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25/10/2022 | FRANCE | N°19/01568

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 25 octobre 2022, 19/01568


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 25 OCTOBRE 2022



RP



N° RG 19/01568 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5VG









[G] [P]



c/



[Z] [A]

[K] [H]

[E] [D] épouse [T]

[X] [D]

[I] [D] épouse [B]

[W] [S]

SARL COMPAGNIE DES SORBIERS

SCI LA NAUVE DES BOIS



SCI FAMILLE DE SEGUIER

[R] [U]











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Nature de la décision : AU FOND



















Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 19 février 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 12/02568) suivant déclaration d'appel du 20 mars 2019...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 25 OCTOBRE 2022

RP

N° RG 19/01568 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5VG

[G] [P]

c/

[Z] [A]

[K] [H]

[E] [D] épouse [T]

[X] [D]

[I] [D] épouse [B]

[W] [S]

SARL COMPAGNIE DES SORBIERS

SCI LA NAUVE DES BOIS

SCI FAMILLE DE SEGUIER

[R] [U]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 19 février 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 12/02568) suivant déclaration d'appel du 20 mars 2019

APPELANT :

[G] [P]

né le [Date naissance 4] 1951 à [Localité 22] ([Localité 22])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 16]

représenté par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître Ingrid THOMAS, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Maître [Z] [A]

né le [Date naissance 6] 1964 à [Localité 23] (33)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 10]

Maître [K] [H]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 22] (33)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 12]

représentés spar Maître Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

[E] [D] épouse [T]

née le [Date naissance 5] 1949 à [Localité 23] (33)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 17]

[X] [D]

né le [Date naissance 7] 1952 à [Localité 23] (33)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 13]

[I] [D] épouse [B]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 32] (33)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 21]

représentés par Maître BOYANCE substituant Maître Denis DUBURCH, avocats au barreau de BORDEAUX

[W] [S]

né le [Date naissance 3] 1950 à [Localité 23] (33)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 30]

représenté par Maître Sophie LEVY de la SELARL PUYBARAUD - LEVY, avocat au barreau de BORDEAUX

SARL COMPAGNIE DES SORBIERS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 8]

représentée par Maître COMBEAU substituant Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocats postulants au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Karen DURAZ de la SELARL LIOCHON DURAZ, avocat plaidant au barreau de CHAMBERY

SCI LA NAUVE DES BOIS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 14]

représentée par Maître BARBOT-FRANCHE substituant Maître Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocats au barreau de BORDEAUX

INTERVENANTS :

SCI FAMILLE DE SEGUIER, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 519 115 463, prise en la personne de son gérant domcilié en cette qualité au siège social

sis [Adresse 15]

représentée par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Ingrid THOMAS, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX

[R] [U]

né le [Date naissance 11] 1950 à [Localité 29] ([Localité 29])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 9]

représenté par Maître COMBEAU substituant Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocats postulants au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître Karen DURAZ de la SELARL LIOCHON DURAZ, avocat plaidant au barreau de CHAMBERY

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 septembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Par acte reçu le 30 décembre 2003 par Maître [H], notaire à [Localité 22], avec la participation de Maître [M], notaire à [Localité 23], M. [G] [P] a acquis de Mme [V] [F] veuve [D] un immeuble sis [Adresse 18], cadastré [Cadastre 28] et [Cadastre 19], pour une contenance totale de 3 a 30 ca.

Antérieurement à cet acte, M. [P] était déjà propriétaire d'une maison d'habitation édifiée sur la parcelle contigüe cadastrée [Cadastre 26] et située [Adresse 16].

Aux termes d'un acte reçu le 5 septembre 2008 par Maître [A], notaire à [Localité 23], la société civile la Nauve des Bois (dont les associés sont les consorts [Y]) a vendu à M. [W] [S] un immeuble situé [Adresse 20], cadastré [Cadastre 24], [Cadastre 25] et [Cadastre 27], pour une contenance totale de 11 a 8 ca.

M. [S] a revendu ce bien immobilier à la société Compagnie des Sorbiers, selon acte reçu le 31 janvier 2011 par Maître [A].

Le 21 février 2011, Maître [H], agissant au nom de M. [P], a écrit au notaire de Mme [D], Maître [C], en sa qualité de successeur de Maître [M], afin que soit établi un acte rectificatif de l'acte de vente du 30 décembre 2003 pour voir inclure, dans la désignation de l'immeuble vendu, la parcelle [Cadastre 27] d'une contenance de 1 à 92 ca, qui aurait selon lui été omise par erreurs aux termes dudit acte.

