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20/10/2022 | FRANCE | N°19/01389

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 20 octobre 2022, 19/01389


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------







ARRÊT DU : 20 OCTOBRE 2022







N° RG 19/01389 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5HK









SA GENERALI IARD

SARL IC NERGIE





c/



Monsieur [O] [J]

SARL SOLEIL DE DORDOGNE

Compagnie d'assurances SMABTP

SARL INGENIERIE CONCEPT BATIMENT (ICB)

SARL SOCIETE D'EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS LIONEL GOUDY

Compagnie d'assurances SMABTP

Co

mpagnie d'assurances GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE

SAS AGRIDOR



























Nature de la décision : AU FOND

















Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu l...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 20 OCTOBRE 2022

N° RG 19/01389 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5HK

SA GENERALI IARD

SARL IC NERGIE

c/

Monsieur [O] [J]

SARL SOLEIL DE DORDOGNE

Compagnie d'assurances SMABTP

SARL INGENIERIE CONCEPT BATIMENT (ICB)

SARL SOCIETE D'EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS LIONEL GOUDY

Compagnie d'assurances SMABTP

Compagnie d'assurances GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE

SAS AGRIDOR

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 01 février 2019 (R.G. 17/00610) par le Tribunal de Grande Instance de BERGERAC suivant deux déclarations d'appel des 12 et 19 mars 2019

APPELANTES :

GENERALI IARD, Société Anonyme au capital de 94.630.300 euros, Immatriculée au RCS de PARIS sous le n°552062663 Domiciliée [Adresse 2] agissant poursuites et diligences de son Représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

appelante dans la déclaration d'appel du 12.03.19

IC NERGIE, Société à responsabilité limitée au capital de 10.000€, Immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 517550679, Domiciliée [Adresse 4] agissant poursuites et diligences de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège

appelante dans la déclaration d'appel du 12.03.19

Représentées par Me Mathieu RAFFY de la SELARL MATHIEU RAFFY - MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistées de Me Thomas MITTEAU de la SELAS CHEVALIER - MARTY - PRUVOST Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

[O] [J]

né le 07 Janvier 1960 à [Localité 10]

de nationalité Française

Profession : Exploitant agricole,

demeurant [Adresse 8] - [Localité 7]

intimé dans les 2 déclarations d'appel des 12.03.19 et 19.03.19

SOLEIL DE DORDOGNE, SARL immatriculée au RCS de Bergerac sous le n° 522 553 262, dont le siège social est domicilié « [Adresse 8] » à [Localité 7], représenté par son gérant domicilié en cette qualité audit siège

intimé dans la déclaration d'appel du 12.03.19

Représentés par Me Karine PERRET de la SELAS PERRET & ASSOCIES, avocat au barreau de BERGERAC

La SMABTP - SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (société d'assurance mutuelle à cotisations variables)

recherchée en qualité d'assureur de la société INGENIERIE CONCEPT BATIMENT (ICB), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 6]

intimé dans la déclaration d'appel du 12.03.19

La SARL INGENIERIE CONCEPT BATIMENT (ICB) prise en la personne de

son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 5]

intimé dans la déclaration d'appel du 12.03.19

Représentées par Me Claire PELTIER, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistées de Me Virgile RENAUDIE de la SELARL R.L, avocat au barreau de BRIVE

La SARL SOCIETE D'EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS LIONEL GOUDY, immatriculée au RCS de PERIGUEUX sous le numéro 432 321 081, dont le siège social est situé [Adresse 9], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège

intimé dans la déclaration d'appel du 12.03.19 et appelant dans la déclaration d'appel du 19.03.19

La SMABTP, ès-qualité d'assureur de la SARL SOCIETE D'EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS LIONEL GOUDY, Société d'assurance mutuelles à cotisation variable, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 775 684 764, dont le siège social est situé [Adresse 6], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

intimé dans la déclaration d'appel du 12.03.19 et appelant dans la déclaration d'appel du 19.03.19

Représentées par Me PELTIER substituant Me Jean-jacques BERTIN, avocat au barreau de BORDEAUX

Compagnie d'assurances GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE Caisse de Réassurance Mutuelle Agricole, entreprise régie par le code des Assurances Dont le siège est [Adresse 1], immatriculée au RCS de NIORT sous le numéro 381 043 686

intimé dans la déclaration d'appel du 19.03.19

Représentée par Me Alice DELAIRE de la SELARL SELARL PIPAT - DE MENDITTE - DELAIRE - DOTAL, avocat au barreau de PERIGUEUX

La Société AGRIDOR, SAS immatriculée au RCS de BERGERAC sous le n°775.569.577, dont le Siège Social est [Adresse 3])

intimée dans les 2 déclarations d'appel des 12.03.19 et 19.03.19

Représentée par Me Dominique ASSIER de la SCP MONEGER-ASSIER-BELAUD, avocat au barreau de BERGERAC

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 septembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller

Madame Christine DEFOY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

M. [O] [J], propriétaire de terres agricoles sises lieu-dit [Adresse 8], commune de [Localité 7], a fait construire un bâtiment agricole en bardage métallique par la société à responsabilité limitée Goudy à usage de hangar et autorisé la société à responsabilité limitée Soleil de Dordogne, dont il est gérant, à faire poser sur le versant sud de la toiture de ce bâtiment une installation de panneaux photovoltaïques.

La Sarl Soleil de Dordogne a confié la pose de ces panneaux à la société à responsabilité limitée IC Nergie laquelle l'a sous-traitée à la société à responsabilité limitée Ingénierie Concept Bâtiment (la société ICB).

Au terme d'un bail commercial du 1er août 2013, M. [O] [J] a loué ce bâtiment à la société par actions simplifiée Agridor pour le stockage de produits agricoles lié à son exploitation.

