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20/10/2022 | FRANCE | N°18/00585

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 20 octobre 2022, 18/00585


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 20 OCTOBRE 2022





F N° RG 18/00585 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KIFK







Madame [G] [U] épouse [H]

Monsieur [W] [H]

Monsieur [A] [H]

SCI REM'S





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Madame [D] [M] épouse [N] (DECEDEE)

Monsieur [B] [S]

SA GEALI IARD



Monsieur [T] [N]




















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Grosse délivrée le :



aux avocats





Décision déférée à la cour : jugement rendu le 18 janvier 2018 (R.G. 16/01189) par le Tribunal de Grande Instance d'ANGOULEME suivant déclaration d'appel du 02 février 2018





APPELANTS ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 20 OCTOBRE 2022

F N° RG 18/00585 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KIFK

Madame [G] [U] épouse [H]

Monsieur [W] [H]

Monsieur [A] [H]

SCI REM'S

c/

Madame [D] [M] épouse [N] (DECEDEE)

Monsieur [B] [S]

SA GEALI IARD

Monsieur [T] [N]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 18 janvier 2018 (R.G. 16/01189) par le Tribunal de Grande Instance d'ANGOULEME suivant déclaration d'appel du 02 février 2018

APPELANTS :

[G] [U] épouse [H]

née le 10 Novembre 1958 à [Localité 11]

de nationalité Française

Comptable, demeurant [Adresse 6]

[W] [H]

né le 11 Novembre 1954 à [Localité 13]

de nationalité Française

Notaire, demeurant [Adresse 6]

[A] [H]

né le 11 Septembre 1979 à [Localité 12] (87)

de nationalité Française

Gérant de SCI, demeurant [Adresse 4]

SCI REM'S Société civile immobilière, inscrite au RCS d'ANGOULEME sous le numéro 442 323 655, dont le siège social est sis [Adresse 4], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

Représentés par Me Katell LE BORGNE de la SCP LAVALETTE AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[D] [M] épouse [N] décédée

née le 23 Mars 1947 à [Localité 8] (16)

de nationalité Française

Retraitée, demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Sébastien MOTARD de la SCP CMCP, avocat au barreau de CHARENTE

[B] [S]

de nationalité Française

Chef d'entreprise, demeurant [Adresse 7]

Représenté par Me Laurent BENETEAU de la SCP SCPA BENETEAU, avocat au barreau de CHARENTE

et assisté de Me Thibault POZZO DI BORGO de la SCP DELPLANCKE-POZZO DI BORGO-ROMETTI & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

SA GENERALI IARD la compagnie GENERALI, société anonyme, inscrite au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 552062663, dont le siège social est sis [Adresse 2], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège.

[Adresse 1]

Représentée par Me Charlotte GUESPIN de la SCP GUESPIN - CASANOVA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

et assisté de Me Jacques CHEVALIER de la SELAS CHEVALIER - MARTY - PRUVOST Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS

INTERVENANT :

[T] [N]

intervenant volontaire en sa qualité d'ayant droit de Mme [D] [M] épouse [N]

né le 13 Janvier 1947 à [Localité 9]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Sébastien MOTARD de la SCP CMCP, avocat au barreau de CHARENTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Remi FIGEROU, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Monsieur Remi FIGEROU, Conseiller,

Madame Christine DEFOY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte notarié du 7 janvier 2009, M. [C] [M], aujourd'hui décédé, et Mme [D] [M] épouse [N] ont vendu à M. [W] [H] et Mme [G] [U] épouse [H] une maison d'habitation sise [Adresse 5]. Aux termes de cet acte, il était expressément précisé que les acquéreurs prendraient le bien sans aucune garantie de la part du vendeur, pour raison soit de l'état des constructions, soit de leurs vices même cachés.

Suite à l'apparition de fissures sur la façade de l'immeuble, M. et Mme [H] ont adressé une déclaration de sinistre à leur assureur, la CIC assurances qui, par courrier du 1er février 2013 a refusé de garantir les désordres liés à ces fissures qui ont pris naissance antérieurement au contrat d'assurance, ayant pris effet le 7 janvier 2009 seulement.

