COUR D'APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 27 AVRIL 2023
N° RG 19/06791 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LMEW
Monsieur [B] [L]
c/
SARL SERVO'Z
S.A. AXA FRANCE IARD
S.A. AXA FRANCE IARD
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 décembre 2019 (R.G. 19/00984) par la 7ème chambre civile du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 24 décembre 2019
APPELANT :
[B] [L]
né le 02 Décembre 1939 à LIBOURNE (33500)
de nationalité Française
Retraité
demeurant [Adresse 4]
Représenté par Me DIROU substituant Me Hélène TERRIEN-CRETTE, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉES :
La Société SERV'OZ (anciennement dénommée BATI + 33)
Société à responsabilité limitée, au capital de 60 000 euros inscrite au RCS de Bordeaux sous le numéro 751 647 181 dont le siège social est situé [Adresse 1], valablement représentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Béatrice DEL CORTE, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A. AXA FRANCE IARD,
immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 722 057 460, dont le siège social est [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social assureur de la Société BATI + 33
Représentée par Me Laurène D'AMIENS de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée de Me Amélie CAILLOL de la SCP EYQUEM BARRIERE - DONITIAN - CAILLOL, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A. AXA FRANCE IARD,
SA au capital de 214 799 030,00 € immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 722.057.460 dont le siège social est [Adresse 2] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
en sa qualité d'assureur multirisques immeuble de Monsieur [L] - contrat 3059290904
Représentée par Me GUERIN substituant Me Marin RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 février 2023 en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Paule POIREL, Président,
Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller,
Madame Christine DEFOY, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
LES FAITS ET LA PROCEDURE
M. [B] [L] est propriétaire d'un appartement situé [Adresse 3], qu'il loue.
Un dégât des eaux a eu lieu dans cet appartement le 28 janvier 2016.
L'assureur multirisque de M. [L], la compagnie AXA a diligenté une expertise amiable.
Le coût des travaux de reprise a été fixé à la somme de 4016,72 euros, selon devis de la société BRT Bat au droit de laquelle est ensuite venue la société Bati + 33, puis dans le cadre de la présente procédure, » la société Serv'oz.
M. [L] a signé une lettre d'acceptation à hauteur de 3953,68 euros, cette somme tenant compte de la vétusté de l'appartement antérieure au sinistre.
La société Bati + 33 a réalisé les travaux de réfection.
Par lettre du 9 mai 2016, M. [L] a dénoncé la mauvaise réalisation de ces travaux.
Par lettre du 24 mai 2016, il a mis en demeure la société Bati + 33 de reprendre les travaux, conformément aux préconisations de l'assureur amiable.
Par acte du 26 juillet 2016, M. [L] a assigné la société Bati+ 33 en référé, et a sollicité l'organisation d'une expertise judiciaire.
Par ordonnance du 26 septembre 2016, il a été fait droit à sa demande, et M. [I] a été désigné à cet effet.
Le 6 décembre 2016, la compagnie AXA a réglé à M. [L] la somme de 3953,68 euros.
A la demande de M. [L] par ordonnance du 10 avril 2017, les opérations d'expertise ont été déclarées communes à la SA AXA France.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 7 juin 2018.
Par actes du 22 janvier 2019, M. [L] a assigné la société Bati + 33 ( devenue en cours de procédure la société Serv'oz) , l'assureur de celle-ci, la SA AXA France IARD, ainsi que son assureur multirisque habitation, la société AXA France IARD devant le tribunal de grande instance de Bordeaux et a sollicité leur condamnation in solidum à lui verser la somme de 19 733,68 euros au titre des travaux de reprise, celle de 22 100 euros au titre de son préjudice locatif, celle de 6000 euros au titre de son préjudice moral, et celle de 8000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et frais d'expertise.
Par jugement rendu le 11 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
- déclaré M. [L] recevable en ses demandes,
- débouté M. [L] de l'ensemble de ses demandes,
- débouté la société Serv'oz de sa demande reconventionnelle en paiement,
- laissé à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles,
- dit que M. [L] supporterait la charge des dépens en ce compris les frais d'expertise,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.
