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01/06/2023 | FRANCE | N°22/04942

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 01 juin 2023, 22/04942


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



2ème CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 01 JUIN 2023









N° RG 22/04942 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-M6MQ







[K] [N]



c/



S.A.R.L. ALTHEA GESTION



























Nature de la décision : AU FOND





























Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 octobre 2022 par le Juge de l'exécution de BORDEAUX (RG : 22/03941) suivant déclaration d'appel du 27 octobre 2022





APPELANT :



[K] [N]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]



Représenté par Me François DEAT, avocat au barreau de BORDEAUX



...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

2ème CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 01 JUIN 2023

N° RG 22/04942 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-M6MQ

[K] [N]

c/

S.A.R.L. ALTHEA GESTION

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 octobre 2022 par le Juge de l'exécution de BORDEAUX (RG : 22/03941) suivant déclaration d'appel du 27 octobre 2022

APPELANT :

[K] [N]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me François DEAT, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ E :

S.A.R.L. ALTHEA GESTION

Société à responsabilité limitée à associé unique au capital social de 15.000 €, Immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 824 270 771, dont le

siège social est situé [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Yasmina RACON, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Stéphanie GOINARD, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 avril 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Christine DEFOY, Conseillère, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Paule POIREL

Conseiller : Monsieur Alain DESALBRES

Conseiller : Mme Christine DEFOY

Greffier lors des débats : Mme Mélody VIGNOLLE-DELTI,

Greffier lors du prononcé : Mme Audrey COLLIN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * *

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte authentique exécutoire passé devant Maître [Z] [H], notaire à [Localité 3], du 27 décembre 2005, la SCI TAM dont M. [K] [N] détient 45% des parts sociales, a acquis un appartement situé Résidence 'Les terrasses du Castillet' à [Localité 3].

Afin de financer cette acquisition, la SCI TAM a souscrit un prêt immobilier auprès du Crédit immobilier de France, le 8 décembre 2005, à hauteur de la somme de 178 700 euros, remboursable par échéances mensuelles de 814,68 euros sur une durée de trente ans. Les trois associés de la SCI TAM se sont portés caution solidaire avec renonciation au bénéfice de discussion et de division. Un autre prêt immobilier a également été souscrit auprès du Crédit immobilier de France pour l'acquisition d'un parking, à hauteur d'un montant emprunté de 18200 euros.

Suite à plusieurs impayés, une procédure d'adjudication des deux fonds a été diligentée. Par jugement du 8 septembre 2017 le tribunal de grande instance de Perpignan a prononcé l'adjudication de l'appartement au bénéfice de M. [P], à hauteur d'un prix inférieur de 88000 euros.

Selon un projet de distribution du 3 décembre 2018, le Crédit immobilier de France a reçu la somme de 79 086,98 euros au titre de l'appartement objet du prêt immobilier.

Par acte de cession ayant pris effet en date du 1er octobre 2020, le Crédit immobilier de France a cédé sa créance objet du prêt immobilier, au bénéfice de la société Althea gestion. Cette cession a été notifiée à M. [N] par courrier du 1er juillet 2021.

Par jugement du 28 mai 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux a rejeté la demande de saisie des rémunérations de M. [N] au bénéfice de la société Althea gestion.

Par acte du 9 mai 2022, la SARL Althea gestion a fait réaliser une saisie-attribution entre les mains de la société Boursorama et à l'encontre de M. [N] pour avoir paiement de la somme de 75 023,01 euros. Cette mesure lui a été dénoncée le 12 mai 2022. Le tiers saisi a déclaré détenir des comptes créditeurs à hauteur de 18 175, 29 euros, solde bancaire insaisissable déduit et sous réserve des opérations en cours.

Par acte du 25 mai 2022, M. [N] a assigné la SARL Althea gestion devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de contestation de la mesure pratiquée à son encontre.

Par jugement du 25 octobre 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- débouté M. [K] [N] de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 9 mai 2022,

- validé la saisie-attribution pratiquée le 9 mai 2022 sur les comptes de M. [K] [N] ouverts chez Boursorama à hauteur de 64 747,84 euros en principal,

- débouté M. [K] [N] de sa demande au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamné M. [K] [N] à payer à la SARL Althea gestion la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande formée par M. [K] [N] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [K] [N] aux entiers dépens de l'instance qui comprendront les frais de la saisie-attribution,

- rejeté les plus amples demandes formulées par les parties,

- rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l'article R 121-21 du code des procédures civiles d'exécution.

