COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE - SECTION A
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ARRÊT DU : 14 SEPTEMBRE 2022
PRUD'HOMMES
N° RG 19/02233 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K7OD
SA LOCADOUR GLR
c/
Monsieur [Y] [K]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 avril 2019 (R.G. n°F 17/01869) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 19 avril 2019,
APPELANTE :
SA Locadour GLR, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]
N° SIRET : 389 324 468
représentée par Me Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX,
assistée de Me David BRIVOIS, avocat au barreau de DAX
INTIMÉ :
Monsieur [Y] [K]
né le 23 Novembre 1956 à [Localité 5] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Iwann LE BOEDEC, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 mai 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Rémi Figerou, conseiller chargé d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie Hylaire, présidente
Madame Sophie Masson, conseillère
Monsieur Rémi Figerou, conseiller
Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
- prorogé au 14 septembre 2022 en raison de la charge de travail de la cour.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [Y] [K], né en 1956, a été engagé en qualité d'animateur d'agence, statut cadre, par la SA Locadour GLR par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 9 janvier 2008.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de commerce, de location et de réparation de tracteurs, machines et matériels agricoles, de matériels de travaux publics, de bâtiment et de manutention.
Par lettre datée du 10 août 2017, M. [K] a été convoqué à un entretien préalable en vue d'une éventuelle sanction disciplinaire. Le 24 août 2017, il lui a été notifié une mise à pied de 3 jours prévus les 29, 30 et 31 août 2017.
Par lettre datée du 3 octobre 2017, M. [K] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 13 octobre 2017, reporté au 24 octobre 2017, et s'est vu notifier une mise à pied à titre conservatoire.
M. [K] a ensuite été licencié pour faute grave par lettre datée du 30 octobre 2017 aux motifs suivants :
- avoir laissé chez un client (ATPA [Localité 4]) un matériel (chariot Maniscopic MT1330SL) alors que le contrat de location avait été arrêté depuis le 10 mars 2017, sans que le matériel soit rentré sur le parc, sans couverture assurance et sans facturation ;
- avoir fait pression sur ses subordonnés afin que ces derniers ne refacturent pas des réparations au client, puisque ce matériel aurait dû être sur le parc (faisant supporter à l'entreprise le coût de 3 crevaisons) et qu'ils établissent un rapport de vérification mensonger en indiquant un faux lieu de contrôle ([Localité 3] au lieu de [Localité 4]),
- non-paiement de deux factures émises par la société Ctimso des mois d'avril et mai 2017, l'employeur considérant que les prix facturés et acceptés étaient déraisonnables, faits caractérisant des fautes de gestion.
A la date du licenciement, M. [K] avait une ancienneté de 9 ans et 10 mois et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.
Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités ainsi que l'annulation de sa mise à pied disciplinaire, M. [K] a saisi le 6 décembre 2017 le conseil de prud'hommes de Bordeaux, qui par jugement rendu le 12 avril 2019, a :
- ordonné l'annulation de la mise à pied disciplinaire en date du 24 août 2017,
- dit que le licenciement de M. [K] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et que ses demandes sont fondées,
- condamné la société à payer à M. [K] les sommes de :
* 573,81 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied disciplinaire,
* 57,38 euros à titre d'indemnité de congés payés sur mise à pied disciplinaire,
* 1.948 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,
* 194,80 euros à titre d'indemnité de congés payés sur mise à pied conservatoire,
* 11.688,27 euros à titre d'indemnité de préavis sur le fondement de l'article L.1234-1 du code du travail,
* 1.168,82 euros à titre de congés payés sur préavis,
* 10.730 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
* rappelé qu'est de droit exécutoire à titre provisoire le paiement de ces sommes sur le fondement de l'article R.1454-28 du code du travail dans la limite maximum de neuf mois de salaire, la moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire étant fixée à 3.896,09 euros,
* 24.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail,
* 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné le remboursement par la société aux organismes concernés des indemnités de chômage qui ont été versées à M. [K] dans la limite d'un mois d'indemnité sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail,
- débouté M. [K] du surplus de ses demandes,
- débouté la société de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société aux dépens et frais éventuels d'exécution.
