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05/04/2023 | FRANCE | N°19/06071

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 05 avril 2023, 19/06071


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023







PRUD'HOMMES



N° RG 19/06071 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LKF2















Madame [F] [U]



c/



SCM VASCUTIV

















Nature de la décision : AU FOND





















Grosse déliv

rée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 novembre 2019 (R.G. n°F 17/00199) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 19 novembre 2019,





APPELANTE :

Madame [F] [U]

née le 15 Juillet 1958 à [Localité 3]

de nationalité Fran...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023

PRUD'HOMMES

N° RG 19/06071 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LKF2

Madame [F] [U]

c/

SCM VASCUTIV

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 novembre 2019 (R.G. n°F 17/00199) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 19 novembre 2019,

APPELANTE :

Madame [F] [U]

née le 15 Juillet 1958 à [Localité 3]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Hugo Tahar JALAIN, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me Magali JULOU-POIRIER, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Madame [N] et Monsieur [X] en qualité de liquidateurs amiables de la SCM Vascutiv dissoute selon procès-verbal d'assemblée générale en date du 13 avril 2017

N° SIRET : 790 592 281

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Christophe BIAIS de la SELARL BIAIS ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 février 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bénédicte Lamarque, conseiller chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseiller

Madame Bénédicte Lamarque, conseiller

Greffier lors des débats : Séverine Roma

Greffier lors du prononcé : A.-Marie Lacour-Rivière

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [F] [U], née en 1958, a été engagée en qualité d'infirmière par le Docteur [Y] au droit duquel s'est ensuite substituée l'association des Docteurs [G] et [Y], par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 1er janvier 1993.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du personnel des cabinets médicaux.

Suite à un avenant du 10 octobre 2000, Mme [U] a exercé son activité à temps plein.

Puis, au 1er janvier 2013, le Docteur [Y] a intégré la société civile de moyens Vascutiv à laquelle le contrat de travail de Mme [U] a été transféré. Un avenant a été signé entre les parties le 30 juin 2014avec reprise de l'ancienneté de la salariée.

M. [Y] a cédé ses parts le 20 mars 2015, la société étant en dernier lieu constituée des docteurs [R] [Z], [N] et [X].

Suite à la volonté de M. [R] [Z] de renoncer à sa qualité d'associé par courrier du 13 octobre 2016, la société a entrepris une procédure de licenciement collectif économique à l'égard de ses deux salariés.

Par lettre datée du 9 novembre 2016, Mme [U] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 22 novembre 2016.

Par lettre du 25 novembre 2016, remise le 29 novembre 2016, deux postes de reclassement à temps partiel représentant 27 heures par semaine au total ont été proposés par chacun des médecins, les docteurs [N] et [X], à Mme [U] qui les a refusés le 8 décembre 2016.

Par courrier du 12 décembre 2016, Mme [U] a informé la société d'erreurs qu'elle avait relevées dans le contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait été remis.

Mme [U] a ensuite été licenciée pour motif économique par lettre datée du 13 décembre 2016 ainsi rédigée :

«'Le départ d'un associé, le Docteur [R], de la SCM ne permet pas la continuité de celle-ci, en effet les deux associés restants les Docteurs [N] et [X] ne pourraient pas supporter les charges supplémentaires leur incombant du fait du départ de leur associé, ne pouvant assumer des charges fixes trop lourdes par conséquent la SCM sera dissoute suite au départ du Docteur [R].

D'autre part, les Docteurs [N] et [X], vous ont fait une proposition de reprise de vos contrats de travail en fonction de leurs besoins propres, proposition que vous avez refusée, les deux médecins étant dans l'impossibilité d'assurer seuls les charges de personnels existantes, le licenciement devient inévitable.

Pour ces raisons, nous prononçons votre licenciement pour motif économique'».

Mme [U] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 15 décembre 2016 et son contrat a pris fin le 20 décembre 2016.

A cette date, elle avait une ancienneté de 23 ans et 11 mois et la société occupait à titre habituel moins de onze salariés.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de Mme [U] s'élevait à la somme de 4.011,15 euros.

Le 29 décembre 2016, Mme [U] a demandé à être rétablie dans ses droits quant à l'indemnité de licenciement, soutenant pouvoir bénéficier 'd'une indemnité équivalente à un an de salaire brut augmentée d'un mois de salaire brut par année d'ancienneté'. La société, s'étonnant de cette réclamation, a sollicité des compléments d'information par courrier du 27 janvier 2017 auquel Mme [U] n'a jamais répondu.

Contestant la légitimité ainsi que la régularité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, Mme [U] a saisi le 10 février 2017 le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 8 novembre 2019, a :

- jugé le licenciement de Mme [U] régulier et justifié,

- débouté Mme [U] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné Mme [U] à verser à la société Vascutiv la somme de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [U] aux dépens.