Par déclaration électronique en date du 24 décembre 2019, enregistrée sous le n° RG 19/06791, M. [L] a relevé appel de cette décision limité aux dispositions ayant :
- débouté M. [L] de l'ensemble de ses demandes,
- laissé à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles,
- dit que M. [L] supportera la charge des dépens en ce compris les frais d'expertise,
M. [L], dans ses dernières conclusions d'appelant en date du 22 juillet 2022, demande à la cour, de :
- déclarer son appel parfaitement recevable.
- confirmer la décision sur ce point
- le déclarer parfaitement bien fondé en son appel.
Y faisant droit
- dire et juger que la société BATI + 3 a engagé sa responsabilité décennale retenue par l'expert judiciaire et qu'à ce titre, son assureur Axa doit la garantir en application de l'article 1972 du code civil.
- dire et juger qu'à défaut, la responsabilité contractuelle de la société BATI + 33 sera retenue conformément aux dispositions de l'article 1147 ancien du code civil, ses manquements contractuels ayant causé un préjudice à M. [L].
- constater que la compagnie AXA pris en sa qualité d'assureur dégâts des eaux de M. [L] a failli à ses obligations contractuelles conjointement avec son entreprise partenaire concernant la gestion de ce sinistre.
En conséquence et sur l'un ou l'autre fondement, condamner in solidum la société BATI + 33 avec son assureur Axa tant en sa qualité d'assureur de la société BATI + 33 qu'en qualité d'assureur dégâts des eaux de M. [L] à prendre en charge les travaux de reprise chiffrés par l'expert à la somme de 19.733,68 euros T.T.C avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts.
- les condamner in solidum au paiement du préjudice locatif qui s'élève sauf mémoire à la somme de 670 euros par mois à compter du 1°' mars 2016 soit 33.500 euros au 30/05/2020 avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts.
- les condamner in solidum au paiement de la somme de 3.120 euros du 1er mars 2016 à mai 2020 au titre du préjudice locatif de l'emplacement de parking de l'appartement N°7 avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts.
- les condamner in solidum également au paiement d'une somme de 6.000 euros à titre de complément de dommages et intérêts pour préjudice supplémentaire.
- condamner in solidum BATI 33 et la compagnie Axa à payer à M. [L], la somme de 605 euros T.T.C. correspondant aux frais de mise en place d'un échafaudage au cours des opérations d'expertise.
- dire et juger que les sommes arbitrées s'entendent avec actualisation, intérêts de droit et capitalisation des intérêts.
- débouter la société Bati + 33 et la société Axa de l'intégralité de leur demandes dirigées contre M. [L].
- condamner in solidum BATI 33 et la compagnie Axa tant en sa qualité d'assureur de la SARL BATI + 33 qu'en qualité d'assureur de M. [L] au paiement d'une somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les frais de constat de 263,39euros.
- condamner in solidum BATI + 33, son assureur, la compagnie Axa, et la compagnie Axa pris en sa qualité d'assureur de M. [L] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire et de constat d'huissier (263,39 euros T.T.C).
La société Serv'oz, dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 25 janvier 2023, demande à la cour, au visa des articles 1353, 1787, 1792 et suivants du code civil, de :
- confirmer le jugement rendu le 11 décembre 2019 par la 7 ème chambre du tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu'il a débouté M. [L] de l'ensemble de ses demandes.
