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03/11/2022 | FRANCE | N°18/03854

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 03 novembre 2022, 18/03854


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 03 NOVEMBRE 2022







F N° RG 18/03854 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KQRI









Monsieur [N] [E]

Madame [L] [E]





c/



SA SMA SA



























Nature de la décision : AU FOND





















Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 juin 2018 (R.G. 17/01446) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 03 juillet 2018



APPELANTS :



[N] [E]

né le 30 Mai 1969 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]



[L] [E]

née le 03 Juillet 1971 à [Locali...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 03 NOVEMBRE 2022

F N° RG 18/03854 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KQRI

Monsieur [N] [E]

Madame [L] [E]

c/

SA SMA SA

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 juin 2018 (R.G. 17/01446) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 03 juillet 2018

APPELANTS :

[N] [E]

né le 30 Mai 1969 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]

[L] [E]

née le 03 Juillet 1971 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]

Représentés par Me Thierry FIRINO MARTELL, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SA SMA SA la SMA SA venant au droit de la Société SAGENA et prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

Représentée par Me Jean CORONAT de la SCP AVOCAGIR, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 septembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller

Madame Christine DEFOY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Les époux [E] ont signé le 3 février 2011 avec la S.A.R.L. Dixit Ingénierie un contrat de maîtrise d''uvre pour d'importants travaux de rénovation d'un immeuble leur appartenant situé dans la commune de [Localité 4], en Gironde.

Le contrat a prévu une mission complète de maîtrise d''uvre pour un montant d'honoraires de 18.896,80 euros TTC.

La S.A.R.L. Dixit Ingénierie était assurée au titre de sa responsabilité professionnelle auprès de la société Sagena, aux droits de laquelle vient désormais la société SMA .

La réalisation des travaux a été confiée à la S.A.R.L. Suninvest, exerçant son activité sociale sous le nom Dixit Construction, celle-ci étant assurée auprès de la société Elite Insurance Compagny Limited.

Les travaux ont débuté le 28 avril 2011, date à laquelle a été établie la déclaration d'ouverture de chantier.

Le 12 mars 2013, les époux [E] ont fait constater par huissier l'abandon du chantier ainsi que la présence de diverses malfaçons affectant notamment l'étanchéité en toiture.

La société Dixit Construction a été placée en redressement judiciaire le 30 janvier 2013 puis en liquidation judiciaire le 17 juillet 2013.

Les époux [E] ont effectué une déclaration de créance le 10 avril 2013.

Le 15 mai 2013, la société Dixit Ingénierie a également été placée en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire le 17 juillet 2013.

Les époux [E] ont effectué une nouvelle déclaration de créance.

La réception des travaux avec réserves est intervenue le 29 juillet 2013, suivant procès-verbal dressé par Maître [S], huissier de justice, en l'absence des mandataires liquidateurs des deux sociétés.

Par actes des 11 décembre 2015, et 23 décembre 2015, les époux [E] ont sollicité en référé l'organisation d'une expertise judiciaire.

Par ordonnance du 4 avril 2016, M. [I] [O] a été désigné à cette fin.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 17 décembre 2016.

Par actes du 8 février 2017, les époux [E] ont assigné au fond les deux assureurs: Elite et SMA afin d'obtenir l'indemnisation de divers préjudices.

Par jugement rendu le 5 juin 2018, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- débouté M. et Mme [E] de l'intégralité de leurs demandes,

- laissé à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles,

- dit que M. et Mme [E] supporteront la charge des dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise,

Le tribunal a en effet considéré que la garantie d'Elite, assureur du constructeur : Dixit construction ne pouvait être recherchée pour les travaux de couverture ou d'étanchéité, lesquels étaient exclus par la police d'assurance, et que les autres désordres ne relevaient pas de la garantie décennale.

