La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2023 | FRANCE | N°20/01289

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Juridic.premier president, 30 mai 2023, 20/01289


CONTESTATION EN MATIÈRE D'HONORAIRES D'AVOCAT

---------------------------



Maître [Y] [V]

C/

Madame [C] [W]

--------------------------



N° RG 20/01289 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LP53

--------------------------



DU 30 MAI 2023

--------------------------



















































Notifications



le :



Gross

e délivrée



le :



ARRÊT

--------------





Rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



Le 30 MAI 2023



LA JURIDICTION DE LA PREMIERE PRESIDENTE ...

CONTESTATION EN MATIÈRE D'HONORAIRES D'AVOCAT

---------------------------

Maître [Y] [V]

C/

Madame [C] [W]

--------------------------

N° RG 20/01289 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LP53

--------------------------

DU 30 MAI 2023

--------------------------

Notifications

le :

Grosse délivrée

le :

ARRÊT

--------------

Rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Le 30 MAI 2023

LA JURIDICTION DE LA PREMIERE PRESIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX

Vu l'ordonnance de fixation en collégialité du 16 décembre 2022 de la première présidente ;

Vu le renvoi de l'affaire devant la formation collégiale composée de :

Isabelle DELAQUYS,conseillère,

Noria FAUCHERIE,conseillère,

Nathalie PIGNON,magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Nathalie PIGNON, ayant entendu les  parties en qualité de rapporteur, a rendu compte des débats à la Cour,

assistées de Séverine ROMA, greffière,

dans l'affaire

ENTRE :

Maître [Y] [V]

Avocat, demeurant [Adresse 2]

présent,

Demandeur au recours contre une décision rendue le

27 janvier 2020 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de BORDEAUX,

ET :

Madame [C] [W]

demeurant [Adresse 1]

présente,

Défenderesse,

A rendu publiquement l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue devant nous, assistées de Séverine Roma, Greffière, en audience publique, le 25 Avril 2023  et qu'il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus désignés.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :

Me [Y] [V] a relevé appel de la décision rendue le 27 janvier 2020 par laquelle le délégataire du bâtonnier du barreau de Bordeaux a décidé de supprimer l'honoraire de résultat réclamé à son ancienne cliente Mme [C] [W] en expliquant qu'il est manifestement exagéré.

Il explique qu'il justifie de ses honoraires par les nombreuses pièces qu'il verse aux débats et par un taux horaire fort raisonnable et très en deça de l'honoraire habituellement pratiqué au sein du barreau de Bordeaux. Il affirme que son temps de travail s'est élevé à 26,5 heures.

Mme [C] [W] conclut à la confirmation de la décision déférée. Elle reproche à Me [V], qui l'avait convaincue de le mandater aux lieu et place de Me [P] en lui proposant des conditions financières d'intervention préférentielles (1.900 € ttc honoraire de diligence et 7 % honoraire de résultat) de n'avoir rien fait sinon de reprendre à son compte les écritures rédigées pour elle par son ancien conseil. Elle explique que Me [V] qui était saisi depuis le mois de juin 2018 lui a fait régulariser en urgence une convention d'honoraire le

8 novembre 2018 à la veille de l'audience qu'elle n'a pas lue et dont elle a découvert la teneur à réception de la facture (2.900 € ttc honoraire de diligence et 9% honoraire de résultat).

Elle sollicite l'indemnisation de ses frais de déplacement et perte de revenus à hauteur de la somme de 2.000 €, outre 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

MOTIFS :

Est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.

L'existence d'un aléa ne constitue pas une condition de validité de la convention prévoyant un honoraire de résultat.

Toutefois, l'honoraire complémentaire de résultat convenu peut être réduit s'il apparaît exagéré au regard du service rendu.

Enfin, l'honoraire de résultat n'est dû que si un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable est intervenu.En l'espèce, la convention d'honoraires datée du 25 juillet 2018 mais signée postérieurement au 8 novembre 2018, date à laquelle Me [V] l'a transmise à sa cliente, prévoit : 'Les parties conviennent que les honoraires qui devront être acquittés au titre de la présente mission d'assistance de Mme [C] [W] dans le cadre de la procédure d'appel devant la chambre sociale de la CA de Bordeaux seront facturés selon un honoraire forfaitaire fixe de 2.500 € TTC.