- déclarer recevable mais mal fondée la demande de condamnation en paiement présentée par M. [L], à l'encontre de la société Serv'oz,
- dire et juger que les devis en date des 3, 10 février 2016 et 22 avril 2016 ne sont pas entrés dans le champ contractuel et ne peuvent constituer un marché dont serait tenue la société Serv'oz à défaut d'accord expresse sur la chose et le prix
- dire et juger que M. [L] s'avère défaillant dans l'administration de la preuve qui lui incombe,
Si la cour d'appel de Bordeaux estimait que les conditions de mises en 'uvre de la garantie décennale étaient réunies,
- dire et juger que la compagnie d'assurance Axa France Iard assureur décennal devrait garantir et relever indemne la société Serv'oz de l'ensemble des condamnations pécuniaires qui pourrait être mis à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil,
- dire et juger que la preuve d'une faute contractuelle, d'un préjudice et d'un lien de causalité n'est pas rapporté par M. [L],
- débouter M. [L] de sa demande de condamnation en paiement à l'encontre de la société Serv'oz sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, la preuve d'une faute imputable à la société Serv'oz à l'origine du dommage n'étant pas établie
- rejeter le devis de Solrenov présenté par M. [L]
- réformer le jugement rendu le 11 décembre 2019 en ce qu'il a débouté la société Serv'oz de sa demande en paiement,
- condamner M. [L] à payer à la société Serv'oz la somme de 3245,74 euros TTC, outre les intérêts au taux légal capitalisés depuis le 31 août 2017 jusqu'à parfait paiement.
- rejeter la demande que présente M. [L] au titre de la perte locative et du préjudice moral,
- débouter les compagnies d'Assurance Axa France Iard de toutes demandes pécuniaires qu'elles présenteraient à l'encontre de la société Serv'oz.
- rejeter la demande que présente M. [L] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
- condamner M. [L] à lui verser la somme de 7 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
La société Axa France Iard, en qualité d'assureur de la société BATI + 33 (aujourd'hui société Serv'oz), dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 16 juin 2020, demande à la cour, au visa des articles 1792 du code civil et du code de procédure civile, de :
- dire et juger M. [L] mal fondé en son appel,
En conséquence,
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 11 décembre 2019 en ce qu'il a débouté M. [L] de ses prétentions,
En conséquence,
1°/ A titre principal,
- dire et juger que la responsabilité de la société Axa France Iard, en qualité d'assureur de BATI + 33, n'est pas engagée
- dire et juger que les travaux de la société BATI + 33 n'ont pas fait l'objet d'une réception
- dire et juger que les travaux de la société BATI + 33 ne sont pas constitutifs d'ouvrage ;
- dire et juger que les désordres ne sont pas imputables à la société BATI + 33 ;
- dire et juger qu'aucune garantie souscrite par la société BATI + 33 auprès de la société Axa France Iard n'est mobilisable ;
Par conséquent,
- débouter M. [L] ou toutes parties qui viendraient à conclure à l'encontre de la société Axa France Iard, de leurs demandes formulées à l'encontre de la société Axa France Iard ;
2°/ A titre subsidiaire
- limiter les demandes de M. [L] au titre des préjudices matériels
- rejeter la demande de M. [L] au titre du préjudice de perte locative de l'appartement et du parking
- rejeter la demande de M. [L] au titre du préjudice moral
- dire et juger la société Axa France Iard bien fondée à opposer à la société BATI + 33, devenue Serv'oz, sa franchise contractuelle prévue par la police d'assurance au titre de la garantie obligatoire ;
- condamner la société BATI + 33, devenue Serv'oz, à verser le montant de sa franchise contractuelle à la société Axa France Iard
- dire et juger la société Axa France Iard bien fondée à opposer à la société BATI +33 devenue Serv'oz ainsi qu'aux tiers, sa franchise contractuelle prévue par la police d'assurance au titre des garanties facultatives ;
La société Axa France Iard, ès qualité d'assureur multirisques de l'immeuble de M. [L], dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 15 juin 2020, demande à la cour, au visa des articles 1792 du code civil et 4,15 et 753 du code de procédure civile, de :
- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré recevables les prétentions de M. [L] formulées à l'encontre de la compagnie Axa France Iard ès qualité d'assureur de M. [L] ;
- confirmer le jugement dont appel pour le surplus ;
Et statuant à nouveau,
A titre principal
- juger que les demandes de M. [L] ne sont pas fondées en droit et insuffisamment motivées en fait
En conséquence,
