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06/07/2022 | FRANCE | N°19/03799

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 06 juillet 2022, 19/03799


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 06 JUILLET 2022







PRUD'HOMMES



N° RG 19/03799 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LDZY



















EPIC LA MONNAIE DE PARIS



c/



Madame [F] [Y]

















Nature de la décision : AU FOND
















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Grosse délivrée le :



à :







Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 juin 2019 (RG. n° F 16/00751) par le conseil de prud'hommes - formation de départage de BORDEAUX, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 08 juillet 2019,





APPELANTE :

EPIC La Monnaie de Paris, siret n° 160 020 012, agis...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 06 JUILLET 2022

PRUD'HOMMES

N° RG 19/03799 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LDZY

EPIC LA MONNAIE DE PARIS

c/

Madame [F] [Y]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 juin 2019 (RG. n° F 16/00751) par le conseil de prud'hommes - formation de départage de BORDEAUX, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 08 juillet 2019,

APPELANTE :

EPIC La Monnaie de Paris, siret n° 160 020 012, agissant en la personne de son président directeur général domicilié en cette qualité audit siège social, [Adresse 1]

représenté par Maître Joy DELANNAY substituant Maître Charlotte VUEZ de la SELARL ELLIPSE AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉE :

Madame [F] [Y], née le 25 avril 1973 à [Localité 4] de nationalité française, profession commerciale, demeurant [Adresse 2],

représentée par Maître Vincent LEMAY, avocat au barreau de BORDEAUX substituant Maître Maryline LE DIMEET de la SELAS LE DIMEET & ASSOCIÉS, avocats au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 avril 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sophie Masson, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Anne-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

- délibéré prorogé au 06 juillet 2022 en raison de la charge de travail de la cour.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [F] [Y], née en 1973, a été engagée par l'EPIC la Monnaie de Paris par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2003 en qualité de secrétaire bilingue.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie et activités qui s'y rattachent.

Par un avenant en date du 11 avril 2006, Mme [Y] a été promue au poste d'assistante commerciale export, puis à compter du 1er juillet 2010, au poste de commerciale export.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de Mme [Y] s'élevait à la somme de 3.500 euros bruts.

Par lettre datée du 30 septembre 2015, Mme [Y] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 8 octobre 2015, reporté au 15 octobre 2015 en raison d'un arrêt de travail.La salariée ne s'est pas présentée.

Elle a alors été à nouveau convoquée à un entretien fixé le 28 octobre 2015. Elle ne s'y est pas présentée non plus.

Mme [Y] a ensuite été licenciée pour insuffisance professionnelle par lettre datée du 2 novembre 2015.

A la date du licenciement, Mme [Y] avait une ancienneté de 12 ans et 2 mois et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Sollicitant la nullité de la convention de forfait annuel en jours, ainsi que diverses sommes, Mme [Y] a saisi le 31 mars 2016 le conseil de prud'hommes de Bordeaux.

Le conseil de prud'hommes, par jugement de départage du 14 juin 2019, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a :

- dit irrecevables les demandes de rappels de salaire formées par Mme [Y] pour la période antérieure au mois de novembre 2012,

- dit inopposable à Mme [Y] la convention de forfait jours conclue avec l'établissement public industriel et commercial La Monnaie de Paris le 1er juillet 2010,

- condamné l'EPIC à régler à Mme [Y] les sommes suivantes :

* 15.000 euros bruts au titre d'un rappel d'heures supplémentaires pour la période de décembre 2012 jusqu'au terme de leur relation de travail, outre les congés payés y afférents à hauteur de 1.500 euros bruts,

* 1.674,72 euros bruts de rappel de salaire pour non-respect des minima conventionnels, outre les congés payés y afférents à hauteur de 167,47 euros bruts,

* 4.000 euros de prime d'objectifs pour l'année 2015,

- rejeter les demandes formées par Mme [Y] au titre d'indemnisation de la contrepartie obligatoire en repos, de rappel de salaire pour les jours de récupération de déplacement à l'étranger et les congés payés y afférents, de dommages-intérêts pour non respect de l'obligation de sécurité et exécution déloyale ducontrat de travail, de dommages-intérêts pour remise tardive de documents de fin de contrat et non-respect de la portabilité de la mutuelle,

- dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par l'EPIC à Mme [Y] par lettre datée du 2 novembre 2015,

- condamné l'EPIC à verser à Mme [Y] la somme de 36.000 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- rappelé qu'en application de l'article R. 1454-28 du code du travail sont de droit exécutoires à titre provisoire :

* le jugement qui n'est susceptible d'appel que par suite d'une demande reconventionnelle,

