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24/05/2023 | FRANCE | N°20/00915

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 24 mai 2023, 20/00915


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 24 MAI 2023







PRUD'HOMMES



N° RG 20/00915 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LO6K















Monsieur [J] [X]



c/



Société FIDUCIAL SECURITE PREVENTION

















Nature de la décision : AU FOND

















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Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 janvier 2020 (R.G. n°F 18/01330) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 18 février 2020,





APPELANT :

Monsieur [J] [X]

né le 27 Avril 1967 à [Locali...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 24 MAI 2023

PRUD'HOMMES

N° RG 20/00915 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LO6K

Monsieur [J] [X]

c/

Société FIDUCIAL SECURITE PREVENTION

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 janvier 2020 (R.G. n°F 18/01330) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 18 février 2020,

APPELANT :

Monsieur [J] [X]

né le 27 Avril 1967 à [Localité 8] de nationalité Française Profession : Adjoint chef de site, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Olivier MEYER de la SCP GUEDON - MEYER, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS Fiducial Sécurité Prévention, immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 383 474 889, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 383 474 889

représentée par Me Claire LE BARAZER de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, assistée de Me Olivier VOLPE, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 mars 2023 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [J] [X], né en 1967, a été engagé en qualité d'agent de surveillance par la société Gardiennage de Guyenne et Gascogne, par contrat de travail à durée déterminée à compter du 15 janvier 1988.

La relation contractuelle s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein du 16 juin 1988.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [X] s'élevait à la somme de 1.524,13 euros bruts.

Le contrat de travail de M. [X] a ensuite été transféré à la société Fiducial Sécurité Prévention.

A compter du 1er novembre 2015, M. [X] a été promu chef de site adjoint.

Du 1er janvier 2017 au 30 juin 2017, la société Fiducial Sécurité Prévention a affecté temporairement M. [X] au poste de responsable du site de Thales au Haillan.

Par la suite, M. [X] a réintégré son poste de chef de site adjoint.

Par courriel du 10 mai 2017, M. [X] a sollicité une rupture conventionnelle de son contrat de travail, qui lui a été refusée par retour du 12 juin 2017.

Suite aux visites médicales des 15 et 19 juin 2017, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude définitive de M. [X] à son poste de travail actuel, précisant qu'il 'serait immédiatement apte à un poste non strictement isolé'.

Le 27 juillet 2017, les délégués du personnel ont été consultés.

Par courrier du 28 juillet 2017, la société Fiducial sécurité prévention a notifié à M. [X] les raisons de l'impossibilité de son reclassement dans l'ensemble du groupe Fiducial.

Par lettre datée du 31 juillet 2017, M. [X] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 10 août 2017.

M. [X] a ensuite été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre datée du 29 août 2017.

A la date du licenciement, M. [X] avait une ancienneté de 29 ans et 7 mois et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Soutenant que son licenciement pour inaptitude doit être requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et réclamant diverses indemnités, M. [X] a saisi le 23 août 2018, le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 24 janvier 2020, a :

- jugé que le licenciement pour inaptitude est confirmé,

- débouté les demandes de M.[X] portant sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que sur les indemnités compensatrices de préavis, et de congés payés afférents,

- jugé que la société Fiducial Sécurité Prévention a bien respecté ses obligations de reclassement, de formation, d'adaptation et de consultation des délégués du personnel,

- dit ne pas avoir lieu à exécution provisoire sur la totalité du jugement,

- dit ne pas avoir lieu à quelque astreinte que ce soit,

- rejeté la demande de voir condamner la société Fiducial Sécurité Prévention au versement de la somme de 2.000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de condamnation de M.[X] au versement de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la condamnation de M.[X] aux entiers dépens,

- rejeté la condamnation de la société Fiducial Sécurité Prévention aux entiers dépens, laissant ainsi à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Par déclaration du 18 février 2020, M. [X] a relevé appel de cette décision, notifiée le 24 janvier 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 28 février 2023, M.[X] demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu le 24 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Bordeaux en ce qu'il a :

* jugé que le licenciement pour inaptitude est confirmé,

* débouté ses demandes portant sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que sur les indemnités compensatrices de préavis, et de congés payés afférents,

* jugé que la société Fiducial Sécurité Prévention a bien respecté ses obligations de reclassement, de formation, d'adaptation et de consultation des délégués du personnel,

