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13/09/2022 | FRANCE | N°20/00291

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 3ème chambre famille, 13 septembre 2022, 20/00291


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



TROISIÈME CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 13 SEPTEMBRE 2022









N° RG 20/00291 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LNGR









[H] [K]



c/



[P] [I] épouse [K]

[R] [K] épouse [N]

[G] [Z]

[V] [Z]

[M] [Z] épouse [F]



















Nature de la décision : AU FOND







28A


r>Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 novembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de BORDEAUX (RG n° 16/04167) suivant déclaration d'appel du 15 janvier 2020



APPELANT :



[H] [K]

né le 16 Mai 1958 à [Localité 40] (...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 13 SEPTEMBRE 2022

N° RG 20/00291 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LNGR

[H] [K]

c/

[P] [I] épouse [K]

[R] [K] épouse [N]

[G] [Z]

[V] [Z]

[M] [Z] épouse [F]

Nature de la décision : AU FOND

28A

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 novembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de BORDEAUX (RG n° 16/04167) suivant déclaration d'appel du 15 janvier 2020

APPELANT :

[H] [K]

né le 16 Mai 1958 à [Localité 40] ([Localité 40])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 5]

Représenté par Me Alain GUERIN de la SELARL A. GUERIN & J. DELAS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[P] [I] épouse [K]

née le 31 Janvier 1938 à [Localité 29] ([Localité 29])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 11]

Représentée par Me Bertrand GABORIAU de la SELARL B.G.A., avocat au barreau de BORDEAUX

[R] [K] épouse [N]

née le 14 Novembre 1959 à [Localité 40] ([Localité 40])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 6]

Non comparant, non représenté (DA et conclusions signifiées le 07/04/2020)

[G] [Z]

né le 02 Avril 1943 à [Localité 9] ([Localité 9])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 4]

Non comparant, non représenté (DA et conclusions signifiées le 10/04/2020)

[V] [Z]

né le 11 Avril 1968 à [Localité 9] ([Localité 9])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 8]

Non comparant, non représenté (DA et conclusions signifiées le 25/05/2020)

[M] [Z] épouse [F]

née le 28 Mai 1974 à [Localité 9] ([Localité 9])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 10]

Non comparant, non représenté (ordonnance de dessaisissement partiel du 03/09/2020)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 juin 2022 hors la présence du public, devant la Cour composée de :

Président : Hélène MORNET

Conseiller: Danièle PUYDEBAT

Conseiller : Isabelle DELAQUYS

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Clémentine JORDAN

Greffier lors du prononcé : Véronique DUPHIL

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.

M. [X] [K], né le 6 février 1924, est décédé à [Localité 9] le 1er janvier 2013.

Il était veuf en premières noces de Mme [U] [O], décédée le 3 février 1969, avec laquelle il avait eu trois enfants :

- Mme [B] [K], épouse [Z],

- M.[H] [K],

- Mme [R] [K], épouse [N].

En secondes noces, M. [K] a contracté mariage avec Mme [P] [I] le 23 juillet 1988 sous le régime de la séparation de biens.

Au décès de Mme [O], la succession de celle-ci était composée de :

- la moitié des biens de communauté soit :

-la moitié d'un terrain sis à [Localité 16],

- la moitié d'un immeuble sis à [Adresse 24],

- la moitié d'un immeuble sis à [Adresse 28],

- des immeubles lui appartenant en propre soit :

- un immeuble [Adresse 39],

- un immeuble [Adresse 32]/[Adresse 37],

- un immeuble [Adresse 25],

- un immeuble [Adresse 30],

- un immeuble [Adresse 13],

- un immeuble [Adresse 7].

M. [K] ayant opté pour l'usufruit des biens dépendants de la succession de son épouse prédécédée, ces immeubles sont revenus à chacun des trois enfants à concurrence d'un tiers en nue-propriété .

Par la suite, diverses donations sont intervenues.

Ainsi, suivant acte reçu par Me [T], notaire à [Localité 26], en date du 4 décembre 1981, M. [K] a transmis à ses trois enfants à concurrence d'un tiers indivis chacun l'ensemble de ses droits sur les biens ayant dépendu de sa communauté avec Mme [O] dans l'immeuble sis à [Localité 27] et dans l'immeuble sis [Adresse 36].

Aux termes d'un acte de partage en date du 16 janvier 1985 reçu par Me [E], notaire à [Localité 9], il a été attribué :

- à Mmes [K] [B] et [R], à concurrence de moitié chacune, la pleine propriété de l'immeuble sis à [Localité 27] et de l'immeuble sis [Adresse 36],

- à M. [K] [H], la nue-propriété, sous l'usufruit de M. [K] [X] de l'immeuble [Adresse 39], de l'immeuble [Adresse 33] et de l'immeuble [Adresse 25].

Ce partage a été réalisé sans soulte de part ni d'autre.

Puis, aux termes d'un acte de partage reçu par Me [J], notaire à [Localité 9], le 10 mars 2003, l'indivision entre Mmes [K] a été partagée et il a été attribué :

- à Mme [K] [R] la pleine propriété de l'immeuble sise à [Localité 27],

- à Mme [K] [B] la pleine propriété de l'immeuble sis [Adresse 36].

Ce partage a été réalisé également sans soulte de part ni d'autre.