* le jugement qui ordonne la remise d'un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer,

* le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,

- fixé à hauteur de 3.500 euros bruts la moyenne des trois derniers mois de salaire de Mme [Y], conformément à sa demande,

- ordonné la remise par l'EPIC à Mme [Y] d'une attestation Pôle Emploi et d'un bulletin de paye mis en conformité avec le présent jugement,

- rejeté la demande formée par Mme [Y] au titre d'une remise sous astreinte des documents de fin de contrat susvisés,

- condamné l'EPIC à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à Mme [Y] du jour de son licenciement notifié par lettre datée du 2 novembre 2015 jusqu'à la date du présent jugement, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage,

- condamné l'EPIC à verser à Mme [Y] la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné l'EPIC aux entiers dépens de l'instance,

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires au dispositif du présent jugement,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire des dispositions du présent jugement qui n'en bénéficieraient pas de plein droit.

Par déclaration du 8 juillet 2019, l'EPIC a relevé appel de cette décision, notifiée le 14 juin 2019.

Par une ordonnance du 8 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a enjoint les parties de rencontrer un médiateur.

L'une des parties a cependant refusé la médiation le 12 janvier 2022.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 8 février 2022, l'EPIC la Monnaie de Paris demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu en ce qu'il a :

* dit inopposable à Mme [Y] la convention de forfait jours conclue le 1er juillet 2010 avec l'EPIC,

* condamné l'EPIC à régler à Mme [Y] les sommes suivantes :

- 15.000 euros bruts au titre d'un rappel d'heures supplémentaires pour la période de décembre 2012 jusqu'au terme de leur relation de travail, outre les congés payés y afférents à hauteur de 1.500 euros bruts,

- 1.674,72 euros bruts de rappel de salaire pour non-respect des minima conventionnels, outre les congés payés y afférents à hauteur de 167,47 euros bruts,

- 4.000 euros de prime d'objectifs pour l'année 2015,

* dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par l'EPIC à Mme [Y] par lettre datée du 2 novembre 2015,

* condamné l'EPIC à verser à Mme [Y] la somme de 36.000 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* condamné l'EPIC à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à Mme [Y] du jour de son licenciement notifié par lettre daté du 2 novembre 2015 jusqu'à la date du jugement dans la limite de six mois d'indemnités de chômage,

* condamné l'EPIC à régler à Mme [Y] la somme de 1.500 euros en application on de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné l'EPIC aux entiers dépens.

- confirmer le jugement rendu n ce qu'il a débouté Madame [Y] de ses demandes de :

* d'indemnisation de la contrepartie obligatoire en repos,

* de rappel de salaires pour les jours de récupération de déplacement à l'étranger et les congés payés afférents,

* de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité et de l'exécution déloyale du contrat de travail,

* de dommages et intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrats et non-respect de la portabilité de la mutuelle.

En conséquence et statuant à nouveau :

- dire bien-fondé le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme [Y],

- dire que la convention de forfait-jours conclue le 1er juillet 2010 entre l'EPIC et Mme [Y] est opposable à Mme [Y],

- débouter Mme [Y] de l'intégralité de ses demandes.

De manière reconventionnelle,

- condamner Mme [Y] à verser à l'EPIC la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [Y] aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 18 octobre 2021, Mme [Y] demande à la cour de':

- déclarer recevable mais non fondé l'appel interjeté par l'EPIC du jugement rendu,

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que :

* la convention forfait jour était inopposable à Mme [Y],

* le licenciement de Mme [Y] était sans cause réelle et sérieuse,

-réformer le jugement ce qu'il a débouté Mme [Y] :

* de ses demandes d'indemnisation de la contrepartie obligatoire en repos,

* de rappel de salaire pour les jours de récupération de déplacement à l'étranger et les congés payés y afférents,

* de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité et de résultat et de l'exécution déloyale du contrat de travail,

*de dommages et intérêts pour remise tardive de documents de fin de contrat et non-respect de la portabilité de la mutuelle.