Par acte du 21 novembre 2011, Mme [V] [F] veuve [D] a donné procuration à tout clerc de l'étude de Maître [H] pour régulariser l'acte rectificatif en cause.

Maître [H] a procédé à l'établissement d'un projet d'acte rectificatif, mais a refusé de le régulariser.

Par exploit signifié les 28 février et 2 mars 2012, M. [G] [P] a assigné M. [W] [S] et Maître [K] [A] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux afin de voir engager leur responsabilité et obtenir à titre principal leur condamnation solidaire au paiement d'une somme de 500 000 € en réparation du préjudice subi sur le fondement des articles 1382, 1134, 1147, 1165 anciens et 1599 du code civil.

En cours de procédure, M. [P] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux par exploit du 16 septembre 2013, afin de voir enjoindre à Maître [H] d'effectuer la passation de l'acte rectificatif susvisé.

Par ordonnance du 20 janvier 2014, le juge des référés l'a débouté de sa demande en relevant notamment dans ses motifs que :

' (...) Il existe manifestement une difficulté sur le droit de propriété de la parcelle litigieuse [BW64] de sorte qu'en l'absence du tiers auquel M. [S] a vendu la parcelle et qui serait en possession de ladite parcelle, il ne peut être dit droit sur la légitimité de l'authentification de l'acte rectificatif attribuant la propriété de droits indivis au requérant et qu'à tout le moins, cette régularisation ne peut être en l'état considérée comme non sérieusement contestable ou constitutive d'un trouble manifestement illicite ou justifiée par l'existence de différends avec des tiers à la procédure'.

M. [P] a ainsi fait délivrer assignation au fond et aux mêmes fins à Maître [H] par acte d'huissier du 17 mars 2014. Les procédures correspondantes ont été jointes.

Par jugement du 1er mars 2016, le tribunal de grande instance de Bordeaux a invité M. [P] à assigner en la cause la SARL Compagnie des Sorbiers, propriétaire en titre de la parcelle cadastrée [Cadastre 27] [Localité 31], ainsi que Mme [V] [F] veuve [D] ou ses héritiers, renvoyé le dossier à la mise en état continue et réservé l'ensemble des demandes au fond et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

Par exploits signifiés les 31 mai, 6 et 17 juin 2016, M. [P] a appelé en cause Mme [E] [D] épouse [T], M. [X] [D] et Mme [I] [D] épouse [B], héritiers de Mme [V] [F] épouse [D], ainsi que la SARL Compagnie des Sorbiers. Par acte d'huissier du 25 septembre 2017, M. [S] a par ailleurs appelé en garantie la SCI La Nauve des Bois. Les procédures correspondantes ont été jointes à l'instance initiale.

Par jugement du 19 février 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- rejeté la demande de mise hors de cause de Mme [E] [D] épouse [T], M. [X] [D] et Mme [I] [D] épouse [B],

- déclaré irrecevables, faute de publication au service de la publicité foncière conformément aux dispositions des articles 28-4° c) et 30-5 du décret du 4 janvier 1955, les demandes de M. [G] [P] afférentes à la propriété de la parcelle [Cadastre 27], commune de [Localité 31],

- débouté M. [G] [P] du surplus de ses demandes,

- débouté M. [W] [S] de sa demande indemnitaire reconventionnelle pour procédure abusive,

- condamné M. [G] [P] à payer à M. [W] [S], la SCI La Nauve des Bois, la SARL Compagnie des Sorbiers, Maître [K] [H] et Maître [Z] [A] la somme de 1 000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [P] aux dépens de l'instance, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats en la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement,

- rejeté toutes autres demandes comme non fondées.

M. [G] [P] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 20 mars 2019.

Par arrêt avant-dire droit du 29 mars 2022, la cour d'appel de Bordeaux a :

- déclaré les demandes de M. [P] et de la SCI Famille de Séguier recevables au regard des règles de publicité foncière,

Avant dire droit :

- invité les parties à conclure sur la qualité pour agir de M. [P] aux fins de rectification de l'acte notarié du 30 décembre 2003,

- invité M. [P] et la SCI Famille de Séguier et, à défaut, la partie la plus diligente, à produire l'acte reçu par Maître [O] [L], Notaire à Bordeaux, les 10 juin 1953, 9 avril, 7 juillet et 14 septembre 1954, transcrit au troisième bureau des hypothèques de Bordeaux le 17 novembre 1954, volume 2982 numéro 1, contenant échange entre les consorts [J], [XO] et [Y],

- renvoyé l'affaire à l'audience du mardi 20 septembre 2022 à 14 heures et fixé la clôture au 5 septembre 2022,

- réservé les dépens.

Par conclusions déposées le 2 septembre 2022, M. [P] et la SCI Famille de Séguier, intervenante volontaire, demandent à la cour de :

- prendre acte de la communication de l'acte sollicité,

- déclarer recevables et bien fondés en leurs actions M. [P] et la SCI Famille de Séguier,

- réformer le jugement querellé et statuant à nouveau,

- prendre acte de la publication des assignations,

- déclarer recevable l'intervention de la SCI Famille de Séguier laquelle a intérêt à l'établissement de l'acte rectificatif,

- déclarer M. [P] recevable et bien fondé en son action,

- débouter les défendeurs de toutes demandes, fins et prétentions,

-juger que le Notaire authentificateur, Maitre [A], a commis une faute en ne vérifiant pas l'origine de propriété,

- juger également que Maître [H] au moment de l'acquisition de M. [P] n'a pas procédé à son examen utile du dossier.

- juger que cette faute est caractérisée en authentifiant une vente portant sur parcelle d'autrui sciemment, parcelle [Cadastre 27],

- juger que M. [S] vendeur à la Compagnie des Sorbiers a également commis une faute, en ayant parfaitement conscience de céder une parcelle ne lui appartenant pas, comme le rappelle l'acte authentique en page 9 et 11,

- écarter le moyen tiré de la prescription et juger que ni la Compagnie des Sorbiers ni M. [N] ni M. [S] ne peuvent se prévaloir de la prescription acquisitive,

- débouter M. [N], la Compagnie des Sorbiers et M. [S] de leurs demandes,

- juger que cette faute occasionne un préjudice réel à M. [P],

- débouter les Notaires assignés en leurs demandes,

- condamner solidairement Maître [A], Maître [H], M. [S], la SARL Compagnie des Sorbiers, M. [N] au paiement d'une somme de 500.000 € en faveur de M. [P], à valoir sur l'indemnisation de son préjudice financier du fait de ses cumuls de fautes,

- condamner Maître [H] au paiement d'une somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts, en raison de son abstention fautive et préjudiciable dans la passation d'acte rectificatif pour laquelle il disposait de l'intégralité des pièces,

- prendre acte de la position des Consorts [D] en ce qu'il demande au tribunal de « de donner acte aux Consorts [D], venant aux droits de Mme [F] veuve [D], que leur mère a voulu vendre en 2003 l'ensemble de sa propriété à M. [G] [P] en ce compris le passage supportant une servitude, qu'elle s'en est remise au notaire pour corréler le passage qu'elle reconnaissait, avec des désignations cadastrales, et de solliciter la mise hors de cause des concluants »

- ordonner à Maître [H] de procéder à l'établissement de l'acte rectificatif dont il a tous justificatifs utiles depuis fin 2011, à la vue de la procuration valablement signée par Mme [D], à ses frais exclusifs en ce que :

- ordonner que cet acte rectificatif soit publié sans frais pour M. [P] et pour la SCI Famille de Séguier,

- ordonner que Maître [H] soit condamné, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, à établir l'acte et à en justifier auprès de M. [P],

- ordonner la publication du jugement à intervenir,

- juger que le Magistrat qui prononce l'astreinte se réserve le droit de la liquider,

- ordonner avant dire doit une expertise et la désignation d'un géomètre expert géomètre afin de reprendre les actes en litige, et de déterminer le terrain d'assiette du passage querellé parcelle [Cadastre 27] lequel pourra s'adjoindre un expert foncier pour chiffrer la perte de valeur vénale aux frais avancés de la Compagnie des Sorbiers et de M. [N],

- condamner solidairement les défendeurs, à l'exclusion des consorts [D], au paiement d'une somme de 7.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner solidairement aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 11 juillet 2019, les consorts [D] prient la cour de :