Par la suite, une seconde donation est intervenue le 9 mai 2006 suivant acte au rapport de Me [J], notaire à [Localité 9], au profit de M. [K] [H], et portant sur l'usufruit d'un appartement sis [Adresse 35].

Mme [B] [K] est décédée à [Localité 9] le 9 juin 2009 en laissant pour lui succéder :

- son conjoint, M. [Z] [G], ayant opté le 2 avril 2014 pour l'usufruit des biens et droits mobiliers et immobiliers composant la succession de son épouse au jour de son décès,

- M. [V] [Z], son fils adoptif (adoption simple),

- Mme [M] [Z] épouse [F], sa fille adoptive (adoption simple).

Il dépendait notamment de sa succession, provenant de la succession de sa mère:

- la nue-propriété, sous l'usufruit viager de M. [K] [X] aujourd'hui éteint par suite de son décès, d'un immeuble sis à [Adresse 24],

- le tiers d'un immeuble sis à [Adresse 23],

- le tiers en nue-propriété d'un immeuble sis à [Adresse 22],

- le sixième en nue-propriété de terrains sis à [Localité 14].

Le 3 mai 2010, M. [X] [K] a réalisé une donation au profit de Mme [I] hors part successorale à concurrence de ses droits, soit moitié indivise, d'un appartement sis à [Adresse 31].

Aux termes d'un testament olographe en date du 21 juin 2010 et d'un codicille du 25 janvier 2012, M. [K] [X] a institué ses deux enfants, légataires universels, et son épouse légataire à titre particulier de la pleine propriété, net de tous frais et droits de succession, d'un appartement sis à [Adresse 21] et à son choix les meubles meublants et objets mobiliers qu'elle pourrait désirer (liste suit non nominative) ainsi qu'avec dispense de caution et d'état de l'immeuble, l'usufruit, sa vie durant jusqu'au jour de son décès, d'un immeube sis à [Localité 18], les nues propriétaires supportant l'impôt foncier et toutes les grosses réparations nécessaires à l'immeuble outre qu'elle reste gratuitement dans la maison de l'[Adresse 17] le temps nécessaire à la récupération de son appartement de la [Adresse 31] .

Après le décès de M. [K] [X], un premier partage (dont la date n'est pas communiquée) est intervenu aux termes d'un acte reçu par Me [J], notaire liquidateur de la succession de M. [K] [X], entre ses enfants vivants et les ayants droit de Mme [B] [K], épouse [Z], concernant les biens ayant dépendu de la communauté [K]/[O] et ceux dépendant de la succession de Mme [O], épouse [K], soit :

- les terrains sis à [Localité 15],

- les immeubles sis à [Adresse 20],

- l'immeuble sis à [Adresse 19],

- le compte de gestion desdits immeubles pour un montant de 44.529,03 euros.

Concernant la succession de M. [K] [X], un acte de partage est intervenu les 1er et 2 avril 2014 au rapport de Me [J], notaire à [Localité 9], entre Mme [I] épouse [K] (conjoint survivant de M. [K] [X]), M. [K] [H] et Mme [K] épouse [N].

Préalablement au décès de M. [K] [X] et postérieurement, jusqu'au 1er avril 2014, date de la signature de l'acte de partage, les biens dépendant de l'indivision [K], ainsi que ceux qui avaient préalablement été attribués aux héritiers en vertu des libéralités consenties, ont été gérés par Mme [I], investie à cet effet d'une procuration sur le compte bancaire HSBC de l'indivision [K].

Indiquant avoir découvert de nombreux mouvements bancaires sur ce compte nécessitant des explications et des justificatifs, que Mme [I] épouse [K] ne lui a pas donnés, et notamment en faisant état de ce que le compte bancaire HSBC faisait apparaître un débit de 80 000 euros suite à un virement inexpliqué du 26 août 2013 et un débit du même montant suite à l'établissement d'un chèque le 22 mai 2014, M. [K] [H] a, par exploit du 24 septembre 2015, saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux afin de voir ordonner une expertise permettant d'établir les comptes entre les parties et obtenir la communication sous astreinte de la procuration relative à la gestion des comptes, ainsi que les relevés de comptes et les relevés d'opérations bancaires.

Le juge des référés, par ordonnance du 14 décembre 2015, a pris acte qu'aucune demande de communication de pièces n'était maintenue quant aux relevés d'opérations concernant les deux mouvements des 26 août 2013 et 22 mai 2014 au motif que selon Mme [I] 'il s'agit pour le premier d'un virement réalisé par internet, pour le second d'un chèque, qui n'existent pas', [P] [I] ayant communiqué les pièces sollicitées pour le surplus par M. [K], et a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [C], laquelle n'était pas contestée.

Considérant que son beau-fils revenait de la sorte sur les termes de leurs accords de gestion des conséquences de la succession de son mari, Mme [I] a, par exploit du 1 avril 2016, assigné M. [K] [H] et Mme [K] [R] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux au visa des articles 887 et suivants du code civil, afin de voir ordonner, à titre principal, un partage complémentaire, l'acte des 1er et 2 avril 2014 étant selon elle entaché d'une erreur sur la consistance de ses droits, et subsidiairement un complément de part.

Le rapport d'expertise a été déposé le 20 avril 2017.