Par déclaration du 19 avril 2019, la société a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 14 janvier 2020, la société demande à la cour de réformer dans son intégralité le jugement rendu et de :
A titre principal,
- constater les manquements de M. [K],
- confirmer la mise à pied disciplinaire notifiée le 24 août 2017,
- rejeter les demandes de M. [K] à ce titre,
- constater les graves manquements de M. [K],
- confirmer l'existence d'une faute grave de licenciement et la nécessité d'ordonner une mise à pied conservatoire pendant la procédure de licenciement,
- rejeter l'ensemble des demandes de M. [K] au titre d'une absence de cause réelle et sérieuse,
- constater l'absence de tout caractère vexatoire à la procédure,
- rejeter l'ensemble des demandes de M. [K] au titre d'un préjudice à ce titre,
- rejeter l'ensemble des demandes de M. [K], article 700 du code de procédure civile, dépens et frais d'exécution y compris,
- débouter M. [K] de son appel incident ;
A titre subsidiaire, et à supposer que la cour estime qu'il n'existait pas de faute grave, constater l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ;
A titre infiniment subsidiaire, et à supposer que la cour estime qu'il n'existait pas de cause réelle et sérieuse de licenciement, limiter les condamnations pour absence de cause réelle et sérieuse au strict préjudice démontré par M. [K] et, faute de démonstration véritable, dire qu'il ne dépasse pas le minimum fixé à l'article L.1235-3 du code du travail, c'est-à-dire 3 mois de salaire (12.876 euros) ;
A titre reconventionnel, condamner M. [K] au paiement d'une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 14 octobre 2019, M. [K] demande à la cour de le dire recevable et bien fondé en son appel et de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a requalifié son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- confirmer l'annulation de la mise à pied disciplinaire notifiée le 24 août 2017,
- infirmer le jugement pour le surplus,
- condamner la SA Locadour GLR à lui verser les sommes suivantes :
* 10.730 euros à titre d'indemnité de licenciement,
* 11.688,27 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 1.168,82 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
* 1.948 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 194,80 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
* 42.920 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 3.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés du caractère vexatoire de la procédure de licenciement,
* 573,81 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied disciplinaire du 24 août 2017 outre 57,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
* 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner l'appelante aux dépens et aux éventuels frais d'exécution forcée.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 avril 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 24 mai 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la sanction disciplinaire du 24 août 2017
La société a fait grief à M. [K] d'avoir validé les congés du personnel de telle manière que M. [O], qui venait de démissionner pour aller travailler pour la concurrence, s'est retrouvé seul dans l'entreprise du 24 au 28 juillet 2017. Elle lui a également reproché d'avoir communiqué à M. [R] ses propres identifiants et mots de passe informatique pour la validation des congés alors qu'il s'agit de données personnelles et confidentielles
M. [K] conteste les deux griefs.
Sur la validation des congés il fait valoir que l'historique des congés de 2016 démontre que l'employeur avait procédé de manière identique concernant M. [O] alors que lui-même se trouvait en arrêt maladie et que le second responsable était également en congés.
Par ailleurs, si M. [O] partait à la concurrence, celui-ci était mécanicien non-cadre, soit exerçant des fonctions et un statut limitant par leur nature le risque de fuite de clients et il était en poste depuis suffisamment longtemps pour connaître le fichier client et les tarifs, sans que sa présence, seul et pendant une durée limitée de 4 jours, au cours de son préavis constitue un risque supplémentaire pour l'employeur.
Sur le second grief, l'intimé conteste avoir communiqué ses codes à son collègue, M. [R], pour la validation de ses congés pour la bonne raison qu'il se trouvait précisément en congés. En fait ses codes étaient inscrits sur une note se trouvant sur son bureau, lequel n'était pas fermé à clefs, si bien que son ordinateur était accessible aux autres salariés car l'employeur n'avait jamais sécurisé son bureau.
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Aux termes des dispositions de l'article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige sur une sanction disciplinaire, le juge apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction et forme sa conviction au vu des éléments retenus par l'employeur pour prononcer la sanction et de ceux fournis par le salarié à l'appui de ses allégations. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Sur le premier grief, il résulte des pièces versées aux débats par les parties que ce n'est pas la première fois que les salariés partaient en vacances simultanément à l'exception de M. [O] qui restait ainsi seul dans l'entreprise (pièces 11 et 17 de l'intimé). Le fait que celui-ci était démissionnaire et partait pour travailler pour la concurrence ne change rien à une règle qui avait été acceptée et pratiquée antérieurement par l'employeur.