M. [N] a relevé appel du jugement le 27 octobre 2022 en ce qu'il :

- l'a débouté de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 9 mai 2022,

- a validé la saisie-attribution pratiquée le 9 mai 2022 sur ses comptes ouverts chez Boursorama à hauteur de 64 747,84 euros en principal,

- l'a débouté de sa demande au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- l'a condamné à payer à la SARL Althea gestion la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- a rejeté les plus amples demandes formulées par les parties, mais juste en ce qui concerne ses demandes.

L'ordonnance du 2 décembre 2022 a fixé l'affaire à l'audience des plaidoiries au 5 avril 2023, avec clôture de la procédure à la date du 22 mars 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 16 mars 2023, M. [N] demande à la cour, sur le fondement des articles L.211-1 et R.211-10 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, de l'article 2314 du code civil, de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire, ainsi que des articles L313-16, L.343-4, L.333-2, L.343-6, L.333-1 et L.343-5 du code de la consommation, dans leur version en vigueur à la date des faits et de l'article L.313-22 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur à la date des faits, de :

A titre principal :

- réformer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 25 octobre 2022 en ce qu'il a jugé que l'exigibilité et l'opposabilité de la créance litigieuse était démontrée,

Et statuant à nouveau,

- ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée en date du 9 mai 2022 à la demande de la société Althea gestion sur les comptes bancaires de M. [K] [N] détenus entre les mains de la banque Boursorama, et ce à hauteur de la totalité de la créance,

A titre subsidiaire,

- réformer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 25 octobre 2022 en ce qu'il a jugé que M. [N] ne démontrait pas la faute du créancier,

Et statuant à nouveau,

- ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée en date du 9 mai 2022 à la demande de la société Althea gestion sur les comptes bancaires de M. [K] [N] détenus entre les mains de la banque Boursorama, et ce, à hauteur de la totalité de la créance,

A titre très subsidiaire,

- réformer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 25 octobre 2022 en ce qu'il a jugé que M. [N] ne rapportait pas la preuve de la disproportion de son engagement de caution au titre du prêt immobilier n°282651 souscrit par la SCI TAM en date du 27 décembre 2005,

Et statuant à nouveau,

- ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée en date du 9 mai 2022 à la demande de la société Althea gestion sur les comptes bancaires de M. [K] [N] détenus entre les mains de la banque Boursorama, et ce, à hauteur de la totalité de la créance,

A titre infiniment subsidiaire,

- confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 25 octobre 2022 en ce qu'il a jugé que la société Althea gestion a manqué à son obligation d'information annuelle,

- confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 25 octobre 2022 en ce qu'il a jugé que la société Althea gestion a manqué à son obligation du premier incident de paiement caractérisé,

- réformer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 25 octobre 2022 en ce qu'il a jugé que M. [N] ne justifiait pas d'une remise de dette accordée à Mme [D],

- fixer à la somme de 51 704,30 euros le montant dû par M. [K] [N] au titre de son engagement de caution relativement au prêt souscrit par la SCI TAM,

En tout état de cause,

- débouter la société Althea gestion de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- la condamner à verser à M. [N] une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice subi,

- la condamner à lui verser une somme de 3 500 euros au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Althea gestion aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 janvier 2023, la SARL Althea gestion demande à la cour, sur le fondement de l'article R121-22 code des procédures civiles d'exécution, de :

- déclarer son action recevable et bien-fondée,

- confirmer le jugement rendu le 25 octobre 2022 par le juge de l'exécution de Bordeaux en toutes ses dispositions,

- débouter M. [N] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

- le condamner à lui verser la somme de 3 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 5 avril 2023 et mise en délibéré au 1er juin 2023.

MOTIFS :

Sur l'exigibilité de la créance,

En l'espèce, M. [K] [N] conteste la mesure de saisie-attribution diligentée à son encontre par la SARL Althéa Gestion, sur le fondement de l'article L211-1 du code des procédures civiles d'exécution, arguant de ce que la créance invoquée par l'intimée n'est pas exigible à son encontre en l'absence de toute mise en demeure préalable adressée au débiteur prinicipal .

