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04/04/2023 | FRANCE | N°23/00209

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 3ème chambre famille, 04 avril 2023, 23/00209


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



TROISIÈME CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 04 AVRIL 2023









N° RG 23/00209 - N° Portalis DBVJ-V-B7H-NCGX











[V] [U]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/018202 du 05/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)



c/



[P] [O] [X] [E]



















Nature de la dé

cision : AU FOND











Grosse délivrée le :



aux avocats :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 novembre 2022 par Juge aux affaires familiales de BORDEAUX (RG n° 21/09166) suivant déclaration d'appel du 13 janvier 2023



APPELANTE :



[...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 04 AVRIL 2023

N° RG 23/00209 - N° Portalis DBVJ-V-B7H-NCGX

[V] [U]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/018202 du 05/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c/

[P] [O] [X] [E]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 novembre 2022 par Juge aux affaires familiales de BORDEAUX (RG n° 21/09166) suivant déclaration d'appel du 13 janvier 2023

APPELANTE :

[V] [U]

née le 13 Juin 1991 à [Localité 7] (MAYOTTE)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Valérie BOYANCE, avocat au barreau de BORDEAUX et à l'audience par Me Julia VINCENT

INTIMÉ :

[P] [O] [X] [E]

né le 09 Juillet 1988 à [Localité 6] (MADAGASCAR)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Mathilde STINCO, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du cpc, l'affaire a été débattue le 28 février 2023 hors la présence du public, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Sandra BAREL et Danielle PUYDEBAT, conseillères, chargées du rapport

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Hélène MORNET

Conseiller : Sandra BAREL

Conseiller : Danielle PUYDEBAT

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique DUPHIL

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Des relations de Madame [V] [U] et de Monsieur [P] [O] [E] sont issus deux enfants :

- [W], née le 15 novembre 2013,

- [D], née le 25 septembre 2015.

Par jugement du 14 avril 2015, avant la naissance de [D], le juge aux affaires familiales a constaté l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur [W], fixé la résidence de [W] au domicile de la mère, octroyé un droit de visite et d'hébergement au profit du père au gré des parties et à défaut hors vacances scolaires d'un week-end sur deux du samedi 9h au dimanche 18h et de la moitié des vacances scolaires et fixé la pension alimentaire pour [W] à la somme mensuelle de 90 euros.

Par ordonnance du 23 novembre 2021, le juge des enfants a désigné l'UEMO aux fins de réaliser une mesure judiciaire d'investigation éducative.

Par jugement avant dire droit du 24 juin 2022, le juge aux affaires familiales a dit que le droit d'accueil sur les deux enfants s'exerce un week-end sur deux du samedi 9h au dimanche 18h et la moitié des vacances scolaires et que la remise des enfants se fera par le biais d'un tiers digne de confiance et sur le parking du commissariat de [Localité 5].

Par jugement du 16 septembre 2022, le juge des enfants a institué une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert jusqu'au 30 septembre 2023.

Mme [U] a saisi le juge aux affaires familiales aux fins de modification des modalités de l'autorité parentale.

Par jugement contradictoire rendu en date du 24 novembre 2022, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bordeaux a pour l'essentiel :

- fixé la résidence des enfants au domicile de la mère,

- jugé que durant trois mois à compter de la décision, le droit de visite du père s'exercera en point rencontre du [Localité 4], les premier et troisième samedis de chaque mois de 14h à 16h, avec autorisation de sortie dans l'enceinte du parc entourant la structure d'accueil, avec suspension pendant les vacances scolaires,

- jugé qu'à l'issue de ces trois mois, le droit de visite et d'hébergement du père pourra, sauf autre accord, s'exercer en période scolaire, du vendredi soir à la sortie des classes au dimanche soir 18h sur le parking du commissariat de [Localité 5] par le père, par la mère, ou par un tiers digne de confiance connu des deux parents,