En conséquence et statuant à nouveau :

- dire que la convention de forfait annuel en jours est nulle,

- dire que les dispositions sur les conventions de forfait annuel en jours n'ont pas été respectées,

- dire que le licenciement de Mme [Y] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

- dire que la société n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail de Mme [Y] et n'a pas respecté son obligation de sécurité à son égard,

- condamner la société à verser à Mme [Y] les sommes suivantes :

* 45.795,42 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

* 4.579,54 euros au titre des congés payés y afférents,

* 17.055 euros à titre d'indemnisation de la contrepartie obligatoire en repos pour les heures effectuées au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires,

-condamner la société à verser à Mme [Y] les sommes suivantes :

* 1.674,72 euros à titre de rappel de salaire pour non-respect des minima conventionnels,

* 167,47 euros au titre des congés payés y afférents,

* 874,99 euros au titre de rappel de salaire pour les jours de récupération de déplacement à l'étranger,

* 87,49 euros au titre des congés payés y afférents,

* 4.000 euros au titre du paiement de primes pour objectifs 2015,

* 42.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de résultat et exécution déloyale du contrat de travail,

* 70.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 3.500 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de documents de fin de contrat et non-respect de la portabilité de la mutuelle,

* 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner la remise sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir des bulletins de paie, et des documents de fin de contrat rectifiés,

- dire que la moyenne des salaires de Mme [Y] est fixée à 3.500 euros,

- condamner la société aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 mars 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A- l'exécution du contrat de travail

a - la durée du travail

A titre principal, Mme [Y] fait valoir que la convention de forfait annuel en jours insérée dans son contrat de travail est nulle. À titre subsidiaire, elle estime que cette convention est privée d'effet.

S'agissant de la nullité de la convention, Mme [Y] fait valoir que l'accord d'entreprise sur lequel se fonde la convention de forfait en jours est illicite aux motifs que la convention collective de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie et l'accord d'entreprise sont illicites ; que la clause contractuelle est nulle.

La société répond que seul l'accord d'entreprise relatif à l'organisation de la durée du travail au sein de la Monnaie de Paris, datant du 16 décembre 2008 était applicable; que cet accord mentionnait que le nombre de jours travaillés ne devait pas dépasser 213 jours par an, journée de solidarité incluse ; que l'article L. 3121-39 du code du travail dans sa version ici applicable prévoit que ce n'est pas la convention individuelle de forfait mais bien l'accord collectif sur lequel celle- ci est fondée, qui doit préciser la durée annuelle du travail du salarié concerné.

Aux termes des dispositions légales sus visées, l'accord collectif prévoyant la conclusion d'une convention de forfait en jours détermine la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi. Il n'en résulte pas que le nombre de jours du forfait doit être uniquement prévu par l'accord collectif.

Et en tout état de cause, cet accord prévoit seulement que le nombre de jours travaillés ne devra pas dépasser 213 jours par an.

La convention individuelle de forfait en jours doit fixer le nombre de jours travaillés ; à défaut d'une telle précision, le forfait annuel en jours est illicite et peut être annulé.

L'avenant numéro 3 au contrat de travail de Mme [Y] est ainsi rédigé :

'le temps de travail du contractant est décompté forfaitairement sous forme de jours dans le respect du plafond annuel légal de jours travaillés. Elle bénéficie cependant des dispositions et usages en vigueur au sein de l'EPIC et applicables aux cadres.'

Faute d'indication du nombre de jours travaillés, cette convention de forfait en jours est illicite et ne peut être opposée à Mme [Y].

Mme [Y] demande paiement d'heures supplémentaires et de la contrepartie obligatoire en repos qui lui est due pour dépassement du contingent annuel des heures supplémentaires fixé à hauteur de 220 heures. Elle fait valoir que les éditions de badgeage versées par l'employeur ne sont pas fiables : certaines journées voire semaines ne comportent aucun horaire de pointage et même sont comptées pour zéro heure alors qu'elle travaillait ; les jours fériés, RTT et jours de récupération ont été à tort

valorisés ; elle produit des mails transmis tôt le matin ou tard le soir, pendant les week- end et les congés. Mme [Y] dit qu'elle travaillait en moyenne 45 heures par semaine et demande le paiement de la contrepartie obligatoire en repos au regard du contingent de 220 heures supplémentaires.

L'Epic répond que Mme [Y] n'a jamais demandé paiement d'heures supplémentaires au cours de la relation contractuelle, qu'elle ne dispose pas d'éléments suffisamment précis, que ses mails concernent majoritairement une période antérieure au 3 novembre 2012 et que l'employeur n'avait pas donné d'accord pour l'exécution d'heures supplémentaires, que les jours de RTT et de repos doivent être décomptés, que subsidiairement, des heures supplémentaires seraient dues à hauteur de 702,69 euros voire de 3.448,36 euros ; qu'en tout état de cause, il n'y a pas eu de dépassement du contingent des heures supplémentaires fixé à 220 heures.

Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l' employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

L'absence de demande de paiement d'heures supplémentaires pendant la relation contractuelle ne prive pas Mme [Y] de son droit d'en demander le paiement.