Par ailleurs, le tribunal a en outre considéré que la garantie de la SMA, assureur du maitre d''uvre : Dixit Ingénierie ne pouvait davantage être acquise, dès lors que l'assurée n'avait pas déclaré à son assureur le chantier des époux [E], et qu'il y avait lieu par voie de conséquence d'appliquer une réduction de garantie de 100 %, soit une réduction proportionnelle de l'indemnité au prorata des primes payées pour le risque déclaré.

Par déclaration du 3 juillet 2018, M. et Mme [E] ont relevé appel de cette décision.

Par ordonnance du 27 mars 2019, le conseiller de la mise en état a constaté la caducité de l'appel à l'égard de la société Elite ; au visa des articles 908 et 911 du code de procédure civile, les conclusions des appelants n'ayant pas été signifiées à la société Elite, intimée dans le mois de l'expiration du délai imposé aux appelants pour déposer leurs écritures.

La procédure s'est poursuivie à l'encontre de la seule intimée restante: la société SMA SA, assureur du maitre d''uvre.

Par arrêt avant dire-droit rendu le 4 novembre 2021, la Cour d'appel a rejeté l'exclusion de garantie soutenu par la société SMA aux termes de laquelle, l'assureur soutenait que son assuré aurait intentionnellement laissé l'entrepreneur réaliser des travaux à l'origine des désordres. La cour a en effet considéré qu'il n'était pas démontré une volonté délibérée du maitre d''uvre de faillir à sa mission.

Par ailleurs, sur l'application de la règle proportionnelle, à la lecture de la police d'assurance, laquelle ne prévoyait pas qu'en l'absence de déclaration de chantier, la réduction proportionnelle équivalait à une absence de garantie, elle a considéré que l'application de ladite règle ne pouvait équivaloir à une absence de garantie. Aussi avant dire droit, elle a enjoint à la SMA de communiquer tous les éléments qui permettraient de calculer le montant de la réduction proportionnelle, et notamment : le taux et le montant de la prime payée par la société Dixit ingénierie pour les chantiers qu'elle avait déclarés, et la prime qu'elle aurait dû payer si son assureur avait eu connaissance du risque imparfaitement déclaré.

Les époux [E], dans leurs dernières écritures demandent à la cour de juger que le défaut de ventilation et la non-conformité des appuis de fenêtre constituent des désordres de nature décennale, et sollicitent pour l'essentiel la condamnation de la SMA à leur payer les coûts des travaux de reprise de l'ensemble des désordres, en ce compris les frais de stockage de la cuisine, les frais de nettoyage, leur préjudice financier, leur préjudice de jouissance, ou encore leur préjudice moral

Pour sa part la SMA, par lettre de son avocat du 15 octobre 2021, a indiqué qu'elle se désistait de son appel en garantie à l'encontre de la compagnie Elite, assureur du constructeur.

Elle demande désormais à la cour : A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. et Madame [E] de l'ensemble de leurs demandes formulées à son encontre.

- réformer le jugement entrepris en ce que sa garantie n'a pas vocation à être mobilisée au regard de la violation des dispositions de l'article L 113-1 du code des assurances.

A titre subsidiaire

Elle demande à la cour de débouter les époux [E] au titre de leurs préjudices financiers, préjudice de jouissance, et leur préjudice moral.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2022.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