Rapidement, des fuites d'eau sont apparues ayant donné lieu à des infiltrations et la société Agridor s'est alors rapprochée de son bailleur qui s'est lui même adressé aux constructeurs.

Ces infiltrations ont fait l'objet d'un constat du 26 mai 2014 dressé par la SCP Masson & Associés, huissiers de justice à Bergerac.

M. [O] [J] ayant vainement tenté de trouver une solution réparatrice a sollicité avec la société Soleil de Dordogne la désignation d'un expert judiciaire. Par ordonnance de référé rendue le 7 octobre 2014, M. [R] [G] a été désigné en qualité d'expert et celui-ci s'est adjoint un sapiteur en la personne de M. [P] [Y], expert agro-alimentaire.

M. [R] [G] a déposé son rapport définitif le 16 janvier 2017.

Par exploit d'huissier en date des 9,12 15 et 21 juin 2017, M. [O] [J] et la société Soleil de Dordogne ont saisi en lecture de rapport d'expertise le tribunal de grande instance de Bergerac sur le fondement de l'article 1792 du code civil, sollicitant la condamnation conjointe et solidaire de la société Goudy et de son assureur, la SMABTP, laquelle, par exploit d'huissier en date du 12 décembre 2017, a appelé en garantie la société anonyme Groupama Centre Atlantique, assureur de la société Agridor.

Par jugement en date du 1er février 2019, le tribunal de grande instance de Bergerac a :

- déclaré recevables les conclusions déposées par la société Goudy, défendeur principal, la veille de l'ordonnance de clôture.

- déclaré irrecevables les conclusions de la société ICB et de son assureur, la SMABTP en date du 26 novembre 2018 et les a écartées des débats, en application de l'article 783 du code de procédure civile,

Vu l'article 1792 du code civil:

- déclaré la société Goudy et la société IC Nergie, responsable de son sous-traitant ICB, entièrement responsables, chacun pour ce qui le concerne, des dommages subis par M. [O] [J].

- dit et jugé que la responsabilité de M. [O] [J] ne peut être recherchée.

- constaté qu'aucune demande indemnitaire n'est formulée pour la société Soleil de Dordogne.

En conséquence:

- condamné in solidum la société Goudy et son assureur SMABTP à régler à M.[O] [J] le coût des travaux de reprise des désordres affectant son bâtiment, soit la somme HT de 571 644,30 euros.

- dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du présent jugement.

- condamné in solidum la Société Goudy et son assureur SMABTP à régler à M.[O] [J] les indemnités suivantes :

- 238 279,20 euros au titre des travaux de dépose de l'installation électrique et de fourniture et pose de nouveaux panneaux photovoltaïques, pareils travaux étant indissociables de ceux préconisés par l'expert [R] [G],

- 145 000 euros correspondant aux pertes de loyers, le coût des travaux de reprise des désordres affectant son bâtiment.

- dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du présent jugement.

- condamné in solidum la société IC Nergie et son assureur Générali Iard à payer à M. [O] [J] une indemnité de 120 750 euros au titre de la perte de la production électrique pendant la durée des travaux à réaliser.

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

- condamné in solidum la Société Goudy et son assureur SMABTP ainsi que la société IC Nergie et son assureur Générali Iard à verser a M. [O] [J] une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

- condamné in solidum la société Goudy et son assureur SMABTP ainsi que la société IC NERGIE et son assureur Générali Iard aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration électronique en date du 12 mars 2019, enregistrée sous le numéro 19/01389, la société Générali Iard et la société IC Nergie ont relevé appel de ce jugement limité aux dispositions ayant:

- déclaré la société IC Nergie responsable de son sous-traitant, entièrement responsable, chacun pour ce qui le concerne, des dommages subis par M. [O] [J],

- dit et jugé que la responsabilité de M. [O] [J] ne peut être recherchée,

- les a condamnés (dont la société IC Nergie) in solidum à payer à M. [J] une indemnité de 120.750 euros au titre de la perte de production électrique pendant la période des travaux à réaliser,

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraire formées par les parties,

- a condamnés in solidum avec la société Goudy et son assureur, la SMABTP à verser à M. [O] [J] une indemnité d'un montant de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamnés, in solidum avec la société Goudy et son assureur, la SMABTP, aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration électronique en date du 19 mars 2019, enregistrée sous le numéro 19/01389, la SMABTP et la société Goudy ont relevé appel de ce jugement limité aux dispositions ayant:

- déclaré la société Goudy et la Société IC Nergie, responsable de son sous-traitant ICB, entièrement responsables chacune pour ce qui la concerne, des dommages subis par M. [O] [J].

- dit et jugé que la responsabilité de M. [O] [J] ne peut être recherchée.

- condamné in solidum la Société Goudy et son assureur la SMABTP à régler à M. [O] [J] le coût des travaux de reprise des désordres affectant son bâtiment soit la somme hors taxe de 571.644,30 euros.

- dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du présent jugement.

- condamné in solidum la Société Goudy et son assureur la SMABTP à régler à M. [O] [J] les indemnités suivantes :

-238.279,20 euros au titre des travaux de dépose de l'installation électrique et de fourniture et pose de nouveaux panneaux photovoltaïques, pareils travaux étant indissociables de ceux préconisés par l'expert [R] [G] ;

-145.000 euros correspondant aux pertes de loyers, le coût des travaux de reprise des désordres affectant son bâtiment.

- dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du présent jugement.

- condamné in solidum la société Goudy et son assureur la SMABTP ainsi que la Société IC Nergie et son assureur Générali à verser à M. [O] [J] une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

-condamné in solidum la société Goudy et son assureur SMABTP ainsi que la Société IC Nergie et son assureur Générali aux entiers dépens de l'instance.

