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05/01/2023 | FRANCE | N°20/02370

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 05 janvier 2023, 20/02370


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 05 JANVIER 2023









N° RG 20/02370 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LTES







S.A. CREDIT LOGEMENT



c/



[E] [D]

[U] [V]



























Nature de la décision : AU FOND























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Grosse délivrée le : 05 janvier 2023



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 avril 2020 par le Tribunal Judiciaire de BERGERAC (RG : 18/00384) suivant déclaration d'appel du 10 juillet 2020





APPELANTE :



S.A. CREDIT LOGEMENT agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité a...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 05 JANVIER 2023

N° RG 20/02370 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LTES

S.A. CREDIT LOGEMENT

c/

[E] [D]

[U] [V]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le : 05 janvier 2023

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 avril 2020 par le Tribunal Judiciaire de BERGERAC (RG : 18/00384) suivant déclaration d'appel du 10 juillet 2020

APPELANTE :

S.A. CREDIT LOGEMENT agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 3]

Représentée par Me Emmanuel JOLY de la SCP JOLY-CUTURI-WOJAS AVOCATS DYNAMIS EUROPE (ADE), avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[E] [F]

née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 4]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 6]

Représentée par Me Samantha LABESSAN GAUCHER-PIOLA, avocat au barreau de BORDEAUX

[U] [V]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4] (33), demeurant [Adresse 5]

Non représenté, assigné à personne physique

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 novembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Selon offre préalable acceptée le 10 mai 2010, la Société Générale a consenti aux époux mariés sous le régime légal de la communauté M. [U] [V] et Mme [E] [D] un crédit n°M10024907401 d'un montant en capital de 129 436,65 euros au taux nominal de 4,06%, remboursable en 240 mensualités. La banque leur a par ailleurs consenti un second prêt n°M10024907402 d'un montant en capital de 17 200 euros au taux nominal de 0%, remboursable en 72 mensualités.

Par actes du 10 février et du 20 mars 2010, le Crédit Logement s'est porté caution de ces prêts.

Le divorce des époux [N] a été prononcé le 12 juillet 2012.

A raison de la défaillance des emprunteurs, la Société Générale a prononcé le 13 août 2014 la déchéance du terme.

Le bien des ex-époux [N] a été vendu le 11 septembre 2014.

Le prix de vente du bien ne parvenant pas à solder le montant des emprunts, la caution de la société Crédit Logement a été mise en jeu. Celle-ci s'est acquittée le 7 novembre 2014 de la somme de 44 735,17 euros au titre du premier prêt et de la somme de 9.424,59 euros au titre du second prêt.

Par lettre du 29 octobre 2014, le Crédit Logement a mis en demeure M. [V] et Mme [D] de rembourser les sommes versées à la Société Générale en sa qualité de caution.

Par actes d'huissier en date des 9 et 13 avril 2018, la SA Crédit Logement a fait assigner Mme [E] [D] divorcée [V] et M. [U] [V] en paiement.

Par jugement du 14 avril 2020, le tribunal judiciaire de Bergerac a :

- Constaté la prescription de l'action de la SA Crédit Logement à l'encontre de Mme [E] [D] et M. [U] [V] ;

- Condamné la SA Crédit Logement à payer à Mme [E] [D] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Rejeté les autres chefs de demande ;

- Condamné la SA Crédit Logement aux dépens.

La SA Crédit Logement a interjeté appel par déclaration du 10 juillet 2020.

Par conclusions déposées 18 mars 2021, la société Crédit Logement demande à la cour de :

- Débouter Mme [E] [D] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

- Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :

* constaté la prescription de l'action du Crédit Logement à l'encontre de Mme [E] [D] et M. [U] [V] ;

* condamné le Crédit Logement à payer à Mme [E] [D] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

* rejeté les autres chefs de demande, sauf en ce qu'il a débouté Mme [E] [D] de sa demande tendant à ce que l'assignation introductive d'instance soit déclarée nulle ;

* condamné le Crédit Logement aux dépens.

- Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation soulevée par Mme [E] [D].

Y ajoutant et statuant à nouveau :

- Condamner solidairement M. [U] [V] et Mme [E] [D] à payer au Crédit Logement les sommes de 56 688,38 euros arrêtée au 22 septembre 2020 outre les intérêts au taux légal à compter de cette somme et jusqu'au parfait paiement.

- Ordonner la capitalisation des intérêts

- Condamner solidairement M. [U] [V] et Mme [E] [D] à payer au Crédit Logement la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner solidairement M. [U] [V] et Mme [E] [D] aux entiers dépens

Par conclusions déposées le 22 décembre 2020, Mme [E] [D] demande à la cour de :

- Déclarer l'appelante recevable en son appel mais mal fondée.

Dès lors :

- Infirmer le jugement et constater la nullité de l'assignation pour défaut de fondement juridique causant un grief aux défendeurs ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la prescription de l'action du demandeur;

- Constater en effet que les actions entre consommateurs et professionnels se prescrivent par deux ans et dès lors, constater que l'action engagée par la société Crédit Logement est prescrite ;

- Débouter dès lors la société Crédit Logement de la totalité de ses demandes ;

- Condamner solidairement la société Crédit Logement et M. [V] à lui payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.

M. [U] [V] n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les conclusions des parties lui ont été régulièrement signifiées.

L'affaire a été fixée à l'audience du 10 novembre 2022.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 27 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité de l'assignation

Aux termes de l'article 114 du code de procédure civile, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

En l'espèce, Mme [D] soulève la nullité de l'assignation introductive d'instance pour défaut de fondement juridique lui causant un grief.

Cependant, comme le fait justement observer l'appelante, l'assignation indique que le Crédit Logement a, en sa qualité de caution, payé entre les mains du prêteur en lieu et place des débiteurs, de sorte qu'il dispose à l'encontre de ceux-ci d'une créance liquide et exigible. Il se déduit donc suffisamment des termes de l'assignation que le Crédit Logement exerce à l'encontre des débiteurs un recours en sa qualité de caution.

Par ailleurs, à supposer l'irrégularité établie, Mme [D] ne démontre pas l'existence d'un grief puisqu'elle a pu constituer avocat et faire valoir l'ensemble de ses arguments en défense, rien ne l'empêchant en outre de formuler des demandes à l'encontre de M. [V].

Le tribunal doit par conséquent être approuvé en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité.

Sur la prescription de l'action

La société Crédit Logement, qui rappelle qu'elle exerce un recours personnel fondé sur l'article 2305 du code civil, reproche au tribunal d'avoir déclaré son action en paiement prescrite et fait valoir l'existence d'actes interruptifs de prescription.

De son côté, Mme [D] maintient que l'action en paiement de la société Crédit Logement est prescrite, conformément à l'article L. 137-2 du code de la consommation. Elle ajoute que les moyens tirés de l'interruption de la prescription liés à la procédure de surendettement de M. [V], d'une part, constituent des moyens nouveaux qui ne peuvent prospérer en appel, d'autre part, lui sont inopposables en ce qu'ils ne concernent que son ex-époux.

En droit, l'action récursoire de l'organisme de caution qui a réglé au lieu et place du débiteur principal ayant souscrit un emprunt immobilier, engagée contre ce dernier, est une action en paiement régie par l'article L. 137-2 devenu L. 218-2 du code de la consommation, dès lors que le cautionnement ainsi consenti est un service fourni par un professionnel à un consommateur.

Le premier juge a donc justement estimé que la prescription biennale prévue à l'article précité est applicable à la présente affaire.

Il est acquis que le délai de prescription du recours personnel de la caution qui a payé le prêteur a pour point de départ la date à laquelle celle-ci a payé soit, en l'espèce, le 7 novembre 2014, date à laquelle les quittances subrogatives ont été émises.

La société Crédit Logement disposait donc d'un délai de deux ans pour agir à compter de cette date.

Elle fait toutefois valoir plusieurs actes interruptifs ou suspensifs de prescription, étant rappelé qu'en application de l'article 563 du code de procédure civile, les parties peuvent en cause d'appel invoquer des moyens nouveaux pour justifier les prétentions soumises au premier juge.

Ainsi, il apparaît que M. [V] a, le 4 novembre 2014, déposé un dossier de surendettement, déclarant être débiteur du Crédit Logement à hauteur de 54.050 euros. Son dossier de surendettement a ensuite été déclaré recevable le 13 janvier 2015 et M. [V] a bénéficié, par mesures imposées par la commission entrées en vigueur le 30 juin 2015, d'un moratoire de 24 mois.

Le Crédit Logement s'est donc trouvé dans l'impossibilité d'agir du 13 janvier au 30 juin 2015 puis, pendant l'exécution des mesures imposées, soit du 30 juin 2015 au 30 juin 2017.

Dès lors, en agissant par acte introductif d'instance des 9 et 13 avril 2018, la société Crédit Logement a respecté le délai biennal de prescription.

Enfin, en application des dispositions de l'article 1312 du code civil, tout acte qui interrompt ou suspend la prescription à l'égard de l'un des créanciers solidaires, profite aux autres créanciers.

Il s'ensuit que les actes interruptifs ou suspensifs précités ont produit leur effet tant à l'égard de M. [V] que de Mme [D], co-débiteurs solidaires, peu important leur situation maritale.

Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu'il a déclaré prescrite l'action formée par la société Crédit Logement à l'encontre de Mme [D] et M. [V].

Sur le montant de la créance

Au regard des quittances subrogatives et du décomptes de créance actualisé au 22 septembre 2020, la société Crédit Logement justifient d'une créance à l'encontre de Mme [D] et M. [V] de 46.823,79 euros au titre du prêt n°M10024907402 et de 9.864,59 euros au titre du prêt n°M10024907401, ces montants n'étant par ailleurs pas discutés par les intimés.

Il sera donc fait droit à la demande en paiement formée par la société Crédit Logement.

Conformément à la demande en ce sens, les intérêts seront capitalisés en application de l'article 1343-2 du code civil.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Mme [D] et M. [V] supporteront les dépens in solidum.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Compte tenu des circonstances de la cause et de la situation respective des parties, il n'y a pas lieu à condamnation sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance,

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

Déclare recevable l'action en paiement de la société Crédit Logement,

Condamne solidairement Mme [D] et M. [V] à payer à la société Crédit Logement la somme de 56.688,38 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2020,

Ordonne la capitalisation des intérêts,

Dit n'y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme [D] et M. [V] aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/02370
Date de la décision : 05/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-05;20.02370 ?
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