De plus, l'intimé n'est pas démenti par l'appelante quand il souligne que M. [O] occupait un poste technique de mécanicien non cadre et que le risque allégué ne repose que sur les allégations de la société et il n'est pas démontré que M. [O] a commis un acte nuisible aux intérêts de l'entreprise. Enfin, il n'est pas plus établi qu'il existait un usage ou une règle notifiée aux salariés, et ainsi à M. [K], obligeant le responsable de l'établissement à maintenir plusieurs cadres dans l'entreprise en période de vacances.
Le second grief n'est pas non plus établi dès lors que le bureau de M. [K] était accessible à d'autres employés qui ont pu avoir ainsi connaissance de ses codes, sans que celui-ci ne les ait communiqués.
En conséquence, en l'absence de faute démontrée, et par voie de conséquence, d'une proportionnalité entre une telle faute et la sanction prise, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a annulé la sanction disciplinaire du 24 août 2017, et qu'il a condamné l'employeur à verser à M. [K] les sommes de 573,81 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied disciplinaire outre 57,38 euros pour les congés payés y afférents.
Sur le licenciement
La société soutient que malgré la mesure de mise à pied disciplinaire, le comportement de M. [K] ne s'est pas amélioré et qu'elle a ainsi été contrainte de le convoquer à nouveau à un entretien préalable, puis de le licencier pour faute grave le 30 octobre 2017.
Pour sa part, M. [K] conteste les trois griefs qui lui sont reprochés sur la base d'une présentation erronée des faits. Il répond point par point sur chacun d'eux.
Il convient de reprendre chacun des trois griefs reprochés à M. [K] dans la lettre de licenciement, laquelle fixe les termes du litige.
Sur la mise à disposition d'un matériel sans contrat de location
Il est reproché au salarié d'avoir laissé un matériel chez un client en omettant de le facturer.
Pour l'employeur, cette omission serait volontaire dès lors que le logiciel de facturation génère « automatiquement » une nouvelle facture lorsque le contrat de location arrive à son terme, si bien qu'un oubli est impossible ; le seul moyen d'éviter cette nouvelle facturation est de 'remettre' le matériel sur le parc, ce qu'a fait le salarié, alors que le matériel n'était pas revenu dans l'entreprise. C'est ainsi que la société a fait constater, le 28 septembre 2017, qu'un chariot Maniscopic MT 1330 SL se trouvait toujours chez le client, la société ATPA, à [Localité 4], alors que la dernière facture reçue et acquittée par cette société remontait au mois de mars 2017.
M. [K] fait exposer que le chariot mis à disposition de la société ATPA était ancien, pour avoir été mis en service en 2000, était loué à cette dernière depuis 2008, et avait subi de nombreuses pannes. Notamment, le 10 mars 2017, la société Pneus Sécurité Girondins avait réalisé un remplacement d'un pneu hors d'usage sur ce véhicule, réparation qui était nécessaire pour ramener le véhicule vers le parc de Locadour, le lendemain, 11 mars 2017.
C'est la raison pour laquelle le contrat de location ainsi que la facturation ont été interrompus, ce matériel est resté au parc du 11 mars au 14 mai 2017 et la société cliente a, en attendant de pouvoir le récupérer, loué un chariot de remplacement qui lui a été facturé, pour la période courant du 11 avril au 4 mai 2017. Il n'y a eu aucune tentative de dissimulation de l'intimé ou de la société ATPA car celle-ci a déclaré des jours d'intempéries dans la période entre le 15 mai et le 14 septembre 2017, ce qu'elle n'aurait pas fait dans le cas d'une fraude puisque ces déclarations auraient pu alors attirer l'attention de la société Locadour.
Par ailleurs, M. [K] soutient que dans la mesure où les réparations de pneus étaient fréquentes sur l'engin, et ainsi les 10 mars, 24 juillet et 2 août 2017, le fait qu'il n'y en ait eu aucune pour la période du 11 mars au 15 mai 2017 prouve que le véhicule n'était pas à la disposition de la cliente. Dès lors il est normal que le matériel n'ait pas été facturé du 11 mars au 15 mai 2017.