Ensuite, l'employeur ne peut arguer de ce qu'il n'aurait pas donné à Mme [Y] l'autorisation d'effectuer des heures supplémentaires, puisque plusieurs messages électroniques ont été transmis à sa supérieure hiérarchique tard le soir sans qu'aucune remarque ne lui ait été faite à ce sujet. La cour constate que la lettre de licenciement mentionne un message du dimanche 13 septembre 2015 sans que ce travail dominical n'ait appelé de remarque de l'employeur, seule la teneur de la réponse immédiate de la salariée lui étant reprochée.

Le contrat de travail de Mme [Y] mentionne une durée hebdomadaire de travail de 35 heures.

Au soutien de sa demande, Mme [Y] produit :

- l'attestation de M. [S], responsable sécurité - santé de 2010 à 2015, aux termes de laquelle Mme [Y] travaillait tard le soir, voire le samedi ou le dimanche ;

- des mails de la période du 8 février 2011 au 6 septembre 2015 : un certain nombre d'entre eux intéressent la période non prescrite antérieure au 2 novembre 2012 et indiquent une heure très tardive ;

- un tableau des horaires réalisés sur la période de janvier 2011 au mois de décembre 2015 qui sera pris en compte pour la période non prescrite ;

- ses bulletins de paye.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de fournir les horaires effectivement réalisés.

La société verse des relevés de badgeage pour la période 2013-2015 et un tableau des heures supplémentaires effectuées au cours des années 2013 à 2015 incluses.

L'examen des pièces versées par les deux parties révèlent des anomalies ; ainsi , certains relevés de badgeage n'indiquent aucun horaire de travail alors que Mme [Y] n'était ni en congés, ni en RTT, ni en arrêt de travail au regard de ses bulletins de paye (ex : 3 journées de la semaine du 18 au 22 mars, 3 jours de la semaine du 11 au 14 mars 2013).

Mme [Y] a bénéficié de 16 jours de RTT et des heures supplémentaires lui ont été payées.

En considération de ces éléments, la cour a la conviction- sans qu'il soit besoin de recourir à une mesure d'instruction - que la Monnaie de Paris doit payer à Mme [Y] la somme de 6 230 euros majorée des congés payés afférents (623 euros).

À défaut de dépassement du contingent des heures supplémentaires ici applicable, aucune contrepartie obligatoire de repos obligatoire n'est dû.

b- l'exécution déloyale du contrat de travail

Mme [Y] fait valoir qu'elle n'a pas bénéficié de la majoration conforme à son statut de cadre, qu'aucun entretien annuel d'évaluation de sa charge de travail et de la compatibilité entre ses horaires de travail et sa vie privée n'a été organisé, que, déduction faite des 21h67 réglées lors du solde de tout compte, 7,5 jours de récupération n'ont pas été réglés. Par ailleurs elle a été victime du comportement de sa supérieure hiérarchique qui a altéré son état et santé et nécessité un arrêt de maladie, ses documents

de fin de contrat lui ont été délivrés avec retard, enfin, elle a été convoquée à un entretien préalable à licenciement après avoir sollicité un rendez-vous avec la directrice des ressources humaines pour évoquer les difficultés récurrentes rencontrées avec sa supérieure.

La Monnaie de Paris répond que Mme [Y] a été remplie de ses droits puisque, prime d'objectifs incluse, elle a été payée au-delà même d'une rémunération majorée de 10 %, que les 53,93 heurs de récupérations dues lui ont été versées sur le bulletin de paye du mois de février 2015, que les 13,1 jours à récupérer suite aux déplacements professionnels ont été pris ou payés , que Mme [Y] n'établit pas la réalité d'un préjudice résultant du léger retard dans la délivrance des documents de rupture et qu'elle a bénéficié du maintien de ses droits à la complémentaire santé pendant une année. La Monnaie de Paris ajoute que Mme [Y] ne peut demander deux fois la réparation d'un même préjudice, que les deux attestations produites et la lettre qu'elle a envoyés à la directrice des ressources humaines n'établissent pas la réalité de pressions de la part de sa supérieure hiérarchique, qu'enfin, aucun lien ne peut être fait entre l'arrêt de travail pour maladie et ses conditions de travail.

Aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Aux termes de l'article 1.4 de l'accord du 4 décembre 1998, la rémunération annuelle des cadres en forfait jours devra être au moins équivalente au salaire minimum conventionnel de sa classification, majorée de 10 %, ce taux étant porté à 15 % à compter du 1er janvier 2003.

La prime d'objectifs payée est un élément permanent de la rémunération devant être pris en compte dans le calcul des minima conventionnels.

Le tableau de comparaison des minima conventionnels, majorés de 15 %, et de la rémunération indique un différentiel nul à compter du mois de mai 2014.