* rejeté la demande de voir condamner la société Fiducial Sécurité Prévention au versement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* rejeté la condamnation de la société Fiducial Sécurité Prévention aux entiers dépens, laissant ainsi à chaque partie la charge de ses propres dépens,

Statuant à nouveau,

- dire que son licenciement en date du 29 août 2017 ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Fiducial Sécurité Prévention à lui verser les sommes suivantes :

* 67.400 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 4.644,90 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 464,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

* 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la société Fiducial Sécurité Prévention de toutes ses demandes,

- ordonner la capitalisation des sommes dues à titre d'intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner la société Fiducial Sécurité Prévention, aux dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 1er mars 2023, la société Fiducial Sécurité Prévention demande à la cour de':

- la recevoir en ses présentes conclusions et les dires bien fondées,

En conséquence,

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux du 24 janvier 2020 en toutes ses dispositions, hormis en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation de M.[X] au versement de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté la demande de condamnation de M. [X] aux dépens et laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens,

Infirmant le jugement sur ces deux points :

- condamner M. [X] à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- le débouter de ses demandes.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 mars 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 27 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la déclaration d'inaptitude

M. [X] conclut à l'irrégularité de la déclaration d'inaptitude qui mentionne qu'il occupait un poste d'agent de sécurité confirmé alors même qu'il a changé de poste depuis le 1er novembre 2015 lors de sa promotion de chef de site adjoint. L'appelant soutient en conséquence que son licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse dans la mesure où l'avis médical est non conforme à l'article R.4624-42 du code du travail et qu'il a donc la possibilité de contester cet avis devant la juridiction prud'homale.

La société intimée souligne que M. [X] remet en cause la régularité de l'avis d'inaptitude, pour la première fois lors de la saisine du conseil de prud'hommes, soit plus d'un an après ladite visite. Ainsi, en ne saisissant pas la formation des référés dans les quinze jours de l'avis, l'avis médical s'impose aux parties.

Enfin, selon la société, il n'appartient pas au juge de se prononcer sur le respect par le médecin du travail de son obligation de procéder à une étude de poste et, qu'en tout état de cause les missions d'un agent de sécurité et d'un chef de site sont similaires, le dernier ayant, en plus, des missions de coordination.

Aux termes de l'article L.4624-4 du code du travail, après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l'équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l'employeur, le médecin du travail qui constate qu'aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n'est possible et que l'état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail. L'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des

conclusions écrites, assorties d'indications relatives au reclassement du travailleur.

Par ailleurs, l'article R.4624-42 du même code dispose que le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail que

1. S'il a réalisé au moins un examen médical de l'intéressé, accompagné, le cas échéant, des examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d'aménagement, d'adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste;

2. S'il a réalisé ou fait réaliser une étude de ce poste ;

3. S'il a réalisé ou fait réaliser une étude des conditions de travail dans l'établissement et indiqué la date à laquelle la fiche d'entreprise a été actualisée;

4. S'il a procédé à un échange, par tout moyen, avec l'employeur.

Ces échanges avec l'employeur et le travailleur permettent à ceux-ci de faire valoir leurs observations sur les avis et les propositions que le médecin du travail entend adresser.

S'il estime un second examen nécessaire pour rassembler les éléments permettant de motiver sa décision, le médecin réalise ce second examen dans un délai qui n'excède pas quinze jours après le premier examen. La notification de l'avis médical d'inaptitude intervient au plus tard à cette date.

Le médecin du travail peut mentionner dans cet avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L'article L.4624-7 I. du code du travail, dans sa version applicable au litige énonce que, si le salarié ou l'employeur conteste les éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4, il peut saisir le conseil de prud'hommes d'une demande de désignation d'un médecin-expert inscrit sur la liste des experts près la cour d'appel. L'affaire est directement portée devant la formation de référé. Le demandeur en informe le médecin du travail.

Enfin, en vertu de l'article R.4624-45 du même code, dans sa version applicable au litige, prévoit qu'en cas de contestation portant sur les éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-7, la formation de référé est saisie dans un délai de quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail.

En l'espèce, l'avis d'inaptitude du médecin du travail rendu le 19 juin 2017 mentionne un poste d'agent de sécurité confirmé alors que M. [X] avait été promu chef de site adjoint depuis le 1er novembre 2015.

En cas de contestation sur le non-respect par le médecin du travail des procédures et diligences prescrites par les articles L. 4624-4 et R. 4624-42 du code du travail, la seule voie possible est la contestation de l'avis rendu par le médecin du travail dans le délai de quinze jours devant le conseil des prud'hommes, en la formation des référés.