- déclarer irrecevables les demandes de M. [L] formulées à l'encontre de la compagnie Axa France Iard es qualité d'assureur de M. [L] ;
A titre subsidiaire,
- juger qu'aucune garantie souscrite par M. [L] auprès de la compagnie Axa France Iard n'est mobilisable ;
- juger que la responsabilité de la compagnie Axa France Iard es qualité d'assureur de M. [L] n'est pas engagée ;
En conséquence,
- débouter M. [L] ou toute autre partie qui viendrait à conclure à l'encontre de la compagnie Axa France Iard es qualité d'assureur de M. [L] de leurs demandes formulées à son encontre ;
A titre infiniment subsidiaire,
- limiter les demandes de M. [L] au titre des préjudices matériels ;
- constater que la compagnie Axa France Iard a indemnisé M. [L] à hauteur de 3.953,68 euros au titre de son contrat d'assurance multirisques immeuble ;
- juger que la somme de 3.953,68 euros devra être réduite des sommes réclamées ;
- débouter M. [L] de ses demandes au titre de son préjudice de perte locative de l'appartement et du parking, et du cout de l'échafaudage ;
- débouter M. [L] de sa demande formulée au titre de son préjudice moral ;
- débouter M. [L] de sa demande extravagante et injustifiée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [L] ou toute autre partie succombante au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [L] ou toute autre partie succombante au paiement des entiers dépens de l'instance.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 février 2023.
Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la responsabilité de la société Bati+ 33
Le tribunal a considéré que M. [L] ne rapportait pas la preuve de la responsabilité décennale, ni davantage contractuelle de la société Bati + 33.
M. [L] recherche la responsabilité décennale, et subsidiairement contractuelle de la société Bati + 33 alors qu'il soutient que les désordres relevés par l'expert judiciaire affectaient le plancher lequel pourrissait du fait d'infiltrations par le bac à douche, alors qu'en outre les travaux réalisés par le constructeur n'étaient pas conformes aux termes du marché et ne respectaient pas les règles techniques.
La société Serv'oz (anciennement dénommée Bati + 33) expose que ses travaux ont porté sur la réfection d'éléments dissociables d'un immeuble vétuste et qu'ils ne rendaient pas celui-ci dans son ensemble impropre à sa destination, si bien que sa responsabilité décennale ne peut être retenue, alors qu'en outre dans la mesure où M. [L] n'a jamais accepté les devis établis par elle les 3 et 10 février 2016, les travaux qui y sont décrits ne sont pas entrés dans le champ contractuel, alors qu'en toute hypothèse, les travaux qu'elle a réalisés sont conformes à ces devis, les désordres provenant de causes étrangères à son intervention.
La société AXA France IARD, assureur décennal de la société Serv'oz expose qu'elle ne peut garantir les travaux réalisés par son assurée alors qu'il ne s'agit pas d'un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, qu'il n'a pas existé de réception de ces travaux, que les désordres invoqués par le maitre de l'ouvrage ne sont pas imputables à la société Serv'oz et ne rendent pas l'immeuble impropre à sa destination.
La société AXA France IARD, assureur multirisques de l'immeuble de M. [L], soutient pour sa part que les demandes de ce dernier à son égard sont irrecevables faute pour l'appelant d'avoir viser un quelconque fondement juridique, et ce y compris devant la cour d'appel, qu'en outre l'éventuelle mauvaise exécution des travaux de reprise du sinistre ne pourrait qu'engager la responsabilité de l'entreprise qui les a réalisés, alors que l'appelant n'avance aucun élément de fait permettant de démontrer un mauvaise gestion du sinistre, et subsidiairement un lien de causalité entre celle-ci et les désordres
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Sur la responsabilité décennale de la société Serv'oz venant aux droits de la société Bati + 33
L'article 1792 du code civil dispose : « Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère. »
A la lecture du rapport d'expertise, et des pièces des parties, la cour d'appel considère que si la consolidation des solives par leur doublage, et ainsi par incorporation à une partie d'ouvrage existante, et le remplacement de panneaux en aggloméré, constituent des ouvrages au sens de l'article 1792 du code civil, il n'a en revanche existé, en l'espèce, aucune réception, notamment pas tacite, alors que M. [L] a contesté rapidement la bonne exécution des travaux litigieux, et le règlement des travaux n'a pas été entrepris, alors que la société Serv'oz, dans le cadre de son appel incident poursuit la condamnation de l'appelant à ce titre.
En conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité décennale de l'entreprise et la garantie de son assureur de sa responsabilité décennale.
Sur la responsabilité contractuelle de la société Serv'oz venant aux droits de la société Bati + 33
La société Serv'oz ne peut sérieusement soutenir que sa responsabilité contractuelle ne pourrait pas être recherchée au motif que son intervention ne serait pas intervention ne serait pas entrée dans le champ contractuel faute pour M. [L] d'avoir accepté ses devis, et faute pour son assureur multirisque habitation de lui avoir adressé un ordre de service, puisqu'en ce cas on ne voit pas à quel titre elle aurait pu réaliser les travaux litigieux.
Il résulte en réalité de la lettre d'acceptation adressée par la compagnie d'assurance AXA France, assureur multirisque habitation de M. [L], à ce dernier que celle-ci a adressé à son assuré une proposition d'indemnisation sur la base des devis établis par la société Bati + 33, que celui-ci a accepté le 28 mars 2016, à la suite de quoi, l'assureur a nécessairement donné l'ordre à la rédactrice du devis d'intervenir. ( cf : pièce n° 5 de l'appelant) L'expert judiciaire a d'ailleurs sollicité en vain de la compagnie AXA la commande des travaux ( rapport d'expertise page 18). Si la société Serv'oz n'avait pas reçu commande d'entreprendre les travaux conformément à son devis comment pourrait-elle former appel incident pour solliciter le paiement du solde de ses travaux ' En toutes hypothèses, elle ne conteste pas avoir réalisé les travaux litigieux.
S'agissant de la preuve de ce contrat, l'article 1341 du code civil, dans sa rédaction ancienne applicable au litige, dispose qu'il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, et qu'il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre, le tout sans préjudice de ce qui est prescrit dans les lois relatives au commerce. La somme au-delà de laquelle est ainsi exigée une preuve écrite est fixée à 1.500 € par le décret n° 80-533 du 15 juillet 1980 pris pour l'application de l'article 1341 du code civil, dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2004-836 du 20 août 2004.
En l'espèce, aucun écrit n'est versé aux débats qui constaterait un accord des parties sur l'intervention de la société Bati + 33.
Toutefois, une première exception à l'exigence d'une preuve écrite est toutefois prévue, à l'article 1347 ancien du code civil, lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit, constitué de tout acte écrit qui est émané de celui contre lequel la demande est formée et qui rend vraisemblable le fait allégué.
En l'espèce, les courriers adressés par M. [L] à la société Bati + 33 après la réalisation des travaux litigieux, les 3 mai 2016, 4 mai 2016, 9 mai 2016, remis en mains propres pour ceux des 3 et 4 mai 2016, ou adressé en recommandé avec demande d'avis de réception pour celui du 9 mai 2016, et l'absence de toute protestation de l'entreprise quant à la réalisation des travaux litigieux constituent un commencement de preuve que la société Bati + 33 est bien intervenue dans un cadre contractuel. ( cf : pièces n° 8, 9, 10 et 11 de l'appelant)
Par ailleurs, la demande de paiement de la société Serv'oz au titre du solde des travaux qu'elle reconnait ainsi avoir réalisés confirme l'existence d'un cadre conventionnel à son intervention.
En outre lors de la réunion d'expertise du 22 juin 2017, M. [N] représentant de la société Bati + 33, assisté de son conseil, a expressément indiqué à l'expert judiciaire que les travaux réalisés par sa société étaient conformes à son devis du 10 mai 2016, et qu'ils « étaient basés sur le devis en date du 3 février 2016 » .