M. [K] [H] a, à son tour, assigné (le 29 juin 2017 selon l'intimée, en juillet 2017, sans plus de précision, pour l'appelant) Mme [I], Mme [K] [R], M.M. [V] et [G] [Z] et Mme [Z] [M], aux fins notamment d'homologation du rapport d'expertise et la condamnation de Mme [I] à lui verser les sommes de 101 274,01 euros au titre des comptes entre les parties, avec intérêts au taux légal à compter du 1 janvier 2013 et 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Les procédures correspondantes ont été jointes.

Par acte d'huissier du 18 août 2016, M. [K] [H] a assigné en la cause Me [J] notaire à [Localité 9].

La procédure correspondante a également fait l'objet d'une jonction.

Par jugement en date du 19 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- débouté M. [K] [H] de l'ensemble de ses prétentions dirigées contre Mme [I] veuve [K],

- rejeté l'ensemble des demandes des consorts [Z] à l'encontre de Mme [I] épouse [K],

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit des parties,

- condamné M. [K] [H] d'une part et les consorts [Z] d'autre part à supporter chacun la moitié des dépens de l'instance,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.

Procédure d'appel:

Par déclaration d'appel en date du 15 janvier 2020, M. [K] [H] a relevé appel de l'ensemble des dispositions du jugement de première instance.

Par conclusions de désistement d'appel du 20 mars 2020, M. [K] [H] s'est désisté de son appel à l'encontre de Me [J].

Par conclusions responsives du 14 mai 2020, Me [J] a accepté le désistement.

Et par ordonnance du 3 septembre 2020, le conseiller de la mise en état a prononcé le dessaisissement partiel de la cour et condamné l'appelant aux dépens exposés par Me [J].

Par ordonnance du 9 décembre 2020, le conseiller de la mise en état a constaté la caducité partielle de la déclaration d'appel à l'égard de Mme [Z] [M].

Selon dernières conclusions en date du 27 octobre 2020, M. [K] [H] demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

- débouter Mme [I] veuve [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et notamment de ses demandes de partage complémentaire et/ou rectificatif et de complément de part,

- infirmer la décision du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 19 novembre 2019, dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- entériner le rapport d'expertise de Me [C], notaire, en date du 20 avril 2017,

- condamner Mme [I] veuve [K] à lui verser

* 101 274,01 euros à titre des comptes établis entre les parties, des sommes relatives à la gestion de l'indivision et des détournements de fonds sur ledit compte, et dire que les intérêts sur cette somme sont dus au titre des intérêts légaux à compter du 1er janvier 2013 et faire application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts devant porter eux-mêmes intérêts,

* 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive en application des dispositions des articles 1217 et 1231-1 du Code Civil, et subsidiairement, 1240 du code civil, toutes causes de préjudices confondues,

* 8 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens, en ce compris le coût du rapport d'expertise et y compris l'intégralité des frais d'exécution éventuels qui, comprendront expressément les frais devant normalement rester à la charge du créancier, mais qui seront mis expressément à la charge du débiteur.

Selon dernières conclusions en date du 21 août 2020, Mme [I] épouse [K] demande à la cour de :

- déclarer M. [K] [H], recevable mais mal fondé en son appel,

- confirmer le jugement du 19 novembre 2019 en toutes ses dispositions et notamment, en ce qu'il a :

* débouté les consorts [Z] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

* débouté M. [K] [H] de l'ensemble de ses demandes et notamment celles tendant à obtenir le remboursement d'une taxe foncière déjà payée et la répétition des deux sommes de 80 000 euros,

* débouté les consorts [Z] et M. [K] [H] de leurs demandes de dommages et intérêts,

- condamner M. [K] [H] à payer à Mme [I] veuve [K] une indemnité de 6 000 euros, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [K] [H] aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

- dire et juger Mme [I] veuve [K] recevable et bien fondée en sa demande.

- constater que le partage des biens dépendant de la succession de M. [X] [K] intervenu suivant acte au rapport de Me [J] le 2 avril 2014 est entaché d'erreur au préjudice de Mme [I], veuve [K], dès lors qu'il n'a pas été tenu compte dans les biens qui lui ont été attribués et plus généralement dans le calcul de ses droits du quart en pleine propriété, des biens dépendants de ladite succession qu'elle avait vocation à recevoir en application des dispositions de l'article 757 du code civil,

- en conséquence, ordonner un partage complémentaire et /ou rectificatif au partage des biens dépendant de la succession de M. [K] [X] intervenu suivant acte au rapport de Me [J] notaire à [Localité 9] le 1er avril 2014 et ce afin qu'il soit tenu compte des dispositions de l'article 757 du Code Civil au bénéfice de Mme [I], veuve [K],

- commettre pour y procéder Me [J], notaire à [Localité 9].

- désigner tel Juge du siège de ce tribunal qu'il plaira en qualité de juge commis à qui il pourra être fait rapport en cas de difficultés,

A titre encore plus subsidiaire,

- ordonner que soit attribué à Mme [I] veuve [K] un complément de part pour tenir compte de la valeur du quart en pleine propriété des biens dépendant de la succession de M. [K] [X] devant lui revenir,

- renvoyer le dossier en l'étude de Me [J] afin que soit déterminé le montant de la part complémentaire devant ainsi revenir à Mme [I] veuve [K].

- réserver les dépens.

Mme [K] épouse [N] et M.M. [Z] n'ont pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 janvier 2022.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 14 juin 2022 et mise en délibéré au 13 septembre 2022.

MOTIVATION

Sur la gestion de l'indivision

L'article 1991 du code civil dispose que 'le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution. Il est tenu de même d'achever la chose commencée au décès du mandant, s'il y a péril en la demeure'.