1/ Sur l'application de la règle proportionnelle

Les appelants demandent à la cour de faire application de la règle proportionnelle telle que prévue à l'article L 131- 9 du Code des assurances. Or, à l'examen des conditions particulières et des conditions générales du contrat souscrit par la société Dixit Ingénierie, si le montant de la prime est calculé en fonction des honoraires encaissés sur l'année, il existe un minimum de cotisations qui se calcule hors-taxes. En l'espèce, pour l'année 2011, le taux de cotisation minimum hors-taxes était de 36 franchises à 161 €, soit une somme HT de 5.796 €. La société Dixit ingénierie avait versé des primes à concurrence de 8918,41 euros TTC pour des honoraires encaissés déclarés de 36.123 €, ce chiffre d'affaires ayant justifié un appel de cotisation total de 4.221,67 € HT (85,86 € HT au titre de la convention risque de l'exploitation, outre 4.136,41 € HT au titre de la convention ingénierie bâtiment). Or, ce montant étant inférieur au taux minimum annuel de cotisations, la compagnie a recalculé la cotisation due par son assurée au minimum, à savoir 5.796 € HT, soit 6.317,64 € TTC donnant lieu ainsi à une restitution de 2.600,77 € de primes trop versées. Les époux [E] considèrent qu'il faut calculer la cotisation telle qu'elle aurait dû être payée par la société Dixit ingénierie selon les mêmes modalités que celles prévues à la page 2 de la Pièce 9 de la société SMA, étant précisé que la déclaration se fait sur la base du montant des honoraires HT encaissés. En conséquence, la base de calcul s'élève à 36 123 € (honoraires HT déclarés) + 15.800€HT (honoraires chantier [E]) = 51.923€, et le calcul de cotisation représente :

-Convention risques de l'exploitation : 51.923€ x 0,2377% = 123,42€

-Convention ingénierie bâtiment-garantie obligatoire : 51.923€ x 7,6124% = 3.952,58€

-Convention ingénierie bâtiment-garanties complémentaire : 51.923€ x 3,8385% = 1.993,06€

Soit au total la somme de 6.069,06€, si bien que l'assureur aurait dû percevoir 6.069,06€ HT de primes au titre de l'année 2011, or elle n'a perçu que la somme de 5.796€HT correspondant au minimum annuel de cotisation, soit une différence de 273,06 €. Par conséquent, la réduction proportionnelle se calcule comme suit : (5.796 x 100) / 6.069,06€ = 95,5 % si bien que le risque doit être garantie par la SMA SA à concurrence de 95,5%, soit une réduction proportionnelle de 4,5%.

Pour sa part la SA SMA, qui a versé aux débats le décompte de cotisation définitive du 6 juin 2012, considère que dans la mesure où la prime payée en 2011 par la société Dixit ingénierie s'élève à la somme de 5.796 euros HT, avec un taux applicable en 2011 de 11,6886 % HT, la prime qui aurait dû être appelée en plus si la concluante avait eu pleinement connaissance du risque s'élève à la somme de 2 208,67 euros HT (18.996 x 11,6886 % HT), soit une prime totale sur l'exercice 2011 d'un montant de 8 004,67 euros HT au lieu de la somme de 5 796 euros HT. Elle en déduit qu'elle aurait donc dû percevoir 28 % de cotisation complémentaire et que par conséquent, l'indemnité doit être réduite de 28 %. Elle conclut cependant que sa garantie n'a pas vocation à être mobilisée.

***

Vu l'arrêt avant dire droit du 4 novembre 2021,

Il résulte de la pièce n° 9 communiquée par la société SMA que l'assiette annuelle déclarée par la société Dixit ingénierie s'est élevée pour l'année 2011 à la somme de 36 123 euros, ce qui aurait dû générer une cotisation de 4222,27 euros HT (36 123 x 11, 6886 %). Toutefois, l'assureur a appliqué le minimum de cotisation prévu, et a en définitive appelé une cotisation de 5796, 00 euros HT (pièce n° 9 de l'intimée)

Si on ajoute le chantier non déclaré par l'assurée des époux [E] qui a généré un chiffre d'affaires de 15 800 euros HT, l'assiette annuelle qui aurait dû être déclarée aurait été de 51 923 euros ce qui aurait généré une cotisation de 6069,07 euros HT (51923 x 11,6886 %).