- dit que pour les vacances d'été, les 15 premiers jours de juillet et les 15 premiers jours d'août les années paires seront passés chez le père et les 15 derniers jours de juillet et les 15 derniers jours d'août les années impaires chez le père avec récupération des enfants le samedi matin 11h et remise des enfants le samedi matin suivant à 11h par un tiers digne de confiance du côté de la mère et par monsieur ou par un tiers digne de confiance du côté du père,

- jugé que toute sortie du territoire français avec les enfants devra faire l'objet d'une communication à l'autre parent sur le lieu de destination et les dates du séjour entrevu,

- dit que la part contributive du père pour l'entretien et l'éducation des enfants est fixée à la somme de 120 euros par enfant et par mois, soit la somme de 240 euros par mois au total, suivant indexation,

- dit que chaque partie règle ses propres dépens.

Procédure d'appel :

Par déclaration au greffe en date du 13 janvier 2023, Mme [U] a interjeté appel limité de ce jugement dans ses dispositions relatives au droit de visite. M. [E] a formé appel incident sur la contribution à l'entretien et éducation des enfants.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 20 février 2023, Mme [U] demande à la cour de :

à titre principal, concernant le point rencontre, et statuant à nouveau,

- dire que le droit de visite de M. [E] s'exercera au Point rencontre un samedi après-midi sur deux de 14h à 16h, avec suspension pendant les vacances scolaires, de façon médiatisée, durant un délai d'un an, à l'issue du délai de ce délai de 12 mois, et à tout le mois jusqu'à la rentrée de septembre 2023, la partie la plus diligente pourra saisir le Juge aux affaires familiales pour voir réviser le droit de visite,

à titre subsidiaire, concernant le droit de visite et d'hébergement du père pour les vacances scolaires,

- réformer le jugement en ce qu'il dit que, pour les vacances scolaires, la récupération ou la remise des enfants devra se faire par un tiers digne de confiance du côté de la mère,

- dire que, pour les vacances scolaires, la remise ou la récupération des enfants se fera sur le parking en face du commissariat de [Localité 5] par le père, la mère ou un tiers digne de confiance,

- concernant le jour de la remise des enfants pour les vacances, réformer le jugement en ce qu'il prévoit le samedi à 11h et fixer le jour de remise des enfants le vendredi soir 18h,

- confirmer le jugement en ce qu'il fixe le montant de la pension alimentaire au titre de l'entretien et de l'éducation des enfants à la somme mensuelle de 120 euros par enfant et par mois,

- débouter M. [E] de l'ensemble de ses demandes.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 14 février 2023, M. [E] a demandé à la cour de :

- dire que l'appel interjeté par Mme [U] est infondé,

- confirmer le jugement rendu par le juge aux affaires familiales de Bordeaux le 24 novembre 2022, en ce qu'il fixe un droit de visite médiatisé en point rencontre durant 3 mois puis un droit de visite et d'hébergement classique pour la suite,

- débouter Mme [U] de l'ensemble de ses demandes,

statuant à nouveau,

- réformer le jugement du 24 novembre 2022 en ce qu'il fixe la part contributive de M. [E] à la somme de 120 euros par enfant et par mois, soit 240 euros par mois,

- fixer cette part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants à la somme de 90 euros par enfant et par mois, soit 180 euros par mois.

Aux termes de conclusions en date du 26 février 2023, soit postérieurement à l'ordonnance de clôture, M. [E] demande identiquement à la cour de confirmer les dispositions relatives au droit de visite et d'hébergement et de réformer celles relatives à sa part contributive et communique deux nouvelles pièces.

En application de l'article 1072-1 du code de procédure civile, la cour a vérifié l'existence d'une procédure d'assistance éducative à l'égard des enfants. Une AEMO est en cours.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 février 2023.

L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience rapporteur du 28 février 2023.

MOTIVATION

Sur la recevabilité des conclusions en date du 26 février 2023

Aux termes de l'article 802 du code de procédure civile 'après l'ordonnance de clôture aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.'

Selon l'article 803 du même code 'l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.'