La société Bati + 33 a ainsi reconnu être intervenue conformément aux devis qu'elle avait elle-même établis, considérant en outre que ses travaux étaient conformes à son devis du 10 mai 2016.
En conséquence, elle doit répondre conformément aux dispositions de l'article 1147 du code civil, applicable aux faits de l'espèce, du défaut dans l'exécution de ses travaux à partir du moment où elle ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne pourrait lui être imputé.
Or, il résulte du rapport d'expertise que l'expert judiciaire a indiqué que les infiltrations par le bac à douche étaient à l'origine des dégradations affectant le plancher et avaient pour conséquence une perte de résistance mécanique des solives.
Il a ajouté que la société Bati + 33 avait constaté ces désordres lors de l'exécution de ses travaux, en avait fait un compte rendu, et avait établi un devis, à cette même date, pour y remédier.
Il a considéré que les désordres n'avaient été que partiellement repris alors qu'un seul renfort d'une solive avait été mis en 'uvre, alors que le doublage des solives était prévu pour cinq d'entre elles dans le devis du 10 février 2016. De même les panneaux en aggloméré n'avaient été remplacés que très ponctuellement par l'entreprise pour 3,77 m² au lieu des 21,90 m² prévus dans le devis initial. Il a donc considéré que le remplacement des panneaux était insuffisant, que ces panneaux n'étaient pas calés ce qui constituait une malfaçon dans leur mise en 'uvre, et entraînait des défauts de planéité dans le dégagement et dans la salle d'eau de l'appartement (rapport d'expertise page 22 et 23)
Il a en outre estimé que les travaux réalisés par la société Bati + 33 n'étaient pas conformes techniquement dès lors que les solives dégradées par le dégât des eaux n'avaient pas fait l'objet d'un remplacement adéquat.
Dès lors, la faute contractuelle de la société Serv'oz est démontré et celle-ci doit répondre des préjudices subis par M. [L] qui en découlent.
En conséquence, le jugement déféré sera réformé en ce qu'il a considéré que la responsabilité contractuelle de l'entreprise Serv'oz ne pouvait être retenue, en absence de la communication de l'ordre de service ou du bon de commande qui lui a été adressé.
Sur la responsabilité contractuelle de la société Axa France Iard, assureur multirisques
Le tribunal a considéré que la garantie de la société Axa France Iard n'était pas mobilisable alors que le litige était né de la mauvaise exécution des travaux de reprise, alors que la faute de l'assureur à cette occasion n'était pas démontrée.
M. [L] considère au contraire que c'est son assureur multirisques habitation qui a géré le sinistre puisqu'elle a mandaté la société Bati + 33 pour établir un devis, puis pour réaliser les travaux utiles, et qu'elle est même intervenue volontairement aux opérations d'expertise, qu'elle n'a pas versé l'intégralité des sommes nécessaires aux travaux de reprise et qu'elle n'a pas vérifié que les travaux de reprise étaient conformes à ceux qui étaient nécessaires.
La société Axa France Iard demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a considéré que l'assuré était recevable en ses demandes alors qu'il ne visait aucun fondement juridique, et de le confirmer à titre subsidiaire au fond.
***
Si M. [L] recherche la responsabilité de son assureur sans viser expressément un texte de loi, il précise cependant que c'est sa responsabilité contractuelle qui serait en cause si bien que cette référence expresse dans le dispositif de ses écritures est suffisante pour juger de la recevabilité de sa demande.
L'article L. 113-5 du code des assurances impose à l'assureur multirisques habitation d'exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat" "lors de la réalisation du risque".
En l'espèce, la société Axa France IARD, assureur multirisques de M. [L] devait indemniser le sinistre lorsqu'il est survenu, ce qu'elle a fait dans des délais qui ne sont pas contestés.
Si les travaux réalisés par la société Serv'oz ont été justement contestés par le maitre de l'ouvrage, celui-ci ne démontre pas l'existence d'une faute de son assureur multirisques habitation, en lien avec un tel résultat, et avec les préjudices dont il demande réparation.