En conséquence, l'indemnité due par l'assureur doit être réduite en proportion du taux de la prime annuelle payée par rapport à celui de la prime qui aurait été due si la mission [E] avait été déclarée. (cf : Cass. 3e civ. 11-5-2022 n° 21-15.420)

Dès lors la réduction proportionnelle s'élève à : (6069,07 ' 5796,00) x 100 = 4,71 %

5796

2/ Sur le montant des préjudices indemnisables

Sur les préjudices matériels

L'expert judiciaire: M. [O] a estimé que si :

- l'absence d'entrées d'air générant des problèmes de condensation ;

- l'inadaptation des appuis de fenêtre ;

- l'absence de pose de trois vitrages anti-effraction, pourtant prévus au devis ;

- l'absence de respect du DTU 43.1 relatif aux travaux de la terrasse sur dalle béton ;

- les défauts affectant la couverture de la galerie ;

peuvent être reprochés à la S.A.R.L. Suninvest, ces désordres n'auraient pas dû échapper à la vigilance de la S.A.R.L. Dixit Ingénierie d'autant plus que celle-ci était investie d'une mission complète de maîtrise d''uvre.

Comme l'a observé très justement le tribunal et en l'absence de démonstration d'une incompétence manifeste du maître d''uvre ou d'actes répréhensibles du gérant des deux sociétés traduisant une volonté délibérée de faillir à sa mission, le défaut de vigilance dans la surveillance du chantier constitue un manquement aux obligations contractuelles mais non une faute dolosive au sens de l'article L113-1 du code des assurances.

En conséquence, l'argumentation de la SMA SA, consistant à se prévaloir d'une fraude non démontrée de son assurée, sera rejetée.

1. le phénomène de condensation

L'expert a considéré que le désordre qui est la conséquence de l'absence d'entrée d'air ne présente pas un caractère de gravité et ne rend pas l'ouvrage impropre à sa destination.

Les appelants contestent cette conclusion de l'expert judiciaire, et considèrent que si le désordre n'affecte pas davantage les plâtres et éléments d'équipement, cela tient au fait qu'ils sont contraints de ventiler régulièrement leur habitation. Aussi, ils demandent à la cour de juger qu'il s'agit d'un désordre de nature décennale. A titre subsidiaire, dans la mesure où l'expert a considéré que le désordre résultait d'un défaut d'exécution qui n'aurait pas dû échapper à la vigilance du maitre d''uvre, ils sollicitent la garantie de la société SMA au titre de la responsabilité civile professionnelle de son assurée. Ils ajoutent qu'un désordre réservé engage la responsabilité civile contractuelle du locateur d'ouvrage.

La SA SMA se borne dans ses dernières conclusions à exposer que c'est la société Dixit construction qui a réalisé des non conformités et des défauts d'exécution, si bien qu'elle sollicite la garantie de l'assureur de celle-ci, étant toutefois rappelé que par lettre de son avocat du 15 octobre 2021, elle s'est désistée de ses demandes à son égard.

***

L'expert judiciaire a clairement démontré que le désordre relatif au phénomène de condensation ne présentait pas un degré de gravité suffisant pour rendre l'immeuble impropre à sa destination. Les appelants en conviennent puisqu'ils affirment, sans le démontrer, que l'absence de désordres plus importants proviendrait du fait qu'ils seraient contraints d'aérer régulièrement leur immeuble. Toutefois, ils ne présentent aucun élément objectif permettant de contredire sérieusement les conclusions de l'expert.

En revanche, ils démontrent la faute du maitre d''uvre concernant ce désordre, qui a selon l'expert judiciaire échappée à la vigilance du maitre d''uvre. (cf : rapport d'expertise page 7). Cette absence de vigilance est l'une des causes de l'apparition du désordre. Aussi, la responsabilité contractuelle de la société Dixit ingénierie doit être retenue. Celle-ci était assurée au titre de sa responsabilité civile contractuelle auprès de la société Sagena devenue SMA. (cf : pièce n° 4 de l'intimée : conditions particulières, page 3)

En conséquence, la société SMA devra garantir son assurée au titre de ce désordre, dont l'expert a chiffré les travaux de reprises à la somme de 1182, 45 euros TTC, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 1126,75 euros.

2. les appuis de fenêtres

Les époux [E] sollicitent la garantie de la société SMA pour ce désordre qui pour l'expert judiciaire présente un caractère décennal.

La société SMA n'a pas conclu sur ce point.

***

L'expert judiciaire a constaté que le désordre provenait de la réalisation en contreplaqué des appuis de fenêtre, alors que ceux-ci étaient prévus en aluminium. Il a ajouté que ce désordre était de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination dans la mesure où il permet la migration de l'eau de pluie à l'intérieur de la construction. Enfin, il a estimé qu'il n'aurait pas dû échapper à la vigilance du maître d''uvre.

La cour constate que l'expert a relevé que les appuis étaient pourris ( cf : page 5 de son rapport) si bien qu'ils ne peuvent plus assuré la moindre étanchéité. Il s'agit incontestablement d'un désordre de nature décennale.

Les travaux de reprise s'élèvent à la somme de 3588,46 euros, à laquelle la société SMA sera condamnée au titre de sa garantie, dans la limite du taux de celle-ci, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 3419,44 euros.

3. les vitrages anti-effraction

Les époux [E] demandent la condamnation de la société SMA au titre de sa garantie de la responsabilité contractuelle de son assurée.

La société SMA n'a pas conclu sur ce point.

***

L'expert judiciaire a relevé qu'un vitrage normal a été mis en place alors qu'il était prévu un vitrage anti-effraction pour trois menuiseries. Il a ajouté que cette non-conformité au contrat concernait un élément constitutif de l'ouvrage sans compromettre sa solidité ni la propriété de sa destination, qui n'aurait pas dû échapper à la vigilance du maître d''uvre.

En revanche, au titre de la faute contractuelle du maitre d''uvre, la société SMA doit sa garantie.

Les travaux pour changer les vitrages non conformes s'élèvent à la somme de 874,63 euros, à laquelle la société SMA sera condamnée au titre de sa garantie, dans la limite du taux de celle-ci, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 833,43 euros.

4. les finitions et imperfections

Les époux [E] sollicitent la condamnation de la société SMA pour le montant de 2200 euros TTC représentant le temps qu'ils auraient perdu pour reprendre les menus désordres affectant l'ouvrage.

La société SMA n'a pas conclu sur ce point.

***

L'expert judiciaire a considéré que les différentes imperfections étaient dues à l'abandon du chantier, et concernaient les éléments d'équipement dissociables. Il a ajouté qu'elles ne rendaient pas l'ouvrage impropre à sa destination. Il a estimé que le temps à y consacrer représentait quatre journées de travail qu'il a chiffrées à la somme de 2200 euros TTC.

Ces imperfections résultent de l'abandon de chantier, notamment par le maitre d''uvre dont la responsabilité contractuelle doit être retenue. En conséquence, son assureur sera condamné à le garantir au titre de cette responsabilité, pour le montant retenu par l'expert judiciaire, dans la limite de son taux de garantie, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 1905,80 euros.

5. la terrasse sur dalle béton et la couverture de la galerie

Les époux [E] sollicitent la garantie de ces désordres qualifiés par l'expert judiciaire de décennaux.

La société SMA n'a pas conclu sur ce point.

***

L'expert judiciaire a relevé, après avoir entrepris différentes constatations techniques que ces désordres qui affectaient des éléments constitutifs de l'ouvrage (page 5 de son rapport) ne respectaient pas, pour la terrasse le DTU 43.1 qui définissait les règles de l'art en la matière, et mettaient en cause la sécurité des intervenants en surface pour les travaux d'entretien courant, pour la galerie. Il a en outre noté en outre que les décollements constatés sur la terrasse ne manqueraient pas de provoquer des infiltrations dans le séjour avant la fin de la période décennale.

Il s'agit de désordres de nature décennale pour lequels la société SMA doit sa garantie à son assurée.