Par acte notarié du 22 août 2012, M. et Mme [H] ont revendu à la SCI Rem's représentée par son gérant, M. [A] [H], leur fils, cette même maison d'habitation. Au sein de l'acte de vente est notamment stipulée une clause de subrogation de l'acquéreur dans tous les droits et actions des vendeurs concernant d'éventuelles dégradations de 1'immeuble au titre des catastrophes naturelles.

M. et Mme [H] ont assigné les consorts [M] devant le juge des référés du tribunal de grande instance d'Angoulême aux fins d'expertise judiciaire.

Par ordonnance du 22 janvier 2014, le juge des référés a désigné Mme [O] en qualité d'expert judiciaire. Le rapport d'expertise a été déposé le 22 janvier 2016.

Les opérations d'expertise judiciaire ont ultérieurement été rendues communes et opposables à M. [B] [S], entreprise individuelle de travaux, lequel avait réalisé des travaux de peinture de façades de l'immeuble litigieux en octobre 2007, ainsi qu'à son assureur la SA Generali Iard.

Par actes du 26 avril 2016, M. [W] [H], M. [A] [H], Mme [H] et la SCI Rem's ont assigné Mme [N], M. [S] et la SA Generali Iard devant le tribunal de grande instance d'Angoulême aux fins de condamnation au paiement de diverses sommes en réparation de leur préjudice, sur le fondement de l'article 1641 du code civil.

Par jugement du 18 janvier 2018, le tribunal de grande instance d'Angoulême a :

- rejeté toutes les demandes de M. [W] [H], Mme [G] [U] épouse [H], M. [A] [H] et la SCI Rem's,

- condamné M. [W] [H], Mme [G] [U] épouse [H], M. [A] [H] et la SCI Rem's à payer à Mme [D] [M] épouse [N] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [W] [H], Mme [G] [U] épouse [H], M. [A] [H] et la SCI Rem's à payer à M. [B] [S] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de la SA Generali Iard sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [W] [H], Mme [G] [U] épouse [H], M. [A] [H] et la SCI Rem's aux entiers dépens de l'instance y compris les frais d'expertise.

M. [W] [H], M. [A] [H], Mme [H] et la SCI Rem's ont relevé appel du jugement le 2 février 2018 en ce qu'il :

- a rejeté toutes leurs demandes,

- les a condamnés à payer à Mme [D] [M] épouse [N] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les a condamnés à payer à M. [B] [S] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- a rejeté la demande de la SA Generali Iard sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les a condamnés aux entiers dépens de l'instance y compris les frais d'expertise.

Suite au décès de [D] [N] le 30 septembre 2020, M. [T] [N] est intervenu volontairement à la procédure le 27 septembre 2021 en qualité d'ayant droit.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 19 juillet 2022, M. [W] [H], M. [A] [H], Mme [H] et la SCI Rem's demandent à la cour, sur le fondement des articles 1641 et suivants, 1116 et 1240 et suivants du code civil, de:

- les juger recevables et bien fondés en leur appel,

- infirmer la décision déférée en ce qu'elle a rejeté leurs demandes, les a condamnés à payer à M. [S] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et les a condamnés aux entiers dépens de l'instance y compris les frais d'expertise,

Statuant à nouveau,

A titre liminaire, déclarer recevable l'intervention volontaire en reprise d'instance de M. [N], en sa qualité d'ayant droit de Mme [M] épouse [N].

A titre principal, sur les articles 1641 et suivants du code civil,

- condamner M. [N] en sa qualité d'ayant droit de Mme [M] épouse [N] au paiement des sommes suivantes :

- 140 004 euros TTC au titre des travaux de confortement à la SCI Rem's,

- 8 000 euros au titre du préjudice de jouissance à la SCI Rem's prise en la personne de son gérant, M. [A] [H],

- 4 000 euros au titre du préjudice de jouissance à M. et Mme [H],

A titre subsidiaire, sur les articles 1116 et 1240 et suivants du code civil,

- condamner M. [N] en sa qualité d'ayant droit de Mme [M] épouse [N] au paiement des sommes suivantes :