M. [E] a conclu à nouveau le 26 février 2023, soit postérieurement à l'ordonnane de clôture qui a été prononcée le 24 février 2023, et communiqué, le 25 février 2023, deux pièces, n° 7 et 8, sans invoquer de cause grave.

Il convient, par conséquent, de dire irrecevables les conclusions en date du 26 février 2023 et d'écarter les pièce n° 7 et 8 des débats.

Sur le droit de visite et d'hébergement du père

En application de l'article 373-2 du code civil, chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent.

L'article 373-2-6 alinéa 2 du code civil précise que le juge peut prendre les mesures permettant de garantir la continuité et l'effectivité du maintien des liens de l'enfant avec chacun de ses parents.

L'article 373-2-9 du code civil dispose que lorsque la résidence de l'enfant est fixée au domicile de l'un des parents, le juge aux affaires familiales statue sur les modalités du droit de visite de l'autre parent. Ce droit de visite, lorsque l'intérêt de l'enfant le commande, peut, par décision spécialement motivée, être exercé dans un espace de rencontre désigné par le juge. Lorsque l'intérêt de l'enfant le commande ou lorsque la remise directe de l'enfant à l'autre parent présente un danger pour l'un d'eaux, le juge en organise les modalités pour qu'elle présente toutes les garanties nécessaires. Il peut prévoir qu'elle s'effectue dans un espace de rencontre qu'il désigne, avec l'assistance d'un tiers de confiance ou du représentant d'une personne morale qualifiée.

A l'appui de son appel, Mme [U] fait valoir que si le Point Rencontre, au vu du conflit parental et des difficultés réelles des enfants, permet à ces derniers de trouver un apaisement, la durée des modalités prévues par le premier juge, soit trois mois, est insuffisante pour garantir la sécurité des enfants et leur stabilité alors qu'un travail des parents sur eux mêmes n'a pas encore été entrepris sérieusement.

M. [E] fait valoir, quant à lui, qu'il a un suivi régulier concernant ses troubles, ce qui est établi par les attestations du centre médico psychologique de [3], qui indique que M. [E] s'est présenté aux entretiens infirmiers les 19 octobre 2021, 24 novembre 2021, 15 décembre 2021, 19 mai 2022, 18 janvier 2023 et 13 février 2023. Il souligne qu'il a toujours été proche de ses enfants et qu'être privé d'eux pendant longtemps est très difficile pour lui, d'autant que les incidents dont fait état Mme [U] (l'enfant [D] a mis le feu à plusieurs objets dans la maison de sa mère en janvier 2023) se sont déroulés pendant le temps où M. [E] ne voyait les enfants qu'en Point Rencontre et que cela ne traduit pas d'apaisement chez les enfants.

Il apparait à la lecture des pièces du dossier que le juge des enfants du tribunal des enfants de Bordeaux a ordonné une mesure judiciaire d'investigation éducative.

Le rapport de l'UEMO, dont les conclusions sont reprises par le juge des enfants dans sa décision du 16 septembre 2022, préconise l'instauration de droit de visite médiatisé pour M. [E] tant qu'il n'aura pas trouvé la stabilité personnelle qui offre des conditions d'accueil rassurantes pour les enfants.

Il y est ausi observé que des conflits parentaux envahissent de façon inadaptée la vie de [W] et [D] qui en sont systématiquement spectatrices et qui se jouent au détriment total de leur bien être, avec pour ces deux enfants des signes de souffrance et de fragilité psychologique.

L'UEMO fait état d'un trouble psychiatrique chez M. [E] qui altère fortement sa perception de la réalité et le conduit à présenter des comportements inadaptés. Est soulignée la nécessité pour le père de famille d'un suivi psychiatrique pour apaiser la souffrance qu'il exprime.

Il résulte donc de l'analyse des pièces du dossier et des explications des parties que la mésentente entre les parents reste très vive et que les enfants, pris dans un conflit de loyauté, attachés à l'un et l'autre de leurs parents, sont en grande souffrance et ont besoin d'apaisement pendant un laps de temps suffisamment long pour leur permettre d'être rassurés.

L'invitation faite par le juge des enfants lors de l'instauration de la mesure d'AEMO en septembre 2022 à participer à un stage de 'réflexion sur les conséquences du conflit parental sur l'enfant' n'a pas été suivie.

La décision sera par conséquent infirmée.

Il convient de fixer le droit de visite du père sur les enfants dans le Point Recontre désigné, un samedi par quinzaine de 14 h à 16 h, (y compris pendant les vacances de Pâques et de juillet) avec possibilité de sortie, et ce pour une durée de 6 mois à compter du présent arrêt.

Il y a lieu de juger que, passé ce délai, la partie la plus diligente devra saisir le juge aux affaires familiales pour qu'il soit statué à nouveau au vue de l'évolution de la situation.

En application des dispositions de l'article 1072-2 du code de procédure civile, copie de la présente décision sera transmise au juge des enfants.

Sur la contribution du père à l'entretien et l'éducation des enfants

Aux termes de l'article 371-2 du code civil, chacun des parents contribue à l'entretien de l'enfant à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant, cette obligation ne cessant pas de plein droit lorsque l'enfant devient majeur.

Selon l'article 373-2-2 du code civil, en cas de séparation des parents, cette contribution prend la forme d'une pension alimentaire versée par l'un des parents à l'autre. Cette pension peut en tout ou partie prendre la forme d'une prise en charge directe des frais exposés au profit de l'enfant. Elle peut être en tout ou partie sous forme d'un droit d'usage et d'habitation.

Il résulte des pièces du dossier et des explications des parties que les ressources et charges des père et mère s'établissent ainsi :

Madame

ressources :

revenus mensuels : allocation pôle emploi 718 euros

prestations sociales : 1116,09 euros

charges mensuelles :

loyer résiduel : 284 euros

prêt voiture : 273 euros

elle assume les charges fixes de la vie courante (edf, assurances)

Monsieur

ressources :

revenus mensuels : il est en arrêt maladie et a perçu entre le 2 décembre 2022 et le 4 février 2023, 2831 euros, soit une moyenne mensuelle de 1415 euros

charges mensuelles :

loyer : 367,56 euros

il assume les charges fixes de la vie courante.

C'est donc à bon droit, au vu des ressources des parties et des besoins des enfants, que le premier juge a fixé le montant de la contribution de M. [E] à l'entretien et l'éducation des enfants à la somme de 120 euros par enfant et par mois, soit 240 euros au total.

Il convient de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur les dépens

Il y a lieu de laisser la charge des dépens d''appel à M. [E] qui succombe en l'essentiel de ses demandes.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

DECLARE irrecevables les conclusions en date du 26 février 2023 et écarte les pièces n° 7 et 8 des débats.

INFIRME la décision déférée sur les modalités du droit de visite du père,

Statuant à nouveau de ce chef,

FIXE, pendant une durée de 6 mois, à compter de la première rencontre effective avec les enfants, le droit de visite de M. [E] de la façon suivante :

- Au Point Rencontre du [Localité 4],

les premier et troisième samedis de chaque mois de 14h à 16h, y compris pendant les vacances scolaires de Pâques et du mois de juillet, avec autorisation de sortie dans l'enceinte du parc entourant la structure d'accueil ;

DIT que, passé ce délai, la partie la plus diligente pourra saisir le juge aux affaires familiales pour qu'il soit statué à nouveau au vue de l'évolution de la situation ;

CONFIRME pour le surplus,

Y ajoutant,

DIT que la présente décision sera communiquée au juge des enfants du tribunal pour enfants de Bordeaux (cabinet 3, Madame Lajoie),

CONDAMNE M. [E] aux dépens d'appel.

Signé par Hélène MORNET, Présidente de la chambre et par Véronique DUPHIL, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre famille
Numéro d'arrêt : 23/00209
Date de la décision : 04/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-04;23.00209 ?
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