Au regard des minima conventionnels (niveau 5, échelon 3), la rémunération mensuelle devait être de 3 223,45 euros de novembre 2012 à février 2013, de 3.346,5 euros de mars 2013 à juin 2014.

Mme [Y] a perçu, prime d'objectifs incluse, une rémunération au moins égale à minimum majoré de 15 %. Aucune somme ne lui est due au titre de la période non prescrite et Mme [Y] sera déboutée de sa demande en paiement d'un rappel de salaire de 1.674 euros.

Mme [Y] dit qu'en tout état de cause, le contrat de travail n'a pas été exécuté de bonne foi au cours de la période prescrite de juillet 2010 à novembre 2012 en ce que la rémunération versée était inférieure au minimum conventionnel majoré, mais elle ne verse pas les bulletins de paye correspondant de sorte qu'il n'est pas établi que l'employeur n'a pas exécuté de bonne foi le contrat de travail pendant cette période.

Mme [Y] demande paiement d'une prime sur objectifs de 4.000 euros au titre de l'année 2015.

La Monnaie de Paris répond que Mme [Y] n'a pas atteint ses objectifs et qu'en tout état de cause, elle a été licenciée deux mois avant la fin de l'année 2015 et a été placée en arrêt de travail pour maladie quelques jours à compter du 28 septembre 2015.

La Monnaie de Paris doit préciser les objectifs que devait atteindre la salarié et les seuls insuffisances mentionnées dans la lettre de licenciement -d'ailleurs non retenus par la cour- n'établissent pas que Mme [Y] n'aurait pas atteint ses objectifs.

Si Mme [Y] a été licenciée le 2 novembre 2015, son préavis était de trois mois. Si l' employeur a dispensé Mme [Y] de l'exécution de son préavis, il doit cependant verser la prime de 4.000 euros correspondant à l'année 2015.

La société ne verse pas d'entretien destiné à évaluer la charge de travail et sa compatibilité avec la vie privée, alors que l'avenant à son contrat de travail prévoyait une clause de forfait en jours dont l'employeur a toujours revendiqué la validité.

Au titre des jours de récupération pour ses déplacements à l'étranger, Mme [Y] demande paiement de 7,5 jours de rémunération à hauteur de 874,99 euros. Or, 53,93 heures ont été payées en février 2015 et, pour la période postérieure, Mme [Y] a bénéficié de 11 jours de récupération et 3,1 jours ont été payés sur le bulletin de paye de février 2016. Mme [Y] sera déboutée de sa demande de ce chef.

Les documents de fin de contrat ont été transmis le 4 mars 2016 mais Mme [Y] ne verse aucun élément établissant la réalité d'un préjudice.

Elle a aussi bénéficié du maintien de la complémentaire santé pendant un an après la rupture de son contrat de travail.

Enfin, pour dire que l'employeur n'a pas respecté son obligation de sécurité, Mme [Y] fait état de pressions et d'un management inadapté de sa supérieure hiérarchique. Mme [Y] évoquant l'obligation qu'à tout employeur de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir les faits de harcèlement moral, la cour appliquera les dispositions afférentes.

L'employeur tenu à une obligation de sécurité, doit assurer la protection et la santé des travailleurs dans l'entreprise et notamment prévenir les faits de harcèlement moral. Dès lors que les faits sont avérés, la responsabilité de l'employeur est engagée, ce dernier devant répondre des agissements des personnes qui exercent de droit ou de fait une autorité sur les salariés.

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aux termes de l'article L. 1154-1 du code du travail, en cas de litige, si le salarié présente des faits qui permettent de présumer l'existence d' un harcèlement, au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Les deux attestations versées par Mme [Y] sont insuffisantes pour laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral. M. [S] ne mentionne aucun fait intéressant Mme [Y].M. [U] fait état de l'inconstance de caractère de la responsable de service de Mme [Y] et de la nervosité voire des pleurs de Mme [Y] sans qu'aucune précision ne soit apportée. La lettre transmise par Mme [Y] à la directrice des ressources humaines de La Monnaie de Paris le 16 septembre 2015 ne fait état que du comportement de Mme [N] sans précision et surtout de la problématique de son changement de poste; en tout état de cause, elle a été rédigée par Mme [Y] et n'est

corroborée par aucune pièce. Enfin, en l'état des pièces produites, aucun lien ne peut être établi entre l'arrêt de travail de Mme [Y] et ses conditions de travail ; ces éléments pris dans leur ensemble ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

L'absence d'organisation d'entretiens d'évaluation de la charge de travail et le non paiement de la prime d'objectifs de l'année 2015 fondent l'exécution déloyale du contrat de travail de Mme [Y] qui sera -eu égard aux heures supplémentaires effectuées et aux déplacements lointains et fatiguants qu'elle réalisait- indemnisée hauteur de 2.000 euros.