- 140 004 euros TTC au titre des travaux de confortement à la SCI Rem's,

- 8 000 euros au titre du préjudice de jouissance à la SCI Rem's prise en la personne de son gérant, M. [A] [H],

- 4 000 euros au titre du préjudice de jouissance à M. et Mme [H],

A titre plus subsidiaire,

- condamner M. [S] in solidum avec la société Generali Iard son assureur au paiement des sommes de :

- 140 004 euros TTC au titre des travaux de confortement à la SCI Rem's,

- 8 000 euros au titre du préjudice de jouissance à la SCI Rem's prise en la personne de son gérant, M. [A] [H],

- 4 000 euros au titre du préjudice de jouissance à M. et Mme [H],

En tout état de cause,

- débouter en sa qualité d'ayant droit de Mme [M] épouse [N], M. [S] et son assureur la SA Generali Iard de toutes demandes plus amples ou contraires,

- les condamner solidairement à leur payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,

- les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, outre aux dépens d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 27 septembre 2021, M. [N], intervenant volontaire demande à la cour, sur le fondement des articles 1641 et 1642 du code civil, de :

- juger que les prétentions des appelants s'agissant de la responsabilité délictuelle de Mme [N] doivent s'analyser en une demande nouvelle en cause d'appel,

- en conséquence, juger que cette prétention est irrecevable, et les en débouter,

A titre principal,

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Angoulême du 18 janvier 2018,

Y ajoutant,

- condamner solidairement M. [W] [H], Mme [G] [H], M. [A] [H] et la SCI Rem's à lui verser la somme de 6 000 euros en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- débouter les appelants de l'intégralité de leurs prétentions,

A titre infiniment subsidiaire,

- juger que M. et Mme [H] sont dépourvus d'intérêt à agir, et par conséquent les débouter de leurs prétentions,

- juger M. [A] [H] dépourvu d'intérêt à agir, et par conséquent le débouter de ses prétentions,

- dans l'hypothèse où la cour, par extraordinaire, estimerait que M. [N] ès qualité d'ayant droit de [D] [N] née [M] doit garantir les appelants, condamner in solidum M. [S] et sa compagnie d'assurances la SA Generali Iard à le relever indemne de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

En tout état de cause,

- débouter M. et Mme [H] de leurs prétentions au titre du préjudice de jouissance,

- débouter, à titre principal, la SCI Rem's de sa demande de préjudice de jouissance et, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il serait reconnu, le réduire à de plus justes proportions,

- condamner solidairement M. et Mme [H], M. [A] [H] et la SCI Rem's à lui verser la somme de 6 000 euros en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [S] in solidum avec la SA Generali Iard à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 5 août 2020, M. [S] demande à la cour, sur le fondement de l'article 1382 ancien du code civil et de l'article 1792 et subsidiairement, des articles 1134 et 1147 anciens du code civil (nouvellement article 1231-1 et 1104 du code civil), de :

A titre principal,

- ordonner, en tant que de besoin, le rabat de l'ordonnance de clôture,

- débouter M. [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement rendu le 18 janvier 2018 par le tribunal de grande instance d'Angoulême, - rejeté les appels principaux et incidents, ainsi que de l'ensemble des demandes formées à son encontre,

A titre subsidiaire et incident,

- réformer le jugement en ce qu'il a retenu une faute à son encontre,

- rejeter l'ensemble des demandes formées à son encontre,

A titre très subsidiaire,

- condamner la SA Generali Iard à le relever et le garantir de l'ensemble des demandes pouvant intervenir à son encontre,

En tout état de cause, ajoutant au jugement de première instance,

- débouter Mme [M], les consorts [H], la SCI Rem's et la SA Generali Iard de l'ensemble de leurs demandes et l'exonérer de toute responsabilité,

- condamner les consorts [H] ou tout succombant au paiement d'une somme de 4 000 euros

sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens distraits conformément à la loi. .