La SCM Vascutiv a été dissoute à la suite d'une assemblée générale du 13 avril 2017.

Les deux associés restant, à savoir le Docteur [N] et le Docteur [X], ont été désignés liquidateurs amiables.

Par déclaration du 19 novembre 2019, Mme [U] a relevé appel de cette décision.

Le second appel interjeté par Mme [U] le 28 novembre 2019, enregistré sous le numéro RG 19/06254 a été joint au précédent par mention au dossier le 18 décembre 2019, sous le numéro RG 19/06071.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 8 juillet 2021, Mme [U] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a validé le licenciement prononcé le 13 décembre 2016 comme régulier et justifié, en ce qu'il l'a déboutee de l'intégralité de ses demandes et en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société la somme de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de :

- dire fautif le refus de la société Vascutiv de communiquer les pièces comptables sollicitées par Mme [U] dans le cadre de sa sommation communiquer du 26 février 2019,

En tirer les conséquences, en droit, statuant à nouveau :

- dire recevable la demande de Mme [U],

- dire son licenciement injustifié et irrégulier,

- condamner la société Vascutiv, représentée par les liquidateurs amiables Mme [J] [N] et M. [C] [X], à payer à Mme [U] les sommes suivantes ::

* 70.000 euros au titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, sur le fondement des articles L.1235-1 et L.1235-5 du code du travail,

* 11.615,97 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 1.161,59 euros bruts au titre des congés payés afférents,

* 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux

dépens.

Dans leurs dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 26 février 2020, Mme [N] et M. [X], en leurs qualités de liquidateurs amiables de la société Vascutiv, demandent à la cour de confirmer le jugement dans son intégralité, qu'il soit jugé que le licenciement pour motif économique prononcé par la SCM Vascutiv dissoute, pour cessation définitive de l'activité de la

SCM, repose sur une cause réelle et sérieuse et qu'il soit dit que la procédure de licenciement est parfaitement régulière,

En conséquence,

- débouter la salariée de l'intégralité de ses demandes,

En tout état de cause,

- condamner Mme [U] à verser à la société Vascutiv la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre le paiement des dépens de la présente procédure et éventuels frais d'exécution.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 14 février 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Pour voir qualifier son licenciement économique de licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, Mme [U] invoque dans un premier temps l'absence de motif économique en ce qu'il n'est pas suffisamment précis ni établi et, dans un second temps, que la lettre de licenciement ne précise ni les conséquences sur l'emploi de Mme [U] ni ne respecte l'obligation de reclassement.

- Le motif économique

Mme [U] soutient que la SCM ne justifiait pas de difficultés économiques visant à mettre en oeuvre une réorganisation de l'entreprise pour sauvegarder sa compétitivité, celles-ci ayant été purement hypothétiques :

- au moment du licenciement, l'associé devait quitter la SCM avec un délai de préavis de 6 mois et aucun changement n'était intervenu sur la situation financière de la SCM dont la stabilité économique n'était alors pas menacée. La décision de la licencier ayant été prise avant même la dissolution de la SCM, celle-ci ne démontre pas les menaces qui pesaient sur sa compétitivité ;

- au surplus, la dissolution de la SCM n'est pas un juste motif de licenciement : la cessation d'activité d'un des membres d'une SCM n'empêche pas la poursuite de l'activité par les associés restants ; la cessation de l'activité doit être totale et définitive pour justifier un licenciement économique, or les associés ont poursuivi à titre individuel leur activité dans les mêmes locaux ;

- la proposition de modification de son contrat en temps plein en deux contrats à temps partiels était justifiée par des simples fins d'économie sur son salaire et par la volonté de limiter une potentielle baisse des revenus des associés en réduisant les frais de personnel.

Mme [U] invoque également l'absence de respect de la procédure permettant d'analyser la proposition faite de modification du contrat de travail en une modification liée aux motifs économiques, conformément à l'article L. 1233-3 du code du travail. Elle soutient en conséquence que le licenciement n'est pas intervenu pour refus de la modification de son contrat de travail.

Mme [U] invoque enfin l'absence d'indication dans la lettre de licenciement de ce que la cause économique a eu des conséquences sur son emploi.

Pour voir confirmer la décision des premiers juges, la société représentée par ses mandataires liquidateurs fait valoir que la cessation complète d'activité de l'entreprise constitue une cause autonome de licenciement économique, Mme [U] n'invoquant pas par ailleurs d'attitude fautive de l'employeur, la seule mention de la disparition de l'entreprise suffisant à justifier la suppression de tous les emplois.