Si l'assureur multirisques habitation avait homologué les travaux à mettre en 'uvre pour remédier au sinistre l'expertise judiciaire a démontré que ces travaux n'ont été que très partiellement réalisés, et en outre mal exécutés.
M. [L] ne démontre pas davantage avoir alerté son assureur avant de l'assigner au fond, trois ans après le sinistre, puisque celui-ci n'avait notamment pas été appelé aux opérations d'expertise judiciaire.
Ces opérations d'expertise judiciaire n'ont pas démontré l'existence d'une faute de l'assureur multirisques habitation, et M. [L] n'en a pas allégué une seule à cette occasion, ni davantage à la charge de l'expert amiable qui avait été mandaté.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a jugé recevable mais mal fondée la demande de M. [L] à l'encontre de son assureur multirisque habitation.
Sur les préjudices
Sur les travaux de reprise
M. [L] reprend le montant des travaux de reprise chiffré par l'expert à la somme de 19.733,68 euros T.T.C, avec actualisation à compter du rapport d'expertise, « intérêts de droit » et capitalisation des intérêts.
La société Serv'oz considére que les travaux de reprise tels que prévus par la société Solrenov va au-delà des préconisations de l'expert judiciaire.
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Les travaux de reprise des désordres tels que prévus dans le devis de la société Solrenov ont été débattus devant l'expert judiciaire, et celui-ci a considéré que l'ensemble des travaux, objet de ce devis étaient nécessaires, alors que notamment la dépose et la repose des parquets étaient inévitables, ainsi que les éléments de la cuisine.
Il n'y a pas lieu de déduire des sommes dont est débitrice la société Serv'oz l'indemnité qui a été versée par l'assureur du maitre de l'ouvrage qui ne saurait compenser le coût des travaux nécessaires à réaliser, et dont la société Axa és qualité d'assureur de M. [L] ne demande qu'une réduction des sommes qu'elle serait amenée à devoir à celui-ci au titre de sa responsabilité, laquelle n'a pas été retenue par le cour d'appel.
En conséquence, le jugement sera réformé et la société Serv'oz sera condamnée à verser à M. [L] cette somme de 19 733, 68 euros, outre les intérêts légaux sur cette somme à compter du présent arrêt, outre la capitalisation des intérêts.
Sur la perte de loyers
M. [L] estime que son appartement n'a pas pu être loué depuis mars 2016 compris, jusqu'au mois de mai 2020, date à laquelle il a fait réaliser les travaux de reprise.
La société Serv'oz considére que M. [L] ne justifierait pas d'un tel préjudice, précisant que le contrat de location communiqué inclut le montant de la place de parking, laquelle en outre n'a nullement été sinistrée, alors qu'enfin le sinistre n'interdisait pas de proposer l'appartement à la location.
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Il résulte du rapport d'expertise que M. [C], locataire de M. [L] a quitté l'appartement litigieux le 30 février 2016, en raison du sinistre, et il importe peu qu'il ait alors loué un autre appartement appartenant à son bailleur, ou celui d'un tiers, puisqu'en toutes hypothèses M. [L] a perdu le bénéfice du règlement du loyer de l'appartement litigieux.
Si l'état de l'appartement n'interdisait pas, selon l'expert judiciaire, sa mise en location, force est de constater que le locataire qui occupait les lieux n'a pas souhaité s'y maintenir, l'expert judiciaire a également ajouté que les travaux de reprise à réaliser ne permettait l'habitabilité des lieux pendant leur réalisation.
Toutefois, M. [L] ne justifie pas de la date à laquelle l'appartement litigieux a pu être reloué, alors que le nouveau contrat de bail n'a pas été versé aux débats, et s'il affirrme qu'il aurait relouer celui-ci à compter du 1 er juin 2020, il communique un constat d'huissier du 9 juin 2020 qui démontre que les désordres existent toujours.
En conséquence, l'appelant ne justifie pas du quantum du préjudice qu'il invoque.