La société Générali Iard et la société IC Nergie, dans leurs dernières conclusions d'appelantes en date du 11 juin 2019, demandent à la cour, au visa des articles 1231-1 et 1792 du code civil, de :

A titre principal,

Infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bergerac le 1er février 2019 (RG17/00610) en ce qu'il a retenu la responsabilité d'IC Nergie dans la survenue des désordres allégués et l'a condamnée in solidum avec Générali à verser 120.700 euros à M. [J] au titre des pertes de production électrique pendant la durée des travaux réparatoires,

Infirmer le même jugement en ce qu'il a écarté la responsabilité de M. [J],

Et statuant à nouveau,

- constater que la responsabilité de la Société IC Nergie n'est pas engagée.

- constater que M. [J] est en partie responsable des désordres allégués,

- mettre purement et simplement hors de cause IC Nergie et son assureur Générali,

A titre subsidiaire,

Infirmer le jugement en ce qu'il a écarté le recours formé par IC Nergie et Générali à l'encontre de la société ICB et de son assureur la SMABTP,

Statuant à nouveau,

- déclarer recevables IC Nergie et Générali dans leurs recours,

- condamner la société ICB et son assureur la SMABTP à relever et garantir indemne les concluantes de toutes condamnations qui seraient prononcées à leurs encontre Générali,

- dire et juger que la Compagnie Générali ne saurait être tenue au-delà des termes et limites de la police souscrite, franchises et plafonds de garantie, notamment,

- condamner tout succombant à verser aux concluantes 5.000euros au titre de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Michel Puybaraud (Avocat au Barreau de Bordeaux).

La SMABTP et la société Goudy, dans leurs dernières conclusions d'appelantes en date du 10 septembre 2019, demandent à la cour, au visa des articles 1147, 1382 et 1792 du code civil, de :

Réformer le jugement déféré quant au montant de l'indemnisation allouée à M.[J],

Réformer le jugement déféré en ce qu'il n'a pas fait droit aux recours dirigés contre M. [J] et la société Agridor ainsi que l'assureur de cette dernière,Groupama,

Réformer le jugement déféré en ce qu'il n'a pas fait application des franchises contractuelles et plafond de garantie de la SMABTP,

Statuant à nouveau :

- limiter le montant de la condamnation qui pourrait être prononcée à l'encontre de la société Goudy et de la SMABTP à la somme de 473.524,80 euros HT correspondant au montant des travaux de reprise chiffrés par l'expert judiciaire ;

- dire et juger M. [J] non fondé en son appel incident.

- débouter M. [J] de l'intégralité de ses demandes.

En tout état de cause,

- condamner in solidum M. [J], la SAS Agridor et son assureur la Compagnie Groupama à garantir et relever indemne la SMABTP et la société Goudy de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre.

- dire et juger que la SMABTP est bien fondée à opposer :

- une franchise contractuelle de 20 % du montant des dommages avec un minimum de 10 franchises statutaires, soit 1.650 euros, et un maximum de 50 franchises statutaires, soit 8.250 euros au titre des travaux réparatoires,

- une franchise d'un montant de 6 franchises statutaires, soit 990 euros au titre des préjudices immatériels, cette franchise étant opposable à toute partie,

- un plafond de garantie fixé à 1.000.000 euros au titre des dommages matériels et 500.000 euros au titre des dommages immatériels.

- rejeter le surplus des demandes, fins et prétentions dirigées à l'encontre de la SMABTP et de la société Goudy ;

- condamner tous succombants à leur verser à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Jean Jacques Bertin conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

M.[J] et la société Soleil de Dordogne, dans leurs dernières conclusions d'intimés en date du 8 novembre 2019, demandent à la cour, de :

- dire et juger recevable mais mal fondé l'appel interjeté par la société Goudy et son assureur, la SMABTP ;

- dire et juger recevable mais mal fondé l'appel interjeté par la société IC Nergie et son assureur, Générali Iard ;

En conséquence :

Confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bergerac le 1er février 2019 entre les parties en toutes ses dispositions, sauf :

- en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire des concluants concernant le bouchage et le recreusement du fossé,

- en ce qu'il a arrêté au mois d'octobre 2018 le décompte du préjudice résultant de la perte de loyers pour les concluants,

- en ce qu'il a rejeté la demande des concluants en indemnisation de leur perte de chiffre d'affaires pendant la durée de la procédure d'expertise,

Statuant à nouveau sur ces trois points,

- condamner in solidum la société Goudy et son assureur, la SMABTP :

- au paiement de la somme de 15.607,75 euros (5.902,75 euros + 9.705 euros) au titre des travaux de bouchage et recreusement du fossé nécessaire aux engins pour accéder au chantier

- au paiement des pertes de loyers, à hauteur de 2.500 euros HT par mois, depuis 2014 et jusqu'à la réception des travaux de reprise des ouvrages affectés de désordres

- au paiement de la somme de 15.000 euros au titre de la perte de chiffre d'affaires générée par le temps considérable passé par M. [J] pour préparer les travaux d'expertises amiable et judiciaire

- condamner in solidum les entreprises Goudy, IC Nergie, SMABTP et Générali Iard au paiement d'une juste indemnité de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Michel Perret, Avocat, aux offres de droit.

La société Agridor, dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 18 août 2022, demande à la cour, au visa des 1792 et suivants du code civil, de :

- juger que la société Générali et de la société IC Nergie ne présentent aucune demande à son encontre ;

- juger que l'appel incident de M. [J] et de la société Soleil de Dordogne n'est pas dirigé à son encontre;

- débouter la société Goudy et la SMABTP de leurs demandes formées à son encontre;

Confirmer le jugement rendu le 1er février 2019 par le tribunal de grande instance de Bergerac;

Y ajoutant, afin de réparer l'omission de statuer des premiers juges,

- la mettre hors de cause ;

- condamner tout succombant à lui payer une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Moneger Assier Belaud sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Groupama Centre Atlantique, dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 16 septembre 2019, demande à la cour, de :

Confirmer le jugement entrepris,

Et, y ajoutant, afin de réparer l'omission de statuer des premiers juges sur ce point,

- débouter la SMABPT et la société Goudy de leur demande de garantie à son égard,

- condamner in solidum la SMABTP et la société Goudy à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la SMABTP et la société Goudy aux dépens d'appel.

La SMABPT et la société ICB, dans leurs dernières conclusions d'intimées en date du 9 septembre 2019, demandent à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, de :

- rejeter toutes conclusions contraire,

Confirmer le jugement en ce qu'il a mis hors de cause la société ICB et son assureur SMABTP,

au besoin par substitution de motifs, notamment en déclarant nulle et sans effets l'assignation délivrée à la demande de M. [J] et de la Société Soleil de Dordogne,

Subsidiairement au fond au motif que les demandes sont injustifiées et infondées,

Y ajoutant,

- condamner la société IC Nergie et son assureur Générali, in solidum, à verser 3500 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile,

- les condamner aux entiers d'appel dont distraction au profit de Me Boyreau sur ses offres de droits.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 août 2022.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le tribunal a retenu l'application de la responsabilité décennale des constructeurs ayant observé que ce régime de responsabilité n'était contesté par aucune des parties et condamné sur ce fondement 'chacun pour ce qui le concerne', la société Goudy et son assureur, la SMABTP, à indemniser les désordres affectant le bâtiment, le coût de la dépose et pose de nouveaux panneaux photovoltaïques et la perte de loyers et, in solidum, la société IC Nergie et son assureur, la société Generali Iard, à indemniser M. [J] de la perte de production électrique pendant la durée des travaux à réaliser.

Devant la cour, l'application des dispositions de l'article 1792 n'est pas remise en cause par la société Goudy et son assureur lesquels concluent expressément à la réduction du montant des condamnations prononcées à leur encontre et à l'admission de leurs recours en garantie, contestant notamment que la responsabilité de M. [J] n'ait pas été retenue.

Quant à la société IC Nergie, elle ne remet pas en cause l'application de la responsabilité décennale mais conteste que ses travaux soient en lien quelconque avec le dommage, contestant le principe de sa responsabilité.

Il conviendra en conséquence de statuer au principal sur la responsabilité de la société IC Nergie, sur les désordres indemnisables et les recours.

I - Sur la responsabilité de la société IC Nergie:

Celle ci a été retenue et se trouve recherchée en qualité de donneur d'ordre de la société ICB.

Pour retenir la responsabilité de la société IC Nergie, du fait de son sous-traitant, le tribunal a relevé que la société IC Nergie avait fait preuve de négligence vis à vis de son sous traitant en ne vérifiant jamais son travail.

M. [J] demande la confirmation de la décision sur ce point, observant que l'expert a conclu expressément en réponse à un dire de la société IC Nergie que, responsable de son sous traitant, elle était responsable 'des dommages ponctuels causés aux panneaux sandwiches lors de la pose des panneaux photovoltaïques sur la toiture Sud', en ce que 'le choc ainsi causé ayant soulevé les bavettes de recouvrement transversales entre ces panneaux, pourrait être pour partie responsable d'infiltrations sur le versant sud de la toiture du bâtiment', en sorte que ne pourrait être contestée la relation entre l'intervention du sous-traitant de IC Nergie et les désordres de nature décennale.

La société IC Nergie conteste toute responsabilité dans les infiltrations retenues par le tribunal alors que l'expert a écarté, notamment dans son tableau récapitulatif des désordres et responsabilités particulièrement clair, tout lien entre son intervention ou celle de son sous-traitant et les désordres (infiltrations d'eau) en partie sud.

En droit, la responsabilité du constructeur est justement recherchée de plein droit par le maître de l'ouvrage, sans faute, sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil dès lors qu'est établie son intervention dans les désordres de nature décennale et il est constant que le constructeur répond sur ce fondement des fautes de son sous-traitant en lien avec les désordres.

Il s'ensuit que pour engager la responsabilité des constructeurs sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil, il doit nécessairement être établi le lien entre les désordres et les travaux litigieux.

S'il n'est pas contestable que la société IC Nergie est responsable des désordres qui seraient imputables à son sous-traitant, cela ne dispense pas d'établir le lien entre les travaux sous-traités et les désordres de nature décennale qui ne sont pas en eux-mêmes contestés.

Or, en l'espèce, l'expert judiciaire retient comme cause des désordres (humidité excessive) :

- A l'intérieur du bâtiment :

des infiltrations d'eau par la toiture ;

des remontées capillaires par le dallage, aggravées par un réseau de traitement des eaux pluviales inachevé et donc inefficace ;

des insuffisances importantes des équipements d'exploitation mis en 'uvre par la société Agridor, locataire, expliquant pour la plus grande partiel'impossibilité de conserver les grains dans le bâtiment.

- A l'extérieur :

-un défaut de pose et de qualité des bardages extérieurs ;

-la peinture de protection ne tient pas ;

-les portes et portails mal conçus ;

-un réseau de traitement des eaux pluviales non achevé donc inefficace entraînant des infiltrations d'eau sans le dallage du bâtiment.

Il ne ressort aucunement de ces conclusions qu'il relève comme cause des désordres décennaux consistant en des infiltrations d'eau et remontées capillaires provenant du sol, les travaux de l'entreprise ICB, sous traitant de IC Nergie ayant posé les panneaux photovoltaïques, et ces conclusions reprises dans un tableau récapitulant les désordres et responsabilités ne retiennent nullement la responsabilité dans ces désordres de la société IC Nergie du fait de son sous-traitant.