La société justifie de la cessation d'activité suite au droit de retrait exercé par un des associés le 13 octobre 2016 avec préavis de 6 mois et à l'impossibilité de le remplacer par un autre associé, ainsi que la date du licenciement de Mme [U], laquelle si elle n'avait pas accepté, le CSP aurait pu effectuer ses trois mois de préavis au sein de la société avant sa dissolution qui ne pouvait pas intervenir avant le 14 mars 2017. Elle soutient que le procès verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 13 avril 2017 n'a fait qu'avaliser la dissolution qui remontait à fin décembre 2016.

Sur la décision de cesser l'activité de la SCM, les liquidateurs font valoir :

- l'importance des charges d'exploitation du Dr [N] qui représentaient 73% du chiffre d'affaires total fin 2016, en augmentation pour avoir représenté 56 % l'année précédente,

- le faible nombre de créneaux au bloc opératoire du Dr [R] [Z] qui sont passés de 1,5 jours par semaine à 1 jour par semaine, son BNC étant en diminution passant de 96.000 euros en 2016 à 51.200 euros en 2017 et le chirurgien n'ayant pas d'autre activité fixe dans une autre clinique,

- que le départ du Dr [R] [Z] impliquait l'absorption par la SCM de ses charges,

- que le Dr [X] n'opérait à cette clinique qu'une journée par semaine ayant d'autres activités de chirurgien dans d'autres cliniques, ses honoraires perçus par la clinique Tivoli Ducos ayant baissé de plus de 40% entre 2015 et 2018,

- que les deux associés restants avaient déjà des plages horaires en bloc opératoire qu'ils ne pouvaient augmenter, exerçant par ailleurs dans d'autres cliniques où ils avaient des engagements.

***

En application de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement économique celui prononcé par l'employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à la cessation d'activité de l'entreprise.

La cessation d'activité constitue une cause de licenciement pour motif économique à condition de concerner toute l'activité, d'être définitive et de pas résulter d'une faute de l'employeur

En l'espèce, la SCM Vascutiv avait pour objet de faciliter l'exercice de la profession des trois associés par la mise en commun de tous les moyens matériels et nécessaires au sein de la clinique Tivoli Ducos, deux des associés exerçant par ailleurs à titre individuel sur une autre partie de leur temps à la clinique Jean Villar pour le Dr [N] et à la clinique Saint Augustin pour le Docteur [X] sans recourir aux moyens mis en commun par le biais de la SCM.

*

La société justifie du retrait d'un des trois associés annoncé le 13 octobre 2016, avec effet 6 mois plus tard, et confirmé par la dissolution de la société civile de moyens par le procès verbal de l'assemblée générale extraordinaire tenue le 13 avril 2017.

La société n'a pas entendu se prévaloir d'une modification du contrat de travail pour motif économique mais bien d'une cessation d'activité.

Selon les documents comptables constitués par l'attestation de l'expert comptable et la répartition des charges et des frais sur les deux années précédant la cessation d'activité, les charges d'exploitation de la SCM étaient en augmentation entre 2015 et 2016 pour s'établir à 82% du chiffre d'affaires en 2016, comme l'était la part des charges d'exploitation de chacun des deux associés sur le chiffre d'affaires global de la SCM.

Les liquidateurs justifient également de ce qu'ils n'auraient pu, en reprenant l'activité de l'associé partant, dont il est attesté qu'il n'exerçait qu'une vacation de 5 heures par semaine faute d'activité, compenser à eux deux l'augmentation des charges d'exploitation.

Les éléments comptables produits sont suffisants à établir les difficultés économiques ayant conduit à la cessation d'activité sans qu'il puisse être reproché aux liquidateurs de ne pas communiquer leurs déclarations fiscales 2035 sur les exercices 2016 et 2017 notamment.

Les difficultés économiques résultant du départ annoncé d'un des associés de la SCM justifiant ainsi sa dissolution sans qu'aucune faute ou légèreté blâmable ne puisse lui être imputée.

La dissolution emportant toute suppression d'emploi, il se déduit que la seule mention de la disparition de l'entreprise, totale et définitive, par sa dissolution annoncée dans la lettre de licenciement suffisait à renseigner Mme [U] des incidences de cette décision sur son emploi et il n'est pas contesté que les deux emplois d'infirmière et de secrétaire ont été supprimés. Comme l'ont retenu les premiers juges, seule la SCM était l'employeur de Mme [U] et non les associés qui la composent.

La dissolution de la société étant intervenue un mois après la fin du préavis de la décision de retrait d'un des associés et un mois après la fin du préavis qui aurait été celui de Mme [U] si elle n'avait pas accepté le CSP, le licenciement repose sur un motif économique justifié.