Afin de tenir compte de cet honoraire fixe très préférentiel, les parties conviennent qu'il sera facturé un honoraire de résultat complémentaire de 9% HT sur le total des sommes brutes obtenues à la suite d'une transaction, d'une conciliation et/ou d'une décision judiciaire et que l'avocat percevra le bénéfice de l'éventuel article 700 du code de procédure civile alloué par la juridiction'.

Pour appuyer sa demande, Me [V] produit un décompte faisant état des diligences suivantes :

'- correspondances reçues et envoyées :

14x10 minutes de traitement = 2 heures 30

- Rendez-vous cliente et échanges téléphoniques :

RV cabinet du 25 juin 2018 = 1 heure 30

RV téléphonique du 07/09/2018 = 30 mn

RV téléphonique du 30/01/2019 = 30 mn

RV téléphonique du 08/04/2019 = 30 mn

- Les actes réalisés et démarches effectuées :

Elaboration de conclusions d'appel

Analyse du dossier ; rech. de moyens = 4 heures

Recherches jurisprudentielles = 4 heures

Rédaction = 6 heures

Constitution de pièces/ BCP / RPVA = 5 heures

Audience(s) MEE+ plaidoirie = 2 heures

Diligences post-procédure = 1 heure

Courriers à Mme [W] ; échanges avec cabinet adv. Pour émission de chèque CARPA ; formalités d'ouverture sous-compte [W] à CARPA ; transmission des fonds à la cliente.'

En premier lieu, aucun justificatif n'est produit concernant la durée des différents entretiens téléphoniques que Me [V] prétend avoir eus avec sa cliente, celle-ci soutenant que les échanges avaient lieu au BNI, hormis en octobre 2018.

Par ailleurs, Mme [W] produit aux débats les conclusions qu'avaient rédigées dans son intérêt Maître [P] devant le conseil de prud'hommes, accompagnées du bordereau de pièces.

Ces écritures ont été très largement reprises par Me [V] devant la cour d'appel, seules quelques ajouts ayant été opérés, et, s'agissant des pièces, elles sont strictement identiques de la première à la soixante-dix-huitième, Me [V] n'ayant communiqué que trois pièces supplémentaires, dont le jugement du conseil de prud'hommes.

Un seul jeu de conclusions a été rédigé le 22 août 2018, et, alors que Mme [W] a adressé à Me [V] le 1er octobre 2018 un long courriel contenant des informations susceptibles d'être insérées dans un nouveau jeu de conclusions, Me [V] ne justifie pas avoir répondu à ce courriel, et n'a pas plus répondu aux conclusions développées par son contradicteur le 5 octobre 2018.

Dès lors, la contribution de Me [V] au résultat obtenu devant la cour d'appel est minime, et l'honoraire de résultat, qui présente un caractère exagéré au regard du service rendu, doit être réduit, sans qu'il soit possible de le supprimer, la convention d'honoraire prévoyant expressément un honoraire de résultat que le juge ne peut réduire à néant.

De l'ensemble de ces éléments, il résulte que les diligences de Me [V] ne justifient ni l'honoraire fixe, ni l'honoraire de résultat convenus.

Mme [W] ne contestant pas le quantum de l'honoraire fixe, l'honoraire de résultat doit être ramené à la somme de 100 €, la décision déférée étant réformée.

L'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

La preuve d'un tel comportement n'étant pas rapportée en l'espèce, la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive sera rejetée.

Compte tenu de la décision intervenue, les dépens seront laissés à la charge de Me [V].

Il est équitable d'allouer à Mme [W] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, que

Me [V] sera condamné à lui payer.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de l'appel intervenu ;

Infirme la décision déférée ;

Statuant à nouveau,

Fixe à 100 € l'honoraire de résultat de Me [Y] [V] ;

Déboute Mme [C] [W] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne Me [Y] [V] à payer à Mme [C] [W] la somme de 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Me [Y] [V] aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par Isabelle DELAQUYS, conseillère, et par Séverine ROMA, greffière, à laquelle la minute a été remise par le Magistrat signataire.

La Greffière La Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Juridic.premier president
Numéro d'arrêt : 20/01289
Date de la décision : 30/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-30;20.01289 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award