B- le licenciement

À titre liminaire, Mme [Y] fait valoir que les motifs de son licenciement ne relèvent pas d'une insuffisance professionnelle fondée sur une incapacité à exercer de manière satisfaisante ses fonctions par manque de compétence, que la lettre de licenciement fait référence à son comportement et que la décision de licencier repose sur un motif disciplinaire. Elle ajoute que plusieurs griefs sont prescrits en vertu de l' article L. 1332-4 du code du travail, les autres n'étant pas établis ou ayant été ajoutés à la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige.

La société répond que Mme [Y] a été licenciée pour une insuffisance professionnelle dont l'appréciation lui revient et qu'elle l'a régulièrement guidée.

Mme [Y] aurait démontré :

* des réactions inappropriées du fait d'un manque de pragmatisme et de discernement,

*s on manque manifeste de rigueur,

* sa démotivation.

La cour examinera successivement les motifs évoqués dans la lettre de licenciement et déterminera leur nature, disciplinaire ou pas.

1- le suivi opérationnel des dossiers

Deux dossiers sont évoqués par l'employeur qui reproche à la Mme [Y] de manquer de discernement et de rigueur.

a- le dossier de l'Arabie Saoudite

* Mme [Y] se serait engagée, sans information préalable et aval de sa supérieure hiérarchique Mme [N], à faire une intervention lors du forum intitulé ' Vivre et travailler en Arabie Saoudite' organisé à [Localité 3]. Mme [N], mise devant le fait accompli, l'a laissée assurer cette prestation pour ne pas nuire à l'image de l'entreprise.

La Monnaie de Paris fait valoir qu'elle sélectionne les collaborateurs qui la représentent au forum et dont le discours est préparé et que Mme [Y] ne s'est pas interrogée sur sa légitimité à intervenir lors de cette manifestation.

Mme [Y] répond que Mme [N] avait validé sa participation par mail du 19 mai 2015, l'avait encouragée et avait informé le directeur adjoint des ressources humaines. Elle ajoute qu'aucune difficulté n'est survenue et qu'en tout état de cause, ce grief est prescrit.

Cette situation ne relève pas d'une faute disciplinaire : l'employeur ne reproche ni comportement déloyal ni manquement à une règle dont la violation constituerait une faute. Le moyen tiré de la prescription est dès lors inopérant.

Des pièces produites, il résulte que Mme [Y] a demandé son accord à Mme [N] par mail du 19 mai 2015 et que cette dernière le lui a donné le même jour. La supérieure hiérarchique a attendu le 28 mai pour demander à la salariée de l'informer en amont la prochaine fois.

Il n'est donc pas établi que Mme [Y] aurait fait preuve d'un manque de pragmatisme et de discernement ni qu'elle aurait fait 'passer ses ambitions personnelles avant de réfléchir aux intérêts de son employeur' . Cette décision qui n'a par ailleurs pas perturbé la marche de l'entreprise n'est pas la marque d'une insuffisance professionnelle.

* le 20 juillet 2015, Mme [Y] a écrit que le roi d'Arabie Saoudite avait validé les produits de La Monnaie de Paris et elle s'est flattée de cette réussite. En réalité, ce client n'avait pas validé les dessins de la gamme mais donné un accord de principe au changement de gamme. L'information de Mme [Y] aurait dû être plus claire et elle s'est attribuée cette réussite collective comme une victoire personnelle.

Le défaut de précision de l'information transmise par Mme [Y] ne relève pas du domaine disciplinaire et le moyen tiré de la prescription est inopérant.

La Monnaie de Paris verse un échange de mails entre Mme [N] et un correspondant dont la cour comprend qu'il n'avait pas demandé un nouveau dessin mais le remplacement d'un portrait par un autre. En tout état de cause, Mme [N], destinataire du mail du 20 juillet n'a pas demandé de précision à sa lecture en dépit de l'importance alléguée de ce client.

S'agissant de l'auto-congratulation de Mme [Y], elle ne peut lui être reprochée alors que l'employeur souligne sa démotivation et la salariée ne manque pas de souligner qu'il s'agit d'un travail d'équipe.

Aucune insuffisance professionnelle n'est ici établie.

* le 13 septembre 2015, l'ambassade de France à Ryad demande à Mme [Y] de faire fabriquer plus de médailles que prévu pour une distribution lors du forum franco-saoudien organisé à Ryad du 11 au 13 octobre suivant. Mme [Y] aurait répondu par la négative sans échange préalable avec sa hiérarchie ou le responsable de production alors que des pièces complémentaires ont pu être réalisées dans l'urgence.

