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13/02/2023 | FRANCE | N°21/04690

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 13 février 2023, 21/04690


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 13 FEVRIER 2023









N° RG 21/04690 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MI3C







[M] [J]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 33063/02/21/18619 du 02/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)



c/



S.A. [H]



























Nature de la décision : AU FOND

























Grosse délivrée le : 13 février 2023



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 09 juillet 2021 par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (RG : 20/01176) su...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 13 FEVRIER 2023

N° RG 21/04690 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MI3C

[M] [J]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 33063/02/21/18619 du 02/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c/

S.A. [H]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le : 13 février 2023

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 09 juillet 2021 par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (RG : 20/01176) suivant déclaration d'appel du 13 août 2021

APPELANTE :

[M] [J]

née le 09 Février 1966 à [Localité 4] ([Localité 4])

de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Véronique REIX, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

S.A. [H] prise poursuites et diligences de son Représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 1]

Représentée par Me Michel PUYBARAUD de la SELARL MATHIEU RAFFY - MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX

Représentée par Me Mathieu RAFFY de la SELARL MATHIEU RAFFY - MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 janvier 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Roland POTEE, président, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Sylvie HERAS DE PEDRO, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 31 janvier 2013, la SA d'HLM [H] a consenti un bail d'habitation à Mme [M] [J] et M. [E] [D] (décédé en 2013), portant sur un logement situé dans le lotissement [Adresse 2]) moyennant un loyer révisable de 513,65 €, outre une provision mensuelle sur charges de 74,94€.

Depuis 2016, [H] a été destinataire de plaintes du voisinage concernant des tapages et des voies de faits imputés aux locataires du n°[Adresse 2]. Le bailleur a mis en demeure [M] [J] de cesser les troubles à plusieurs reprises.

Face à la persistance des plaintes du voisinage à l'encontre de la locataire du n°5, [H], par acte introductif d'instance du 12 juin 2020, fait assigner [M] [J] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bordeaux (pôle protection et proximité) à l'audience du 28 juillet 2020, aux fins notamment de voir constater les manquements de Mme [J] à ses obligations, notamment celle de jouir paisiblement des lieux loués, ordonner la résiliation du contrat de bail consenti à Mme [J] et son expulsion et condamner celle-ci au paiement d'une indemnité d'occupation.

Par jugement du 9 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- prononcé la résiliation du bail conclu entre la SA d'HLM [H] et [M] [J] et [E] [D] le 31 janvier 2013, aux torts du locataire,

- condamné [M] [J] et tous occupants de son chef à quitter les lieux situés au [Adresse 2],

- dit qu'à défaut pour [M] [J] de libérer volontairement les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec si nécessaire le concours et l'assistance de la force publique deux mois après la délivrance d'un commandement de quitter les lieux conformément aux dispositions des articles L.411-1 et L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution,

- rappelé que le sort des meubles en cas d'expulsion est régi par les articles L.433-1, L.433-2 et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution lesquels attribuent compétence au juge de l'exécution,

- fixé le montant de l'indemnité d'occupation due à compter de ce jour et jusqu'à libération parfaite des lieux, au montant du loyer révisable selon les conditions contractuelles et de la provision sur charges 588,59 € par mois à la date de l'audience, augmenté de la régularisation au titre des charges sur production de justificatifs et condamné [M] [J] à son paiement,

- condamné [M] [J] à verser à la SA d'HLM Domofrance la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné [M] [J] aux dépens,

- rappelé que l'exécution provisoire de la décision est de droit.

Mme [M] [J] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 13 août 2021 et par conclusions déposées le 19 décembre 2022, elle demande à la cour de :

- déclarer recevable son appel,

- infirmer le jugement déféré à la Cour en ce qu'il a :

* prononcé la résiliation du bail conclu entre la SA d'HLM [H] et [M] [J] et [E] [D] le 31 janvier 2013, aux torts du locataire,

* condamné [M] [J] et tous occupants de son chef à quitter les lieux situés au [Adresse 2],

* dit qu'à défaut pour [M] [J] de libérer volontairement les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec si nécessaire le concours et l'assistance de la force publique deux mois après la délivrance d'un commandement de quitter les lieux conformément aux dispositions des articles L.411-1 et L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution,

* rappelé que le sort des meubles en cas d'expulsion est régi par les articles L.433-1, L.433-2 et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution lesquels attribuent compétence au juge de l'exécution,

* fixé le montant de l'indemnité d'occupation due à compter de ce jour et jusqu'à libération parfaite des lieux, au montant du loyer révisable selon les conditions contractuelles et de la provision sur charges 588,59 € par mois à la date de l'audience, augmenté de la régularisation au titre des charges sur production de justificatifs et condamné [M] [J] son paiement,

* condamner [M] [J] à verser à la SA d'HLM Domofrance la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné [M] [J] aux dépens,

* rappelé que l'exécution provisoire de la décision est de droit.

Statuant à nouveau,

- débouter la Société [H] de l'ensemble de ses demandes,

- la condamner à payer à Mme [M] [J] la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A ce titre elle fait valoir notamment que :

- les faits dénoncés sont anciens ;

- les troubles allégués ne concernent pas Mme [M] [J] ;

- la société [H] ne démontre pas le lien entre les troubles constatés et le manquement imputé à Mme [M] [J] à son obligation d'user paisiblement de la chose louée.

Par conclusions déposées le 23 décembre 2022, la société [H] demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Bordeaux en date du 9 juillet 2021,

Y ajoutant,

- condamner Mme [J] au paiement d'une indemnité de 2.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- condamner Mme [J] aux entiers dépens de la procédure intentée en cause d'appel.

A ce titre et en réponse au moyens développés par l'appelante, elle fait valoir notamment que :

- les nuisances dénoncées persistent ;

- les troubles allégués concernent des personnes que Mme [J] héberge ;

L'affaire a été fixée à l'audience du 9 janvier 2023.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 26 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la résiliation du bail

Selon les articles 1728 et 1729 du code civil, le locataire est tenu d'user de la chose louée raisonnablement et s'expose à la résiliation de son bail en cas de manquement à son obligation.

Il est également tenu de répondre des dégradations et des pertes qui arrivent par le fait des personnes de sa maison, au sens de l'article 1735 du code civil.

Aux termes de l'articler 7 b) de la loi du 6 juillet 1989 le locataire est obligé d'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location.

Il est responsable à ce titre des actes de nuisance troublant la tranquillité du voisinage commis par les occupants de son chef.

Il est constant que Mme [M] [J] loue un logement dans le lotissement [Adresse 2], que son bailleur [H] a été destinataire de plaintes de voisins dénonçant les troubles causés par la famille [J] au sein du lotissement et qu'après avoir mis en demeure à sept reprises Mme [J] de faire cesser les troubles qui lui sont imputés, a fait assigner cette dernière, le 12 juin 2020, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judicaire de Bordeaux, qui a rendu sa décision le 9 juillet 2021.

Le premier juge, qui a apprécié la situation au jour où il était appelé à statuer, a caractérisé les manquements de Mme [J] à son obligation de jouissance paisible et prononcé la résiliation de son bail.

Devant la cour d'appel Mme [J] fait valoir que les troubles du voisinage dénoncés sont désormais anciens et qu'ils sont imputables à des personnes qu'elle n'héberge pas ou plus, à l'instar de son petit-fils M. [Y] [J], auquel le premier juge a attribué les troubles de voisinage les plus graves et qui résiderait aujourd'hui à Cenon avec sa compagne, Madame [U].

L'appelante produit une attestation non datée de Mme [U] dans laquelle celle-ci certifie sur l'honneur que M. [Y] [J] vit chez elle. De son côté, [H] verse aux débats une ordonnance d'homologation de CRPC, datée du 21 juillet 2022, relatives à des dégradations et des violences commises par M. [Y] [J] et dans laquelle il est indiqué que celui-ci demeure au [Adresse 2], c'est-à-dire au domicile de l'appelante. Il y a donc lieu de considérer qu'il est toujours hébergé par sa grand-mère.

Or, M. [Y] [J] est depuis plusieurs années visé par les plaintes des résidents du lotissement, adressées tantôt à [H], tantôt à la mairie de [Adresse 2], qui font état des comportements inciviques, voire délictuels, du susnommé. Outre le fait que Mme [J] reconnait elle-même que son petit-fils [Y] a participé au cambriolage du domicile d'un résident en 2018, il ressort d'un procès-verbal d'audition de victime du 11 août 2022 qu'il lui est également reproché des dégradations volontaires de biens et des menaces de violences à l'encontre d'une résidente. Si Mme [J] tient à préciser dans ses écritures qu'elle a tout fait pour remettre son petit-fils 'dans le droit chemin', il lui est toutefois rappelé que les locataires sont responsables des nuisances et actes de malveillance commis par les personnes qu'ils hébergent, quand bien même ceux-ci échapperaient de façon totale et définitive à leur autorité.

En outre, l'intimé produit de nouveaux courriels adressés à [H] durant l'année 2022 (les 15 mai, 19 mai, 31 mai et 9 septembre), dans lesquels deux voisins se plaignent de regroupements et de nuisances sonores 'chez Mme [J]' ou encore 'dans la maison de Mme [J]'. Ces témoignages s'ajoutent aux dizaines d'autres, ainsi qu'à plusieurs dépôts de plainte visant les membres de la famille de Mme [J], hébergés fût-ce temporairement dans les lieux loués.

De son côté, Mme [J] produit deux attestations peu étayées, l'une de M. [K] [W] la décrivant comme une voisine 'calme et sans problèmes', l'autre de Mme [G] [A] indiquant qu'elle n'a 'jamais eu de problème avec elle ou ses enfants' et qu'elle 'ne fait pas autant de bruits comme l'indique les plaintes'. Cependant, ces seules attestations ne permettent pas contrebalancer les dizaines de témoignages de voisins rapportés par l'intimé, qui mettent en cause Mme [J] et, plus directement, les personnes qu'elle héberge.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les troubles du voisinage n'ont pas cessé et qu'ils sont liées à des manquements graves et réitérés à la jouissance paisible des lieux loués, du fait des personnes hébergées par Mme [J].

Pour ce motif auquel s'ajoutent ceux du tribunal et que la cour adopte dans leur intégralité, le jugement sera confirmé en ce qu'il a acceuilli les demandes de [H] et prononcé la résiliation du bail de Mme [J].

Sur les autres demandes

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Mme [M] [J] qui succombe en supportera la charge.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Au regard de la situation économique de l'appelante, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, il convient de limiter l'indemnité à laquelle l'intimée a droit au titre de ses frais irrépétibles. Mme [J] sera donc condamnée à lui verser la somme de 1500 euros.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de grande instance de Bordeaux le 7 juillet 2021.

Y ajoutant,

Condamne Mme [M] [J] aux dépens,

Condamne Mme [M] [J] à verser la somme de 1500 euros à la SA [H].

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/04690
Date de la décision : 13/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-13;21.04690 ?
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