Dès lors, il sera débouté de sa demende au titre de préjudice résultant de sa perte de loyers.
Sur les frais d'échafaudage
M. [L] justifie avoir fait poser à la demande de l'expert judiciaire, et pour les besoins de l'expertise, un échafaudage pour lequel il a déboursé la somme de 605 euros, que la société Le Gua Bâti lui a facturé.
La société Serv'oz sera condamnée à lui rembourser une telle somme.
Sur le préjudice moral
M. [L] expose en substance que le comportement de la société Axa France Iard, assureur des deux parties, et de la société Bati + 33 lui a causé un préjudice du fait de la mauvaise gestion du dossier, ayant pour conséquence que les travaux de réfection ont été réalisés avec beaucoup de retard. Dès lors, il sollicite l'allocation de la somme de 6 000 euros.
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M. [L] sera débouté de sa demande alors qu'il ne justifie d'une atteinte à son honneur , à sa dignité, ni davantage de souffrances psychologiques qu'il aurait endurées du fait de ce sinistre matériel.
Sur l'appel incident de la société Serv'oz
Le tribunal a débouté la société Serv'oz de sa demande de paiement de sa facture de travaux, faute d'éléments probants suffisants.
La société Serv'oz sollicite à nouveau devant la cour d'appel le paiement de sa facture d'un montant de 3245,74 euros au motif que les travaux correspondant ont été réalisés et M. [L] a reçu de son assureur une indemnité pour pouvoir procéder à leur règlement. A titre subsidiaire, elle sollicite une compensation avec le montant des sommes qu'elle devrait à M. [L].
Dans le cadre du contrat qui unissait M. [L] à la société Serv'oz ou plus précisemment les différentes sociétés dont elle vient aux droits, et la société Axa, assureur multirisque habitation, les travaux litigieux qui ont été réalisés doivent être payés, nonobstant leur qualité et leur imperfection. M. [L] avait d'ailleurs reçu de son assureur une indemnité pour y faire face.
En conséquence, le jugement sera infirmé et M. [L] sera condamné à payer à la société Serv'oz la somme de 3245, 74 euros, et une compensation sera ordonnée entre les créances respectives des parties.
Sur les frais et dépens
Il ne parait pas inéquitable de laisser à la charge de la société Axa France Iard, prise en ses deux qualités, les frais et dépens qu'elle a exposés à l'occasion de cette procédure.
En revanche, il serait inéquitable que M. [L] supporte les frais irrépétibles et dépens qu'il a exposés devant la cour d'appel.
En conséquence, la société Serv'oz sera condamnée aux entiers dépens en ce compris les frais du constat d'huissier du 1 er juillet 2016, celui du 9 juin 2020 ne paraissant pas utile au besoin de la procédure, et les frais d'expertise, et à verser à M. [L] la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Dans la limite des appels,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté M. [B] [L] de ses demandes dirigées contre la société Serv'oz au titre de sa responsabilité contractuelle, et en ce qu'il a condamné celui-ci aux dépens et frais d'expertise, et sauf en ce qu'il a débouté la société Serv'oz de sa demande en paiement de sa facture,
Statuant à nouveau des chefs réformés :
Condamne la SARL Serv'oz à payer à M. [B] [L] la somme de 19 733, 68 euros, au titre des travaux de reprise et celle de 605 euros au titre des frais d'échafaudage,
Dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt, et que les intérêts échus dus au moins pour une année entière produiront eux-mêmes intérêt,
Faisant droit à l'appel incident de la SARL Serv'oz,
Condamne M. [B] [L] à payer à la SARL Serv'oz la somme de 3245, 74 euros au titre de sa facture de travaux,
Ordonne la compensation entre les créances respectives des parties condamnées,
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,
Condamne la SARL Serv'oz à payer à M. [B] [L] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à ses entiers dépens, de référé de fond, d'expertise et les frais de son constat du 1 er juillet 2016,
Laisse à la SA Axa France IARD ses dépens et ses frais non compris dans les dépens.
La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE