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20/10/2022 | FRANCE | N°19/01458

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 20 octobre 2022, 19/01458


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 20 OCTOBRE 2022





N° RG 19/01458 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5NJ







Madame [B] [N] NEE [W]





c/



SARLU [E] MENUISIER EBENISTE



























Nature de la décision : AU FOND























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Grosse délivrée le :



aux avocats





Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 février 2019 (R.G. 18/00953) par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d'appel du 15 mars 2019



APPELANTE :



[B] [N] NEE [W]

née le 18 Mai 1960 à CHESTER (ROYAUME-UNI)

de nationalité Britannique

Prof...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 20 OCTOBRE 2022

N° RG 19/01458 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5NJ

Madame [B] [N] NEE [W]

c/

SARLU [E] MENUISIER EBENISTE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 février 2019 (R.G. 18/00953) par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d'appel du 15 mars 2019

APPELANTE :

[B] [N] NEE [W]

née le 18 Mai 1960 à CHESTER (ROYAUME-UNI)

de nationalité Britannique

Profession : Avocate,

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Sylvie BERTRANDON de la SELARL BARRET-BERTRANDON-JAMOT-MALBEC-TAILHADES, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉE :

SARL [E] MENUISIER EBENISTE, société inscrite au RCS de PERIGUEUX sous le numéro 752 758 953 demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Claudia TIERNEY-HANCOCK de la SELARL VESUNNA AVOCATS, avocat au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Selon plusieurs devis en date du 29 août 2017, Mme [B] [N] née [W] a commandé à la société [E] Ludovic, menuisier ébéniste :

- un lot de menuiseries bois pour un montant de 29 811,54 euros selon devis n°0245 en date du 21 juin 2017 ;

- deux grilles de défense pour un montant de 564,94 euros selon devis n°0246 en date du 19 juin 2017 ;

- deux paires de volets pour un montant de 1 609,01 euros selon devis n°0247 en date du 26 juin 2017 ;

- une porte d'entrée en ventail pour un montant de 1 655,04 euros selon devis n° 0251 en date du 28 août 2017.

Mme [N] a versé quatre acomptes pour un montant total de 10 092,15 euros.

Les menuiseries ont été commandées par 1a société [E] Ludovic à son fournisseur Seguy.

Mme [N] s'est opposée à la livraison de 1'ensemble des marchandises et à la poursuite du chantier au motif que la couleur des fenêtres livrées ne correspondait pas à celle prévue à la commande.

Par deux courriers des 8 janvier et 21 février 2018, le conseil de la société [E] Ludovic a soutenu à Mme [N] que les menuiseries en chêne étaient conformes à la commande qui ne prévoyait aucune couleur particulière.

En l'absence d'accord amiable, la société à responsabilité limité unipersonnelle [E] Menuisier Ebéniste (la SARLU [E]) a, suivant acte d'huissier du 14 juin 2018, assigné Mme [N] devant le tribunal de grande instance de Périgueux afin de constater le caractère abusif de la rupture contractuelle et d'obtenir l'indemnisation de divers préjudices.

Par jugement réputé contradictoire du 12 février 2019, le tribunal de grande instance de Périgueux a :

- condamné Mme [N] à payer à la SARLU [E] les sommes de :

- 15 804,03 euros au titre de son préjudice matériel avec intérêt au taux légal à compter du 14 juin 2018,

- 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile avec intérêt au taux légal à compter du présent jugement ;

- dit que les intérêts seront capitalisés en application de l'article 1343-2 du code civil ;

- débouté la SARLU [E] de ses autres demandes ;

- condamné Mme [N] aux dépens de l'instance ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Mme [N] a relevé appel de cette décision le 15 mars 2019.

Dans ses dernières conclusions du 07 octobre 2021, Mme [N] demande à la cour, au visa des articles 471 et suivants du code de procédure civile, 1163 et 1604 du code civil, L271-4 et R111-1 du code de la consommation, de la déclarer recevable et bien fondée en son appel ainsi que d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement de première instance et, statuant à nouveau, de :

- prononcer la résolution du marché conclu avec la SARLU [E] ;

- condamner en conséquence la SARLU [E] :

- à lui payer la somme de 10 095 euros, correspondant aux acomptes versés en exécution du marché ;

- à reprendre les menuiseries non conformes qui lui ont été livrées le 19 octobre 2017, dans un délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt à intervenir, sous peine d'une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

- au paiement de la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

- au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait notamment valoir que :

- Me [C], huissier de justice, n'a pas délivré l'acte introductif d'instance à personne lors de son passage à son domicile le 16 juin 2018 ; il a laissé un simple avis de passage et l'assignation a par la suite été conservée à l'étude sans qu'il en soit pris connaissance ; elle ne connaît pas le rôle de l'huissier ; elle a multiplié les déplacements en Ecosse où elle réside habituellement ; le jugement a donc été rendu par défaut avec négligence des diligences faites en vue de donner connaissance de l'acte introductif d'instance à une partie demeurant à l'étranger ; le jugement encourt donc réformation ;

- le devis n'est pas signé par ses soins mais par une tierce personne, en l'occurrence M. [Z] [J] ; ce document n'est ni daté ni revêtu de la formule manuscrite 'Bon pour accord, lu et accepté' ; faute pour la SARLU [E] d'apporter la preuve de son engagement ferme et définitif, le jugement est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- en tant que professionnel, c'est à l'entrepreneur de démontrer qu'il a établi des devis clairs, précis et dénués d'équivoque ; les devis sont insuffisants et ne lui permettent pas de s'assurer des caractéristiques des matériaux livrés ; les devis litigieux doivent être considérés comme irréguliers et les conséquences de ces irrégularités engagent la responsabilité contractuelles de l'artisan ;

- les menuiseries livrées par la SARLU [E] ne sont pas de couleur chêne naturel ; il s'agit de menuiseries très teintées qui ne correspondent pas à la commande passée ; il y a donc bien non-conformité entre la commande passée et les produits livrés ;

- elle a bien refusé les marchandises le jour même de la livraison.

Suivant ses dernières conclusions du 18 juin 2020, la SARLU [E] demande à la cour, au visa des articles 1101, 1113 et 1217 du code civil, de : 

- constater que le contrat a été rompu à tort par Mme [N] ;

- confirmer par conséquent le jugement attaqué en ce qu'il a :

- condamné Mme [N] à lui payer les sommes de :

- 15 804,03 euros au titre de son préjudice matériel avec intérêt au taux légal à compter du 14 juin 2018,

- 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile avec intérêt au taux légal à compter du présent jugement ;

- dit que les intérêts seront capitalisés en application de l'article 1343-2 du code civil ;

Statuant à nouveau,

- condamner Mme [N] à lui payer les sommes de :

- 4 000 euros au titre de son préjudice moral, avec intérêt au taux légal à compter du 14 juin 2018 ;

- 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de la procédure en appel ;

- débouter Mme [N] de l'intégralité de ses demandes ;

- ordonner que les sommes mises à la charge de Mme [N] portent intérêts au taux légal sur l'intégralité des sommes allouées à compter de la demande en justice en application des dispositions de l'article 1236-1 et suivants du code civil ;

- dire que les intérêts seront capitalisés à son profit, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

- condamner l'appelante aux entiers dépens, en ce compris les frais éventuels d'exécution.

Elle fait notamment valoir que :

- Mme [N] et M. [J], son compagnon, se sont toujours présentés comme résidant à [Localité 1] en Dordogne ; ils n'ont jamais prétendu résider en Ecosse ; l'avis de passage a été déposé pendant que ceux-ci se seraient trouvés en vacances ; le jugement de première instance a été signifié à Mme [N] à son adresse habituelle situé à [Localité 1] en Dordogne ;

- le courrier de M. [J] du 17 juillet 2018 justifie que Mme [N] était au courant de l'avis de passage de Me [C] au moins dès cette date ; elle était donc en capacité de constituer avocat et faire valoir ses arguments à l'audience dans les délais ;

- par la signature du devis, un contrat s'est formé entre les parties ; les devis ont été datés et signés le 29 août 2017 par M. [J] ; Mme [N] ne les a jamais contestés ; la mention 'bon pour accord, lu et accepté' n'est pas une condition de formation du contrat ;

- le versement de l'acompte matérialise l'acceptation définitive et irrévocable du contrat par le client, lequel est devenu ferme et définitif ;

- elle n'a jamais caché à Mme [N] et M. [J] qu'il sollicitait la société Seguy pour la fabrication des menuiseries ;

- lors de l'établissement des devis, M. [E] a montré à Mme [N] et M. [J] son catalogue d'échantillon ; ils ont choisi les menuiseries en chêne naturel ce qui est attesté par les devis ; par conséquent Mme [N] a entendu rompre le contrat pour un motif qui est inexact.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 septembre 2022.

MOTIVATION

Il doit être tout d'abord constaté que Mme [N] critique les diligences réalisées par l'huissier de justice chargé de lui délivrer l'acte introductif d'instance, estimant dans les motifs de ses dernières conclusions que le jugement déféré doit être 'réformé pour vice de procédure'. Elle ne formule cependant aucune demande de nullité de l'assignation ou de la décision attaquée dans le dispositif de celles-ci. La cour n'est donc pas saisie de prétentions sur ce point.

L'appelante conteste ensuite la validité des devis produits par la SARLU [E].

Elle soutient en premier lieu ne pas avoir été la signataire de ces documents mais que ceux-ci ont été paraphés par son compagnon M. [J]. Pour autant, elle ne conteste pas que les travaux devaient être réalisés sur sa propriété et avoir personnellement versé à l'entrepreneur la somme de 10 092,15 euros à titre d'acompte.

Mme [N] reproche également au devis l'absence de date et de la mention : 'Bon pour accord, lu et accepté'. Cependant, aucune obligation légale n'impose l'apposition de cette formule alors que les documents émis par la SARLU [E] portent bien la date du 21 juin 2017.

La validité des devis ne saurait dès lors être remise en cause. En conséquence, le premier juge n'a donc pas commis d'erreur manifeste d'appréciation comme le soutient l'appelante.

Ainsi, un contrat a bien été valablement formé entre l'appelante et la SARLU [E].

Il sera en outre observé que les travaux ont effectivement débuté au domicile de Mme [N] sans opposition de celle-ci jusqu'à sa demande d'interruption du chantier liée à un différent sur le coloris des menuiseries.

L'appelante reproche en effet à la SARLU [E] l'absence de précisions suffisantes dans ses devis pour ce qui concerne la couleur des menuiseries devant être posées à son domicile. Elle estime que les fenêtres installées ne présentent pas le coloris commandé.

Comme l'observe à raison le jugement entrepris, les devis ne contiennent aucune précision sur le coloris, ces documents mentionnant simplement la commande de produits 'de chêne lamellé collé'.

Dès lors, la question de la couleur n'est pas entrée dans le champ contractuel de sorte que la non-conformité invoquée par l'appelante n'est pas établie, étant ajouté que la SARLU [E] justifie :

- s'être présentée, avant le début des travaux, au domicile de Mme [N] en compagnie de son fournisseur afin de lui montrer des échantillons des menuiseries devant être installées à son domicile ;

- que le produit en 'chêne lamellé collé' ne comporte qu'un seul coloris et peut supporter une peinture additionnelle correspondant au souhait du client.

Aucun élément de nature technique ne démontre que les menuiseries qui avaient commencé à être posées au domicile de l'appelante n'étaient pas constituées de chêne naturel, l'attestation du fournisseur établissant, à défaut de plus utile contestation, l'exacte composition de ces matériaux.

Dès lors, Mme [N] ne peut soutenir avoir été mal informée par la SARLU [E] sur le choix du coloris des menuiserie et arguer d'un défaut de conformité du produit livré et installé pour rompre le contrat la liant à l'entrepreneur. Elle doit donc respecter son engagement contractuel jusqu'à son terme

La SARLU [E] justifie d'un préjudice financier, ayant dû régler à son fournisseur le montant des produits acquis et donc certains ne peuvent être réutilisés car adaptés aux dimension de la résidence de Mme [N]. Le jugement ayant condamné cette dernière à lui verser la somme de 15 804,03 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 14 juin 2018, sera donc confirmé.

En revanche, l'intimée n'établit pas que le litige l'opposant à sa cliente a nui à sa réputation de sorte que le jugement entrepris ayant rejeté sa demande au titre du préjudice moral sera confirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Outre la somme mise à la charge de Mme [N] en première instance, il y a lieu en cause d'appel de la condamner au versement à la SARLU [E] d'une indemnité complémentaire de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter les autres demandes de ce chef.

Mme [N] sera également condamnée au paiement des dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

- Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 février 2019 par le tribunal de grande instance de Périgueux ;

Y ajoutant ;

- Rejette l'intégralité des demandes présentées par Mme [B] [N] née [W] à l'encontre de la société à responsabilité limitée [E] Menuisier Ebéniste ;

- Condamne Mme [B] [N] née [W] à verser à la société à responsabilité limitée [E] Menuisier Ebéniste une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne Mme [B] [N] née [W] au paiement des dépens d'appel.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/01458
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;19.01458 ?
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