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15/03/2023 | FRANCE | N°19/06205

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 15 mars 2023, 19/06205


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 15 MARS 2023







PRUD'HOMMES



N° RG 19/06205 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LKRV

















SAS BOURSE DE L'IMMOBILIER



c/



Madame [I] [Y] [S] [B] [C] épouse [P]

















Nature de la décision : AU FOND

















Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 octobre 2019 (R.G. n°F 18/00480) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 26 novembre 2019,





APPELANTE :

SAS Bourse de l'Immobilier, agissant en l...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 15 MARS 2023

PRUD'HOMMES

N° RG 19/06205 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LKRV

SAS BOURSE DE L'IMMOBILIER

c/

Madame [I] [Y] [S] [B] [C] épouse [P]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 octobre 2019 (R.G. n°F 18/00480) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 26 novembre 2019,

APPELANTE :

SAS Bourse de l'Immobilier, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 414 854 216

représentée par Me François PETIT de la SELAS FPF AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Madame [I] [Y] [S] [B] [C] épouse [P]

née le 13 Avril 1954 à ABBEVILLE (80100) de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Jérôme DELAS de la SELARL ATELIER AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 janvier 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Hylaire, présidente chargée d'instruire l'affaire, et Madame Sylvie Tronche, conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [I] [C], épouse [P], née en 1954, a été engagée en qualité de négociatrice immobilière VRP par la SAS Bourse de l'Immobilier par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 juillet 2000.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de l'immobilier, administrateurs de biens, sociétés immobilières et agents immobiliers.

Mme [P] a été promue responsable de l'agence de [Localité 2] le 1er décembre 2001 puis est devenue cadre le 14 février 2005.

Le 30 avril 2017, Mme [P] a fait valoir ses droits à la retraite.

Par lettre du 2 janvier 2018, Mme [P] a contesté les modalités de calcul utilisées par la société pour calculer le montant des commissions dues en vertu du droit de suite prévu par l'article 10 de l'avenant n°31 du 15 juin 2006 de la convention collective applicable.

La société a opposé un refus à sa demande en paiement.

Le 30 mars 2018, sollicitant le paiement la somme de 9.713,29 euros outre les congés payés afférents ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive, Mme [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 18 octobre 2019, a :

- condamné la société Bourse de l'Immobilier à verser à Mme [P] les sommes de :

* 9.713,29 euros au titre du droit de suite,

* 971,33 euros au titre des congés payés afférents,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit conformément aux dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois,

- ordonné la délivrance des bulletins de paie conformes au jugement,

- débouté Mme [P] de sa demande de dommages intérêts pour résistance abusive,

- condamné la société Bourse de l'Immobilier à verser à Mme [P] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [P] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Bourse de l'Immobilier de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Bourse de l'Immobilier aux dépens.

Par déclaration du 26 novembre 2019, la société Bourse de l'Immobilier a relevé appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe adressée aux parties le 28 octobre 2019.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 3 août 2020, la société Bourse de l'Immobilier demande à la cour de déclarer recevable et bien fondé son appel, de déclarer mal fondé l'appel incident de Mme [P] et de :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bordeaux le 18 octobre 2019, en ce qu'il a :

* condamné la société Bourse de l'Immobilier à verser à Mme [P] les sommes de 9.713,29 euros au titre du droit de suite et 971,33 euros au titre des congés payés afférents,

* ordonné la délivrance des bulletins de paie conformes au jugement,

* condamné la société Bourse de l'Immobilier à verser à Mme [P] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la société Bourse de l'Immobilier de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société Bourse de l'Immobilier aux dépens.

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [P] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- débouter Mme [P] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Mme [P] à payer à la société Bourse de l'Immobilier la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [P] aux dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 18 mars 2021, Mme [P] demande à la cour de':

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* condamné la société Bourse de l'Immobilier à lui verser au titre du droit de suite article 10 de l'avenant n°31 du 15 juin 2006 de la convention collective de l'Immobilier, la somme de 9.713,29 euros ainsi que celle de 971,33 euros pour les congés payés correspondants,

* ordonné la délivrance des bulletins de salaire conformes à la condamnation ci-dessus,

- réformer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau :

* condamner la société Bourse de l'Immobilier à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive sur le fondement des articles 1217 et suivants du code civil,

* la condamner au versement de la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les intérêts porteront eux-mêmes intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner la société Bourse de l'Immobilier aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 décembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 17 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En vertu de l'article 10 de l'avenant n° 31 du 15 juin 2006 relatif au statut du négociateur immobilier, attaché à la convention collective nationale de l'immobilier, de l'immobilier, administrateurs de biens, sociétés immobilières et agents immobiliers, le négociateur immobilier, VRP ou non, bénéficie d'un droit de suite concernant les commissions qu'il aurait perçues dans le cas où le contrat de travail n'aurait pas expiré, sous les 2 conditions cumulatives suivantes :

- ces affaires devront être la suite et la conséquence du travail effectué par lui pendant l'exécution de son contrat de travail ;

- ces affaires devront avoir été réalisées dans la durée du droit de suite étant entendu que celui-ci ne saurait porter sur des affaires pour lesquelles l'employeur lui-même n'aurait pas effectivement perçu les honoraires correspondants.

