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05/04/2023 | FRANCE | N°19/04176

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 05 avril 2023, 19/04176


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023







PRUD'HOMMES



N° RG 19/04176 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LE5S

















Madame [M], [R] [A]



c/



Madame [E] [H]

















Nature de la décision : AU FOND















Grosse délivrée le :





à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 juillet 2019 (R.G. n°F 18/00891) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 22 juillet 2019,





APPELANTE :

Madame [M] [R] [A]

née le 16 Mai 1978 à [Localité 4] de nationali...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023

PRUD'HOMMES

N° RG 19/04176 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LE5S

Madame [M], [R] [A]

c/

Madame [E] [H]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 juillet 2019 (R.G. n°F 18/00891) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 22 juillet 2019,

APPELANTE :

Madame [M] [R] [A]

née le 16 Mai 1978 à [Localité 4] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Maxime GRAVELLIER, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Madame [E] [H]

née le 10 Octobre 1986 à [Localité 3] ,de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Anne-laure GOBIN, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 février 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Hylaire, présidente, et Madame Bénédicte Lamarque, conseillère chargée d'instruire l'affaire,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon contrat de travail à durée indéterminée à effet au 1er février 2017, Mme [M] [A], née en 1978, a été engagée en qualité de garde d'enfants à domicile par Mme [E] [H] afin d'exercer la garde du fils de celle-ci, âgé de moins d'un an, du lundi au vendredi pour un horaire hebdomadaire de 25 heures et un salaire horaire net de 10 euros.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des salariés du particulier employeur.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle nette moyenne de Mme [A] s'élevait à la somme de 1.107,18 euros.

Après entretien préalable à un éventuel licenciement en date du 11 avril 2017, Mme [A] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse par lettre du 13 avril 2017 avec dispense d'exécution de son préavis.

Par courrier du 15 mai 2017, Mme [A] a contesté son solde de tout compte ainsi que les motifs de licenciement dont elle avait fait l'objet.

Estimant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et réclamant diverses indemnités outre un complément du salaire pour le mois de mars 2017, Mme [A] a saisi le 11 juin 2018 le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 12 juillet 2019, a :

- dit que l'acte de saisine du conseil de prud'hommes est parfaitement régulier,

- dit que le licenciement de Mme [A] repose bien sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [A] de sa demande d'indemnité au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné Mme [H] à payer à Mme [A] la somme de 310 euros nets au titre du salaire restant dû sur le mois de mars 2017, correspondant à la somme brute de 408,19 euros,

- donné acte à Mme [H] de la remise d'un bulletin récapitulatif pour le mois d'avril 2017 faisant apparaître le nombre de jours de congés payés acquis,

- donné acte à Mme [H] du paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés pour un montant de 294,81 euros,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit conformément à l'article R.1454-28 du code du travail, le salaire mensuel moyen brut de Mme [A] s'établissant à la somme brute de 1.310,28 euros,

- condamné Mme [H] à payer à Mme [A] la somme de 300 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [H] de sa demande reconventionnelle d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [H] aux éventuels dépens.

Par déclaration du 22 juillet 2019, Mme [A] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 13 octobre 2020, Mme [A] demande à la cour de réformer et infirmer le jugement du 12 juillet 2019 rendu par le conseil de prud'hommes de Bordeaux en ce qu'il a dit et jugé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse ainsi qu'en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnité à ce titre et de :

- écarter des débats la pièce adverse n°14 en ce qu'elle ne répond pas aux conditions des articles 202 et suivants du code de procédure civile,

- dire que le licenciement notifié par courrier en date du 13 avril 2017 dont elle a fait l'objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner Mme [H] à lui verser la somme de 5.241,12 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner Mme [H] à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 23 avril 2020, Mme [H] demande à la cour de'confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bordeaux en toutes des dispositions ayant débouté Mme [A] et, en conséquence, de :

- dire parfaitement bien fondé le licenciement entrepris en date du 13 avril 2017,

- débouter Mme [A] de sa demande d'indemnité au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouter Mme [A] de l'intégralité de ses demandes,

Y ajoutant,

- condamner Mme [A] à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [A] aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 21 février 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La déclaration d'appel formée par Mme [A] a été limitée en ce que le jugement a "dit que le licenciement de Madame [M] [A] repose bien sur une cause réelle et sérieuse, déboute en conséquence Madame [M] [A] de sa demande d'indemnité au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse".