Les travaux de reprise du désordre ont été évalués à la somme de 7401,17 euros TTC, pour la terrasse, et à celle de 10 576, 96 euros TTC pour la galerie, sommes auxquelles l'intimée sera condamnée, dans la limite du taux de sa garantie, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 7052,57 euros.

6. les désordres complémentaires

Les époux [E] sollicitent la garantie des travaux complémentaires pour remédier aux précédents désordres, soit la création d'un joint de fractionnement d'un montant de 59,40 euros TTC, et le traitement des fissures de la façade pour un montant de 6807, 24 euros TTC.

La société SMA n'a pas conclu sur ce point.

***

S'agissant de travaux complémentaires rendus nécessaires selon l'expert par les désordres de nature décennale, la société SMA devra sa garantie, dans la limite du taux de garantie, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 56,60 euros pour les joints de fractionnement, et 6486,61 euros pour les travaux sur les façades.

7. les désordres annexes

a. les frais de stockage de la cuisine

Les époux [E] sollicitent la condamnation de l'intimée à leur verser la somme de 1425 euros TTC, représentant les frais de stockage de leur cuisine, lequel a été rendu nécessaire en raison d'un retard de chantier dont est responsable le maitre d''uvre.

La société SMA n'a pas conclu sur ce point.

***

L'expert a considéré que le montant réclamé était juste.

Il est certain que le maitre d''uvre a engagé sa responsabilité en ne veillant pas aux délais d'exécution du chantier, ce qui a contraint les époux [E] à stocker les éléments de la cuisine qu'ils avaient commandés. Il n'est pas justifié d'une cause majeure, ou extérieure pour expliquer la carence de la société Dixit ingénierie, laquelle a ainsi failli à son obligation de moyen, et a engagé sa responsabilité contractuelle.

En conséquence, la société SMA devra sa garantie, dans la limite du taux de celle-ci, en raison de la faute contractuelle de son assurée, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 1357,88 euros.

b. les frais de nettoyage

Les époux [E] sollicitent également la condamnation de l'intimée à leur verser la somme de 1491,29 euros TTC, représentant les frais de nettoyage du chantier qu'ils ont dû exposer, et qui sont la conséquence de l'abandon du chantier par le constructeur, et le maitre d''uvre.

La société SMA n'a pas conclu sur ce point.

***

L'expert a considéré que le montant réclamé était justifié.

Il est certain que le maitre d''uvre a engagé sa responsabilité en abandonnant le chantier, et en obligeant par voie de conséquence les maitres de l'ouvrage à procéder à son nettoyage.

En conséquence, la société SMA devra sa garantie, dans la limite du taux de celle-ci, en raison de la faute contractuelle de son assurée, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 1421,05 euros.

c. les préjudices financiers

Les époux [E] sollicitent également la condamnation de l'intimée à leur verser la somme de 1891, 00 euros TTC, représentant leurs préjudices financiers constitués par le paiement des taxes d'habitation, alors qu'ils ne pouvaient pas habiter l'immeuble litigieux.

La société SMA s'y oppose faisant valoir que les appelants étaient propriétaires de leur construction si bien qu'ils devaient acquitter une telle taxe qu'il y ait des travaux en cours ou pas.

***

La taxe d'habitation doit être acquittée par tous les propriétaires que leur immeuble soit occupé ou non.

En conséquence, les époux [E] ne peuvent pas solliciter le remboursement des taxes qu'ils ont payées.

Sur les préjudices immatériels

1. le préjudice de jouissance

M. et Mme [E] font valoir que pendant une période de 21 mois, ils n'ont pas pu jouir de leur immeuble d'habitation, et que leur préjudice doit être calculé sur la base de 1 475 euros par mois sur une période de 21 mois, soit une indemnisation à leur profit de 30.975 euros

La société SMA SA demande à la cour de rejeter la demande de M. et Mme [E] dans la mesure où ce préjudice n'est pas justifié et où il ressort de l'article 6.7 des conditions générales que ne seront jamais garanties les conséquences pécuniaires, autre que celles visées aux articles 6.5 et 6.6 découlant d'un retard dans l'exécution de vos marchés, sauf lorsqu'elles trouvent leur origine dans un dommage garanti par la présente convention.

***

L'expert judiciaire a confirmé que le préjudice de jouissance des appelants a duré 21 mois. Il importe peu que les époux [E] aient été relogés pendant cette période, alors que pendant celle-ci, ils n'ont pas pu ni habiter leur bien, ni le louer, si bien que leur préjudice de jouissance est équivalent à la valeur locative de l'immeuble achevé. L'abandon du chantier constitue la cause de leur préjudice, et résulte de la responsabilité du constructeur et du maitre d''uvre qui a failli à son obligation contractuelle de livrer à la date convenue le bien achevé.

L'exclusion de garantie soulevée par la société SMA, au visa de l'article 6.7 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par la société Dixit ingénierie, ne peut recevoir application alors que les retards à l'origine des préjudices de jouissance trouvent leur origine dans plusieurs dommages garantis par la convention d'assurance.

En conséquence, la société SMA devra sa garantie, dans la limite du taux de celle-ci, soit après application de la réduction proportionnelle, la somme de 29516,07 euros.

2. le préjudice moral

Les appelants sollicitent à ce titre la somme de 7000 euros et exposent que leur préjudice moral est constitué par la très grande difficulté à laquelle ils ont été confrontés du fait du manque de professionnalisme des sociétés Dixit Ingenierie et Dixit Construction.

La société SMA s'y oppose considérant qu'une telle réclamation ne serait justifiée ni dans son principe, ni dans son quantum.

***

L'expert a considéré que ce préjudice ne pourrait se cumuler avec leur préjudice de jouissance. Toutefois, le non-respect d'un délai de livraison d'un bien immobilier crée pour le maitre de l'ouvrage un préjudice moral, indépendamment du préjudice de jouissance qu'il a pu subir, en raison de l'incertitude quant à la possibilité pour lui de jouir de son bien, ainsi que des tracasseries qui en ont découlées.

En conséquence, il sera fait droit au principe de la demande des appelants dont le quantum sera fixé à la somme de 2000 euros.

En conséquence, la société SMA devra sa garantie, dans la limite du taux de celle-ci.

Sur les frais et dépens

La société SMA qui succombe partiellement sera condamnée à prendre en charge les dépens et frais d'expertise judiciaire, et à payer aux époux [E] la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Vu notre arrêt avant dire droit du 4 novembre 2021,

Réforme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux le 5 juin 2018, et statuant à nouveau :

Dit que la garantie de SA SMA assureur de la SARL Dixit ingénierie doit être réduite de 4, 71 %,

En conséquence, et en application de cette réduction proportionnelle, condamne la SA SMA à payer aux époux [E] les sommes suivantes :

- 1126,75 euros au titre des travaux de reprise du phénomène de condensation ;

- 3419, 44 euros au titre des travaux de reprise des appuis de fenêtres ;

- 833, 43 euros au titre du changement des vitrages ;

- 1905,80 euros au titre des travaux de finitions et de reprise des imperfections ;

- 7052,57 euros au titre des travaux de reprise de la terrasse ;

-10078,78 euros au titre des travaux de reprise de la galerie ;

- 56,60 euros au titre de la pose de joints de fractionnement ;

- 6486, 61 euros au titre des travaux sur les façades ;

-1357,88 euros au titre des frais de stockage de la cuisine ;

- 1421,05 euros au titre des frais de nettoyage ;

- 29 516,07 euros au titre de leur préjudice de jouissance ;

- 1905,80 euros au titre de leur préjudice moral ;

- 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Condamne la SA SMA aux entiers dépens et frais d'expertise.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Annie BLAZEVIC, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/03854
Date de la décision : 03/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-03;18.03854 ?
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