Mme [Y] fait valoir que la demande de l'ambassade était destinée à Mme [N] qui a été en copie de sa réponse et qui a attendu le 29 septembre pour manifesté son désaccord.

La destinataire du mail du 13 septembre était Mme [N], Mme [Y] n'étant qu'en copie. La cour constate aussi que le message de Mme [Y] du 13 septembre était destiné à Mme [N] et précisait qu'une discussion aurait lieu le lendemain. Il ne peut être reproché à Mme [Y] d'avoir émis un avis qu'elle proposait d'évoquer le lendemain même alors que sa supérieure aurait dû répondre elle même à l'auteur du message.

Cette démarche ne relève d'aucune insuffisance professionnelle.

b- le dossier bolivien

Le 12 juin 2015, Mme [Y] aurait mobilisé plusieurs services de l'entreprise pour la réalisation d'un appel d'offres virtuel sans avoir correctement analysé les informations en sa possession et sans préciser le contexte d'exécution de cet appel d'offres. Mme [Y] aurait fait preuve d'un manque de rigueur.

Aucune faute n'est reprochée, seule étant en cause un défaut d'analyse d'information. Le moyen tiré de la prescription est inopérant.

La Monnaie de Paris verse deux messages de Mme [N] dont l'un mentionne que les informations données par la banque centrale sont différentes des données transmises par la salariée et l'autre est adressé à 'toute l'équipe' et qui invite les commerciaux à ne pas transmettre des informations dispersées et générant des confusions.

Ce second message établit à lui seul que le défaut de clarté des informations données par les commerciaux était général. Ensuite, le premier juge a justement remarqué qu'aucune pièce n'établissait la teneur des informations adressées par la banque centrale.

Par conséquent, le reproche fait à Mme [Y] n'était pas fondé.

La cour note enfin que les mails transmis par la hiérarchie à Mme [Y] ne constituaient pas l'aide alléguée par la société. La lecture de ces messages ne révèle que des reproches et aucune pièce n'établit que l'employeur aurait recherché des solutions avec sa salariée.

2- le problème de comportement et de positionnement

Il est ici reproché à Mme [Y] d'avoir :

- le 16 septembre 2015, alors qu'elle était désireuse de quitter son poste, d'avoir refusé une démarche tendant à organiser une mobilité externe à l'aide du cabinet Oasys,

- les 24 et 28 septembre 2015, décliné deux invitations de M. [W], arguant qu'elle ne se 'sentait pas bien' puis d'avoir quitté l'entreprise pour se rendre chez son médecin,

- transmis son avis d'arrêt de travail avec retard alors qu'elle aurait dû prévenir au plus tôt de son absence prévisible; Mme [Y] s'est dès lors désengagée sciemment sans réfléchir aux conséquences de son attitude dans le contexte de l'organisation du forum avec l'Arabie Saoudite.

L'attitude de Mme [Y] aurait nécessité des recadrages réguliers de sa hiérarchie et depuis plusieurs mois, à la demande de la salariée, son manager a mis en place un processus de travail consistant à faire des points réguliers d'avancement des dossiers mais les lacunes ont perduré.

Ce grief est de nature disciplinaire puisqu'il est reproché à Mme [Y] d'avoir refusé l'organisation d'une recherche d'emploi et d'avoir méconnu la règle posée dans l'entreprise relativement aux absences pour maladie.

Les deux griefs ne sont pas antérieurs de plus de deux mois à l'engagement de la procédure de licenciement et ne sont pas prescrits.

La société fait valoir que Mme [Y] n'a pas saisi la main qu'elle lui a tendue pour organiser la recherche d'un autre emploi, démontrant ainsi qu'elle n'éprouvait pas de plaisir à exercer ses fonctions de commerciale export. Il fait aussi référence à l'article 4 du règlement intérieur qui mentionne que ' un cas d'absence imprévisible, notamment en cas de maladie, d'informer au plus tôt, par tout moyen, son supérieur hiérarchique ou la direction des ressources humaines. Mme [Y] serait restée silencieuse pendant deux jours avant d'adresser le 30 septembre un arrêt de travail daté du 28 septembre.

Mme [Y] répond qu'elle n'avait jamais été sanctionnée depuis son embauche douze ans auparavant, qu'au contraire, elle a bénéficié de deux promotions, que sa rémunération globale brute a été augmentée en 2013 et qu'elle a perçu l'intégralité de sa prime chaque année.