- juger recevable mais mal fondé M. [P] en son appel,

- en réponse à l'interrogation du tribunal suivant jugement du 1er mars 2016, donner acte aux consorts [D] venant aux droits de Mme [F] veuve [D] :

* que leur mère a voulu vendre en 2003 l'ensemble de sa propriété à M. [P] en ce compris le passage supportant une servitude,

* qu'elle s'en est remis aux notaires pour corréler le passage qu'elle connaissait avec des désignations cadastrales,

- réformer le jugement du 19 février 2019 en ce qu'il rejette la demande de mise hors de cause des consorts [D] formée en l'absence de demande principale à leur encontre,

- en conséquence, prononcer la mise hors de cause des consorts [D],

- confirmer le jugement du 19 février 2019 en ce qu'il rejette la demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de condamnation aux dépens formée par M. [P] à l'encontre des consorts [D],

- rejeter la demande de condamnation de M. [P] à l'encontre des consorts [D] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

- condamner M. [P] à verser aux consorts [D] une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Par conclusions déposées le 31 janvier 2022, Maître [K] [H] demande à la cour de :

- déclarer irrecevable la demande indemnitaire formulée par M. [P] à l'encontre de Maître [H],

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [P] de ses demandes à l'encontre de Maître [H],

- condamner M. [P] à payer à Maître [H] une indemnité de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [P] aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 22 août 2022, Maître [Z] [A] prie la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [P] de ses demandes,

- débouter M. [P] de ses demandes à l'encontre de Maître [A],

- débouter toute partie de leurs demandes à l'encontre de Maître [A],

- condamner M. [P] à payer à Monsieur [Z] [A] une indemnité de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner toute partie succombante aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Laydeker-Sammarcelli-Mousseau.

Par conclusions déposées le 19 août 2022, la SCI Nauve des Bois demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 19 février 2019 rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux,

- constater que l'action intentée par M. [P] est irrecevable et mal fondée faute de publication aux Hypothèques conforme aux dispositions des articles 28-4 et 30-5 du décret du 4 janvier 1955,

A titre subsidiaire,

- juger que la SCI LA Nauve des Bois est régulièrement titrée sur la parcelle [Cadastre 27],

- juger prescrite l'action engagée par M. [P] et, en toutes hypothèses, constater la prescription acquisitive des propriétaires successifs (consorts [Y], SCI Nauve des Bois, M. [S]) sur la parcelle [Cadastre 27] par application de l'article 2272 alinéa 2 du code civil,

- débouter M. [P] de ses demandes ainsi que de celles formulées par les appelés en garantie à l'encontre de la concluante.

- rejeter leurs demandes et celles de M. [S].

En conséquence,

- débouter M. [S] de son appel en garantie à l'encontre de la SCI concluante.

A titre infiniment subsidiaire,

- condamner Maître [Z] [A] à garantir et relever indemnes les concluants de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre.

- surseoir à statuer sur les comptes entre les parties,

En toutes hypothèses,

-condamner M. [W] [S] et M. [G] [P] ou à défaut la partie succombante au paiement d'une indemnité de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner aux entiers dépens tant de première instance que d'appel, la partie succombante.

Par conclusions déposées le 31 août 2022, M. [W] [S] demande à la cour de :

*A titre principal :

- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux le 19 février 2019 en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de M. [G] [P] et l'a débouté de l'intégralité de ses demandes, et l'a condamné au paiement à M. [S] de la somme de 1000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens,

- déclarer irrecevables les demandes de M. [G] [P] et de la SCI Famille de Séguier en application des articles 28-4° c) et 30-5 du décret du 4 janvier 1955 relatives à la publicité foncière,

- déclarer irrecevables les demandes de M. [G] [P] et de la SCI Famille de Séguier faute d'intérêt et de qualité à agir,

- débouter M. [G] [P] et la SCI Famille de Séguier de l'ensemble de leurs demandes,

*A titre subsidiaire :

- déclarer M. [G] [P] et la SCI Famille de Séguier mal fondés en leurs demandes,

- débouter M. [G] [P] et la SCI Famille de Séguier de l'ensemble de leurs demandes,

*A titre infiniment subsidiaire,

- condamner Maître [Z] [A] et la SCI LA Nauve des Bois à garantir et relever indemne M. [W] [S] des condamnations prononcées à son encontre,

- débouter M. [R] [N], Maître [Z] [A], la SCI La Nauve des Bois de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de M. [W] [S],

En tout état de cause :

- condamner à titre reconventionnel M. [G] [P] et la SCI Famille de Séguier au paiement d'une indemnité de 5.000 € pour procédure abusive,

- condamner M. [G] [P] la SCI Famille de Séguier au paiement d'une indemnité de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens.