L'article 1992 poursuit ainsi 'le mandataire répond non seulement du dol mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion. Néanmoins la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire'.

Enfin l'article 1993 stipule que 'tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout de ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant'.

Sur les points constants

Il n'est pas contesté par Mme [I] :

- qu'elle a continué la gestion des immeubles détenus en indivision et des immeubles propres de M. [H] [K], après le décès de son époux,

- qu'elle avait une procuration sur le compte bancaire HSBC n° [XXXXXXXXXX03] ouvert au nom de l'indivision [K],

- que l'indivision litigieuse ne concerne que les enfants de M. [X] [K] et Mme [I] et non pas les consorts [Z], qui ont été réglés de leurs droits (page 8 des écritures de l'intimée),

- que les tableaux manuscrits sur lesquels l'expert a travaillé ont été établis par elle.

Sur l'expertise

L'expert a été mis, par les parties, en possession des pièces suivantes:

- un tableau manuscrit relatant les recettes et les dépenses encaissées ou payées par l'indivision sans indication de date,

- un tableau manuscrit relatant les recettes et les dépenses encaissées ou payées par [H] sans indication de date,

- un tableau manuscrit relatant les règlements pour [H] et indivision sans indication de date,

- un tableau sur lequel apparaissent plusieurs colonnes encaissements et dépenses pour [D], [H], [P], [G] et l'indivision, semblant être un tableau récapitulatif des tableaux précédents.

Au titre des documents bancaires, il a reçu :

- le relevé de compte de la HSBC n° [XXXXXXXXXX03] sur lequel apparaissent les débits ou les crédits entre le 19 mai 2014 et le 9 juin 2014 et notamment le chèque n°0829838 de 80 000 euros du 22 mai,

- le relevé de compte de la HSBC n° [XXXXXXXXXX03] sur lequel apparaissent les débits ou les crédits entre le 1er août 2013 et le 31 août 2013 et notamment le virement vers un compte [XXXXXXXXXX01] de 80 000 euros,

- le relevé de compte de l'étude [J] au nom de [X] [K] sur lequel figure en date du 21 août 2013 un virement de 80 000 euros en débit avec libellé 'A indivision [K] partie disponible sur succession'.

L'expert a retenu de ces documents que :

- les tableaux manuscrits peuvent effectivement retracer les loyers et les dépenses mais qu'il n'a aucune preuve de l'encaissement des sommes ni aucun justificatif des dépenses, ni des baux,

- les loyers semblent provenir des immeubles sis à [Localité 9], [Adresse 12], [Adresse 34], [Adresse 39] et [Adresse 38] et aucun ne semble provenir de l'appartement dont l'usufruit a été légué à [P] [I] qui n'a ainsi aucun droit sur ces sommes.

L'expert a distingué entre les encaissements et les dépenses afférentes à l'indivision [K] et pour le compte de [H] [K] :

- encaissements : 93 264, 88 € pour le compte de l'indivision et 42 519 € pour le compte de [H] [K],

- dépenses : 39 531, 36 € pour le compte de l'indivision et 20 811, 16 € pour [H] [K].

Il a interrogé Mme [I] sur les deux sommes de 80 000 euros chacune et celle ci a reconnu 'avoir bien perçu ces sommes et que tous justificatifs de ces opérations lui seraient apportées' ce qui n'a pas été le cas.

Il en a retenu que ces deux sommes dépendaient de la succession de [X] [K] et qu'elles devaient être partagées entre ses héritiers un quart en pleine propriété pour Mme [I], 40 000 €, 3/8ième en pleine propriété pour [H] et [R] soit 60 000 € chacun.

Il a ainsi conclu que :

- l'avis d'imposition relatif à la taxe foncière pour le cours de la Somme ayant été fourni, la somme de 5 974 € représentant ses deux tiers devait être portée au crédit de [H] [K],

- le solde du compte indivision à partager est de 53 740, 50 € - 5 974 € soit 47 766, 50 €, revenant pour 1/3 chacun à [H] et [R] [K] et [G] [Z], soit 15 922, 17 € en faveur de [H] [K],

- le solde des loyers encaissés par [H] [K] déduction faite des dépenses (42 519 €- 20 811, 16 €) soit 21 807, 84 € est du à [H] [K],

soit une somme totale de 43 704, 01 € dont il convient de déduire une somme de 2 430 € qu'il a précédemment perçu.

Selon l'expert, il est ainsi dû à l'appelant la somme de 41 274, 17 € + 60 000 € soit 101 274, 01 €.

Sur ce,

La demande de l'appelant, à hauteur globale de 101 274, 01 euros se détaille ainsi :

- 1/3 du solde de l'indivision soit 15 922, 17 €,

- remboursement de la part de la taxe foncière : 5 974 €,

- le solde des loyers encaissés pour lui déduction faite des charges supportées pour 21 807, 84 €,

- 60 000 euros lui revenant sur la somme de 160 000 € détournée du compte de la HSBC.

Le tribunal a essentiellement retenu d'une part que l'analyse des fruits et revenus des immeubles indivis gérés par Mme [I], et celle des charges dont elle s'était acquittées en tant que mandataire, avaient été réalisées sur la base de simples tableaux manuscrits dont l'expert avair souligné le caractère difficilement exploitable et d'autre part que l'expert avait omis de tenir compte, dans le cadre de ses opérations et du calcul des sommes devant revenir à chaque partie, de celles qu'elles avaient déjà reçues au titre du compte d'administration de l'indivision.

Il est constant que Mme [I], qui ne conteste pas le contenu des tableaux examinés par l'expert devait, en sa qualité de mandataire, tenir des comptes de gestion précis et rendre des comptes.

Cependant, l'appelant ne peut, ainsi que l'a justement retenu le premier juge, persister à se contenter de solliciter l'homologation du rapport d'expertise sans même expliquer comment l'expert est parvenu à ses conclusions, contestées par Mme [I], la cour ne pouvant, comme le tribunal, homologuer un rapport d'expertise qu'à condition d'en pouvoir vérifier la clarté, la précision et la fiabilité, ce que ni le tribunal, ni la cour après lui, n'ont pu faire en l'absence de pièces probantes versées aux débats par les deux parties.

Pire, le tribunal, pour retenir que l'expert avait omis de tenir compte, dans le cadre de ses opérations et du calcul des sommes devant revenir à chaque partie, de celles qu'elles avaient déjà reçues au titre du compte d'administration de l'indivision au terme de l'acte des 1er et 2 avril 2014, a visé 'un relevé de compte de l'étude de Me [J] annexé à l'acte et au rapport de l'expert'.

Or, la cour constate que le rapport d'expertise et l'acte notarié communiqués en appel ne comportent aucune de ces deux annexes.

Pourtant l'appelant ne nie pas que le premier juge a été mis en possession dudit relevé de compte, qu'il était annexé à l'acte notarié et au rapport de l'expert et qu'il faisait état de sommes d'ores et déjà allouées aux parties au titre du compte d'administration de l'indivision.

Par ailleurs, force est de constater que l'expert n'a estimé le 'solde du compte indivision' que sur la seule base des tableaux établis par Mme [I] (page 8 du rapport) et ainsi sans tenir compte du relevé de compte du notaire, dont il avait pourtant connaissance.

Enfin, l'appelant ne démontre par aucune pièce autre que l'expertise qu'il resterait un 'solde d'indivision' dont il pourrait revendiquer le tiers, étant relevé au surplus que la somme de 15 922, 17 euros, censée revenir à [H] [K] selon l'expert, intégre la somme de 5 974 euros correspondant aux 2/3 de la taxe foncière que l'appelant réclame en plus, demande qui sera traitée ci-dessous, et que le calcul de l'expert est en outre légèrement erroné ( 93 264, 88 €- 39 531, 36 € n'est pas égal à 53 740, 50 € mais à 53 733, 52 €).

Dans ces conditions, il convient de confirmer la décision déférée qui a rejeté la demande de [H] [K] au titre du tiers du 'solde de l'indivision'.

S'agissant de la taxe foncière réclamée par l'appelant, c'est à juste titre que le tribunal a rejeté cette demande, pourtant retenue par l'expert à hauteur de 5 974 €, dès lors que M. [K] n'a jamais justifié avoir effectivement réglé cette somme. L'expert n'a joint à son rapport aucun document comptable en ce sens et se contente de relever (page 6) que 'l'avis d'imposition relatif à cette taxe a été fourni'.

Le tribunal est même allé jusqu'à solliciter une note en délibéré sur ce point qui n'a 'apporté aucun éclaircissement', le tribunal de constater qu'il n'était pas justifié de l'effectivité du paiement et que seule la dernière page de l'avis de taxe foncière était produit, précisant le détail du calcul des cotisations , à l'exception de la première page sur laquelle figure l'année à laquelle elles correspondaient.

En appel, il n'est versé aux débats aucune pièce qui permettrait de connaître la date de l'avis d'imposition et de démontrer qu'il a été payé par l'appelant qui reste muet dans ses écritures sur ce point.

La décision sera ainsi confirmée de ce chef.

S'agissant du 'solde des loyers encaissés', le tribunal a reproché à l'expert d'avoir déduit la somme de 21 707, 84 euros, à laquelle il est parvenu, par la différence entre le montant des loyers encaissés par Mme [I] et celui des charges payées 'tels que ressortant des tableaux manuscrits sans effectuer la moindre vérification quant à un éventuel reversement des loyers' par la seconde au premier.

Il a appuyé son analyse sur un dire adressé à l'expert par le conseil de M.[K] le 14 février 2017 qui lui demandait de 'préciser que les sommes perçues et encaissées par Mme [I] n'ont pas été reversées en totalité ou en partie à M.[K] pour un montant qu'il convient de préciser clairement' ajoutant que l'expert ne s'était livré à aucune vérification complémentaire ni apporté aucune précision sur ce point.

La cour constate que l'appelant n'a pas versé aux débats devant elle le dire de son conseil.

Par ailleurs, l'expert n'a déterminé cette somme que sur la base des tableaux présentés sans effectuer la moindre vérification quant à un éventuel remboursement des loyers par Mme [I] à M. [K].

En appel, l'appelant ne verse aucune pièce nouvelle propre à démentir cette analyse du premier juge.

Il convient ainsi de confirmer la décision déférée qui a rejeté la demande de [H] [K] à ce titre.

Enfin, s'agissant des deux sommes de 80 000 euros, le tribunal a admis qu'un chèque n°0829838 d'un montant de 80 000 € avait été débité sur le compte HSBC de l'indivison le 22 mai 2014 et qu'un virement du même montant avait été effectué le 26 août 2013 depuis ce compte vers un compte n°[XXXXXXXXXX02].

Mais, en ce qui concerne le chèque, dont Mme [I] soutenait déjà qu'il ne lui avait pas bénéficié pour avoir été établi à l'ordre de [R] [K], il a retenu qu'il n'était pas versé aux débats, que la date de clôture du compte HSBC n'était pas précisée, que la somme avait été prélevée sur le compte alors que l'indivision avait déjà été partagée les 1er et 2 avril 2014.

Il a considéré qu'une partie des sommes disponibles sur le compte à ces dates avait été virée en la comptabilité du notaire aux fins de répartition entre les héritiers au prorata de leurs droits et que la somme de 80 000 € correspondait au moins partiellement au cumul de diverses sommes échues sur le compte postérieurement au partage sans qu'il soit possible de déterminer leur origine ni à qui elle devait revenir alors que l'indivision [K] n'existait plus.

Il a ajouté que ce chèque et le virement, dont Mme [I] ne contestait pas avoir bénéficié, se seraient inscrits dans le cadre d'une gestion du compte bancaire concertée entre les enfants et elle et acceptée par eux.

Les enfants auraient ainsi accepté ce virement pour 'compenser la diifférence entre le legs particulier d'un immeuble résultant des dispositions testamentaires prises par son défunt époux et les droits légaux auquels elle aurait pu prétendre en l'absence des mêmes dispositions dans la succession de [X] [K]'. Il s'est appuyé sur l'attestation du frère du défunt du 13 février 2016 et 'la confirmation' de [R] [K].

Il a ainsi débouté [H] [K] de ses demandes à ce titre.

Il convient de rappeler que devant l'expert, [P] [I] avait reconnu avoir perçu ces deux sommes et n'avait apporté aucun justificatif malgré son engagement de le faire (rapport page 9).

En appel, l'intimée maintient que le chèque de 80 000 € aurait été tracé à l'ordre de [R] [K] en clôture du compte en mai 2014 et que si elle a bénéficié de ce chèque et de ce virement, c'était dans le cadre d'un accord avec ses beaux enfants pour payer les travaux qu'elle devait réaliser sur son immeuble, au regard de 'l'insuffisance de son legs par rapport à ses droits dans la succession de son mari'. Elle en veut pour preuve l'attestation de son beau-frère et les écritures concordantes de sa belle-fille [R] du 19 septembre 2018.

Ces dernières écritures ne sont cependant pas versées aux débats. Leur contenu n'est pas contesté par l'appelant alors même qu'il a été retenu en ce sens par la décision déférée.

Selon l'intimée, [R] [K] aurait conclu ainsi : 'pour le surplus, la concluante ne peut que confirmer qu'il avait été effectivement expréssement convenu avec son frère et accepté par ce dernier que le coût des travaux relatifs à l'immeuble de Mme [I] serait prélevé sur le compte joint. Il n'a jamais été question de faire le moindre compte à cet égard'.

[A] [K] a attesté quant à lui le 13 février 2016 d'une discussion dont il avait été témoin : '[P] a fait observer qu'elle devait quitter la maison et donc déménager très vite. Cela lui posait problème, car souhaitant acheter une nouvelle maison à [Localité 9], si elle avait les fonds nécessaires pour financer l'achat, elle n'avait pas les liquidités nécessaires pour payer les travaux de remise en état indispensables. Les enfants avaient donc convenu d'aider [P] et [L] [S] était parfaitement d'accord'( pièce 5 de l'intimée).

C'est cependant à raison que l'appelant soutient que l'analyse du premier juge ne peut prospérer devant la cour.

En effet, s'agissant du chèque de 80 000 euros, Mme [I] avait initialement admis devant l'expert qu'elle l'avait perçu et elle ne le verse pas aux débats devant la cour, seule cette production permettant de démontrer qu'il était destiné et qu'il a été perçu par [R] [K], qui n'atteste pas en ce sens.

Elle reste d'ailleurs particulièrement ambigue sur ce point puisqu'après avoir prétendu que le chèque avait été perçu par sa belle-fille, elle ajoute que ' le tribunal au regard des témoignages clairs et concordants des proches du défunt, ne pouvait que considérer que ce virement comme le chèque d'ailleurs se sont inscrits dans le cadre d'une gestion du compte bancaire en cause concertée entre les enfants et M. [K] et sa seconde épouse et acceptée par l'ensemble des héritiers', sous entendant ainsi qu'elle a bien perçu le chèque de 80 000 euros.

Par ailleurs, il importe peu que ce chèque soit postérieur à l'acte de partage dès lors qu'il n'a jamais été contesté que cette somme de 80 000 euros provenait bien du compte d'indivision.

D'autre part, force est de constater que [R] [K] n'a pas attesté en faveur de l'intimée pour confirmer ses conclusions au demeurant, extrêmement imprécises comme l'est tout autant le témoignage du beau-frère de l'intimée.

En effet, iI est une chose de décider 'd'aider' [P] [I] et une autre d'accepter qu'elle perçoive une somme de 160 000 euros, censée payer des travaux de remise en état de son immeuble, travaux qu'elle ne démontre par aucune facture versée aux débats.

En conséquence, il convient de retenir que la somme de 160 000 euros doit être partagée entre les héritiers de M. [K] conformément à leurs droits et de constater que l'appelant ne conteste pas que sur cette somme doit lui revenir celle de 60 000 € correspondant à trois huitièmes en pleine propriété.

La décision sera ainsi infirmée de ce chef.

La demande de partage rectificatif ou complémentaire formée par Mme [I] n'a pas été examinée en première instance dès lors qu'elle était formée à titre subsidiaire dans l'hypothèse où le tribunal ferait droit aux demandes de M. [Z] et de [H] [K] relatives à la gestion de l'indivision.

Il s'impose, la cour ayant admis au moins partiellement le recours de l'appelant, d'examiner la demande subsidiaire de l'intimée.

Celle-ci fait valoir l'erreur de l'article 887 du code civil pour solliciter un partage complémentaire ou rectificatif afin que lui soient attribués, en plus des legs particuliers qui lui ont été consentis, des biens correspondant au quart en pleine propriété des biens dépendant de la succession de feu son époux.

Cet article stipule que 'le partage peut être annulé pour cause de violence ou de dol. Il peut aussi être annulé pour cause d'erreur, si celle-ci a porté sur l'existence ou la quotité des droits des copartageants ou sur la propriété des biens compris dans la masse partageable. S'il apparaît que les conséquences de la violence, du dol ou de l'erreur peuvent être réparées autrement que par l'annulation du partage, le tribunal peut, à la demande de l'une des parties, ordonner un partage complémentaire ou rectificatif'.

Elle soutient en effet que ses droits ont été calculés en tenant compte exclusivement des legs particuliers que lui a consentis son époux dans le testament olographe du 21 joint 2010 et le codicille du 25 janvier 2012. Or, en rédigeant un tel testament, elle soutient que son époux n'aurait nullement entendu la priver du quart en pleine propriété qu'elle est fondée à obtenir au visa de l'article 757 du code civil.

Lequel dispose que 'si l'époux prédécédé laisse des enfants ou descendants, le conjoint survivant recueille, à son choix, l'usufruit de la totalité des biens existants ou la propriété du quart des biens lorsque tous les enfants sont issus des deux époux et la propriété du quart en présence d'un ou plusieurs enfants qui ne sont pas issus des deux époux'.

Elle considère qu'il a ainsi voulu l'avantager en plus du quart en pleine propriété et qu'elle a consenti à l'acte dans l'ignorance de la possibilité de revendiquer le bénéfice de ces dispositions.

A titre subsidiaire, elle demande un complément de part au visa de l'article 889 du code civil qui stipule que ' lorsque l'un des copartageants établit avoir subi une lésion de plus du quart, le complément de sa part lui est fourni, au choix du défendeur, soit en numéraire, soit en nature. Pour apprécier s'il y a eu lésion, on estime les objets suivant leur valeur à l'époque du partage. l'action en complément de part se prescrit par deux ans à compter du partage'.

Elle conteste que cette dernière demande soit prescrite, son assignation ayant été délivrée le 1er avril 2016, soit dans les deux ans, et sa demande de nullité dans les cinq ans.

L'appelant, qui n'oppose pas la prescription des demandes, réplique qu'en vertu de l'article 914-1 du code civil, le conjoint survivant n'est pas réservataire en présence de descendants, les droits légaux de l'article 757 précité n'étant pas appelés à jouer en présence d'une volonté contraire du défunt.

Il rappelle les dispositions de l'article 758-6 du même code aux termes duquel 'les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s'imputent sur les droits de celui-ci dans la succession. Lorsque les libéralités ainsi reçues sont inférieures aux droits définis aux articles 757 et 757-1, le conjoint survivant peut en réclamer le complément, sans jamais recevoir une portion des biens supérieure à la quotité disponible définie à l'article 1094-1".

Il rappelle aussi l'avis de la cour de cassation publié au journal officiel du 25 septembre 2006 aux termes duquel ' s'agissant des successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007, la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, ayant réintroduit la règle de l'imputation en insérant un article 758-6 dans le code civil, le conjoint survivant ne peut plus bénéficier d'un tel cumul' (entre les droits successoraux prévus aux articles 757, 757-1 et 757-2 du code civil avec une ou des libéralités consenties en application de l'article 1094 ou de l'article 1094-1 du même code).

Il en déduit que les droits légaux du conjoint successible, prévus par l'article 757 du code civil, n'ont vocation à s'appliquer qu'à la condition que le testament ne l'en prive pas et qu'en l'espèce, [X] [K], notaire honoraire, particulièrement au fait des règles applicables à la transmission à cause de mort de son patrimoine, a établi un testament en vertu duquel il institue ses deux enfants légataires universels. Il a ainsi privé en toute connaissance de cause son conjoint survivant de ses droits légaux, après l'avoir gratifié de legs à titre particulier qui, en toute hypothèse, ne se cumulent pas avec le quart auquel Mme [I] aurait pu prétendre en cas de dévolution légale ab intestat, conformément à l'article 758-6 précité.

La demande doit donc être rejetée selon l'appelant, qui rappelle que l'article 758-5 du même code prévoit expréssement que l'assiette de calcul des droits légaux du conjoint survivant ne porte que sur les biens que le défunt a entendu soumettre à la dévolution légale et exclut ceux dont il aura disposé par acte entre vif ou testamentaire. En l'espèce, M.[K] ayant consenti un legs universel à ses deux enfants, Mme [I] est privée de tout droit dans sa succession sauf à prendre en compte les legs à titre particulier dont elle est bénéficiaire en vertu du testament.