Certes, celui-ci a également mentionné en réponse à un dire que 'la société IC Nergie partage la responsabilité des travaux effectués par son sous-traitant, la société ICB, en tant que contractant principal... il s'agit de dommages ponctuels causés aux panneaux sandwiches lors de la pose des panneaux photovoltaïques (chocs ayant soulevé ponctuellement les bavettes transversales..)' ou encore 'ce type de dégradations pourrait être pour partie à l'origine d'infiltrations sur le versant sud de la toiture' mais il n'en résulte aucune certitude sur la relation entre les quelques défauts ponctuels et le dommage de nature décennale constitué par les infiltrations en toiture que l'expert impute de manière certaine exclusivement à des défauts de conception et malfaçons affectant la réalisation des bardages, des défauts de ventilation et des remontées d'eau par capillarité et condensation. Pas davantage, le fait que l'expert ait pu indiquer, toujours en réponse à un dire, qu'il 'lui était impossible d'exclure la responsabilité de IC Nergie et ICB dans les infiltrations par lui constatées sur le versant sud de la toiture' n'équivaut à affirmer la certitude du lien de causalité entre les travaux effectués par ICB et les désordres de nature décennale.

En l'état de ces éléments, dont il ne ressort pas que les quelques défauts constatés affectant l'installation des panneaux photovoltaïques sont en lien avec de quelconques désordres décennaux, le jugement entrepris est infirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société IC Nergie sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil et l'a condamnée, in solidum avec son assureur, la société Generali Iard, à payer à M. [J] une indemnité d'un montant de 120 750 euros au titre de la perte de production électrique pendant la durée des travaux à réaliser, M. [J] et la société Soleil de Dordogne étant en conséquence déboutés de toutes leurs demandes à l'encontre de la société IC Nergie et de la société Generali Iard, sans qu'il soit besoin en conséquence d'examiner les recours de celles-ci à l'encontre de la société ICB et de son assureur, la société SMABTP.

II - Sur les désordres indemnisables par la société Goudy:

La société Goudy, en sa qualité de maître d'oeuvre des travaux d'édification d'un hangar agricole à vocation de stockage ne conteste pas avoir engagé sa responsabilité décennale, ne contestant que le montant des travaux de reprise mis à sa charge, estimant ne devoir aucune somme au titre de la pose et dépose et de la fourniture des l'installation de panneaux photovoltaïques, ni au titre d'une perte de loyers, demandant en conséquence à la cour de débouter M. [J] de son appel incident aux fins d'indemnisation supplémentaire.

M. [J] demande la confirmation de la décision entreprise mais forme appel incident en ce qu'il a été débouté de ses demandes indemnitaires au titre des travaux de bouchage et de recreusement du fossé, au titre de la perte de loyer jusqu'à la réception des travaux de reprise, et au titre d'une perte de chiffre d'affaires résultant du temps considérable consacré aux travaux d'expertise amiable et judiciaire.

a) Sur le montant des travaux de reprises indemnisables :

Le montant des travaux de reprise affectant le bâtiment agricole tels que chiffrés par l'expert à la somme de 473 524,80 euros HT n'est nullement contesté.

La contestation porte en réalité sur la somme supplémentaire de 98 119,50 euros HT allouée par le tribunal et correspondant aux travaux de reprise que l'expert avait imputés à M. [J] et que le tribunal a ajoutée à la condamnation du maître d'oeuvre, ce après avoir écarté toute immixtion fautive du maître de l'ouvrage dans les travaux objets des désordres, cette somme correspondant au coût du traitement des remontées capillaires par le dallage et des travaux de gestion des eaux pluviales réalisés par M. [J].

Si sur ce point, la société Goudy et son assureur reprochent aux premiers juges d'avoir statué ultra petita, il n'en est tiré aucune conséquence dans le dispositif de leurs dernières conclusions et force est de constater que la cour est saisie de la part de M. [J] et de la société Soleil de Dordogne d'une demande de confirmation du jugement en ce qu'il a ainsi statué.

La société Goudy et son assureur insistent sur le fait qu'ils n'allèguent pas une immixtion fautive du maître de l'ouvrage dans la réalisation de ces travaux mais bien une réalisation exclusive de ces travaux par le maître de l'ouvrage, la société Goudy n'ayant jamais été sollicitée pour les ouvrages bétonnés et les ouvrages internes pour lesquels elle n'a jamais eu la qualité de maître d'oeuvre, en sorte qu'il n'y a pas de lien entre son intervention et ces désordres.

M. [J] et la société Soleil de Dordogne font au contraire valoir que s'agissant des travaux de collecte des eaux pluviales avec pente et regard favorisant l'écoulement des eaux qui ont été effectués par M. [J] qui se les était réservés, celui-ci n'avait pourtant pas la qualité de professionnel alors qu'au contraire, la société Goudy ayant accepté la construction d'un hangar à vocation agricole se devait, qui plus est en l'absence de maître d'oeuvre, de mettre en garde le maître de l'ouvrage, profane, contre toutes éventuelles remontées d'humidité en provenance du sol par capillarité et lui proposer une protection appropriée de la surface du dallage à la destination du bâtiment.

Cependant, la société Goudy n'invoque effectivement pas l'immixtion fautive du maître de l'ouvrage dans les travaux qu'elle a réalisés et pour lesquels elle reconnaît avoir engagé sa responsabilité décennale sans demander une quelconque contribution de M. [J] à son propre préjudice du fait de sa propre faute et si elle se trouvait tenue d'un devoir de conseil et de mise en garde vis à vis de son client, profane, le manquement à ce devoir qui se résout en terme de perte de chance, ne saurait justifier sa condamnation à la reprise des travaux dans lesquels elle n'est pas intervenue.