A ce titre, il convient de se reporter à l'article 7 de l'acte notarié de prêt du 27 décembre 2005 qui dispose que ' le contrat de prêt sera résilié et les sommes prêtées deviendront immédiatement exigibiles, sans qu'il soit besoin d'autre formalité qu'une simple notification faite à l'emprunteur par lettre recommandée avec avis de réception, à défaut de paiement de tout ou partie des mensualités à leur échéance et de toutes sommes avancées par le prêteur'.

Or, force est de constater à la lecture de ce texte et comme l'a justement indiqué le premier juge que la société Althéa Gestion n'avait nullement l'obligation de mettre en demeure le débiteur principal et la caution, préalablement à la déchéance du terme, mais devait procéder par simple voie de notification, ce qu'elle a fait dans le cadre des courriers recommandés envoyés le 16 décembre 2020 et le 17 juin 2021 à la SCI Tam où elle l'a informée non seulement de la cession de créance intervenue à son profit mais également de l'exigibilité de sa dette ainsi que des correspondances du 1er juillet et du 15 juillet 2021, s'agissant de M. [N].

L'appelant estime de plus que la déchéance du terme prononcée à l'égard du débiteur principal, lui est inopposable en sa qualité de caution, en l'absence d'exigibilité de la créance à l'égard du débiteur principal, eu égard au caractère accessoire de son obligation et qu'en tout état de cause le créancier ne justifie nullement avoir prononcé la déchéance du terme, laquelle ne saurait résulter d'un simple retard de paiement, au vu des dispositions de l'article 7 susvisé, mais implique l'existence d'un incident de paiement au sens du règlement CRFB n°90-05 du 11 avril 1990 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits au particulier.

Néanmoins, l'exigibilité de la créance à l'égard du débiteur principal n'est pas sérieusement contestable au vu de la procédure d'adjudication dont a fait l'objet l'immeuble financé par le crédit souscrit par la société TAM auprès du CIFD, suivant jugement du tribunal de grande instance de Perpignan du 8 septembre 2017, peu important à ce titre que le CIFD ne soit pas à l'origine de cette adjudication et qu'il y soit intervenu simplement en sa qualité de créancier privilégié.

En outre, il ne peut être fait grief à la société Althéa Gestion de ne pas avoir justifié du prononcé de la déchéance du terme, au vu du règlement n°90-05 du 11 avril 1990 relatif au fichier national des incidents de paiement, qui définit ces dernier, à l'aune de son article 3, 'comme les défauts de paiement atteignant un montant cumulé au moins égal, pour les crédits rembousables mensuellement au triple de la dernière échéance échue, dès lors que les sommes visées dans le cadre des lettres de notification susvisées adressées au débiteur s'attachaient à une dette de plus de 74 000 euros.

Il résulte donc de ce qui précède que les différents moyens articulés de ce chef par l'appelant pour voir ordonner la mainlevée de la mesure d'exécution critiquée, seront écartés par la cour, la société Althéa Gestion disposant d'un titre exécutoire valable pour diligenter une mesure de saisie-attribution à l'égard de son débiteur.

Sur l'éventuelle faute du créancier,

L'article 2314 du code civil dispose que lorsque la subrogation aux droits du créancier ne peut plus, par la faute de celui-ci, s'opérer en sa faveur, la caution est déchargée à concurrence du préjudice qu'elle subit.

Toute clause contraire est réputée non écrite.

La caution ne peut reprocher au créancier son choix du mode de réalisation d'une sûreté.

Sur le fondement de la disposition précitée, M. [N] soutient que le CIFD s'est rendu coupable d'une négligence, en ne donnant pas suite à la demande de vente amiable de l'immeuble, présentée par M. [S] [P] en date du 3 août 2017 au prix de 125 000 euros, ce qui a conduit à la vente du bien immobilier appartenant à son débiteur à un prix dérisoire de 88 000 euros par adjudication le 8 septembre 2017.

S'il est exact au vu des pièces versées aux débats que le 24 août 2017, le CIFD a été saisi en vue de donner son accord à la vente amiable de l'immeuble en cause, suite à l'offre d'acquisition faite par M. [S] [P] et qu'ayant réceptionné cette demande le 25 août suivant, il n'y a manifestement pas donné suite, il n'est pas acquis pour autant que cette négligence soit la cause d'un préjudice subi par M. [N].