Mme [H] n'a pas formé d'appel incident en sorte que la cour n'est pas saisie des dispositions du jugement rendu le 12 juillet 2019 par le conseil de prud'hommes de Bordeaux relatives au paiement d'un rappel de salaire pour le mois de mars 2017 et de l'indemnité compensatrice de congés payés et ne doit examiner que l'existence de la cause réelle et sérieuse du licenciement et la demande en paiement d'une indemnité à ce titre.

Sur la demande de rejet de la pièce de l'intimée portant le numéro 14

Mme [A] sollicite le rejet de l'attestation de [Z] [G], fille du compagnon de Mme [H], en ce qu'elle a été établie par une enfant mineure de 10 ans au moment des faits et de 13 ans à la date de la rédaction de l'attestation.

Mme [H] maintient ses demandes sur la base notamment de cette attestation.

Conformément à l'article 205 du code de procédure civile, le mineur, qui ne peut pas être entendu en qualité de témoin, ne peut attester. La pièce 14 sera écartée des débats en ce qu'elle a été rédigée par une enfant de moins de 14 ans, âgée de 11 ans au moment des faits.

Sur la rupture du contrat de travail

La lettre de licenciement en date du 13 avril 2017 qui fixe l'objet du litige est ainsi rédigée :

« (...) Au cours de l'entretien en date du 11 /04/ 2017, nous vous avons exposé les motifs du licenciement envisagé, et nous avons pris note de vos explications.

Au terme de l'entretien préalable, nous avons malheureusement estimé que ces explications n'étaient pas de nature à éviter le licenciement.

Par la présente, nous vous notifions donc votre licenciement.

Les motifs qui nous obligent à mettre en oeuvre cette mesure de licenciement se matérialisent par le manque de respect et l'insubordination dont vous avez fait preuve auprès de ma grand-mère ainsi que l'incohérence de vos propos.

Nous vous dispensons d'effectuer votre préavis de 1 semaine à compter de la première présentation de cette lettre.

Dans le but de ne pas vous pénaliser, vous serez payée intégralement et ce jusqu'à la fin de votre préavis selon les conditions prévues à votre contrat. »

En application des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige, le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute persiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement, n'incombe-t-elle pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

L'employeur retient deux séries de griefs que sont :

1. l'insubordination de Mme [A], attestée par Mme [F], arrière grand-mère de l'enfant, faisant part de l'agressivité des propos de la salariée à l'égard de son employeur mais également d'insultes envers elle.

Mme [F], qui était venue au domicile de Mme [H] du 3 au 7 avril pour s'occuper des enfants alors que Mme [H] devait pour des raison professionnelles se rendre à [Localité 3], déclare ainsi : « Madame [A] pouvait parler toute seule de façon incohérente pendant des heures ; à titre d'exemple, elle se prétendait la mère d'une multitude d'enfants (Madame [A] n'a pas d'enfants) à qui elle donnait la moitié de sa paye. Son délire était véritablement teinté de connotations paranoïaques : notamment que ses patrons et des personnes la volaient. Elle se permettait également de tenir des propos à connotations sexuelles particulièrement gênants à [Z] [G], alors âgée de 10 ans. Elle lui demandait, par exemple, si des garçons avaient déjà essayé de pratiquer des attouchements sexuels sur elle ou encore si elle aimerait plus tard montrer sa poitrine à des inconnus. (...) Elle est apparue très agressive dans ses propos, d'une part envers la société et d'autre part envers les personnes qui l'emploient, ou l'avaient employée qu'elle traite avec mépris et haine des "riches" ( Elle m'a même parlé du montant des impôts payés par ses précédents employeurs (...) s'est permise de critiquer ouvertement son employeur, c'est à dire ma petite fille, concernant son mode de vie (...). A titre d'exemple elle m'a dit "votre petite fille ferait mieux d'envoyer de l'argent dans les pays africains où il y a des enfants malheureux plutôt que d'acheter des vêtements de marques à son fils". »

Mme [F] relate également un événement où Mme [A], au retour d'une promenade, portait à bout de bras la poussette qui a basculé lors du franchissement d'une marche d'escalier, la chute de l'enfant qui avait été mal attaché n'ayant été évitée que grâce à l'intervention du mari de Mme [F].

Elle ajoute qu'elle nourrissait des craintes suite à des propos répétés à plusieurs reprises par Mme [A] selon lesquels il "faudrait enlever les enfants aux parent qui les élèvent conformément à la société de consommation et à l'éducation moderne actuelle".