Passé ce délai, il n'est plus possible de contester le licenciement pour inaptitude au motif que l'avis d'inaptitude a été émis sans que le médecin du travail respecte la procédure de constat de l'inaptitude prévue à l'article R. 4624-45 du code du travail.

En effet, dès lors que l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail mentionne les voies et délais de recours, ce qui est le cas en l'espèce, et n'a fait l'objet d'aucune contestation dans le délai de 15 jours, la régularité de l'avis ne peut plus être contestée et cet avis s'impose aux parties comme au juge.

Dès lors, confirmant le jugement dont appel, M. [X] sera débouté de sa demande de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de l'irrégularité de la déclaration d'inaptitude.

Sur l'obligation de reclassement

M. [X] conclut à l'insuffisance des recherches de reclassement mises en oeuvre, en interne comme en externe, la société ne justifiant pas de l'impossibilité de reclassement en interne ni du périmètre du groupe.

La société intimée indique avoir mis en oeuvre une recherche de reclassement sérieuse et loyale, après avoir pris contact avec le médecin du travail et avec M. [X] lui même.

Elle ajoute qu'au moment de la recherche de reclassement, seules deux entités de la branche sécurité de la société appartenait au secteur géographique de [Localité 3] et qu'en tout état de cause elle a procédé à une recherche au-delà du périmètre défini par le salarié lui même.

En vertu des dispositions de l'article L.1226-2 du code du travail, dans sa version applicable à la date du licenciement, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

En l'espèce, suite à la visite médicale du 15 juin 2017 et celle du 19 juin 2017, le médecin du travail a déclaré M. [X] inapte définitif à son poste de travail actuel, précisant qu'il 'serait médicalement apte à un poste non strictement isolé'.

Dans un premier temps, la société a contacté l'appelant, par courrier du 21 juin 2017, pour compléter son dossier personnel (formation, compétences..). en vue des recherches de reclassement et lui demander s'il était mobile géographiquement.

M. [X] a répondu s'en rapporter à son entretien professionnel de janvier 2016 au sujet de ses formations et compétences et a indiqué qu'il souhaitait que l'emploi proposé soit comparable à l'emploi qu'il occupait jusqu'ici et qu'il entendait 'garder la même situation géographique', ayant quatre enfants à charge.

Dans un second temps, la société expose avoir sollicité le médecin du travail, par courrier détaillé du 21 juin 2017.

Aux termes de ce courrier (pièce 4), la société questionne le médecin du travail sur les tâches que peut effectuer M. [X], sur la possibilité d'exercer un travail de nuit...

Cependant, la société ne produit pas la réponse du médecin du travail ni de courrier ou courriel relançant le médecin pour obtenir les réponses à ses questions.

La cour constate qu'il n'est pas établi que ce courrier au médecin du travail ait été envoyé.

Pour justifier de sa recherche de reclassement, la société produit tout d'abord sept courriels dans lesquels des collaborateurs Fiducial indiquent ne pouvoir répondre favorablement à la recherche de reclassement faisant suite à l'inaptitude de M. [X].

La cour souligne que le courriel de sollicitation a été adressé le 21 juin 2017 à dix destinataires et que trois courriels sont ainsi restés sans réponse. Il n'est justifié d'aucune relance.

Il en est ainsi des courriels adressés aux destinataires suivants : '[Courriel 4]', '[Courriel 6]' et '[Courriel 7]'.

La société verse ensuite des listes d'offres disponibles, peu lisibles, recherchées via une recherche par région et l'impression de trois offres : secrétaire comptable d'avocat, assistant comptable et agent de sécurité, ce dernier poste étant pourvu à la lecture du courriel du 21 juillet 2017 (pièce 18).

Enfin, des extraits de registre du personnel sont produits pour la période comprise entre le 19 juin 2017 et le 29 août 2017, uniquement pour l'établissement F048 de la société Fiducial Sécurité Prévention et pour l'établissement 441 de la société Fiducial Private Sécurity.

Aucun poste d'agent de sécurité confirmé listé dans ces registres n'a été proposé à M. [X], qu'il soit en contrat de travail à durée déterminée ou en contrat de travail à durée indéterminée , à temps partiel ou à temps plein, dans le département de la Gironde ou un autre département sans même qu'une fiche de poste ne soit produite.

