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05/04/2023 | FRANCE | N°22/01058

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 05 avril 2023, 22/01058


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023







PRUD'HOMMES



N° RG 22/01058 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MSIY















Madame [Z] [R]-[H]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro du 05/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)



c/



S.A.R.L. ACL NETTOYAGE












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Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 février 2022 (R.G. n°F 20/00024) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant d...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023

PRUD'HOMMES

N° RG 22/01058 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MSIY

Madame [Z] [R]-[H]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro du 05/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c/

S.A.R.L. ACL NETTOYAGE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 février 2022 (R.G. n°F 20/00024) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 02 mars 2022,

APPELANTE :

Madame [Z] [R]-[H]

née le 11 Janvier 1969 à [Localité 3] de nationalité Française Profession : Employée à domicile, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Claire JORIO substituant Me Christian BLAZY de la SELARL BLAZY & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX, assistée de Me Margaux MASSON, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SARL ACL Nettoyage, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social, [Adresse 2]

N° SIRET : 492 115 506

représentée par Me Marie GIRINON de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 février 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Hylaire, présidente, et Madame Bénédicte Lamarque, conseillère chargée d'instruire l'affaire,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 24 juin 2019, Mme [Z] [R]-[H], née en 1969, a été engagée en qualité d'agent de service selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à effet au 29 juin 2019 conclu avec la SARL ACL Nettoyage qui emploie plus de dix salariés.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés.

Le contrat de travail prévoyait une période d'essai de 30 jours.

Par courrier du 26 août 2019, la société ACL Nettoyage a notifié à Mme [R]-[H] qu'elle mettait fin à sa période d'essai 'renouvelée le 17 juillet 2019".

Soutenant que la rupture du contrat de travail doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse et réclamant diverses indemnités outre des dommages et intérêts pour licenciement abusif, Mme [R]-[H] a saisi le 13 janvier 2020 le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 4 février 2022, a :

- débouté Mme [R]-[H] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens,

- débouté les parties de l'ensemble des autres demandes.

Par déclaration du 2 mars 2022, Mme [R]-[H] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 7 septembre 2022, Mme [R]-[H] demande à la cour de réformer le jugement du 4 février 2022 rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, et, statuant à nouveau, de :

- déclarer qu'elle n'a pas accepté le prolongement de sa période d'essai,

- déclarer que la rupture du contrat de travail en date du 29 août 2019 sera requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société ACL Nettoyage à lui verser les sommes de 321,07 euros et de 32,107 euros au titre de son indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents,

- condamner la société ACL Nettoyage à lui payer la somme de 642,14 euros au titre du préjudice subi suite à son licenciement abusif,

- condamner la société ACL Nettoyage aux dépens, frais et procédure, y compris les frais qui seraient éventuellement à engager si le jugement à venir n'était pas respecté ainsi qu'à une indemnité de 2.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- débouter la société ACL Nettoyage de l'ensemble de ses demandes et notamment de sa demande de condamnation de Mme [R]-[H] à lui verser la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 12 septembre 2022, la société ACL Nettoyage demande à la cour de':

A titre principal,

- déclarer irrecevable l'ensemble des demandes de Mme [R]-[H] en raison du défaut du droit d'agir de l'appelante,

A titre subsidiaire,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux en date du 4 février 2022 et, en conséquence, débouter Mme [R]-[H] de l'ensemble de ses demandes tendant à la condamnation de la société au paiement des sommes suivantes :

* 321,07 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 32,10 euros à titre de congés payés y afférent,

* 642,14 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

* 2.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

En tout état de cause,

- condamner Mme [R]-[H] au paiement de la somme de 1.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 5 octobre 2022, le conseiller de la mise en état de la chambre sociale de la Cour d'appel de Bordeaux a déclaré recevable l'appel formé par Mme [R]-[H].

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 21 février 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'irrecevabilité des demandes soulevée la société

La société ACL conclut à l'irrecevabilité des demandes de Mme [R]-[H] au motif que le jugement critiqué, rendu en dernier ressort, n'était pas susceptible d'appel.

Cette demande a déjà été rejetée par ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 5 octobre 2022, décision qui n'a pas fait l'objet d'un déféré et qui a déclaré recevable l'appel formé par la salariée.

La société n'est donc plus recevable de ce chef.

Sur la rupture du contrat

Pour voir infirmer le jugement déféré, Mme [R]-[H] soutient ne pas avoir eu connaissance que sa période d'essai était prolongée, n'ayant jamais accepté les termes de cette proposition et qu'en conséquence, le contrat de travail était devenu définitif.

L'employeur ne pouvait donc y mettre un terme de manière unilatérale sans procédure de licenciement.

Elle conteste être la signataire du document de renouvellement invoqué par la société, produit un rapport d'expert graphologue auprès de la cour d'appel de Bordeaux en ce sens et soutient ne pas avoir pu renseigner ce document, ne sachant ni lire ni écrire. Elle conteste également avoir reçu le document de renouvellement que la société indique avoir envoyé en lettre simple.