Par conclusions déposées le 25 août 2022, la société Compagnie des Sorbiers et M. [R] [N], intervenant forcé, demandent à la cour :

A titre liminaire,

- mettre hors de cause la Compagnie des Sorbiers,

A titre principal,

- déclarer irrecevable les demandes et prétentions de M. [P] pour irrégularité de publication au service de la publicité foncière, et défaut de qualité et d'intérêt pour agir,

- constatant l'absence de demandes et prétentions au fond de la SCI Famille de Séguier,

- déclarer irrecevables les demandes de la SCI Famille de Séguier, pour irrégularité de publication au service de la publicité foncière,

Subsidiairement,

- débouter purement et simplement M. [P] de l'intégralité de ses demandes,

- constater que M. [P] n'est pas propriétaire de la parcelle [Cadastre 27],

- constater que la Cour n'est saisie d'aucune demande et prétention de la SCI Famille de Séguier,

- juger que la cour n'est saisie d'aucune demande recevable et prétention de la SCI Famille de Séguier formulées dans le délai d'appel, de sorte qu'il n'y a pas lieu à examiner le surplus des demandes formulées par M. [P],

Plus subsidiairement,

- constater que M. [N] venant aux droits de la Compagnie des Sorbiers, elle-même venant aux droits de M. [S], de la SCI Nauve des Bois et des consorts [Y], justifie, de bonne-foi, d'une propriété par juste titre sur la parcelle [Cadastre 27] depuis plus de dix ans,

- débouter M. [P] de ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire,

- juger que la parcelle [Cadastre 27] est affectée en son intégralité (c'est-à-dire sur toute sa longueur et toute sa largeur), d'une servitude de passage au profit des parcelles [Cadastre 24] et [Cadastre 25], fonds dominants,

- condamner M. [W] [S] à payer à M. [N] venant aux droits de la Compagnie des Sorbiers, la somme de 554. 596 € à titre de dommages et intérêts pour perte de propriété de la parcelle [Cadastre 27],

A titre extraordinairement subsidiaire,

- débouter également M. [P] de sa demande d'expertise,

A défaut,

- juger que celle-ci interviendra aux frais avancés de M. [G] [P], seul demandeur à la procédure ainsi qu'à ladite mesure,

En tout état de cause,

- condamner M. [P], ou tout autre succombant, à verser à M. [N], venant aux droits de la Compagnie des Sorbiers la somme de 7.000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. [P] ou tout autre succombant, aux entiers dépens de l'instance, qui seront distraits au profit de Maitre Philippe Leconte de Lexavoue Bordeaux, Avocat, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 20 septembre 2022.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 5 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes de M.[P]

1. Au regard des règles de publicité foncière

La recevabilité des demandes de M. [P] est contestée en raison du défaut de publication au service de la publicité foncière, conforme aux dispositions du décret du 4 janvier 1955, de l'ensemble des assignations puisqu'il ne serait pas justifié de la publication de celles délivrées à MM. [A], à M. [S], à Me [H] et à la Compagnie des Sorbiers et que M.[P] n'a pas respecté en tout cas, le délai de 3 mois fixé par l'article 33 du décret précité.

M. [P] réplique que la formalité de la publication n'est pas applicable en l'espèce s'agissant d'une action en revendication qui n'y est pas soumise et qu'en tout état de cause il a procédé à la publication de l'ensemble des assignations qui peut intervenir jusqu'à la clôture des débats, y compris en appel.

Il est rappelé que l'arrêt avant dire droit du 29 mars 2022 a déjà déclaré recevables les demandes de M.[P] et de la SCI Famille de Séguier au regard des règles de publicité foncière et que cet arrêt mixte, non contesté par les parties, a autorité de chose jugée sur ce point.