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 9 août 2022, la SA Generali Iard demande à la cour de :

- juger mal fondé l'appel principal de M. [W] [H], M. [A] [H], Mme [H] et la SCI Rem's,

- juger mal fondés les appels incidents de M. [N] et de M. [S],

- confirmer la décision du tribunal de grande instance d'Angoulême en toutes ses dispositions,

- débouter les appelants de toutes leurs demandes,

- juger qu'en cas de condamnation, elle pourra faire application des limitations contractuelles de garantie à l'égard de M. [S] en ce qui concerne la garantie de sa responsabilité décennale, et à l'égard de tous, en cas d'application du volet responsabilité civile de sa police,

- condamner M. [W] [H], M. [A] [H], Mme [H] et la SCI Rem's , Mme [M] et M. [S] au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner en tous les dépens dont distraction au profit de Me Charlotte Guespin.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 août 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'intervention volontaire de M. [T] [N]

Il résulte de l'acte de notoriété établi par Maître [K] [X] notaire à [Localité 10] le 30 juillet 2021 que M. [T] [N] est l'ayant droit de Mme [D] [M], et qu'il a ainsi qualité pour intervenir volontairement à la procédure.

Sur la demandes des appelants fondée sur les dispositions de l'article 1641 du code civil

Dans son rapport remis le 22 janvier 2016, l'expert judiciaire a conclu que : « la maison a subi des mouvements du sous-sol lié au terrain argileux décrit dans le rapport [V] et aux périodes de sécheresse reconnue par les arrêtés de catastrophes naturelles (période du 1er juillet 2003 au 30 septembre 2003 et période du 1er juillet 2005 au 30 septembre 2005) ou antérieurement. D'après les dires des voisins recueillis par Monsieur [A] [H], des travaux de reprise en sous-'uvre de la maison voisine ont été réalisés en 2003. On peut penser que la maison qui nous intéresse a pu subir quelques désordres. Lorsque Monsieur [M] et sa fille décident de vendre la maison, ils font appel à M. [S], lequel intervient pour redonner un air présentable à la maison. Deux cas de figure : -les fissures avaient été rebouchées et ne s's'étant pas rouvertes, l'entreprise [S] répare le mur tel qu'il est (cf scénario un donné plus haut) - scénario 1 + les fissures ouvertes sont rebouchées au joint silicone par les ouvriers de M. [S] et l'ensemble repeint. Nous écartons le scénario 2 (les fissures existaient lors de l'intervention de M. [S], il les a rebouchées et a repeint par-dessus), car certains rebouchages semblent être antérieurs à l'intervention de M. [S]. Mais les fissures dans tout le cas étaient visibles à l''il nu. La position des fissures, leur horizontalité et leur généralisation sont des indicateurs de tassement de terrain, terrain dont la nature argileuse était connue dans ce secteur géographique, au moment des travaux en 2007. Il apparaît peu probable que M. [S] et ses ouvriers n'aient pas pu reconnaître ces désordres. Il n'a pas informé le propriétaire d'alors. Les périodes de sécheresse suivantes (période du 1er juillet 2009 au 15 septembre 2009 et période du 1er avril 2011 au 30 juin 2011) ont entraîné la réapparition des fissures, telles que nous les voyons aujourd'hui. »

Sur l'existence d'un vice caché

Aux termes de l'article 1641du code civil : « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »

L'article 1642 du même code précise : « le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même »

L'article suivant ajoute encore : « Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie. »

En l'espèce, M. [N] soutient que lors de la vente litigieuse, les acheteurs avaient eu l'attention attirée par l'existence de fissures qui étaient apparentes, notamment à l'intérieur de l'immeuble, ce que les appelants contestent, mais qu'en toutes hypothèses, l'acte authentique du 7 janvier 2009, contenait une clause exonératoire de la garantie des vendeurs sur l'état des constructions et de leurs vices même cachés, et de plus sur l'état du sol et du sous-sol.

Il résulte des conclusions récapitulatives des consorts [H] du 22 juin 2017, que les acheteurs ont reconnu que lors de l'achat de la maison litigieuse, ils avaient constaté et pris acte de la présence d'une unique fissure dans une des chambres, qualifiée par eux de sans importance.

L'expert judiciaire a ajouté que lors de la vente, certains désordres étaient apparents tels une fissure au plafond d'une chambre ainsi que des carreaux cassés et décollés sur une terrasse extérieure.

Toutefois, ces désordres apparents mais limités ne permettaient aux acquéreurs de penser que l'immeuble objet de la vente avait subi des mouvements de sous-sol lié au terrain argileux et aux périodes de sécheresse, car seules les fissures qui avaient été rebouchées, et qui n'étaient ainsi pas visibles des acquéreurs étaient des indicateurs du tassement du terrain, ainsi que l'expert judiciaire l'a relevé en page 21 de son rapport.

Ainsi, les fissures existaient en partie avant la vente, et elles étaient cachées.

Certaines ont pu apparaître ou s'aggraver après la vente, mais procèdent de la même cause que les fissures qui avaient été rebouchées par les vendeurs.

Elles affectent la solidité de l'immeuble et ainsi le rendent impropre à l'usage auquel on le destine, de telle sorte que les acquéreurs n'auraient pas acquis l'immeuble s'ils les avaient connues.

Ainsi, ces désordres préexistaient nécessairement à la vente, et constituent un vice caché.

Sur la clause d'exclusion de la garantie du vendeur en présence d'un vice caché

Les appelants considèrent que la clause portée dans l'acte qui exonère les vendeurs de leur garantie sur les vices cachés devrait être écartée car ceux-ci n'ignoraient pas l'existence d'une fissuration importante de l'immeuble, qu'ils ont camouflé les fissures, et qu'en toutes hypothèses, ils n'ont pas attiré l'attention de leurs acheteurs sur la présence des dites fissures.

L'intimé considère pour sa part que le rebouchage des fissures s'est faite dans un souci de rendre l'immeuble plus présentable pour sa vente, sans que les vendeurs mesurent la cause de telles fissures si bien que la clause litigieuse doit recevoir son plein et entier effet.

L'article 1643 du code civil dispose à propos du vendeur: « Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie. »

La mauvaise foi du vendeur doit être établie pour écarter la clause d'exclusion de garantie des vices cachés.

Elle ne peut découler en l'espèce, de la seule preuve de la connaissance par le vendeur de la présence de fissures qui ont été rebouchées antérieurement à sa demande, mais de l'importance de la cause de celles-ci.

En toutes hypothèses, la mauvaise foi, ne se présume pas et doit être démontrée, d'autant plus que les vendeurs n'étaient pas des professionnels de l'immobilier si bien qu'il est possible qu'ils n'aient pas mesuré ; nonobstant les arrêtés de catastrophe naturelle pris en 2003 et 2005, pour leur commune ; une possible relation entre ceux-ci et l'apparition de ces fissures, et si tel avait été le cas on peut penser qu'ils auraient alors déclaré le sinistre à leur assureur habitation.

La cour constate également que les travaux d'embellissement des façades ont été terminés plus d'un an avant la vente, et les fissures préexistantes n'ont pas réapparu, si bien que les vendeurs pouvaient penser que les fissures colmatées ne relevaient pas d'une cause grave.

En outre, il n'est nullement démontré que les vendeurs aient été informés par quiconque de la nature du risque que représentaient les fissures quant à la solidité de l'immeuble.

Aussi, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que la seule connaissance de fissures colmatées par silicone, avant la peinture des façades, ne permet pas d'établir que les vendeurs avaient connaissance du vice affectant le sol d'assise lié à sa nature argileuse et aux différents épisodes de sécheresse.

L'intimé, venant au droit des vendeurs, est dès lors fondé à se prévaloir de la clause de non garantie des vices cachés contenue dans l'acte de vente.

Les demandes fondées sur les dispositions de l'article 1641 du code civil seront donc rejetées.

Sur les demandes des appelants fondées sur les dispositions de l'article 1116 du code civil

Les appelants poursuivent à titre subsidiaire leur vendeur en responsabilité à raison de sa faute dolosive considérant qu'il serait manifeste que ceux-ci auraient délibérément dissimulé à leurs acheteurs l'existence de fissures qu'ils avaient pris le soin de faire reboucher et colmater avant la vente, et en ne révélant pas à ces derniers l'existence de ces fissures.