En effet, il résulte de l'artice L322-1 du code des procédures civiles d'exécution que la vente amiable ne peut se faire que sur autorisation judiciaire. Or, il n'est pas démontré en l'espèce que le débiteur ait saisi le juge d'une demande d'autorisation de vente de l'immeuble litigieux à l'amiable.

En outre, il ne peut être procédé à la vente de gré à gré, après l'orientation en vente forcée et ce jusqu'à l'ouverture des enchères, que s'il existe un accord entre le débiteur, le créancier poursuivant et les créanciers inscrits sur l'immeuble saisi à la date de la publication du commandement de payer valant saisie, ainsi que des créanciers inscrits sur l'immeuble avant la publication du titre de vente et qui sont intervenus dans la procédure.

Or, en l'espèce, M. [N] ne démontre pas, au vu des pièces qu'il verse aux débats que les conditions posées à l'article L322-1 du code des procédures civiles d'exécution étaient réunies, à l'exception de l'accord du créancier, pour permettre la réalisation d'une telle vente amiable, après l'orientation en vente forcée.

De plus, l'appelant soutient que le CIFD ne l'a jamais informé en sa qualité de caution de l'existence des échéances impayées de la SCI TAM, ce qui ne lui a pas permis de mettre en oeuvre les actions nécessaires aux fins de remédier à ces impayés.

Toutefois, cette allégation est contredite par les courriers adressés par le CIFD à M. [N] au cours du mois 2016, constituant les pièces n°15 à 17 de l'intimée.

Il s'ensuit que le créancier n'ayant commis aucune faute, l'appelant sera débouté de sa demande tendant à se voir déchargé de son obligation à concurrence du préjudice subi. Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

Sur l'éventuel caractère disproportionné de l'engagement de la caution,

A ce titre, il convient de rappeler à titre liminaire qu'en application de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution a le pouvoir d'apprécier la proportionnalité de l'engagement de la caution, lorsque celle-ci soulève une contestation qui a pour effet de remettre en cause le droit du créancier poursuivant.

En outre, en application de l'article L213-6 du code de la consommation, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 14 mars 2016, applicable au moment de la formation du contrat, un professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci a été appelée ne lui permette de faire face à ses obligations.

Il incombe en l'espèce à la caution qui soulève un tel moyen afin d'être dispensée de son engagement de rapporter la preuve de la disproportion, laquelle s'apprécie au moment de la formation du contrat.

Pour ce faire, M. [N] soutient que l'engagement souscrit est disproportionné, au regard de ses ressources mensuelles d'un montant de 2462, 42 euros, de ses charges dont un emprunt CIC d'un montant mensuel de 208, 95 euros et un loyer mensuel de 765 euros, ainsi que du montant global des sommes qui seraient susceptibles de lui être réclamées à hauteur de 178 700 euros, sans qu'il soit possible de les diviser par le nombre de cautions, comme l'a fait à tort le premier juge, ce qui représente pour lui pas moins de trois ans de revenus.

Cependant, s'il est exact qu'en cas de cautionnement solidaire, l'intégralité des sommes dues peut être réclamée à une seule des cautions par le créancier, les éléments produits ici par l'appelant demeurent trop parcellaires et incomplets pour établir l'existence d'une disproportion manifeste de l'engagement de la caution en décembre 2005.

En effet, il n'est nullement acquis que les charges de crédit et de loyer, dont M. [N] fait aujourd'hui état en cause d'appel, aient été dûment déclarées à la banque au moment de l'engagement.

De plus, l'existence d'un éventuel patrimoine immobilier de la caution au moment de la souscription du contrat de cautionnement, reste indéterminée, nonobstant les dénégations de l'appelant de ce chef, fondées sur aucun élément objectif.

Dans ces conditions, M. [N] se montrant défaillant à démontrer le caractère disproportionné de son engagement, il ne pourra qu'être débouté de sa demande formée de ce chef et tendant à se voir exonérer de ses obligations contractuelles.

Sur le montant de la créance,

En application des articles L313-22 du code monétaire et financier et L333-2 du code de la consommation, le créancier professionnel a l'obligation d'informer au plus tard avant le 31 mars de chaque année, la caution personne physique, du montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation cautionnée ainsi que du terme de son engagement.