La société, s'appuie sur un document de renouvellement qui porte une signature et la mention 'mon accord pour ce renouvellement est bien exprès et non équivoque', 'lu et approuvé' pour faire valoir que le contrat n'était pas encore définitif au moment où elle a notifié à Mme [R]-[H] sa volonté de ne pas donner suite à la période d'essai.

Si la salariée a porté plainte pour faux, la société fait part du classement sans suite de cette plainte.

La société conteste enfin les conclusions de l'expert qui n'a pas eu accès aux documents en originaux.

***

Aux termes de l'article 3 du contrat de travail conclu entre les parties, il était prévu 'une période d'essai de 30 jours au cours de laquelle chacune des parties pourra mettre fin au contrat sans indemnité, moyennant respect d'un délai de prévenance, fixé dans les conditions légales.

Cette période devant correspondre à une période de travail effectif, elle sera suspendue en cas d'absence de Mme [R]-[H] entraînant une prolongation de la période d'essai d'une durée équivalente à celle de la suspension.

Cette période d'essai pourra être renouvelée une fois pour une durée équivalente ou inférieure.

Le présent contrat ne deviendra définitif qu'à l'issue de la période d'essai.'

L'article 4.11 de la convention collective applicable précise que 'dès lors que cela est prévu dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail, la période d'essai pourra être renouvelée une fois pour une durée équivalente ou inférieure en cas de nécessité technique et après accord exprès des parties spécifié par écrit'.

L'employeur doit donc justifier de l'accord de la salariée en vue du renouvellement de sa période d'essai.

Conformément à l'article 287 du code de procédure civile, si la dénégation ou le refus de reconnaissance porte sur un écrit, le juge vérifie si les conditions prévues par les articles 1366 et 1367 du code civil pour la validité de l'écrit sont satisfaites.

Il ressort du contrat de travail et de la déclaration de renouvellement de la période d'essai, produits tous deux en copie, une différence des signatures, celle figurant au contrat de travail étant sur deux lignes avec mention du nom '[R]' et du prénom '[Z]' en-dessous, quand la signature apposée sur le document de renouvellement n'est qu'une trace de signe sans identification particulière. Il est également noté une différence dans la forme des lettres. Le paraphe des pages est fait sous 'AK' (pour [R]-[H] [Z]) dans le contrat de travail alors qu'il est mentionné '[M]' dans le formulaire de renouvellement.

Dès lors, la cour est en mesure de dire, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que ces différences démontrent que Mme [R]-[H] n'est pas la signataire du formulaire de renouvellement de la période d'essai.

Il doit donc être considéré que celle-ci a pris fin de le 24 juillet 2019.

L'employeur a notifié la rupture du contrat de la salarié le 26 août 2019, soit après la fin de la période d'essai, sans respecter la procédure de licenciement et sans motif.

La rupture du contrat doit dès lors être requalifiée en licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières

Au regard d'une ancienneté qu'elle fixe à 2 mois au moment de la rupture du contrat, Mme [R]-[H] sollicite la condamnation de la société à lui verser une indemnité compensatrice de préavis égale à 15 jours outre les congés payés y afférents en se fondant sur les dispositions de l'article L. 1234-15 du code du travail.

*

L'article invoqué par l'appelante au soutien de sa demande est une disposition particulière applicable aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, qui n'a donc pas vocation à produire effet en l'espèce.

Envertu de l'article L. 1234-1 du code du travail applicable, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit :

1° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l'accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ;

2° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d'un mois ;

3° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois.

Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l'accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d'ancienneté de services plus favorable pour le salarié.

L'article 4.11.2. de la convention collective applicable prévoit qu'en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur, sauf faute grave ou lourde, le préavis est d'une durée d'une semaine pour le personnel agent de propreté ayant entre 1 et 6 mois d'ancienneté.

Le salaire moyen a été sur la période de 405,09 euros bruts.

La société sera en conséquence condamnée à payer à Mme [R]-[H] la somme de 101,27 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et celle de 10,13 euros bruts pour les congés payés afférents.

***

Au visa de l'article L. 1235-5 du code du travail, Mme [R]-[H] sollicite une indemnité pour licenciement abusif égale à deux mois de salaire.

Conformément à l'article L. 1235-3 du code du travail, compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, de son ancienneté de 2 mois et 15 jours, du montant de la rémunération versée à Mme [R]-[H], de son âge au moment du licenciement (50 ans), il lui sera alloué la somme de 405,69 euros de nature à assurer la réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite de la rupture du contrat.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société ACL Nettoyage, partie perdante à l'instance, sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement à Mme [R]-[H] de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la fin de non-recevoir opposée par la société ACL aux demandes présentées par Mme [R]-[H],

Dit que le licenciement de Mme [R]-[H] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société ACL Nettoyage à verser à Mme [R]-[H] les sommes de :

de :

- 101,27 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 10,13 euros bruts pour les congés payés afférents,

- 405,69 euros au titre de l'indemnité pour licenciement abusif,

- 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société ACL Nettoyage aux dépens.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 22/01058
Date de la décision : 05/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-05;22.01058 ?
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