M. [K] conteste les déclarations de M. [R] qui prétend qu'il lui aurait demandé de ne pas répercuter le prix des réparations du chariot au client, alors qu'en outre il relevait de la responsabilité de ce dernier, en sa qualité de magasinier, d'établir les contrats de location et de ventiler la facturation. Ainsi, si les pneus n'ont pas été facturés c'est que M. [R] n'a pas fait sortir le matériel du parc (sur le logiciel) et a transmis les factures pour validation, M. [K] soutenant qu'il lui était impossible de veiller au suivi systématique de l'ensemble de la facturation.
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Le matériel litigieux n'a pas été facturé du 11 mars au 14 mai 2017. Toutefois, les pièces communiquées par les parties ne permettent pas de retenir que ce matériel se trouvait bien pendant la période litigieuse chez la cliente, la société ATPA, et en état de marche.
Par ailleurs, l'attestation de M. [R] est ambigüe. En effet, le témoin affirme simplement que M. [K] lui aurait dit, ce que ce dernier conteste, qu'il n'y avait pas lieu de facturer un client pour des travaux de réparation de crevaison de pneus à partir du moment où le Maniscopic se trouvait sur le parc de l'entreprise, et non sur celui du client, ce qui apparaît logique et ne permet pas de déceler une fraude ou, à tout le moins, une faute de gestion de M. [K].
En outre, le matériel litigieux était ancien, sujet à des pannes diverses et à des réparations fréquentes, si bien qu'il était plus difficile d'effectuer un suivi rigoureux.
En toute hypothèse, il existe sur ce premier grief un doute sérieux sur le comportement de M. [K], doute qui doit lui profiter.
Sur la pression exercée par M. [K] sur ses subordonnés afin que ces derniers ne refacturent pas des réparations au client et établissent un faux rapport de vérification
La société expose que le chariot a fait l'objet de trois réparations de pneus alors que ces réparations n'ont pas été facturées à la cliente, la société ATPA, et alors que le matériel se trouvait bien sur son site.
Pour ce faire, M. [K] aurait demandé à ses subordonnés de ne pas facturer la cliente, comme en atteste M. [R]. L'appelante ajoute que si le matériel s'était trouvé sur son parc, donc non utilisé, il n'aurait pas été nécessaire d'entreprendre trois réparations des pneus, dont une intervention à [Localité 4], siège de la société ATPA. M. [V] atteste que M. [K] lui a demandé de procéder à un rapport de vérification sur le chariot en indiquant qu'il se trouvait sur le parc de l'entreprise.
M. [K] conteste cet autre grief exposant avoir déposé plainte contre M. [B] et contre M. [V] pour fausses attestations. Il soutient que le 9 mai 2017, le matériel se trouvait bien sur le parc de l'appelante, ainsi que le confirme le courriel d'ATPA du 19 décembre 2017, la location par cette dernière d'un chariot de remplacement, et l'absence de toute intervention sur le véhicule litigieux pendant la période de référence.
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Les attestations de Messieurs [V] et [R] sont contredites par le courriel de la société ATPA du 19 décembre 2017 qui affirme que du 11 mars au 14 mai 2017, le chariot litigieux se trouvait sur le parc de la société Locadour. Cette contradiction crée un doute qui doit profiter au salarié.
Sur l'absence de contrôle par M. [K] du coût des interventions extérieures
Si l'appelante reconnaît qu'elle ne peut pas prouver un intéressement personnel de M. [K] dans l'acceptation de factures trop élevées de prestataires extérieurs, elle considère que l'intimé a commis une faute en les acceptant.
C'est ainsi qu'il a accepté de payer des factures de réparation d'un godet à la société Ctimso (1.001 euros H.T. et 1.266 euros H.T) alors qu'un remplacement de ce godet coûte 466 euros H.T.
M. [K] expose que les factures litigieuses étaient systématiquement et directement adressées à la direction pour règlement, et s'agissant de factures d'avril et de mai 2017, le grief, soulevé plus de deux mois après l'envoi de ces factures, est prescrit sauf à l'employeur de démontrer, ce qu'il n'entreprend pas, à quelle date plus tardive il aurait eu connaissance de ces faits.
