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21/09/2022 | FRANCE | N°19/00300

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 21 septembre 2022, 19/00300


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 21 SEPTEMBRE 2022







PRUD'HOMMES



N° RG 19/00300 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K2FX













Monsieur [I] [C]



c/



SELARL [H] [V], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Formacces

UNEDIC Délégation AGS-CGEA d'Ile de France-Ouest

















Nature de la

décision : AU FOND

















Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 décembre 2018 (R.G. n°F 17/00487) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel d...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 21 SEPTEMBRE 2022

PRUD'HOMMES

N° RG 19/00300 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K2FX

Monsieur [I] [C]

c/

SELARL [H] [V], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Formacces

UNEDIC Délégation AGS-CGEA d'Ile de France-Ouest

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 décembre 2018 (R.G. n°F 17/00487) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 16 janvier 2019,

APPELANT :

Monsieur [I] [C]

né le 10 Février 1950 à [Localité 4] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Christian DUBARRY, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

SELARL [H] [V], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Formacces sis [Adresse 2]

UNEDIC Délégation AGS-CGEA d'Ile de France-Ouest, prise en la personne de son Directeur domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 3]

représentés et asistés de Me Philippe DUPRAT de la SCP DAGG, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 juin 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Rémi Figerou, conseiller chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sophie Masson, conseillère

Monsieur Rémi Figerou, conseiller

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [I] [C] a été nommé gérant de la SARL Formacces (ci-après dénommée la société), le 12 avril 2010, date de sa création à laquelle il a concouru en se portant actionnaire à hauteur de 30% des parts sociales, les autres parts étant détenues à hauteur de 30% chacune par Mmes [K] [G] et [O] [J] et de 20 % par Mme [E] [Z].

M. [C] revendique la qualité de salarié de cette société à compter du 10 février 2014 sur la base d'un contrat de travail à durée indéterminée signé le 9 février 2014, pour un poste de coordinateur technique à raison de 75 h par mois, avec un statut de cadre, coefficient 170.

A compter du mois d'avri1 2016, les bulletins de salaire produits mentionnent une durée de travail à plein temps pour une rémunération mensuelle brute de 3.422,10 euros.

La société a été placée en liquidation judiciaire par jugement rendu le 21 décembre 2016 par le tribunal de commerce de Bordeaux.

Par lettre du 4 janvier 2017, la SELARL [H] [V], désignée en qualité de liquidateur, a notifié à Monsieur [C] son licenciement pour motif économique sous réserve de la reconnaissance éventuelle de son statut de salarié et de la réalité de son contrat de travail.

Par courrier du 1er février 2017, le mandataire liquidateur a indiqué à M. [C] que la qualité de salarié ne pouvait lui être reconnue.

M. [C] a saisi le 24 mars 2017 le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui, par jugement du 14 décembre 2018, l'a débouté de sa demande de reconnaissance de statut de salarié de la société Formacces ainsi que de l'ensemble de ses prétentions et condamné aux dépens.

Par déclaration du 16 janvier 2019, M. [C] a relevé appel de cette décision, notifiée par lettre adressée par le greffe aux parties le 18 décembre 2018.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 11 avril 2019, M. [C] demande à la cour de réformer la décision prise par le conseil des prud'hommes de Bordeaux, de dire qu'il avait la qualité de salarié et de fixer ses créances au passif de la société aux sommes suivantes opposables à l'UNEDIC :

- 6.844 euros au titre de l'indemnité de préavis,

- 684,42 euros au titre des congés payés sur préavis,

- 2.556,57 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 12 juin 2019, le mandataire liquidateur et l'UNEDIC demandent à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel,

- constater l'absence de qualité de salarié de M. [C], gérant de droit de la société Formacces, faute de fonctions techniques distinctes dans un lien de subordination et en considération d'une gérance collégiale majoritaire,

- débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [C] à payer au CGEA une indemnité de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [C] aux dépens ;

À titre très infiniment subsidiaire, en cas de reconnaissance de la qualité de salarié,

- statuer ce que de droit sur les montants réclamés au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de licenciement,

- dire et juger que l'arrêt à intervenir ne sera opposable à l'AGS que dans la limite légale de sa garantie, laquelle exclut l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 février 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 14 juin 2022.