Cette prétention ne constitue pas une demande nouvelle, alors qu'elle tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, bien que son fondement juridique soit différent, à savoir l'anéantissement de la vente.

L'article 1116 du Code civil dispose : « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiqués par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé »

Il incombe ainsi aux appelants de démontrer l'existence d'une ou plusieurs man'uvres consistant en l'espèce en une dissimulation intentionnelle des désordres, ayant eu en outre un caractère déterminant sur leur consentement et leur causant directement un préjudice.

Toutefois, ils procèdent par voie de simples affirmations pour tenter de démontrer l'existence d'un dol qui n'est nullement prouvé, alors que la cour a d'ores et déjà considéré, en confirmant en cela la décision des premiers juges, que les travaux d'embellissement des façades ne traduisaient pas une man'uvre des vendeurs de cacher l'existence de fissures. Si les consorts [N] avaient voulu véritablement dissimuler à mauvais escient ces fissures, ils auraient alors camouflé également la fissure que les acheteurs ont reconnu avoir découvert dans l'une des chambres avant la vente.

Sur les demandes présentées à l'encontre de M. [S]

À titre plus subsidiaire encore, les appelants recherchent la responsabilité de M. [S], lequel selon eux serait responsable du ravalement extérieur et du support sur lequel il intervenait, si bien qu'il a commis une faute pour ne pas avoir informé le maître de l'ouvrage sur le risque d'un support présentant des fissures rebouchées. Ils ajoutent que s'ils sont tiers au contrat passé entre les consorts [N] et M. [S] , ils sont néanmoins fondés à engager la responsabilité de ce dernier alors qu'il subisse directement les conséquences de sa faute contractuelle.

M. [S] s'y oppose, faisant valoir qu'il est intervenu à la demande du maître de l'ouvrage pour effectuer des travaux de ravalement de la façade, notamment le nettoyage de la maison, en 2007. La facture établie le 18 octobre 2007 délimite les travaux qu'il a réalisés, soit le ravalement et le nettoyage de la façade, soit uniquement l'extérieur de la maison.

***

Il résulte de la facture de M. [S] du 18 octobre 2007 qu'il a réalisé des travaux de ravalement de façade, de nettoyage de la toiture, de mise en peinture des volets et fenêtres extérieurs, ainsi que des travaux de ravalement sur la clôture.

Ainsi, il conteste avoir réalisé des travaux de colmatage et de rebouchage d'éventuelles fissures.

Sa facture ne permet pas de le soutenir, et seules les affirmations des vendeurs le contredisent.

Toutefois, la preuve du champ de son intervention au-delà de ce qui est détaillé n'est pas rapportée.

Dans ces conditions, sa responsabilité ne peut être retenue au titre de travaux de colmatage des fissures.

Par ailleurs, un simple travail de peinture d'une façade ne peut conduire le peintre ; qui aurait constater que des fissures sur cette façade auraient été préalablement rebouchées par une entreprise tierce ; à attirer l'attention du maitre de l'ouvrage sur ce que pourrait révéler l'existence de ces fissures.

En conséquence, la faute de M. [S] ne peut être retenue, et les appelants seront déboutés de leurs demandes à son égard.

Par voie de conséquence, la garantie recherchée de la société GENERALI est sans objet.

Sur les demandes accessoires

Il serait inéquitable que les intimés supportent les frais irrépétibles qu'ils ont du engager pour faire valoir leurs droits devant la cour d'appel.

En conséquence, les appelants seront condamnés in solidum aux dépens et à verser à chacun d'eux la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

CONFIRME le jugement déféré, y ajoutant :

CONDAMNE in solidum, M. [W] [H], Mme [G] [U] épouse [H], M. [A] [H], la SCI Rem's à payer à M. [T] [N], à M. [B] [S], à la SA Generali IARD, chacun la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNE in solidum, M. [W] [H], Mme [G] [U] épouse [H], M. [A] [H], et la SCI Rem's aux dépens.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Annie BLAZEVIC, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/00585
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;18.00585 ?
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