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17/01/2023 | FRANCE | N°22/01841

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 17 janvier 2023, 22/01841


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 17 JANVIER 2023



RP





N° RG 22/01841 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MU22









[Y] [X]

[U] [G]



c/



[D] [C]

CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DE BORDEAUX

























Nature de la décision : AU FOND













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Notifié aux parties par LRAR le :







Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : décision rendue le 22 mars 2022 par le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Barreau de BORDEAUX suivant appel par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 12 avril 2022





APPELANTS :



Ma...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 17 JANVIER 2023

RP

N° RG 22/01841 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MU22

[Y] [X]

[U] [G]

c/

[D] [C]

CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DE BORDEAUX

Nature de la décision : AU FOND

Notifié aux parties par LRAR le :

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : décision rendue le 22 mars 2022 par le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Barreau de BORDEAUX suivant appel par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 12 avril 2022

APPELANTS :

Maître [Y] [X], membre de la SELARL TGB

né le [Date naissance 6] 1980 à [Localité 9] (13)

de nationalité Française

Profession : Avocat

demeurant [Adresse 8]

Maître [U] [G], membre de la SELARL TGB

né le [Date naissance 7] 1975 à [Localité 11] (78)

de nationalité Française

Profession : Avocat

demeurant [Adresse 8]

régulièrement convoqués par lettre recommandée avec accusé de réception

représentés par Maître Laurène D'AMIENS de la SCP CLAIRE LE BARAZER & LAURÈNE D'AMIENS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Maître [D] [C]

Profession : Avocat

demeurant [Adresse 5]

régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception

représenté par Maître Xavier FLECHEUX, avocat au barreau de PARIS

CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DE BORDEAUX, représenté par Maître Christine MAZE, Bâtonnier de l'ordre des avocats de Bordeaux, domicilié [Adresse 4]

régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception

non représenté, non comparant,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 novembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Mme [E] [C], M. [D] [C], M. [U] [G] et M. [Y] [X], exerçaient depuis le 28 mars 2011 l'activité d'avocat en qualité d'associés au sein de la SELARL [C] [G] [X] (la SELARL TGB).

M. [D] [C] s'est retiré de cette société aux termes d'une assemblée générale extraordinaire du 8 avril 2013.

Suivant protocole d'accord transactionnel conclu le 21 janvier 2020 entre Me [E] [C], Me [U] [G], Me [Y] [X], la SELARL TGB et la SELARL [C], les associés ont organisé les modalités de leur séparation.

Reprochant à Me [E] [C] de ne pas appliquer ce protocole et une décision rendue par le bâtonnier [J] et de ne pas leur rembourser une quote-part de dette fiscale d'un montant de 17.973 euros, Me [G] et Me [X] ont saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats de Bordeaux par courrier du 24 janvier 2022.

Par courrier du 25 janvier 2022, Me [D] [C] a saisi le bâtonnier dans le cadre d'une mesure d'urgence, évoquant une difficulté relative à la reprise d'une ligne téléphonique par ses anciens associés et l'urgence à statuer.

Par courrier du 28 janvier 2022, Me [E] [C] a saisi le bâtonnier afin d'évoquer une difficulté sur l'exécution du protocole, le contrôle fiscal et un contentieux sur l'affectation de son numéro de téléphone portable.

Par décision du 22 mars 2022, le bâtonnier de l'ordre des avocats de Bordeaux a :

- constaté la conciliation des parties sur la difficulté relative à deux années de facturation non réglées par Me [E] [C] au titre de l'utilisation d'une ligne téléphonique relative à l'usage du numéro de téléphone portable [XXXXXXXX02].

- pris acte de la communication par Mes [G] et [X] des factures correspondant à l'utilisation par Me [E] [C] de la ligne téléphonique [XXXXXXXX02] avant le 1er avril 2022.

- constaté la conciliation des parties sur la difficulté relative à la compensation opérée par Me [E] [C] au titre d'une dette fiscale et d'honoraires encaissés et ce en vertu du protocole d'accord daté du 21 janvier 2020.

- décidé que la ligne téléphonique portable [XXXXXXXX03] utilisée par Me [D] [C] restera attribuée à ce dernier qui s'est engagé à régler le montant des factures à ce jour dues.

- enjoint Mes [G] et [X] de produire les factures restant dues par Me [D] [C] au titre de l'utilisation de cette ligne téléphonique et ce avant le 1er avril 2022.

- donné acte à Me [D] [C] de son engagement de régler le montant des factures dues dès leur communication par Mes [G] et [X].

- enjoint Me [D] [C] de solliciter la portabilité de son numéro téléphonique [XXXXXXXX03] auprès de son opérateur.

- enjoint Mes [G] et [X] d'accepter la demande de portabilité sollicitée par Me [D] [C].

Par courrier du 12 avril 2022 reçu au greffe le 13 avril 2022, Me [G] et Me [X] ont saisi la cour d'appel de Bordeaux d'un recours contre cette décision et par conclusions déposées le 18 novembre 2022, ils demandent à la cour de :

- les recevoir en leurs demandes et les y dire bien fondées,

- infirmer l'ordonnance d'arbitrage en date du 22 mars 2022,

Statuant de nouveau,

- constater que le titulaire de la ligne téléphonique portable [XXXXXXXX03] est la SELARL TGB,

- débouter M. [D] [C] de ses demandes reconventionnelles.

En conséquence,

- ordonner que la ligne téléphonique portable [XXXXXXXX03] utilisée par M. [D] [C] restera attribuée à la SELARL TGB,

- enjoindre et condamner sous astreinte journalière de 150 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, à M.[D] [C] de restituer à la SELARL TGB, par un dépôt au siège de ladite société, la carte SIM et le téléphone mobile affectés à la ligne téléphonique ([XXXXXXXX03]),

- enjoindre et condamner M. [D] [C], sous astreinte journalière de 150 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, de rembourser à la SELARL TGB le montant des factures émises au titre de l'utilisation frauduleuse de cette ligne téléphonique à compter du 1er mars 2022 jusqu'à la date de remise effective de la carte SIM et du mobile affectés à la ligne téléphonique, à savoir la somme de 951,77 € HT soit 1.142 € TTC,

- condamner M.[D] [C] à verser à M. [G] et [X] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 17 novembre 2022, M. [D] [C] demande à la cour de :

- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel interjeté, au regard de l'article 31 du code de procédure civile

- débouter MM.[G] et [X], avocats au barreau de Bordeaux, de l'ensemble de leurs demandes,

- confirmer les termes de la décision entreprise du 22 mars 2022

- y ajoutant, condamner MM.[G] et [X] à autoriser auprès de l'opérateur téléphonique ORANGE le transfert du numéro de téléphone utilisé par [D] [C], et ce, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

- condamner MM.[G] et [X] à payer à M.[C] la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts à raison de leur résistance manifestement abusive,

- les condamner au paiement de la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 22 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le litige soumis à la cour ne porte plus que sur la question de l'attribution de la ligne téléphonique portable n°[XXXXXXXX03] que [D] [C] utilisait depuis de nombreuses années dans le cadre de ses fonctions d'avocat, soit comme associé au sein de la SELARL TGB formée en mars 2011 soit comme collaborateur après le retrait de M. [C] en avril 2013.

La difficulté provient de la scission de la SELARL TGB intervenue en 2019, les époux [C] constituant une SELARL [C] devenue associée de la SELARL TGB et s'en retirant au 31 décembre 2019 dans des conditions organisées par un protocole conclu le 21 janvier 2020 qui ne vise pas expressément le sort de la ligne téléphonique portable utilisée par [D] [C].

Les appelants soutiennent qu'il résulte nécessairement des termes du protocole transactionnel du 21 janvier 2020 que la SELARL [C] devait remettre à la SELARL TGB l'ensemble des éléments matériels et immatériels rattachés à celle ci, comprenant les téléphones portables des anciens associés, qu'au regard des dispositions contractuelles et des dispositions légales en matière de télécommunication, la SELARL TGB est titulaire de la ligne téléphonique

litigieuse et que la décision dont appel est dépourvue de tout fondement juridique, la référence faite à la nécessaire protection de la confidentialité et du secret professionnel attachés aux différentes activités de M.[D] [C] étant inopérante.

Celui ci, qui précise avoir réglé en cause d'appel, les factures présentées afférentes à la ligne litigieuse, relève que le protocole du 21 janvier 2020 ne vise pas expressément le sort de la ligne téléphonique portable qu'il utilise, que les appelants ne disposent d'aucun intérêt moral ou matériel qui justifierait l'attribution de son numéro de téléphone portable si ce n'est la volonté manifeste de lui nuire en le privant de la continuité de l'utilisation de son numéro de téléphone dont il a l'usage exclusif depuis de longues années.

S'il est exact que le protocole transactionnel conclu le 21 janvier 2020 ne vise pas spécialement le sort des lignes téléphoniques portables utilisées par les associés de la SELARL [C], associée retrayante, il comporte néanmoins des dispositions qui excluent la conservation par les consorts [C], après le retrait de la SELARL [C], des moyens matériels mis à leur disposition par la SELARL TGB.

C'est ainsi que :

- l'article 2 du protocole prévoit la remise à la SELARL TGB des moyens de paiement détenus sur tout compte ouvert à son nom

- l'article 12 précise le modèle de lettre d'information que l'associé retrayant adressera à ses clients pour lesquels il intervient, mentionnant l'adresse professionnelle, et les coordonnées de Mme [E] [C] avec son téléphone n°[XXXXXXXX01], sans mention du numéro de téléphone portable qu'elle ou son conjoint utilisait dans le cadre de leurs fonctions au sein de la SELARL TGB

- l'article 16 précise, au chapitre des effets personnels, qu'à la suite du déménagement de la SELARL TGB [Adresse 8], l'associé retrayant pourra conserver sans indemnité, les bureaux et mobiliers mis à sa disposition par la société et ceux utilisés par ses collaborateurs demeurés [Adresse 10], les matériels informatiques demeurés à cette dernière adresse et détenus par la SELARL dans le cadre des contrats de location en cours étant repris par elle

- l'article 17 organise les transferts de correspondance, courriers postaux et courriel et téléphone en prévoyant seulement sur ce dernier point, un renvoi automatique d'appel de la ligne de la société selon un message mis en place auprès d'ORANGE, maintenu jusqu'en juin 2020.

Il résulte de ces dispositions organisant le maintien ou la remise des moyens matériels utilisés par l'associée retrayante, incluant donc les associés de la SELARL [C], qu'il n'a nullement été prévu la conservation par ceux ci des lignes téléphoniques portables qu'ils utilisaient au sein de la SELARL TGB, comme le montre en particulier la seule référence à une ligne de téléphone fixe dans la lettre d'information adressée aux clients conservés par la SELARL [C].

Par ailleurs, l'intimé n'élève aucune contestation sur le fait que la SELARL TGB est bien la seule attributaire de la ligne de téléphone portable dont il revendique l'utilisation, comme le montrent au surplus les factures téléphoniques qu'il a réglées en cause d'appel, après que les appelants les aient produites, en exécution de la décision entreprise.

Enfin, M.[C] ne prétend pas non plus devant la cour que la conservation de l'usage de la ligne litigieuse par la SELARL TGB pourrait nuire à la confidentialité et au secret professionnel attachés à ses activités, comme l'a relevé à tort la décision attaquée alors que le secret professionnel couvrait les activités d'avocat de M.[C] qu'il exerçait pour le compte de la SELARL TGB et que ce secret s'étendait à l'ensemble de ses membres, ainsi qu'il est dit à l'article 2.3 du règlement intérieur national de la profession d'avocat .

La décision entreprise doit ainsi être réformée et il sera donc fait droit à la demande de restitution sous astreinte du téléphone mobile et de sa carte SIM dans les termes du dispositif.

M. [C] ayant réglé les factures courant jusqu'en février 2022, il reste redevable des factures suivantes, produites par les appelants en pièce 12, s'élevant à 951,77€ HT soit 1.142 € TTC, du 1er mars au 31 octobre 2022, outre celles dues jusqu'à la restitution ordonnée plus haut de sorte qu'il sera également fait droit à la demande en paiement des appelants sans qu'il soit utile d'ordonner une astreinte de ce chef.

Les circonstances ne justifient pas l'octroi d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme la décision entreprise en ce qu'elle a :

- décidé que la ligne téléphonique portable [XXXXXXXX03] utilisée par Me [D] [C] restera attribuée à ce dernier

- enjoint Me [D] [C] de solliciter la portabilité de son numéro téléphonique [XXXXXXXX03] auprès de son opérateur.

- enjoint Mes [G] et [X] d'accepter cette demande de portabilité.

Statuant à nouveau dans cette limite :

Dit que la ligne téléphonique portable [XXXXXXXX03] utilisée par M. [D] [C] restera attribuée à la SELARL TGB,

Condamne M. [D] [C] à restituer à la SELARL TGB, par un dépôt au siège de ladite société, la carte SIM et le téléphone mobile affectés à la ligne téléphonique [XXXXXXXX03], dans les 15 jours suivant la signification du présent arrêt, sous astreinte de 100 € par jour de retard pendant deux mois;

Condamne M. [D] [C] à rembourser à la SELARL TGB les factures émises au titre de l'utilisation de cette ligne téléphonique du 1er mars 2022 au 31 octobre 2022 soit la somme de 951,77 € HT ou 1.142 € TTC et les factures dues pour l'utilisation de la ligne jusqu'à la date de remise effective de la carte SIM et du mobile.

Dit n'y avoir lieu à indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [D] [C] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01841
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;22.01841 ?
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