Par lettre enregistrée au greffe de la cour d'appel, le 19 mai 2022, l'avocat de M. [C] a indiqué qu'il n'intervenait plus pour celui-ci. Aucun dossier n'a été déposé dans son intérêt.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. [C] soutient avoir été gérant de droit de la société Formacces alors que Mme [G] était gérante de fait. Il affirme qu'il était en réalité salarié comme coordinateur technique. Il invoque au soutien de ses prétentions un contrat de travail ayant pour date de prise d'effet le 10 février 2014, signé, et des bulletins de salaires de novembre et décembre 2016.

Le mandataire liquidateur et l'UNEDIC soutiennent que M. [C] n'était pas salarié. D'une part, il aurait signé pour les deux parties le contrat de travail invoqué, ce dernier n'ayant pas été soumis à l'assemblée des associés. D'autre part aucune cotisation à l'AGS et à Pôle Emploi n'apparaît sur ses bulletins de paie. Enfin, M. [C] ne démontre aucun lien de subordination avec la société Formacces.

***

Le gérant d'une société à responsabilité limitée, s'il est actionnaire minoritaire, peut cumuler ses fonctions de gestion avec un contrat de travail. Toutefois, l'existence d'un contrat de travail ne doit pas porter atteinte au principe de la révocabilité du gérant, c'est pourquoi ce contrat doit obéir à certaines conditions.

Tout d'abord, il doit être réel, c'est-à-dire correspondre à un emploi effectif et, dans le cadre de son contrat de travail, le gérant doit exercer des fonctions ' le plus souvent techniques ' distinctes de celles de son mandat social, et recevoir une rémunération normale à ce titre. En outre, le contrat de travail doit placer l'intéressé dans un état de subordination à l'égard de la société.

L'état de subordination suppose que le gérant ne jouisse pas, au titre de son mandat, des pouvoirs les plus étendus, et c'est à lui de prouver que ces différentes conditions sont satisfaites pour pouvoir bénéficier de la double qualité de mandataire social et de salarié, même si c'est à celui qui invoque le caractère fictif d'un contrat de travail apparent d'en apporter la preuve.

Par ailleurs, le contrat de travail conclu entre le gérant déjà en fonction et la société constitue une convention réglementée soumise à l'approbation des associés selon la procédure prévue par l'article L. 223-19 du code de commerce.

En l'espèce, faute d'avoir versé aux débats les pièces qu'il entendait invoquer, l'appelant ne prouve pas que les conditions pour pouvoir bénéficier de la double qualité de gérant et de salarié sont remplies.

Par ailleurs, les intimées démontrent que le contrat de travail litigieux ne comprend aucune définition des missions spécifiques du salarié alors que la société avait une activité de formation et de conseil en matière d'accessibilité des locaux auprès des organismes publics ou privé recevant du public (pièce n° 5 des intimés), que la société ne disposait que de deux salariés dont M. [C] (pièce 10 des intimées), que l'appelant prétend avoir été placé sous les ordres de Mme [G], coordonnatrice, alors que celle-ci bénéficiait d'un coefficient hiérarchique inférieur à lui (pièce n° 5 des intimées) et que M. [C] disposait en vertu de son mandat de gérant des pouvoirs de gestion les plus étendus (pièce n° 1 des intimées).

En outre, sur la foi des pièces de l'appelant (non versées aux débats), les intimés ajoutent qu'il résulte des bulletins de paie de l'appelant que celui-ci ne cotisait pas à l'assurance chômage, ni l'employeur pour la part patronale, ce dernier ne cotisant pas davantage au régime de garantie des salaires.

Les intimés démontrent enfin que M. [C] disposait seul de la signature sur les comptes bancaires de la société (leur pièce n° 8), du pouvoir de direction sur les salariés (leurs pièces n° 6, 7 et 7 bis), d'une absence de fonctions techniques dissociables dans le cadre de son contrat de travail (leurs pièces 1, 2, 5, 8 et10) et ainsi du caractère fictif du contrat de travail de l'appelant.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé.

Il serait inéquitable que l'UNEDIC supporte les frais irrépétibles exposés devant la cour. Aussi, l'appelant sera condamné à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

CONFIRME le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [I] [C] aux dépens ainsi qu'à payer à l'UNEDIC Délégation AGS-CGEA d'Ile de France Ouest la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 19/00300
Date de la décision : 21/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-21;19.00300 ?
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