Il est bon cependant, pour la clarté des développements qui suivent, de relever que pour déclarer ces demandes recevables, la cour a notamment dit que l'action de M. [P] ne pouvait être qualifiée d'action en revendication dans la mesure où il ne prétend pas être titulaire d'un droit de propriété sur la parcelle [Cadastre 27] mais demande justement l'établissement d'un acte rectificatif de vente incluant la parcelle [Cadastre 27], cette action tendant ainsi à faire reconnaître, comme préalable nécessaire à la passation de l'acte rectificatif de vente à son profit, le droit de propriété de son auteur, Mme [F] veuve [D] sur la dite parcelle qui, à le supposer établi, ne lui a donc jamais été transmis ni cédé.

2. Au regard de la qualité pour agir

Les parties ont été invitées par l'arrêt précité, à conclure sur la qualité pour agir de M. [P] dans la mesure où il apparaissait qu'il avait vendu ses parcelles [Cadastre 28] et [Cadastre 19] acquises de Mme [D], à la SCI Famille de Séguier par acte du 25 janvier 2010.

M. [S], M. [A], la Compagnie des Sorbiers et M. [R] [N] ainsi que la SCI Nauve des Bois soulèvent le défaut d'intérêt et de qualité pour agir de M. [P] dès lors qu'il n'est plus propriétaire des parcelles en cause et qu'il ne justifie pas de la perte de chance au titre des droits à construire qu'il invoque.

M. [P] soutient que son action individuelle vise à faire respecter la cessation d'une atteinte à sa propriété par les autres parties, qu'il a intérêt à récupérer la parcelle [Cadastre 27] puisqu'il démontre en être propriétaire et qu'il aurait au surplus perdu une chance dans le cadre de ses droits puisque le bien a été vendu et qu'à l'époque il disposait de droits à construire plus importants qu'il n'a pu utiliser.

L'article 31 du code de procédure civile prévoit que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

Il a été rappelé plus haut que l'action de M.[P] porte sur l'établissement d'un acte rectificatif de l'acte de vente du 30 décembre 2003 aux fins d'y inclure la parcelle [Cadastre 27], cette action tendant ainsi à faire reconnaître, comme préalable nécessaire à la passation de l'acte rectificatif de vente à son profit, le droit de propriété de son auteur, Mme [F] veuve [D] sur la dite parcelle.

Dès lors que M. [P] a cédé, en janvier 2010, les parcelles acquises dans l'acte du 30 décembre 2003 à la SCI Famille de Séguier, il est devenu sans droit ni qualité pour agir aux fins de voir rectifier l'acte de vente d'un bien immobilier qui ne lui appartient plus.

Il est d'autant plus irrecevable dans cette action que ses prétentions se heurtent aux titres de propriété successifs, régulièrement publiés des 5 septembre 2008, 31 janvier 2011 et, en dernier lieu du 13 juillet 2020, attribuant la propriété de la parcelle litigieuse à M.[S], puis à la Compagnie des Sorbiers et enfin à M.[R] [N], actuel propriétaire.

Il en résulte que même si M. [P] avait conservé sa qualité de propriétaire, il resterait irrecevable en son action puisqu'elle ne pourrait être examinée que si, au préalable, le titre de propriété régulièrement publié et portant sur la parcelle [Cadastre 27], était annulé ou rectifié, ce qui n'a jamais été demandé par M.[P].

Par ailleurs, ayant perdu sa qualité de propriétaire des parcelles vendues à la SCI Famille de Séguier, M. [P] ne justifie pas non plus d'un intérêt pour agir au titre d'une perte de chance de droits à construire, cette perte de chance étant attachée à la propriété immobilière qu'il a transférée à l'acquéreur de l'immeuble.

Les demandes de M. [P] qui procèdent toutes de la rectification de l'acte de vente du 30 décembre 2003 seront donc déclarées irrecevables et le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef par motifs substitués.

Sur la recevabilité des demandes de la SCI Famille de Séguier

1.Au regard des règles de publicité foncière

Il a été rappelé plus haut que l'arrêt avant dire droit du 29 mars 2022 a déclaré recevables les demandes de M.[P] et de la SCI Famille de Séguier au regard des règles de publicité foncière et que cet arrêt mixte, non contesté par les parties, a autorité de chose jugée sur ce point.

La fin de non recevoir soulevée par certains intimés au motif que les demandes de la SCI Famille de Séguier formées dans le cadre de son intervention volontaire n'ont pas été publiées au registre de la publicité foncière ne peut donc pas prospérer.