Elle indique enfin s'être fait traiter de 'vieille folle branlante et débile' par Mme [A].

Mme [H] produit également l'attestation de Mme [V], amie de la famille, ayant séjourné chez M. [G] et Mme [H] du 13 au 17 février 2017, à laquelle Mme [A] aurait indiqué qu'elle ne respecterait pas les consignes des parents et agirait uniquement en accord avec ses convictions personnelles sur la manière d'éduquer les enfants et qui témoigne elle aussi de 'propos confus' tenus par Mme [A] au sujet du système de société global.

Mme [A] conteste ces griefs, rappelle qu'elle a tenté d'alerter la mère sur le comportement déplacé des arrières grands-parents et produit l'attestation de deux de ses anciens employeurs selon lesquels "son travail nous a donné pleinement satisfaction, particulièrement en présence des enfants avec qui elle a fait preuve de beaucoup d'écoute et de créativité", sans que des difficultés soient remarquées.

Elle reconnaît dans son courrier du 15 mai 2017 avoir eu un "litige" avec Mme [F], arrière grand-mère de l'enfant expliquant : "c'est le fait qu'elle a saisi sans précaution [Y], 6 mois, en criant sans raison (...) J'étais en train d'ouvrir le rideau et ses cris m'ont horrifié". Mme [F] ne donne pas la même version des faits, reconnaissant ne pas avoir voulu lui remettre l'enfant avec lequel elle jouait, n'ayant plus confiance en Mme [A].

La salariée soutient que si les faits d'insubordination dénoncés par Mme [V] avaient été avérés, elle aurait été immédiatement licenciée alors qu'elle se trouvait encore en période d'essai.

En tout état de cause, en tant que personne extérieure à la famille, elle soutient que l'avis de cette dernière, sur les paroles qu'elle a pu prononcer sur le modèle éducatif à donner à un enfant, n'ont pas à entrer en compte dans son licenciement.

2. l'incohérence des propos de Mme [A], faisant librement état de ses opinions à l'encontre de la société actuelle et du système éducatif auprès de son employeur. M. [G], père de l'enfant, témoigne avoir remarqué une "propension permanente à la mythomanie particulièrement inquiétante et se matérialisant pas des déclarations farfelues et l'évocation de profession ou occupations multiples". Il atteste également de demandes de paiement en espèces de plus en plus insistantes, avoir constaté des troubles du sommeil les jours où l'enfant était gardé par Mme [A] et avoir dû quitter son poste de travail en urgence à plusieurs reprises pour donner congé à la salariée qui tenait des propos délirants.

Mme [H] verse également un SMS adressé par Mme [A] le 10 avril 2017 relatant de manière incompréhensible des propos sur le comportement des grands parents dont on déduit qu'ils seraient défaillants en terme de sécurité pour l'enfant.

L'attestation de Mme [F], arrière grand-mère de l'employeur, évoque le comportement étrange de la salariée, au travers de propos déjà cités.

Mme [H] soutient enfin que Mme [A] a eu des comportements et paroles déplacés à l'égard de l'arrière grand-père de l'enfant, sous-entendant des pulsions pédophiles, qui traduisent une instabilité psychologique de la salariée et invoque également les termes de la lettre du 15 mai 2017 dans laquelle Mme [A] a contesté son licenciement.

Elle indique enfin que Mme [A] aurait été licenciée pour des motifs similaires en 2016.

Mme [A] soutient que l'incohérence de ses propos ne justifient pas une mesure de licenciement.

Elle affirme avoir été témoin d'une scène entre l'arrière grand-père de l'enfant et la belle fille de Mme [H], âgée de 10 ans à l'époque des faits déclarant : « un adulte qui entre dans le lit d'un enfant n'est pas pour ainsi dire anodin. Surtout quelques heures après son arrivée. Alors que l'enfant est en pyjama en train d'y jouer et qu'elle ne le connaît que de la veille, sans lien familial (...) Si elle me parle deux fois de suite la première journée de grand-père qui viole sa petite fille c'est mon devoir d'y prêter attention et de vous le transmettre ».

Mme [F], atteste de ce que certaines paroles de la salariée à connotation sexuelle étaient inadaptées pour une enfant de 10 ans et notamment pour lui avoir demandé "si des garçons avaient déjà essayer de pratiquer des attouchement sexuels sur elle ou encore si elle aimerait plus tard montrer sa poitrine à des inconnus".

