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05/06/2023 | FRANCE | N°22/05485

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 05 juin 2023, 22/05485


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 05 JUIN 2023









N° RG 22/05485 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-NAGD







[Y] [C]



c/



S.A. BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE venant aux

droits de la BANQUE POPULAIRE DU SUD OUEST(BPSO)

S.A. BPCE VIE



























Nature de la décision : APPE

L D UNE ORDONNANCE DE MISE EN ETAT





























Grosse délivrée le : 05 JUIN 2023



aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance rendu le 15 novembre 2022 par le Juge de la mise en état de BORDEAUX (chambre : 5, RG : 22/01605) suivant déclaration d'...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 05 JUIN 2023

N° RG 22/05485 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-NAGD

[Y] [C]

c/

S.A. BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE venant aux

droits de la BANQUE POPULAIRE DU SUD OUEST(BPSO)

S.A. BPCE VIE

Nature de la décision : APPEL D UNE ORDONNANCE DE MISE EN ETAT

Grosse délivrée le : 05 JUIN 2023

aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance rendu le 15 novembre 2022 par le Juge de la mise en état de BORDEAUX (chambre : 5, RG : 22/01605) suivant déclaration d'appel du 05 décembre 2022

APPELANTE :

[Y] [C]

née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 5] ([Localité 5])

de nationalité Française, demeurant [Adresse 3] (FRANCE)

Représentée par Me Pierre FRIBOURG de la SELARL FRIBOURG & ASSOCIES, avocat au barreau de LIBOURNE

INTIMÉ ES :

S.A. BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE venant aux

droits de la BANQUE POPULAIRE DU SUD OUEST,(BPSO) prise en la personne de son représentant légal [Adresse 1]

Représentée par Me Laurent BABIN de la SELARL ABR & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Me Christophe FOUQUIER, membre de l'association de CHAUVERON ' VALLERY-RADOT ' LECOMTE ' FOUQUIER, Avocat au Barreau de PARIS

S.A. BPCE VIE Société anonyme au capital social de 161 469 776 euros

inscrite au RCS Paris 349 004 341 Entreprise régie par le Code des assurances, prise en ses représentants légaux domiciliés audit siège. [Adresse 4]

Représentée par Me Séverine MONFRAY de la SELARL EOZEN AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Me Stéphanie COUILBAULT-DI TOMMASO de la SELARL MESSAGER COUILBAULT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 avril 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel BREARD, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le 19 juillet 1993, Mme [Y] [C] et son ex-époux ont co-souscrit deux contrats d'assurance vie auprès de la SA Fructivie, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la SA BPCE Vie :

* contrat d'assurance vie n° 29003032 à hauteur de 762 247 euros,

* contrat d'assurance vie n° 2900295 à hauteur de 762 247 euros.

En 2003, Mme [C] a engagé une procédure de divorce et a sollicité l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision, en indiquant vouloir révoquer toutes les donations directes ou indirectes qui auraient pu être consenties à son ex-époux depuis le 1er juillet 1991.

Mme [C] ne pouvant procéder au rachat seule des deux contrats d'assurance vie a sollicité du juge de la mise en état qu'il lui alloue une provision à hauteur de 500 000 euros sur les contrats d'assurance vie.

Par ordonnance du 10 juillet 2008, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bordeaux lui a alloué une avance en capital sur le partage de l'indivision et a condamné M. [N] à lui payer une provision de 500 000 euros.

Mme [C] a assigné en référé la société Natixis et la banque populaire du Sud Ouest devant le tribunal de grande instance de Bordeaux afin de les voir condamner au paiement de la somme de 500 000 euros.

La somme n'a malgré tout pas été réglée.

Par ordonnance du 29 septembre 2008, le juge des référés a débouté Mme [C].

Mme [C] a assigné devant le tribunal judiciaire de Bordeaux la SA Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique et la société BPCE VIE le 1er mars 2022 aux fins de les voir condamner au paiement de dommages et intérêts en indemnisation de divers préjudices au titre de leurs manquements respectifs au devoir de conseil.

Par ordonnance du juge de la mise en état du 15 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- déclaré irrecevable comme prescrite la demande de Mme [C],

- condamné Mme [C] à verser à la société BPCE Vie à 1 000 euros et 1 000 euros à la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [C] aux dépens.

Mme [C] a relevé appel de cette ordonnance par déclaration du 5 décembre 2022.

Par conclusions déposées le 17 mars 2023, Mme [C] demande à la cour de :

- déclarer Mme [C] recevable et bien fondée en son appel,

- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 15 novembre 2022 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

- débouter la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique et la société BPCE Vie de leur demande tendant à voir déclarer Mme [C] irrecevable en ses demandes pour cause de prescription,

- débouter la société BPCE Vie de sa demande tendant à voir déclarer Mme [C] irrecevable en sa demande d'indemnisation au titre des frais d'avocat pour cause d'autorité de la chose jugée,

A titre subsidiaire,

- juger que la prescription a été interrompue et débouter la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique et la société BPCE Vie de l'ensemble de leurs demandes,

En tout état de cause,

- débouter la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique et la société BPCE Vie de toutes autres demandes,

- condamner in solidum la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique et la société BPCE Vie à régler à Mme [C] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre une somme de 2 000 euros supplémentaires sur le fondement du même article au titre de la procédure d'appel,

- les condamner aux dépens.