2. Au regard du régime de l'intervention volontaire

M. [A], M. [S], la Compagnie des Sorbiers avec M. [N] et la SCI Nauve des Bois soulèvent l'irrecevabilité des demandes formulées pour la première fois en appel par la SCI Famille de Séguier, dans le cadre de son intervention volontaire formalisée par conclusions du 9 otobre 2019, s'agissant de demandes personnelles non soumises au premier juge.

La SCI Famille de Séguier réplique que son intervention volontaire est recevable dès lors qu'elle se rattache par un lien suffisant aux prétentions originaires et elle souligne qu'aucune des parties à la procédure n'a soulevé de moyens inhérents au défaut de qualité ou d'intérêt avant l'arrêt avant dire droit.

Sur ce dernier point, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 123 du code de procédure civile, les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause et que les intimés sont ainsi recevables à invoquer non seulement le défaut de qualité pour agir de M. [P], suite à l'invitation de l'arrêt avant dire droit, mais aussi l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de la SCI Famille de Séguier.

Pour le reste, il est exact que sont irrecevables les interventions volontaires en cause d'appel qui ont pour objet de demander des condamnations personnelles non soumises aux premiers juges (Civ. 1ère civ., 11 Juillet 2018, n° 17-18.177).

Dans le dernier état des conclusions d'appelant du 2 septembre 2022, en dehors des demandes présentées au seul profit de M. [P], les autres demandes sont formées également au profit de la SCI Famille de Séguier en qualité d'intervenante volontaire et notamment celles tendant à voir:

- condamner Maître [H] au paiement d'une somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts, en raison de son abstention fautive et préjudiciable dans la passation d'acte rectificatif pour laquelle il disposait de l'intégralité des pièces,

- ordonner à Maître [H] de procéder à l'établissement de l'acte rectificatif dont il a tous justificatifs utiles depuis fin 2011, à la vue de la procuration valablement signée par Mme [D], à ses frais exclusifs en ce que :

- ordonner que cet acte rectificatif soit publié sans frais pour M. [P] et pour la SCI Famille de Séguier,

- ordonner que Maître [H] soit condamné, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, à établir l'acte et à en justifier auprès de M. [P],

- ordonner la publication du jugement à intervenir,

- juger que le Magistrat qui prononce l'astreinte se réserve le droit de la liquider,

- ordonner avant dire doit une expertise et la désignation d'un géomètre expert géomètre afin de reprendre les actes en litige, et de déterminer le terrain d'assiette du passage querellé parcelle [Cadastre 27] lequel pourra s'adjoindre un expert foncier pour chiffrer la perte de valeur vénale aux frais avancés de la Compagnie des Sorbiers et de M. [N],

- condamner solidairement les défendeurs, à l'exclusion des Consorts [D], au paiement d'une somme de 7.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner solidairement aux entiers dépens.

L'ensemble de ces demandes sont donc irrecevables puisqu'elles tendent à obtenir des condamnations personnelles non soumises au premier juge, l'intervention volontaire de la SCI Famille de Séguier n'étant survenue qu'en appel.

L'irrecevabilité des demandes de M. [P] et de la SCI Famille de Séguier rend sans objet les appels incidents des parties intimées et notamment leurs demandes de garanties ou de mise hors de cause.

La procédure engagée ne présentant aucun caractère abusif à l'égard de M. [S], il ne sera pas fait droit à sa demande d'indemnité pour procédure abusive.

Il est en revanche équitable d'allouer aux intimées, les indemnités fixées au dispositif au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les autres demandes étant rejetées.

M. [P] et la SCI Famille de Séguier supporteront les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Vu l'arrêt avant dire droit du 29 mars 2022;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions;

Y ajoutant;

Déclare irrecevables les demandes de la SCI Famille de Séguier au titre du régime de l'intervention volontaire;

Condamne M. [G] [P] et la SCI Famille de Séguier in solidum à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2.500 € à M. [S];

Condamne M. [G] [P] à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les indemnités suivantes :

- 1.500 € aux consorts [D] ensemble,

- 2.500 € chacun à M. [K] [H], M. [Z] [A], la SCI Nauve des Bois,

- 2.500 à la Compagnie des Sorbiers et M. [R] [N] ensemble,

Condamne in solidum M. [G] [P] et la SCI Famille de Séguier aux dépens d'appel qui pourront êtré recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/01568
Date de la décision : 25/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-25;19.01568 ?
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