Mme [A] conteste les propos qui la présentent comme souffrant de syndromes psychotiques, aucun élément ne venant le démontrer, les démissions de ses précédents emplois pour des motifs similaires n'étant pas plus démontrées.

Elle produit trois attestations d'anciens employeurs lesquels mettent en évidence qu'elle met un "point d'honneur au respect de l'éducation des enfants et leur sécurité" (attestation de M. [U] père de deux enfants de 10 et 11 ans), que "son travail a donné pleinement satisfaction particulièrement en présence des enfants avec qui elle a fait preuve de beaucoup d'écoute et de créativité" (M. [P] qui employait mme [A] en qualité d'animatrice cuisine) et "outre des tâches ménagères, Mme [A] nous a aussi apporté son aide pour notre dernier fils, né en 2006, à travers l'aide aux devoirs et à travers des activités périscolaires artistiques" (M. [C]).

Mme [A] fait enfin valoir que son employeur ne peut exercer de droit de retrait de l'enfant, les relations entre les parties n'étant pas soumises à la convention collective des assistantes maternelles.

L'employeur fonde la procédure de licenciement sur la procédure applicable aux employeurs à domicile de garde d'enfant prévue aux articles 161.1.1 et suivants de la convention collective, prévoyant un entretien préalable, la notification du licenciement, en l'espèce pour cause réelle et sérieuse, et non pas sur l'article 119-1 de la convention collective applicable aux assistantes maternelles, laquelle prévoit effectivement un droit de retrait permettant à l'employeur de ne plus confier l'enfant quelqu'en soit le motif.

Il ne peut être reproché à l'employeur de produire l'attestation d'un membre de la famille, en l'espèce la grand-mère de l'employeur en qualité de témoin et de victime de paroles offensantes de la salariée, dès lors que les faits intéressant une famille et son intimité ne peuvent être relatés que par les membres de celle-ci.

Si les attestations versées par Mme [A] témoignent de ce qu'elle était appréciée dans ses anciennes fonctions, il ne peut en être déduit que son comportement était adapté dans le cadre de l'emploi qui fait l'objet du présent litige, les conditions de travail étant différentes puisqu'elle avait été embauchée précédemment comme "animatrice cuisine" puis comme "aide familiale" et pour l'aide au devoir d'un enfant de 10 ans.

Dans ces précédentes fonctions, Mme [A] était entourée d'adultes, n'était jamais seule et les enfants étaient tous âgés au minimum de 10 ans alors que dans le cadre du contrat de travail litigieux, l'enfant dont elle avait la garde avait moins d'un an.

En revanche, aucun élément produit ne permet d'établir que Mme [A] aurait été licenciée pour des motifs similaires précédemment.

Mme [A] ne conteste pas avoir tenu des propos sur les modalités d'éducation de l'enfant qui différaient de ceux des parents ni n'avoir eu aucune intention de respecter les consignes donnés par eux.

Il apparaît des pièces produites qu'elle avait le souhait de s'investir personnellement dans cette relation avec la famille, comme en témoigne la position qu'elle indique avoir tenu entre la belle-fille de Mme [H] et l'enfant de 6 mois, cherchant à rapprocher les enfants, allant au-delà de son rôle de garde d'enfant et tentant de mettre à l'écart les arrières grands-parents soit en ce que l'arrière grand-mère serait âgée et maladroite (elle aurait dessanglé l'enfant sans l'en avertir, elle aurait fait tomber des casseroles d'eau chaude) et l'arrière grand-père prétendument dangereux pour la belle-fille mineure, sans toutefois rapporter d'éléments de nature à étayer ses allégations..

Au vu l'ensemble des éléments évoqués, la cour a la conviction de la réalité des commentaires déplacés et insultants de Mme [A] à l'égard de la famille, et de l'insubordination de celle-ci quant aux modalités d'éducation de l'enfant, faits qui constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement, s'agissant d'un emploi de garde d'un enfant de 6 mois, qui nécessitait un lien de grande confiance entre les parties.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [A] de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Mme [A] partie perdante, sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement à Mme [H] de la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cours d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [M] [A] de sa demande d'indemnité au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement,

Y ajoutant,

Condamne Mme [A] aux dépens de la procédure d'appel ainsi qu'à verser à Mme [H] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en appel.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 19/04176
Date de la décision : 05/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-05;19.04176 ?
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