Le montant des commissions dues au titre du droit de suite sera calculé en fonction des honoraires définitivement perçus par l'employeur.

Le droit de suite court à compter de l'expiration du contrat. Sa durée est déterminée au contrat et ne peut en tout état de cause être inférieure à 6 mois.

L'employeur remet un état détaillé des comptes au négociateur immobilier à la date de fin du contrat de travail. Cet état détaillé des comptes donne la liste des affaires en cours pour lesquelles le négociateur immobilier pourrait prétendre à commission en cas de réalisation. Le solde de tout compte se rapportant à la période travaillée est établi à l'expiration de ce droit de suite.

***

Pour voir infirmer la décision déférée, la société appelante fait valoir que le contrat de travail de Mme [P] prévoyait que sa rémunération était ventilée comme suit :

- salaire minimum garanti s'élevant en dernier lieu à la somme de 2.100 euros bruts,

- paiement de commissions en fonction du chiffre d'affaires réalisé,

- commission de 3% sur le chiffre d'affaires réalisé par l'agence.

Elle déduit ensuite des termes de l'avenant que le droit de suite 'concernant les commissions qu'il aurait perçues dans le cas où le contrat de travail n'aurait pas expiré' doit être calculé après déduction du salaire minimum garanti et invoque plusieurs décisions rendues par des juridictions de première instance et d'appel ayant avalisé ces modalités de calcul, soutenant que Mme [P] ne peut valablement se référer à un arrêt isolé rendu par la présente cour d'appel le 12 novembre 2014 pas plus qu'à des décisions rendues par le conseil de prud'hommes de Bordeaux, concernant M. [O] et M. [R] [N] dont elle a interjeté appel.

Elle ajoute que, contrairement à ce qu'a retenu le conseil, la convention collective prévoit un salaire minimum garanti et qu'il convient donc bien de distinguer ce salaire des commissions, le droit de suite ne pouvant s'assimiler à un droit au maintien de la rémunération pendant six mois.

Mme [P] conclut à la confirmation de la condamnation de la société appelante invoquant la motivation retenue par la présente cour dans un arrêt rendu le 12 novembre 2014 opposant M. [R] [N] à la société appelante, qui a acquiescé à la décision, d'où il s'évince que le salaire minimum conventionnel ne peut être déduit des commissions dues en vertu du droit de suite.

***

Il sera observé à titre liminaire que la seconde procédure d'appel à laquelle se réfère la société appelante à savoir le litige l'ayant opposé à M. [O] a fait l'objet d'un arrêt rendu le 29 septembre 2021 par la présente cour qui a fait droit à la demande du salarié.

Cet arrêt n'a pas fait l'objet d'un pourvoi.

L'article 10 de l'avenant instaure un droit distinct de celui normal à rémunération minimale, droit qui cesse à l'expiration du contrat alors que le droit à commissions survit dans la limite de la période de six mois.

Dans le cours de l'exécution du contrat, ce salaire minimum est déduit du total des commissions dues au négociateur, s'analysant en réalité comme une avance sur commissions lorsque le montant de celles-ci excède celui du salaire minimum garanti, en sorte que le salarié perçoit en réalité l'intégralité des commissions dues.

En application de l'article 10 de l'avenant, après la rupture du contrat, le salarié doit percevoir les commissions qui lui auraient été versées si le contrat n'avait pas pris fin, soit l'intégralité des sommes dues, la déduction du salaire minimum garanti appliqué durant la relation contractuelle n'étant pas prévue par les conditions prévues par ce texte.

Par conséquent, et au vu du décompte établi par l'intimée, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Bourse de l'Immobilier au paiement à Mme [P] des sommes de 9.713,29 euros au titre du droit de suite et de 971,33 euros pour les congés payés afférents.

***

Les sommes réclamées par l'intimée sont dues depuis octobre 2017 soit près de 6 ans et demi et présentent un caractère alimentaire.

Au regard du montant de ces sommes, des tentatives de règlement amiable du litige effectuées par Mme [P] avant d'introduire une action judiciaire, la résistance de la société à l'exécution des obligations lui incombant en vertu de la convention collective applicable doit être qualifiée d'abusive et il sera alloué à Mme [P] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la privation pendant plusieurs années du bénéfice des sommes dues.

***

La société appelante, partie perdante à l'instance, sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à Mme [P] la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel en sus de la somme allouée par les premiers juges sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté Mme [I] [P] de sa demande à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

Infirmant la décision de ce chef et y ajoutant,

Condamne la société Bourse de l'Immobilier à payer à Mme [I] [P] les sommes suivantes :

- 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

Condamne la société Bourse de l'Immobilier aux dépens.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 19/06205
Date de la décision : 15/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-15;19.06205 ?
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