- Le non-respect de l'obligation de reclassement

Mme [U] soutient que la SCM a manqué à son obligation de reclassement auprès des médecins exerçant leur activités dans les locaux de la clinique Tivoli-Ducos ou en externe.

La société représentée par ses mandataires liquidateurs soutient que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur trouve sa limite dans la cessation d'activité de l'entreprise qui n'appartient pas à un groupe. La SCM fait valoir avoir remis à Mme [U] le document de présentation du CSP le jour de l'entretien préalable et une proposition de reclassement pour les heures passées par chacun des associés au sein de la clinique Tivoli-Duclos, par courrier remis en main propre le 29 novembre 2016 après réunion des associés le 22 novembre 2016.

***

L'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce dispose que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

Dans ce dernier cas, la recherche de reclassement doit se faire parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'organisation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

La tentative de reclassement est donc un préalable nécessaire à tout licenciement économique.

C'est à l'employeur d'établir la preuve de l'impossibilité d'affecter le salarié dans un autre emploi.

La société, qui allait être dissoute, a rempli son obligation de reclassement en proposant à la salariée, par lettre remise en main propre le 29 novembre 2016 deux contrats à durée indéterminée à temps partiels, le cumul des deux faisant 27 heures par semaine  et signés à titre individuel par chacun deux des anciens associés de la SCM : la proposition consistait en un premier poste d'infirmière auprès du Dr [X] pour 9h30, avec maintien de l'ancienneté de Mme [U], de son salaire mensuel, et un second contrat à durée indéterminée, à temps partiel auprès du Dr [N] pour 18 heures par semaine dans les mêmes conditions. Mme [U] qui avait 16 jours pour faire part de sa décision a refusé la proposition le 8 décembre 2016, sans faire part de ce que l'offre manquait de précision et de garantie quant aux modalités de mises en oeuvre de ces postes.

Ces propositions sont conformes aux règles de permutabilité du personnel entre la SCM et ses membres pris à titre individuel.

Mme [U] produit l'attestation de Mme [B], l'ayant assistée au cours de l'entretien préalable, qui conteste que Mme [U] ait reçu une proposition de contrat au moment de cet entretien. Toutefois, la transmission des courriers et la réponse faite par Mme [U] elle-même dans son courrier de refus du 8 décembre 2016 qui porte mention de la date de proposition de reclassement suite à l'entretien préalable permettent d'établir la réalité des propositions de contrats et de reclassement qui ont été faites et de leur date.

En conséquence, le licenciement repose sur un motif économique de cessation totale et définitive de l'activité de la société dûment justifié.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les irrégularités de procédure

Mme [U] invoque deux irrégularités de procédure :

- l'absence de présentation des motifs du licenciement économique lors de l'entretien préalable de licenciement,

- l'absence de proposition du contrat de sécurisation professionnelle le jour de l'entretien, mais postérieurement par remise en main propre du 29 novembre 2016.

Aux termes des articles L. 1235-5 et L. 1233-12 du code du travail applicable au moment des faits, les demandes de Mme [U] sont recevables.

Il ressort des pièces versées aux débats que la proposition de CSP a bien été remise à Mme [U] le 22 novembre, jour de l'entretien préalable au licenciement, comme indiqué sur le récépissé du document, même s'il comportait une erreur d'adresse et du statut de cadre de la salarié, le bulletin ayant été rectifié avec l'offre de reclassement faite par courrier le 25 novembre remise en main propre le 29 novembre et qu'elle a bénéficié d'un délai de 21 jours calendaires pour l'accepter, comme rappelé dans la lettre de licenciement en date du 13 décembre 2016.

C'est à tort que Mme [U] soutient ne pas avoir eu de précision quant au motif du licenciement économique le jour de l'entretien préalable, la lettre de convocation à cet entretien faisant mention du motif économique et le formulaire de CSP lui ayant été remis le même jour. Le compte rendu de cet entretien dressé par deux des trois associés composant la SCM fait état des motifs du licenciement et des propositions de reclassement qui ont été faites le jour même à Mme [U], contrairement à l'attestation de Mme [B], qui l'a assistée mais qui porte un témoignage en contradiction avec les autres pièces produites dans la procédure, ainsi qu'il l'a été précédemment relevé.

Les demandes de Mme [U] seront donc également rejetées de ces chefs et le jugement déféré confirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Mme [U], partie perdante à l'instance et en son recours, sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement à la SCM représentée par ses mandataires liquidateurs de la somme complémentaire de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement déféré,

Condamne Mme [U] au paiement à Mme [N] et à M. [X], en leur qualité de liquidateurs amiables de la SCM Vascutiv de la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

Condamne Mme [U] aux dépens.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 19/06071
Date de la décision : 05/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-05;19.06071 ?
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