La société affirme dans ses écritures que les postes de sécurité sont des postes isolés ne pouvant convenir aux restrictions médicales du salarié sans même savoir ce que le médecin du travail entendait pas un reclassement sur un poste 'non strictement isolé'.

Au surplus, ces quelques éléments ne permettent pas de justifier d'une recherche sérieuse et loyale de reclassement alors même qu'il n'est pas démontré que le panel des entreprises du groupe, sollicitées pour le reclassement, constituait le seul périmètre de l'obligation de reclassement.

La société intimée ne justifie pas de l'impossibilité de reclassement de M. [X], le cas échéant au sein d'entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Elle se contente d'énumérer certaines entités ou sociétés sans démontrer la composition du groupe; elle se contente également d'affirmer, sans justifier ses allégations, qu'elle n'a pas interrogé les organismes de gestion agrées ni la société spécialisée dans le domaine de l'audit, du fait de la spécificité de leur activité et de leur petite taille.

Les quatre seuls extrait Kbis des pièces 27.a. à 27.d. sont insuffisants pour le démontrer.

Enfin, la société intimée n'évoque que très rapidement le site Thalès de [Localité 5] sur lequel les collègues du salarié ont été affectés progressivement dans le cadre de la délocalisation du site du Haillan.

Il est seulement indiqué que le poste de chef de poste sur lequel M. [X] avait postulé sans être retenu a été occupé par un candidat externe dont le curriculum vitae est produit indiquant qu'il détenait des compétences supérieures aux candidatures internes.

La date d'embauche n'est pas communiquée et ce poste ne figure pas sur les extraits de registre du personnel versé aux débats.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Fiducial Sécurité Prévention n'a pas accompli loyalement et sérieusement l'obligation de recherche de reclassement qui lui incombait.

Dès lors, infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux du 24 janvier 2020, le licenciement de M. [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement

M. [X] sollicite le paiement de la somme de 67.400 euros au titre des dommages et intérêts du fait de son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En l'absence de recherche de reclassement sérieuse, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit, en vertu de l'article L. 1235-3 du code du travail, à une indemnité ne pouvant être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Tel qu'il résulte des pièces et explications fournies, prenant en compte l'âge de 56 ans de M. [X], son ancienneté de 29 années et sept mois, ses charges de famille, le salarié étant père de quatre enfants, sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et son expérience professionnelle, les circonstances de la rupture, le montant de sa rémunération, il y a lieu d'allouer, en application de l'article L.1235-3 du code du travail, une somme de 46.449 euros.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

M. [X] demande paiement de la somme de 4.644,90 euros, outre les congés payés y afférents, correspondant à deux mois de salaire sur la base de la convention collective applicable.

Cette somme n'est pas contestée utilement dans son montant, la société se contentant de conclure que M. [X] ne peut prétendre à une telle indemnité, ayant été déclaré inapte.

En principe, le salarié ne peut prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité d'exécuter en raison de son inaptitude physique à tout emploi.

Toutefois, le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude ouvre droit à l'indemnité de préavis de sorte que la société intimée

sera condamnée à verser à M. [X] la somme de 4.644,90 euros à ce titre, outre la somme de 464,49 euros au titre des congés payés y afférents.

En vertu de l' article L.1235-4 du code du travail, la société devra rembourser au Pôle Emploi de Nouvelle Aquitaine, les indemnités de chômage versées à M. [X] dans la limite de six mois à compter du licenciement.

Sur les autres demandes

Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1343-2.

La société intimée, partie perdante à l'instance, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à M. [X] la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux du 24 janvier 2020 sauf en ce qu'il n'a pas déclaré irrégulière la déclaration d'inaptitude de Monsieur [J] [X],

Statuant à nouveau :

Dit le licenciement pour inaptitude de Monsieur [J] [X], en date du 29 août 2017, dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Fiducial Sécurité Prévention à verser à Monsieur [J] [X] les sommes suivantes :

- 46.449 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- 4.644,90 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 464,49 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,

- 2.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes tandis que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Ordonne à la société Fiducial Sécurité Prévention de rembourser au Pôle Emploi de Nouvelle Aquitaine les indemnités versées à M. [X] dans la limite de six mois à compter du licenciement ;

Condamne la société Fiducial Sécurité Prévention aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit que l'arrêt sera notifié au service contentieux du Pôle Emploi de Nouvelle Aquitaine.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 20/00915
Date de la décision : 24/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-24;20.00915 ?
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