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La facture litigieuse de la société Ctimso est du 5 mai 2017.
L'appelante ne conteste pas que les factures concernant l'agence de [Localité 3] lui étaient adressées, sauf à considérer que c'était à M. [K] de les contrôler.
Toutefois, elle ne démontre pas à quelle date elle en a eu connaissance et se serait ainsi rendue compte d'une facturation trop élevée eu égard à la valeur du godet à réparer.
En conséquence, ce grief invoqué près de 5 mois après la date de l'émission de la facture est prescrit.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a jugé que le licenciement de l'intimé ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse.
Sur les demandes pécuniaires de M. [K] au titre de la rupture
Le rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire
M. [K] sollicite la confirmation du jugement au titre du rappel de salaire retenu durant la mise à pied conservatoire du 16 au 30 octobre 2017.
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M. [K] peut effectivement prétendre au paiement de la somme de 1.948 euros outre celle de 194,80 euros au titre des congés payés afférents.
Le jugement entrepris sera confirmé quant aux sommes allouées à ce titre.
L'indemnité compensatrice de préavis
M. [K] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué l'équivalent de trois mois de salaire au titre de l'indemnité de préavis.
La société Locadour ne présente pas d'observations sur ce point.
M. [K] peut prétendre à une indemnité équivalente à trois mois de salaire, soit la somme de 11.688,27 euros outre celle de 1.168,82 euros au titre des congés payés afférents.
Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
L'indemnité de licenciement
M. [K] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué la somme de 10.730 euros au titre de l'indemnité de licenciement.
La société Locadour ne présente pas d'observations sur ce point.
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Compte tenu de son ancienneté, M. [K] peut prétendre à une indemnité de licenciement. Le salaire de référence doit être fixé à la somme de 4.292,84 euros. Par ailleurs, au terme de son préavis, il aurait disposé d'une ancienneté de 10 ans, si bien que l'indemnité légale de licenciement s'élève à : ¿ x 4.292 euros x 10 = 10.730 euros.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
M. [K] expose qu'il est père de famille, qu'il a la charge de prêts immobiliers, qu'il était âgé de 60 ans au moment du licenciement. Il sollicite une indemnité équivalente à 10 mois de salaire soit la somme de 42.920 euros.
La société Locadour considère que l'intimé n'apporte pas la preuve des préjudices qu'il invoque et fait valoir qu'en application du barème prévu à l'article L. 1253-3 du code du travail, il ne peut prétendre à plus de trois mois de salaire.
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M. [K] a été licencié alors qu'il avait 60 ans et avait une ancienneté de 9 ans et 9 mois à la date de notification de son licenciement pour faute grave.
Cependant, il ne communique aucun élément sur sa situation après son licenciement.
En l'absence de tout justificatif produit par le salarié dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, il lui sera alloué la somme de 12.000 euros à titre d'indemnité en réparation du préjudice résultant de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.
En application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, il sera ordonné le remboursement par l'employeur à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié depuis son licenciement dans la limite de 6 mois d'indemnités.
Les dommages et intérêts en raison du caractère vexatoire du licenciement
M. [K] soutient avoir été particulièrement affecté par les circonstances de son licenciement. Il sollicite la somme de 3.000 euros en raison des conséquences pour lui d'un tel licenciement vexatoire.
La société Locadour s'oppose à cette demande.
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En l'absence d'éléments suffisamment probants pour étayer la demande de M. [K], celle-ci a été à juste titre rejetée par le jugement déféré.
Sur les autres demandes
La société, partie perdante à l'instance et en son recours, sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à M. [K] la somme de 2.300 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel en sus de la somme allouée par les premiers juges sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée à M. [Y] [K] ainsi que le montant du remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié,
Réformant la décision de ces chefs et statuant à nouveau,
CONDAMNE la société Locadour GLR à payer à M. [Y] [K] la somme de 12.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
ORDONNE le remboursement par la société Locadour GLR à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement versées à M. [Y] [K] dans la limite de 6 mois d'indemnités,
CONDAMNE la société Locadour GLR aux dépens ainsi qu'à payer à M. [Y] [K] la somme de 2.300 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire