COUR D'APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 16 mars 2023
(Rédacteur : Catherine LEQUES, conseillère)
N° RG 22/02738 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MXQH
[B], [M] [I] VEUVE [Z]
c/
[X] [W]
Société [17] - SERVICE CLIENTS
Société [21]
Société [16]
Société [13]
SIP [Localité 27] [Localité 29]
Mutualité SOCIALE AGRICOLE (MSA)
Société [11]
Société [10]
S.A. [14]
Nature de la décision : SURENDETTEMENT
Notifié par LRAR le :
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 mai 2022 (R.G. 21/01635) par le Juge des contentieux de la protection de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 03 juin 2022
APPELANTE :
Madame [B], [M] [I] VEUVE [Z]
née le 19 Juin 1932 à [Localité 25]
de nationalité Française
Retraité(e), demeurant [Adresse 23]
Représentée par Me Valérie JANOUEIX de la SCP BATS - LACOSTE - JANOUEIX, avocat au barreau de BORDEAUX
régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception, non comparante,
INTIMÉS :
Monsieur [X] [W]
né le 12 Décembre 1983 à [Localité 29]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 7]
Représenté par Me Arnaud LATAILLADE de la SCP LATAILLADE-BREDIN, avocat au barreau de LIBOURNE, substtué par Me POPA
Société [17] - SERVICE CLIENTS Ref: 5023953960
[18], [Adresse 1]
Société [21] Ref: 2067500003 - Créance cédée par [12],
Surendettement- [Adresse 9]
Société [16] ref:212160664/V011603465
[22]- service surendettement [Adresse 5]
Société [13] ref:149403883300121060730,
[28] [Adresse 15]
SIP [Localité 27] [Localité 29] ref: IR 11-12+ TH 12 , demeurant [Adresse 6]
Mutualité SOCIALE AGRICOLE (MSA) Ref: 1831233522042
[Adresse 3]
Société [11] Ref: 41074652029002
[26], [Adresse 4]
Société [10] Ref: 00050165534467,
[20], [Adresse 8]
S.A. [14] Ref: SD 00069243137
[Adresse 2]
régulièrement convoqué(e)s par lettre recommandée avec accusé de réception, non comparants,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 09 février 2023 en audience publique, devant Madame Catherine LEQUES, conseillère chargé d'instruire l'affaire, qui a retenu l'affaire
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Paule POIREL, Présidente
Madame Catherine LEQUES, Conseillère
Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Chantal BUREAU
ARRÊT :
- réputé contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 12 mai 2021 1a commission de surendettement des particuliers de la Gironde a imposé des mesures de traitement de la situation de surendettement de M [W], consistant en un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire .
Statuant sur le recours de Mme [Z] , le juge des contentieux de la protection en matière de surendettement du tribunal judiciaire de Bordeaux par jugement du 17 mai 2022 a rejeté le recours et confirmé les mesures imposées,
Par déclaration reçue au greffe le 3 juin 2022, Mme [Z] a formé un appel .
Les parties ont été convoquées à l'audience du 15 septembre 2022.
Après plusieurs renvois l'affaire a été retenue le 9 février 2023.
Par conclusions soutenues à l'audience, Mme [Z] demande de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté le recours de Mme [Z] et prononcé le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire
- statuant à nouveau :
* à titre principal : prononcer la déchéance de M [W] du bénéfice de la procédure de surendettement
* subsidiairement : déclarer M [W] irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement
* plus subsidiairement et avant dire droit : enjoindre à M [W] de communiquer :
- une copie des relevés des comptes bancaires ouverts à son nom et/ou celui de Mme [W]
du 1 janvier 2019 à ce jour
-la liste des comptes ouverts au nom de M [W] et de Mme [W] tenue par le Ficoba
-la facture d'acquisition du véhicule 5008 Peugeot immatriculé [Immatriculation 19].
Elle rappelle que par décision du 14 avril 2022, la cour d'appel de Bordeaux a déclaré Mme [E] , épouse de M [W], irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement.
Elle fait valoir que le couple [W] [E] s'est abstenu de tout paiement du loyer depuis 2015, au mépris des différentes décisions rendues et des mesures recommandées et notamment du premier moratoire de 24 mois qui leur a été accordé initialement, et n'ont quitté les lieux que le 8 avril 2019 avec une dette de loyer de 61 351,86 €.
Selon elle en outre, les budgets présentés par le couple sont incohérents :
- ni les revenus du couple ni ses charges ne sont clairement justifiés
- le couple a fait le choix de maintenir les enfants dans des établissements éloignés de leur nouveau domicile.
Par conclusions soutenues à l'audience, M [W] demande de :
- confirmer le jugement
- débouter Mme [Z] de ses demandes
- la condamner aux dépens.
Il rappelle qu'après un premier dépôt de dossier de surendettement par le couple, la commission de surendettement n'a pas accepté qu'il dépose un nouveau dossier avec Mme [E] en raison de sa qualité de gérant d'une société qui a été placée en liquidation judiciaire le 31 juillet 2019, de sorte qu'il a déposé à son tour une demande de traitement de sa situation de surendettement .
Il soutient que :
- la recevabilité de sa demande de traitement de sa situation de surendettement ne peut plus être contestée
- le couple à partir de 2014 a saisi les services sociaux d'une demande de logement social qui n'a pas abouti
- la dette de loyer est la seule à laquelle le couple n'a pu faire face compte tenu de leurs revenus et de leurs charges
- le montant mensuel des ressources du couple est de 1756,68 € ( chiffre d'affaire déclaré par Mme [E] : 520 € et allocations familiales : 1236,68 €)
- le montant des charges est de 2445,87 €.
Bien que régulièrement convoqués et touchés par leur convocation, les autres créanciers n'ont pas comparu à l'audience.
La MSA et [24] ont indiqué par courriers reçus au greffe s'en rapporter sur la décision.
Le SIP de [Localité 27] a transmis un état des dettes de M [W] .
La société [28] a demandé par courrier la confirmation du jugement.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'article L 711-1 alinéa premier du code de la consommation dispose que le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi.
La bonne foi se présume et s'apprécie au jour où le juge statue .
Une précédente décision de recevabilité ne fait pas obstacle à une nouvelle appréciation de la bonne foi.
Les faits constitutifs de la mauvaise foi doivent encore avoir un rapport direct avec la situation de surendettement du débiteur.
Le débiteur qui ne respecte pas les mesures accessoires imposées par la commission pour en assurer la viabilité n'est pas de bonne foi.
Le 26 novembre 2013, la commission de surendettement a déclaré recevable le dossier de surendettement déposé par M et Mme [W] , qui exposaient avoir vu leurs revenus réduits de moitié depuis la perte de leurs emplois respectifs en 2012.
Un jugement de vérification de créance rendu par le tribunal d'instance de Bordeaux le 24 février 2015 a fixé le montant de la créance de Mme [Z], bailleur, à la somme de 8664,11 €.
La commission de surendettement a imposé le 2 juin 2015 des mesures consistant en une suspension de l'exigibilité des créances pendant 24 mois, après évaluation des revenus du couple avec un enfant à 1503 € et de ses charges à 2355 € ; il était précisé que l'activité de M [W] gérant de SARL, lui permettait de dégager un revenu mensuel de 1000 €.
Sur recours de Mme [Z], le tribunal d'instance de Bordeaux par jugement du 3 mars 2016 a infirmé ces mesures, dit que M et Mme [W] rembourseront leur dette envers Mme [Z] en 24 mensualités de 275 € avec un taux d'intérêt de 0 % et suspendu l'exigibilité su surplus des dettes pendant ce délai.
La cour d'appel de Bordeaux, par arrêt du 12 janvier 2017 a confirmé le jugement, au motif que M et Mme [W] ne justifiaient pas de leur situation actuelle , ne produisant pas leur déclaration des revenus 2015 ni de document portant sur leur situation respective en 2016.
Il ressort du décompte produit par Mme [Z] que de janvier 2015 à mai 2017 , seuls ont été payés deux mois de loyer en février et mars 2015 et que la dette s'élevait le 16 mai 2017 à
38 018 €.
Un arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 17 janvier 2019 a confirmé le jugement du tribunal d'instance ayant constaté la résiliation du bail d'habitation , ordonné l'expulsion de M et Mme [W] et les a condamnés à payer à Mme [Z] une indemnité d'occupation égale au montant du loyer.
M et Mme [W] ont libéré le logement de Mme [Z] le 8 avril 2019.
La dette de loyers s'élevait alors à 61 000 €.
Par jugement du 12 septembre 2019, le juge des contentieux de la protection en matière de surendettement statuant sur un recours de Mme [Z] contre une mesure de rétablissement personnel de Mme [E], a constaté que celle-ci, et donc le couple disposait d'une capacité de remboursement de 187 € par mois, en plus du paiement des charges courantes dont le loyer.
Si la situation de Mme [W] et son époux a été fluctuante depuis le dépôt du dossier en 2013 le tribunal, par deux fois, en mars 2016 et septembre 2019, a constaté l'existence d'une capacité de remboursement même minime, en tenant compte des charges courantes et notamment du loyer.
Or, M [W] non seulement n'a payé aucune des mensualités de 275 € mises à sa charge par le jugement du 3 mars 2016 confirmé par la cour d'appel pour apurer sa dette envers Mme [Z], mais encore n'a jamais repris le paiement même partiel du loyer courant à Mme [Z] entre le mois de mars 2016 et son départ des lieux loués.
La dette de loyer envers Mme [Z] n'a fait que croître depuis la première demande de traitement de la situation de surendettement, alors que le loyer est une charge prioritaire, et que les mesures prises par la commission de surendettement et le tribunal sont conditionnées au paiement régulier de cette charge, ce dont les débiteurs sont toujours informés.
M [W] a , avec son épouse, manifestement depuis le premier dépôt du dossier devant la commission de surendettement fait délibérément le choix de ne plus payer son loyer à Mme [Z], même pendant le moratoire accordé en 2016, aggravant ainsi son endettement.
Il ne justifie avoir déposé une demande de logement social qu'à partir de mars 2018.
La mauvaise foi de M [W] est ainsi caractérisée.
Il est donc irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de sa situation de surendettement , ce qui sera constaté par infirmation du jugement.
M [W] sera condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement
Statuant à nouveau
Déclare M [W] irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement
Yajoutant
Condamne M [W] aux dépens d'appel
L'arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, Présidente et par Madame Chantal BUREAU, greffier auquel il a été remis la minute signée de la décision.
Le Greffier La Présidente