A défaut de respect de cette obligation annuelle d'information, la caution est dispensée du paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la dernière information.

En l'espèce, force est de constater que la société Althéa Gestion ne démontre nullement avoir respecté son obligation annuelle d'information, celle-ci arguant sans l'établir qu'elle a envoyé des courriers en ce sens à M. [N] qui n'en a jamais été destinataire.

Il s'ensuit que la créance réclamée par la société Althéa Gestion sera nécessairement amputée des intérêts et frais y afférents.

Par ailleurs, M. [N] reproche au juge de l'exécution d'avoir méconnu les dispositions de l'article 1350-2 du code civil, en constatant que Mme [D], gérante de la SCI TAM, a bénéficié d'un effacement partiel de sa dette dans le cadre de son plan de surendettement, qui n'a manifestement pas bénéficié aux autres cautions.

L'article susvisé dispose que la remise de dette accordée au débiteur principal libère les cautions, même solidaires.

La remise consentie à l'une des cautions solidaires ne libère pas le débiteur principal, mais libère les autres à concurrence de sa part.

Ce que le créancier a reçu d'une caution pour la décharge de son cautionnement doit être imputé sur la dette et décharger le débiteur principal à proportion. Les autres cautions ne restent tenues que déduction faite de la part de la caution libérée ou de la valeur fournie si elle excède cette part'.

S'il n'est pas sérieusement contestable, au vu des pièces versées aux débats, que Mme [D] en sa qualité de caution, a bénéficié d'un effacement partiel de sa dette dans le cadre du plan de surendettement, il est également acquis que les mesures consenties par les créanciers, dans le plan conventionnel de règlement ne constituent pas, eu égard à la finalité d'un tel plan, une remise de dette dont la caution pourrait se prévaloir.

Il s'ensuit que M. [N] ne pourra qu'être débouté de sa demande fondée sur l'article 1350-2 du code civil, tendant à bénéficier de l'effacement partiel de la dette accordé à Mme [D] dans le cadre de son plan de surendettement.

Au vu du dernier décompte produit par le CIFD en date du 17 juillet 2020, le solde du prêt restant dû par la SCI TAM a été justement évalué par le premier juge à la somme globale de 144 645, 90 euros comprenant le capital restant dû au 9 mai 2016 d'un montant de 136 973, 84 euros, les échéances impayées à la même date pour 1882, 52 euros et les échéances impayées du 31 décembre 2008 au 28 février 2009, ainsi que du 30 avril au 30 juin 2010 pour la somme de 5789, 54 euros. Doit être déduite la somme de 79 898, 06 euros résultant de l'adjudication de l'immeuble en sorte que l'assiette de la saisie-attribution sera fixée à la somme de 64 747, 84 euros en principal, conformément au jugement déféré.

Sur la demande indemnitaire de M. [N],

L'article L121-2 du code des procédures civiles d'exécution permet au juge de l'exécution de condamner le créancier au paiement de dommages et intérêts en cas de saisie abusive.

En l'espèce, M. [N] sollicite l'infirmation du jugement déféré qui l'a débouté de sa demande indemnitaire fondée sur l'article susvisé, argant de ce que la saisie-attribution ltigieuse a rendu ses fonds indisponibles et l'a empêché d'investir dans le cadre d'un programme d'actionnariat salarié de son entreprise. Outre ce préjudice matériel, il estime également subir, du fait de cette mesure d'exécution injustifiée, un préjudice moral, qui doit être réparé et sollicite la condamnation l'intimé à lui payer à ce titre la somme de 15 000 euros.

Toutefois, force est de constater que la présente mesure étant parfaitement justifiée en son principe et donc dépourvue de tout caractère abusif, la cour ne pourra que confirmer le jugement déféré qui a débouté M. [N] de sa demande indemnitaire.

Sur les autres demandes,

M. [N], défaillant en son appel, sera débouté de ses demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Enfin, il devra régler à la société Althéa Gestion la somme de 3500 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par décison contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Dans les limites de l'appel ,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [K] [N] à payer la société Althéa Gestion la somme de 3500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [K] [N] aux entiers dépens de la procédure,

Déboute M. [K] [N] de ses demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens.

Le présent arrêt a été signé par Mme Paule POIREL, président, et par Mme Audrey COLLIN greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/04942
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;22.04942 ?
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