Mme [Y] estime avoir été licenciée pour avoir écrit à deux reprises -les 17 juillet et 16 septembre 2015- à la directrice des ressources humaines les difficultés récurrentes rencontrées avec Mme [N]. Elle fait valoir qu'elle a informé l' employeur de son arrêt de travail dès le 28 septembre 2015.

Il ne peut être reproché à une salariée d'avoir décliné une offre dont le but était de lui faire quitter l'entreprise.

Ensuite, le mail du 24 septembre 2015 (14 h 53) établit que Mme [Y] à informé  Mme [N] et M. [W] qu'elle ne se sentait 'pas bien' et qu'elle ne pourrait pas venir au rendez- vous fixé à 16h30. Cette situation ne peut être reprochée à une salariée qui a été placée en arrêt de travail le 28 septembre 2015.

Par mail daté du 28 septembre 2015, Mme [N] était informée par l'infirmerie de l'entreprise que Mme [Y] devait consulter son médecin. Il ne peut être reproché à Mme [Y] de n'avoir pas pu aller au rendez-vous prévu le même jour.

Enfin, la société ne produit pas de pièce établissant que l'avis d'arrêt de travail de Mme [Y], daté du 28 septembre, n'aurait été reçu que le 30 septembre et la pièce 42 bis de la salariée indique que sa supérieure hiérarchique prévoyait l'absence de Mme [Y] puisqu'elle lui a demandé de 'rerouter ' les mails qu'elle recevait pour qu'elle puisse suivre ses dossiers en 'son absence'.

En tout état de cause, aucune sanction n'avait été notifiée à Mme [Y] depuis son entrée dans l'entreprise en 2003 et un licenciement pour un motif disciplinaire aurait été disproportionné.

Le licenciement de Mme [Y] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et le préjudice résultant de la perte de son emploi doit être réparé à hauteur minimale des six derniers mois de salaire puisqu'elle avait une ancienneté de plus deux ans dans une entreprise employant à titre habituel plus de dix salariés.

Mme [Y] produit une attestation de formation pour la période d'octobre 2016 à janvier 2017. Le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 19 juillet 2018 indique que Mme [Y] perçoit une allocation spécifique de solidarité de 489 euros par mois jusqu'au 24 août 2018. Elle ne justifie cependant pas de sa situation postérieure à cette date.

Eu égard à l'âge de Mme [Y] lors de la rupture de son contrat de travail, de son ancienneté et de ses difficultés pour retrouver un emploi, La Monnaie de Paris sera condamnée à lui verser la somme de 30 000 euros.

La Monnaie de Paris devra délivrer à Mme [Y] les documents de rupture et bulletin de paye rectifiés dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt, sans que le prononcé d'une astreinte ne soit nécessaire au regard des éléments de la cause.

Vu l'équité, La Monnaie de Paris sera condamnée à verser à Mme [Y] la somme complémentaire de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre de la procédure d'appel.

Partie perdante, La Monnaie de Paris supportera la charge des entiers dépens des procédures de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

la cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :

- débouté Mme [Y] de ses demandes au titre de la contrepartie obligatoire en repos, des jours de récupération, de la remise des documents de fin de contrat et de la portabilité de la mutuelle,

- dit le licenciement de Mme [Y] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la Monnaie de Paris à payer à Mme [Y] la somme de 4.000 euros au titre de la prime d'objectifs 2015,

- condamné l'Epic la Monnaie de Paris à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme [Y] du jour de son licenciement dans la limite de six mois de salaire,

- ordonné à la Monnaie de Paris de délivrer les documents de fin de contrat et un bulletin de paye rectifiés, précision notée que cette remise devra intervenir dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt,

- condamné la Monnaie de Paris à payer à Mme [Y] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau des autres chefs,

Dit que la convention de forfait en jours est illicite,

Condamne l'Epic la Monnaie de Paris à payer à Mme [Y] les sommes suivantes :

* 6.230 euros et 623 euros au titre des heures supplémentaires,

* 2.000 euros au titre du l'exécution déloyale du contrat de travail,

* 30.000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que les sommes valant salaire porteront intérêts à compter de la date de réception par la Monnaie de Paris de sa convocation devant le bureau de jugement,

Dit que les sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts à compter de la signification de l'arrêt,

Déboute Mme [Y] de ses demandes en paiement de sommes au titre du non respect des minima conventionnels,

Condamne la Monnaie de Paris à payer à Mme [Y] la somme complémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne l'EPIC la Monnaie de Paris aux entiers dépens des procédures de première instance et d'appel.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par Anne-Marie Lacour-Rivière, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 19/03799
Date de la décision : 06/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-06;19.03799 ?
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