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17/01/2023 | FRANCE | N°21/05969

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 17 janvier 2023, 21/05969


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 17 JANVIER 2023



RP





N° de rôle : N° RG 21/05969 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MMRI









SARL TROISAIR venant aux droits de la société CABESC INVESTISSEMENT



c/



Société PEEK & CLOPPENBURG KG

























Nature de la décision : AU FOND




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Notifié aux parties par LRAR le :





Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : décision rendue le 05 octobre 2021 par le Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle de [Localité 4] (OP21-0303) suivant recours en d...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 17 JANVIER 2023

RP

N° de rôle : N° RG 21/05969 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MMRI

SARL TROISAIR venant aux droits de la société CABESC INVESTISSEMENT

c/

Société PEEK & CLOPPENBURG KG

Nature de la décision : AU FOND

Notifié aux parties par LRAR le :

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : décision rendue le 05 octobre 2021 par le Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle de [Localité 4] (OP21-0303) suivant recours en date du 05 novembre 2021

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. TROISAIR venant aux droits de la société CABESC INVESTISSEMENT, agissant en la personne de son Président, M. [R] [E], domicilié ès-qualités au siège sis [Adresse 3]

représentée par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Lucie CORVISIER, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSE :

Société PEEK & CLOPPENBURG KG, société de droit étranger, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 2] (ALLEMAGNE)

non représentée, assignée selon le réglement CE n°1393/2007 du 13 novembre 2007 article 4 §3

EN PRESENCE DE :

INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE, pris en la personne de son Directeur Général domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]

régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception

représenté par Madame [M] [J], juriste, munie d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 novembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

Ministère Public :

L'affaire a été communiquée au Ministère Public qui a fait connaître son avis le 27 octobre 2022.

ARRÊT :

- par défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

La société Cabesc Investissement a déposé, le 2 novembre 2020, la demande d'enregistrement n°469 72 99, portant sur le signe complexe JACK'S BURGERS.

Le 22 janvier 2021, la société de droit allemand Peek & Cloppenburg a formé opposition à l'enregistrement de cette marque sur la base de la marque verbale de l'Union Européenne JAKE*S déposée le 1er septembre 2015 et enregistrée sous le n°014 522 619, sur le fondement du risque de confusion.

Les 4 et 25 janvier 2021, la société déposante a procédé à des retraits partiels de la demande d'enregistrement, inscrits au registre.

La société Troisair est devenue titulaire de la demande d'enregistrement par suite d'une transmission totale de propriété n°824 966 inscrite au registre national des marques le 7 juin 2021.

Au cours de la phase d'instruction, des observations écrites ont été échangées.

Par décision du 5 octobre 2021, l'INPI a :

- reconnu l'opposition partiellement justifiée, en ce qu'elle porte sur les produits et services suivants : 'Foulards ; bandanas (foulards) ; fichus (foulards) ; bandeaux (vêtements) ; casquettes ; bonnets ; vêtements ; teeshirts ; pulls ; sweatshirts ; sweats capuche ; vestes ; chemises ; polos ; chaussettes ; chaussures ; services de vente au détail de lunettes de soleil, foulards, bandanas (foulards), fichus (foulards), bandeaux(vêtements), casquettes, bonnets, vêtements, tee-shirts, pulls, sweatshirts, sweats à capuche, vestes, chaussettes, montres ; services de conseils et de gestion de franchises; services de conseils et de gestion commerciale ; mise à disposition d'une aide à la gestion d'entreprises',

- rejeté partiellement la demande d'enregistrement pour les produits et services précités.

Par déclaration enregistrée au greffe le 5 novembre 2021, la société Troisair a formé un recours contre la décision rendue par l'INPI.

Par conclusions déposées le 24 octobre 2022, elle demande à la cour de :

- annuler la décision statuant sur l'opposition n°OPP21-0303 rendue par Monsieur le Directeur général de l'Institut National de la Propriété Industrielle, portant rejet partiel de la demande d'enregistrement de marque semi-figurative française JACK'S BURGERS n°20/4 697 299 ;

- ordonner la notification de l'arrêt à intervenir par le greffe conformément aux dispositions de l'article 441-42 du Code de la propriété intellectuelle.

La société Peek & Cloppenburg KG n'a pas déposé de mémoire en réponse. Elle a été régulièrement assignée selon les formalités de signification dans un autre Etat membre prévues par le règlement CE du 13 novembre 2007.

Par courrier transmis au greffe le 21 juin 2022, le directeur général de l'INPI a présenté ses observations, dans lesquelles il considère que les produits et services en cause sont identiques et à tout le moins similaires, que la séquence JACK'S est l'élément distinctif et dominant au sein du signe contesté et que les dénominations JAKE et JACK sont visuellement, phonétiquement et intellectuellement très proches, de sorte qu'il existe un risque de confusion entre les signes, en ce qu'ils apparaissent comme des déclinaisons appartenant à une même entité.

Le 27 octobre 2022, le ministère public a rendu un avis conforme à la décision du directeur de l'INPI.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 22 novembre 2022.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 8 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la comparaison des produits et services

La société Troisair, titulaire de la demande d'enregistrement, conteste la similarité entre les 'vêtements' désignés par la marque antérieure et les 'foulards ; bandanas (foulards) ; fichus (foulards) ; bandeaux (vêtements)', dont elle estime qu'ils s'entendent comme des accessoires de mode, qui ne sont pas des vêtements. La requérante conteste également la similarité entre les articles de 'chapellerie' désignés par la marque antérieure et les 'foulards ; bandanas (foulards) ; fichus (foulards) ; bandeaux (vêtements)', estimant que les uns sont destinés à protéger la tête et les autres à couvrir le cou. Elle conteste en outre la similarité entre les 'services de vente au détail de foulards, bandanas (foulards), fichus (foulards), bandeaux (vêtements)' visés par la demande d'enregistrement et les services de 'vente au détail, également via des sites web et le téléachat, de vêtements, chaussures, chapellerie, lunettes de soleil, joaillerie, bijouterie, horlogerie et instrument chronométriques' visés dans la marque antérieure, ainsi que la similitude entre les services de 'conseils et gestion de franchises' visés par la demande d'enregistrement et les services de 'gestion des affaires commerciales' de la marque antérieure.

Il est constant que pour apprécier la similitude entre les produits et services, il y a lieu de tenir compte de leur nature, de leur destination, de leur fonction, ainsi que de leur caractère concurrent ou complémentaire.

En l'espèce, la marque antérieure vise notamment les produits et services suivants :

'montres et autres instruments chronométriques, joaillerie, bijouterie ; vêtements, chaussures, chapellerie ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; vente au détail, également via des sites web et le téléachat, de vêtements, chaussures, chapellerie, lunettes de soleil, métaux précieux et leurs alliages, joaillerie, bijouterie, pierres précieuses, horlogerie et instruments chronométriques (...)'.

L'opposition à la demande d'enregistrement portait sur les produits et services suivants :

'Foulards ; bandanas (foulards) ; fichus (foulards) ; bandeaux (vêtements) ; casquettes ; bonnets ; vêtements ; teeshirts ; pulls ; sweatshirts ; sweats capuche ; vestes ; chemises ; polos ; chaussettes ; chaussures ; services de vente au détail de lunettes de soleil, foulards, bandanas (foulards), fichus (foulards), bandeaux (vêtements), casquettes, bonnets, vêtements, tee-shirts, pulls, sweatshirts, sweats à capuche, vestes, chaussettes, montres ; services de conseils et de gestion de franchises ; services de conseils et de gestion commerciale ; mise à disposition d'une aide à la gestion d'entreprises'.

Il est manifeste que les produits 'foulards ; bandanas (foulards) ; fichus (foulards) ; bandeaux (vêtements)', sont couverts par les produits 'vêtements' et 'chapellerie' de la marque antérieure, en ce que, s'agissant d'articles d'habillement ayant pour fonction et pour destination de recouvrir tout ou partie du corps humain, les foulards, bandanas, fichus et bandeaux entrent nécessairement dans la catégorie générale des vêtements et articles de chapellerie. Ils sont au surplus fabriqués par les mêmes réseaux de confection et distribués via les mêmes canaux de vente. Il en résulte que ces produits doivent être considérés comme identiques et à tout le moins, similaires.

En conséquence, les services de vente au détail des produits de la demande d'enregistrement contestée portent sur des produits identiques à ceux visés par les services de vente au détail de la marque antérieure, à savoir des articles d'habillement, de sorte que ces services sont similaires.

Par ailleurs, si les 'Services de conseils et de gestion de franchises' constituent, comme le soutient la société requérante, des prestations de conseils relatives à une collaboration entre le propriétaire d'une marque ou d'une enseigne et un ou plusieurs commerçants indépendants, il s'agit de services qui présentent les mêmes nature, objet et destination que les services de 'Gestion des affaires commerciales', les seconds constituant la catégorie générale comprenant les premiers. Il s'agit en effet pareillement de services permettant la mise en oeuvre de choix relatifs à des stratégies de marchés, de production et de gestion de contrats par une entreprise commerciale. Ces services sont dès lors similaires.

En conséquence, c'est à bon droit que l'INPI a retenu que les produits et services précités de la demande d'enregistrement contestée sont identiques et similaires à eux invoqués de la marque antérieure.

Sur la comparaison des signes

La comparaison des signes s'effectue par une appréciation globale fondée, s'agissant des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles, sur une impression d'ensemble, en tenant compte des éléments distinctifs et dominants des marques en cause.

La société requérante fait en l'espèce valoir que le signe JACK'S BURGERS ne produit pas une impression d'ensemble similaire au signe JAKE*S et n'en constitue pas l'imitation, notamment en ce que l'un présente une apostrophe suivi d'un 'S', ayant une fonction de conjonction entre JACK et BURGERS et l'autre présente un astérisque, ayant une fonction de renvoi. La requérante estime également que le terme BURGERS est parfaitement distinctif au regard des produits et services désignés et qu'au plan visuel comme au plan phonétique, les signes ne sont pas similaires.

1. Sur l'élément distinctif et dominant du signe contesté

Ainsi que le relève l'INPI, l'élément JACK'S au sein du signe contesté apparaît comme distinctif au regard des produits et services en cause et présente également un caractère dominant, en ce que la présentation globale du signe met très nettement cette séquence en exergue, sur une ligne supérieure, dans une police stylisée, en gras, italique et de grande taille, tandis que le terme BURGERS, bien que distinctif pour les produits et services en cause, est positionné de manière accessoire, sur une ligne inférieure, dans une police classique, droite et de petite taille. Il en résulte que, quand bien même le consommateur perçoit la séquence BURGERS, il la considérera nécessairement comme très accessoire par rapport à la séquence JACK'S.

Dès lors, les éléments distinctifs et dominants des signes en cause sont le terme JACK'S, placé en attaque du signe contesté et le terme JAKE*S, seul élément constitutif de la marque antérieure, lesquels sont très proches.

2. Sur l'impression d'ensemble des signes

Il apparaît au plan visuel que les éléments JACK'S et JAKE*S présentent la même structure, associant un prénom de quatre lettres, suivi d'une apostrophe ou d'un astérisque, puis de la lettre 'S'. Ces éléments sont donc de même longueur (cinq lettres) et présentent quatre lettres en commun placées dans le même ordre (J, A, K, S), ceci leur conférant des ressemblances visuelles incontestables, étant précisé que la calligraphie particulière dans laquelle est présentée la séquence JACK'S ne permet pas de compenser ces ressemblances et l'impression de proximité qui se dégage des signes.

Sur le plan phonétique, les séquences JACK'S et JAKE*S, qui se prononcent en un seul temps, présentent un même rythme et sont donc susceptibles d'être prononcées de manière identique par le consommateur français, auquel l'INPI souligne à juste titre qu'il convient de se référer.

Enfin, sur le plan conceptuel, les termes en cause évoquent tous deux un prénom masculin anglais, ce qui leur confère une ressemblance intellectuelle certaine. À cet égard, la requérante ne saurait valablement soutenir que la présence du vocable BURGERS au sein du signe contesté suffit à distinguer conceptuellement les signes en cause, dès lors qu'il s'agit d'un élément accessoire et que l'appréciation globale par laquelle s'effectue la comparaison des signes se fonde sur une impression d'ensemble, tenant compte des éléments distinctifs et dominants des marques en cause.

En conséquence, eu égard aux ressemblances d'ensemble entre les signes et compte-tenu de leurs éléments distinctifs et dominants, il est démontré que le signe complexe contesté JACK'S BURGERS est similaire à la marque antérieure JAKE*S.

Sur l'appréciation globale du risque de confusion

L'appréciation globale du risque de confusion implique une interdépendance des facteurs pris en compte, notamment la similitude des marques, celles des produits ou des services désignés.

L'INPI rappelle sur ce point que le risque de confusion comprend le risque d'association, qui est caractérisé si le consommateur perçoit qu'il est en présence de deux marques différentes mais leur attribue toutefois une origine commerciale commune et considère qu'elles ne sont que des déclinaisons.

En l'espèce, en considération de l'identité et de la similarité d'une partie des produits et services en présence, ainsi que des similitudes relevées entre les signes en cause, il existe un risque de confusion entre l'origine des marques pour le consommateur. En effet, le risque que les signes JAKE*S et JACK'S BURGERS apparaissent comme des déclinaisons appartenant à une même entité est manifeste, étant précisé que la calligraphie spécifique du signe second est indifférente quant à l'appréciation du risque de confusion, le consommateur étant habitué à voir les entreprises diversifier leurs activités et décliner leurs marques sous différentes formes semi-figuratives, accompagnées ou non de logos.

Par ailleurs et contrairement à ce qui est soutenu par la société requérante, l'INPI ne s'est pas contredit entre la décision déférée OP 21-0303 du 5 octobre 2021 et la décision OP-0301 du 4 octobre 2021 par laquelle il rejetait l'opposition de la société Peek & Cloppenburg KG formée sur la base de la même marque antérieure JAKE*S à l'encontre d'une demande d'enregistrement portant sur le signe verbal JACK'S BURGERS, dès lors que la présentation de ce dernier signe, verbal, ne mettait pas en exergue la séquence JACK'S par rapport au terme BURGERS, écrit dans la même police, de même taille et sur la même ligne, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, ainsi que cela a été démontré.

En conséquence de l'ensemble de ce qui précède, le recours formé par la société Troisair à l'encontre de la décision du directeur général de l'INPI devra être rejeté.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Rejette le recours formé par la SARL Troisair contre la décision du directeur général de l'INPI du 5 octobre 2021 ;

- Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception par le greffe de la cour aux parties à l'instance et au directeur général de l'INPI.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/05969
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;21.05969 ?
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