Il ajoute que l'acte de partage de Me [J] fait application de ces dispositions, que Mme [I] l'a signé de son plein gré, qu'elle n'envisage pas de mettre en cause la responsabilité du notaire, et qu'elle veut au contraire que lui soit confiée la rédaction de l'acte rectificatif.

Il considère qu'il s'agit d'une tentative de répondre aux demandes d'explications sur les détournements opérés au préjudice de l'indivision successorale alors que le notaire n'a commis aucune erreur d'appréciation et n'a pas omis sa qualité de conjoint successible.

Il finit en rappelant que Mme [I] n'a aucun droit sur la succession de son défunt mari en plus de ceux que le testament lui a octroyé et qu'elle n'a donc été victime d'aucune lésion d'un quart de ses droits.

Et en l'espèce, il convient de rappeler que la succession de M. [K] a été ouverte après le 1er janvier 2007 et que l'époux prédécédé a laissé des enfants qui ne sont pas issus des deux époux, que la réintroduction de la règle de l'imputation par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 au travers de l'article 758-6 du code civil implique que Mme [I] ne peut plus bénéficier du cumul entre les droits successoraux prévus aux articles 757, 757-1 et 757-2 du code civil avec une ou des libéralités consenties en application de l'article 1094 ou de l'article 1094-1 du même code.

Et encore qu'en instituant ses deux enfants légataires universels et en instituant son conjoint survivant, Mme [I], légataire à titre particulier de biens dépendant de sa succession, M. [K], lui-même notaire parfaitement au fait de cette législation, a ainsi privé l'intimée de ses droits légaux en vertu de l'article 757 du code civil du quart en toute propriété des biens composant la succession.

Sa demande de partage complémentaire et/ou rectificatif pour erreur sera ainsi rejetée. Et il en sera de même quant à sa demande de complément de part au titre de la lésion de plus d'un quart, dès lors que celle-ci n'est pas établie par aucune pièce versée aux débats.

En ce qui concerne la demande de l'appelant relative aux intérêts, celui-ci prétend que l'intimée aurait perçu la somme qu'il revendique à compter du 1er janvier 2013, qui est la date du décès de [X] [K], et que cette somme doit donc être assortie des intérêts à dater du 1er janvier 2013.

Mais s'agissant de la somme de 60 000 euros revenant à l'appelant, il est impossible de retenir la date du décès alors même que le chèque est daté du 22 mai 2014 et le virement du 21 août 2013.

Les intérêts seront ainsi dûs à compter de l'assignation délivrée par l'appelant devant le tribunal de grande instance de Bordeaux, avec anatocisme judiciaire sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil, ainsi qu'elle est demandée à la cour.

La demande en dommages-intérêts de l'appelant est fondée sur les dispositions des articles 1217 et 1231-1 du code civil et subsidiairement de l'article 1240 ainsi qu'au regard de la résistance abusive de l'intimée.

Toutefois, l'article 1191 du code civil, spécifique au mandat, prévoit que le mandataire 'répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution' et en vertu de l'article 1992 'des fautes qu'il commet dans sa gestion'.

C'est en conséquence sur ce fondement que l'appelant aurait dû fonder sa demande de dommages-intérêts.

Par ailleurs, s'agissant d'un mandat gratuit exercé par Mme [I], la 'faute' s'apprécie moins rigoureusement. Et en l'espèce, le caractère fautif des agissements de Mme [I] n'est pas rapporté, s'agissant d'une gestion certes peu rigoureuse mais menée dans un climat initial de confiance, ainsi qu'en atteste le frère du défunt, aucun 'abus de faiblesse' tel qu'allégué par l'appelant n'étant démontré, celui-ci ne découlant pas ipso facto de son seul statut d'handicapé.

D'autre part, force est de constater que si l'appelant fait état, pour préjudice matériel, d'un redressement fiscal lié aux errements de sa belle-mère, sa pièce 16 ne constitue qu'une proposition de rectification mais aucune pièce ne vient démontrer que cette proposition a donné lieu à un redressement effectif qu'il a payé.

Aucun préjudice moral n'est par ailleurs démontré.

Enfin, aucune résistance abusive de Mme [I] n'est établie, celle-ci n'ayant fait que se défendre à une action en justice.

Il convient donc de confirmer la décision déférée qui a rejeté la demande de dommages-intérêts de M. [K].

Mme [I], qui succombe au principal, versera à M. [K] une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et supportera les dépens d'appel, le coût de l'expertise de M. [C] ainsi que les frais d'exécution éventuels.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant après rapport fait à l'audience,

CONFIRME la décision déférée sauf en ce qui concerne la somme de 60 000 euros ;

Statuant de nouveau de ce chef,

CONDAMNE Mme [I] à payer à M. [H] [K] la somme de 60 000 euros;

DIT que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de l'assignation délivrée par l'appelant devant le tribunal de grande instance de Bordeaux, avec anatocisme judiciaire sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil ;

Y ajoutant,

DEBOUTE Mme [I] de ses demandes de partage complémentaire et/ou rectifcatif et en complément de part ;

CONDAMNE Mme [I] à verser à M. [H] [K] une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel, au coût de l'expertise de M. [C] ainsi qu'aux frais d'exécution éventuels.

Signé par Hélène MORNET, Présidente de la chambre et par Véronique DUPHIL, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre famille
Numéro d'arrêt : 20/00291
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;20.00291 ?
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