Le jugement entrepris est en conséquence infirmé en ce qu'il a mis à la charge de la société Goudy et de son assureur le paiement d'une somme de 571 644,30 euros au titre des travaux de reprise, cette condamnation étant limitée à la somme de 473 524, 80 euros HT

b) sur les travaux de fourniture, pose et dépose de panneaux photovoltaïques:

Le tribunal a alloué à M. [J] une indemnisation de 238 279,20 euros à ce titre comme étant 'indissociables de ceux préconisés par l'expert [G]'.

Or, s'il ne fait aucun doute que les travaux de reprise en toiture nécessitent la pose et la dépose des panneaux photovoltaïques, la société Goudy et son assureur observent à bon droit que la somme de 112 224,48 euros HT correspondant aux frais de pose et de dépose des panneaux a d'ores et déjà été prise en compte par l'expert au titre du coût des travaux de reprise sus accordé et que celui-ci a expressément exclu la nécessité de changer les dits panneaux ainsi qu'il résulte de son rapport en ces termes: 'Nota: les panneaux photovoltaïques actuels sont remis en place'.

Sur la base d'un simple avis d'une entreprise spécialisée dans la pose de panneaux photovoltaïques (sa pièce n° 19) et qui se trouve intéressée à fournir et poser des panneaux neufs, laquelle s'est refusée à déposer et reposer les panneaux existants invoquant un risque de les endommager ainsi que d'incendie ayant établi un devis prévoyant la pose de panneaux neufs, mais à l'exception de tout avis technique indépendant, M. [J] entend contredire le rapport d'expertise et voir juger avec le tribunal que l'entreprise Goudy doit finalement prendre à sa charge la remise à neuf de la totalité de l'installation de panneaux photovoltaïques pour un montant de plus du double de celui retenu par l'expert, ce qui n'est pas suffisamment justifié et se heurte en conséquence au principe de la réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit, en sorte que le jugement entrepris est infirmé en ce qu'il a mis à la charge de la société Goudy et de son assureur une somme de 238.279, 20 euros, M. [J] et la société Soleil de Dordogne étant déboutés de leur demande de ce chef.

c) sur l'indemnisation de la perte de loyers:

Le tribunal a alloué à M. [J] une indemnisation de 145 000 euros à ce titre arrêtée au mois d'octobre 2018..

Bien qu'ayant relevé appel de ce chef, la société Goudy convient dans le cadre de ses développements devant la cour qu'est bien fondé le principe d'une indemnisation de M. [J] de ce chef à hauteur de 102 500 euros qui constituait sa demande initiale au motif que s'étant entièrement exécutée dans le cadre de l'exécution provisoire et des solutions ayant été mises en place dans le cadre de l'expertise amiable qui ont permis de remédier aux désordres, dès 2017, M. [J] ne justifie pas au delà de la réalité de son préjudice.

M. [J] et la SMABTP concluent à l'infirmation du jugement estimant que le préjudice de M. [J] se poursuit et qu'il ne peut être limité à la somme de 145000 euros arrêtée en octobre 2018.

La société Goudy observe à juste titre que le principe d'une telle indemnisation ne saurait courir jusqu' à la date à laquelle la société Agridor réintégrera les lieux, ainsi que le demande M. [J], ce qui reviendrait à laisser à la liberté de M. [J] la fin de son préjudice, ce qu'a justement exclu le tribunal.

De même, alors que la réception des travaux relève du maître de l'ouvrage il ne peut être fixé la fin de l'indemnisation de la perte des loyers à cet événement qui dépend encore de la volonté de M. [J].

La question demeure toutefois de savoir à compter de quand il est juste de faire cesser l'indemnisation de ce chef.

En allouant une somme de 145 000 euros, le tribunal a retenu la fin du préjudice au mois d'octobre 2018 qui constituait la date de l'arrêté des comptes.

Or, la société Goudy soutenant s'être exécutée à compter du jugement dont appel il n'y a aucune raison d'arrêter l'indemnisation de ce préjudice dont le principe n'est pas discuté à la date d'octobre 2018 alors que le jugement est en date du 1er février 2019.

Elle justifie cependant avoir adressé le 26 avril 2019, dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement dont appel, un chèque d'un montant de 957 313, 29 euros à M. [J] qui lui permettait en conséquence d'effectuer les travaux réparatoires et M. [J] se contente d'affirmer que son préjudice perdure et s'aggrave, ce qui en conséquence relève depuis avril 2019 de sa propre responsabilité.

Il convient par ailleurs de retenir que M. [J] devait encore bénéficier d'un délai d'un mois à compter de la réception du chèque pour mener à bien les travaux lui permettant de mettre le hangar hors d'eau.

Ainsi calculée initialement sur une base de 2500 euros mensuelle qui n'était pas contestée du moins jusqu'en mai 2017 (102 500 euros), l'indemnité due à M. [J] au titre de la perte de loyers sera définitivement arrêtée à la date du 31 mai 2019 à la somme de 152 500 euros [145.000 euros + (2 500 x 7)], somme qui sera allouée à M. [J], le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il lui a alloué de ce chef une somme totale de 145 000 euros.

d) sur la demande de M. [J] au titre des travaux de bouchage et de recreusement du fossé:

M. [J] reproche au tribunal d'avoir rejeté sa demande de ce chef sans aucune motivation particulière autre que son rejet alors qu'il est justifié par la production de devis de la nécessité de boucher le fossé en bordure de la façade ouest pour permettre aux entreprises chargées de refaire le bardage d'approcher ses engins du chantier et de bénéficier ainsi d'un accès stabilisé comme il sera nécessaire ensuite de recreuser ce fossé.

Sur ce point la société Goudy objecte à la fois que ces travaux n'ont pas été retenus par l'expert judiciaire qui ne les a pas jugés utiles et qu'il ne lui appartient pas d'intervenir sur la gestion des eaux de pluie qui ne relève que de la responsabilité de M. [J].

Or, la demande de M. [J] ne relève en aucun cas d'une solution à un problème de gestion des eaux de ruissellement et si l'expert n'a pas envisagé ces travaux, ils sont apparus nécessaires aux entreprises qui ont été chargées d'intervenir en suivant pour effectuer les travaux réparatoires. Il n'est par ailleurs pas contesté qu'un fossé borde la face ouest empêchant l'accès aux engins lourds pour la réalisation du bardage sur cette face en sorte que la nécessité de combler le fossé pour stabiliser le sol à cet endroit puis de le recreuser ensuite constitue bien un préjudice indemnisable découlant des travaux de reprise imputés à la société Goudy qu'elle doit en conséquence prendre à sa charge, conformément aux devis versés aux débats par M. [J].

Il sera en conséquence ajouté au jugement entrepris la condamnation de la société Goudy et de son assureur à payer à M. [J] et à la société Soleil De Dordogne la somme de 5 902,75 euros HT et 8 987,50 euros HT au titre de ces travaux.

e) sur la perte de chiffre d'affaires pendant le temps de l'expertise amiable et judiciaire:

M. [J] reproche au tribunal d'avoir rejeté sa demande à ce titre sans motivation alors qu'il a passé un temps considérable pour préparer les expertises amiables et judiciaires, temps qui a été perdu pour son travail agricole à l'origine d'une perte de chiffre d'affaires.

La société Goudy et son assureur concluent au rejet de cette demande observant à bon droit qu'elle n'est justifiée par aucun élément dès lors que, présentée en termes de préjudice financier (perte de chiffre d'affaires), une telle demande doit nécessairement reposer sur des éléments précis et notamment des éléments comptables attestant de la réalité et du montant de cette perte.

Quant au temps passé dans la préparation des expertises privées ou judiciaire, il relève des frais irrépétibles non compris dna sles dépens.

Le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. [J] et la société Soleil de Dordogne de leur appel incident de ce chef.

III- Sur l'appel en garantie de la société Goudy et de la SMABPT contre M. [J] et la société Agridor et son assureur, la société Groupama:

La société Goudy et la SMABPT critiquent le jugement qui a rejeté leur recours en garantie formé à l'encontre du maître de l'ouvrage et de son locataire. A ce titre, elles soutiennent que l'expert judiciaire a retenu une part prépondérante de responsabilité à l'encontre de M. [J] et de la société Agridor, lesquelles ont commis des fautes à l'origine de la mauvaise conservation des céréales.

Elle soutient notamment qu'elle était chargée de la construction d'un entrepôt (structure métallique, bardage et couverture nord) à l'exception des ouvrages bétonnés et internes, que la société Agridor a modifié ensuite la destination des locaux pour en faire un lieu de stockage de céréales nécessitant des installations de séchage et de ventilation relevant de sa seule responsabilité en sorte que l'expert a laissé à sa charge 98% de ses pertes d'exploitation.

Cependant sur ce point, il doit être constaté que la société Goudy et son assureur n'ont nullement été condamnées à indemniser une quelconque perte d'exploitation.

La société Goudy et son assureur observent que de ce fait la société Agridor est également responsable des pertes de loyers de M. [J] dès lors qu'elle n'a plus pu occuper les lieux en raison de l'impossibilité d'y stocker des céréales, ce qui n'était pas initialement prévu, pour solliciter la condamnation de cette société et de son assureur à les relever et garantir de toutes condamnations mises à leur charge.

Cependant il sera observé que même utilisé uniquement pour le stockage du foin et de la paille un hangar agricole n'a pas vocation à recevoir des infiltrations et se doit d'être étanche aux intempéries et à l'humidité et qu'en tout état de cause il résulte clairement du rapport d'expertise (page19/22) que, contrairement à ce qu'elle prétend, la société Goudy connaissait dès l'origine la destination des lieux pour le stockage de céréales, la destination du hangar en lieu de 'stockage de paille, fourrage et céréales' apparaissant sur le plan et la notice descriptive déposés avec le dossier de permis de construire modificatif du 13 juillet 2013, et que la principale cause de préjudice demeure la délivrance d'un bâtiment impropre à l'usage demandé même si le système de ventilation pouvait être amélioré.

Et la société Agridor observe à bon droit que ce faisant la société Goudy et son assureur n'indiquent pas en quoi en sa qualité de locataire elle serait contrainte de garantir des condamnations à prendre en charge des travaux de reprise de désordres prononcées à l'encontre de la société Goudy en sa qualité de constructeur sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil.

Il s'ensuit que la société Goudy et la SMABTP sont déboutées de leur appel en garantie à l'encontre de la société Agridor, étant ajouté au jugement entrepris.

Quant à la société Groupama, il n'est pas utilement contesté qu'elle n'est pas l'assureur responsabilité civile de la société Agridor, en sorte que la Sarl Goudy et la SMABTP seront déboutées de leur recours en garantie à son encontre, étant ajouté en ce sens au jugement entrepris qui avait omis de statuer de ce chef.

Il est demandé également à la cour de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Goudy et la SMABTP de leur recours en garantie contre M. [J] en considération de son immixtion fautive dans les travaux.

Or, si M. [J], profane, pouvait se voir reprocher l'inefficacité des travaux au sol qu'il s'était réservés à l'origine de remontées capillaires par le sol et une absence de gestion des eaux de pluie, la société Goudy ne peut s'exonérer de sa responsabilité de plein droit résultant de l'article 1792 du code civil du fait des travaux effectués par le maître de l'ouvrage, profane, vis à vis duquel elle était tenue d'un devoir de conseil et en aucun cas la société Goudy ne saurait reprocher au maître de l'ouvrage de ne pas s'être entouré des conseils d'un maître d'oeuvre pour la réalisation de l'ouvrage alors que l'absence de maître d'oeuvre ayant des compétences supérieures à l'entrepreneur emportait au contraire pour elle une vigilance accrue quant à son obligation de conseil, ayant accepté d'intervenir dans ces circonstances.

C'est ainsi à bon droit que le tribunal a écarté toute immixtion fautive du maître du l'ouvrage et a débouté en conséquence la société Goudy et son assureur de leur recours en garantie contre M. [J] au titre des travaux de reprise des désordres decennaux.

De même, il n'est pas indiqué en quoi la responsabilité éventuelle de M. [J] dans la mauvaise conservation des céréales ayant participé d'une perte d'exploitation justifie que celui-ci relève et garantisse les sociétés Goudy et la SMABTP de l'ensemble des condamnations mises à leur charge alors qu'elles n'ont pas été condamnées à indemniser un préjudice d'exploitation.

Quant à la perte de loyers, elle est au vu de ce qui précède la seule conséquence de la responsabilité décennale du maître de l'ouvrage.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Goudy et la SMABTP de leur recours en garantie contre M. [J].

- IV Sur les plafonds et franchises de la SMABPT:

La SMABTP, en qualité d'assureur de la société Goudy, fait valoir qu'elle est fondée à opposer aux tiers le montant des franchises correspondant aux travaux réparatoires, relevant de l'assurance obligatoire, soit une franchise contractuelle de 20 % du montant des dommages avec un minimum de 10 franchises statutaires, soit 1 650 euros, et un maximum de 50 franchises statutaires, soit 8 250 euros.

De même, elle ajoute qu'elle est fondée à opposer à toute partie la franchise applicable aux préjudices immatériels, qui ne relèvent pas de l'assurance obligatoire, ainsi qu'un plafond de garantie fixé à 1 000.000 euros au titre des dommages matériels et 500 000 euros au titre des dommages immatériels.

Or, en matière d'assurance obligatoire (article 1792 du code civil), l'assureur ne peut opposer aux bénéficiaires des indemnités, le tiers en l'occurrence, sa franchise s'agissant des dommages matériels couverts par cette assurance, conformément aux dispositions de l'article A 243-1 du code des assurances.

S'il peut effectivement au contraire opposer sa franchise contractuelle en matière d'assurance facultative, et notamment s'agissant des préjudices immatériels consécutifs, force est de constater que la SMABTP n'indique pas au titre de quel préjudice immatériel consécutif au vu des indemnisations retenues, elle entend voir appliquer sa franchise.

Elle sera en conséquence déboutée de sa demande au titre de sa franchise contractuelle , seuls pouvant être appliqués ses plafonds, étant ajouté en ce sens au jugement entrepris.

Au vu de l'issue du présent recours le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens de première instance et les frais irrépétibles y afférents.

Les dépens du présent recours seront supportés par la société Goudy et la SMABTP dont la responsabilité demeure entière et ceux ci seront condamnés à payer au titre des frais irrépétibles d'appel:

-à M. [J] une somme de 3 000 euros,

-à la société Agridor une somme de 2 000 euros,

-à la société Groupama Centre Atlantique une somme de 2 000 euros,

-à la société ICB et son assureur, la SMABTP, ensemble, une somme de 2 000 euros

-à la société IC Nergie et son assureur, la société Generali Iard une somme de 3000 euros

PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant dans les limites de sa saisine.

Rejetant toute demande plus ample ou contraire des parties:

Infirme partiellement le jugement entrepris

Statuant à nouveau des chefs réformés:

Déboute M. [O] [J] et la Sarl Soleil de Dordogne de leurs demandes à l'encontre de la société IC Nergie et son assureur, la société Generali Iard.

Dit n'y avoir lieu en conséquence à statuer sur le recours en garantie de ces mêmes sociétés à l'encontre de la Sarl Ingénierie Concept Bâtiments (ICB) et de son assureur, la SMABTP.

Condamne la Sarl Goudy et la société SMABTP à payer à M. [O] [J]:

* une somme de 473 524,80 euros HT au titre des travaux de reprise des désordres décennaux.

*une somme de 152 500 euros au titre de la perte de loyer arrêtée au 31 mai 2019.

*une somme de 5 902,75 euros HT et de 8 987,50 euros HT au titre des travaux de comblement et de recreusement du fossé.

Déboute M. [O] [J] et la société Soleil de Dordogne de leur demande d'indemnisation au titre de la pose et la dépose de panneaux phoyovoltaïques neufs.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions non contraires au présent arrêt et y ajoutant:

Déboute la Sarl Goudy et la SMABTP de leur recours en garantie contre la société Agridor.

Déboute la Sarl Goudy et la SMABTP de leur recours en garantie à l'encontre de la Compagnie Groupama Centre Atlantique.

Déboute la SMABTP de ses demandes au titre de la franchise contractuelle.

Dit que la SMABTP est fondée à opposer ses plafonds de 1 000 000 euros au titre des dommages matériels et de 500 000 euros au titre des dommages immatériels.

Condamne in solidum la Sarl Goudy et son assureur, la SMABTP, à payer :

-à M. [J] une somme de 3 000 euros,

-à la société Agridor une somme de 2 000 euros,

-à la société Groupama Centre Atlantique une somme de 2 000 euros,

-à la société ICB et son assureur, la SMABTP, ensemble, une somme de 2 000 euros

-à la société IC Nergie et son assureur, la société Generali Iard une somme de 3000 euros

sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum la Sarl Goudy et son assureur, la SMABTP,aux dépens d'appel avec distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/01389
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;19.01389 ?
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