Par conclusions déposées le 10 mars 2023, la société BPCE Vie demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- déclarer prescrite l'action engagée par Mme [C] contre la société BPCE Vie par acte du 1er mars 2022, prescription acquise qui n'a fait l'objet d'aucune interruption,

- condamner Mme [C] à verser une indemnité de 2 500 euros à la société BPCE Vie en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [C] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Eozen Avocats, représentée par Maître Séverine Monfray, avocat au barreau de Bordeaux, en application des articles 699 et suivants du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 14 mars 2023, la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux du 15 novembre 2022 en toutes ses dispositions,

Par conséquent,

- déclarer irrecevable comme prescrite Mme [C] en l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions, formulées à l'encontre de la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique pour les motifs exposés dans les présentes écritures,

- condamner Mme [C] à payer à la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance,

Y ajoutant,

- condamner Mme [C] à payer à la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique une somme complémentaire de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Me Laurent Babin, avocat au barreau de Bordeaux, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

L'affaire a été fixée à l'audience rapporteur du 3 avril 2023, avec clôture de la procédure à la date du 20 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION.

I Sur la prescription.

En vertu de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il est constant qu'en application de ce texte, la prescription d'une action en responsabilité au titre d'un devoir d'information ne court qu'à compter du jour où le client a connaissance du dommage et des conséquences du manquement.

Mme [C] ne conteste pas avoir constaté en 2003 qu'elle ne pouvait procéder à des rachats partiels sur les comptes d'assurance vie alimentés par ses fonds propres.

Elle affirme, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, que le dommage n'était néanmoins pas totalement révélé, de nouveau préjudices s'étant manifestés en 2006, ayant dû vendre l'immeuble qu'elle occupait, faute de pouvoir l'entretenir.

Elle explique que c'est cette même cause qui l'a amenée à recourir à un emprunt le 1er septembre 2008, ce qui lui aurait causé un préjudice moral et engendré chez elle un état dépressif.

Elle soutient qu'elle ne pouvait agir en 2003, n'ayant pu présenter ses préjudices définitifs qu'avec l'arrêt du 25 janvier 2023 rejetant le pourvoi de son ex-époux, et aurait pu saisir la juridiction dans les cinq années suivant cet événement.

Elle estime qu'elle n'avait pas connaissance des pertes subies en 2003, celles-ci n'étant pas encore survenues, alors qu'il n'avait pas été attiré son attention sur le fait que la signature de son ex-mari était nécessaire pour débloquer ses fonds propres du fait du support choisi, alors que cette condition n'avait pas été imposée avant 2003.

Elle indique encore que si l'arrêt du 15 mars 2010 rendu par la cour d'appel de Bordeaux lui a permis de percevoir une provision à valoir sur les fonds bloqués, son préjudice a néanmoins perduré, faute de pouvoir disposer de la totalité des sommes sur les contrats concernés.

Elle avance avoir en outre exposé d'autres frais, notamment dans le cadre de la procédure de divorce entre 2018 et 2021, caractérisant son préjudice, lequel n'a pas été indemnisé par les frais irrépétibles alloués par les différentes juridictions ayant rendu des décisions dans ce cadre. Il n'existe pas d'autorité de la chose jugée à ce titre selon elle.

Elle dit enfin que les différentes procédures engagées par ses soins justifient de son préjudice constant, ce entre le 14 août 2008 et le 25 janvier 2023, et qu'aucune prescription ne saurait donc lui être opposée.

***

La cour ne peut que constater que le dommage subi par Mme [C] ne s'est manifesté pour la première fois qu'en 2003 et non à la souscription du contrat d'assurance vie, l'impossibilité pour l'appelante de retirer partiellement des fonds sur ces contrats n'étant pas rapportée antérieurement.

Il est également exact que Mme [C], en ce qu'elle ne remet pas en cause qu'elle ait été privée à compter de cette même année 2003 de l'ensemble des fonds propres placés, ait eu connaissance de son entier préjudice financier, ou était en mesure d'en avoir connaissance.

Ainsi, s'il est exact que certains événements tels que la vente de son habitation ou la souscription d'un emprunt par l'intéressée sont postérieurs à la connaissance de ce blocage, ils n'en sont que la conséquence directe.

De même, l'appelante connaissait l'opposition de M. [N] à ce qu'elle perçoive les fonds concernés et donc le blocage engendré, ce qui pouvait lui permettre dès 2003 la mise en cause devant les juges du fond des sociétés intimées.

Il s'ensuit que les moyens soulevés seront rejetés et la décision attaquée sera confirmée.

II Sur les demandes annexes.

Aux termes de l'article 696 alinéa premier du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Sur ce fondement, mme [C], qui succombe au principal, supportera la charge des dépens, dont distraction au profit de Maître Babin et de la Selarl EOZEN avocats, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

En l'espèce, l'équité commande que Mme [C] soit condamnée à verser aux sociétés BPCE Vie et Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique, ensemble, la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Confirme la décision rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux le 15 novembre 2022 ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [C] à verser aux sociétés BPCE Vie et Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique, ensemble, la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [C] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Babin et de la Selarl EOZEN avocats.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/05485
Date de la décision : 05/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-05;22.05485 ?
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