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28/06/2022 | FRANCE | N°19/03982

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 28 juin 2022, 19/03982


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 28 JUIN 2022









N° RG 19/03982 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LEMT







[J] [E]



c/



[X] [E]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 33063/02/20/18748 du 19/11/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)



























N

ature de la décision : AU FOND























Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 20 juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 5, RG : 18/11300) suivant déclaration d'appel du 16 juillet 20...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 28 JUIN 2022

N° RG 19/03982 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LEMT

[J] [E]

c/

[X] [E]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 33063/02/20/18748 du 19/11/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 20 juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 5, RG : 18/11300) suivant déclaration d'appel du 16 juillet 2019

APPELANT :

[J] [E]

né le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 5] (62)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 4]

représenté par Maître Delphine BARTHELEMY-MAXWELL, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

[X] [E]

né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 7] (62)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 3]

représenté par Maître CHAVANT substituant Maître Philippe MILANI de la SELARL MILANI - WIART, avocats au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 mai 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Vincent BRAUD, conseiller,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

[J] [E] expose avoir, entre 2011 et 2015, prêté la somme totale de 66.093 euros à son fils [X] [E] compte tenu des difficultés financières rencontrées par celui-ci.

Après des démarches amiables restées vaines et une mise en demeure infructueuse, [J] [E] a, par acte du 30 novembre 2018, fait assigner [X] [E] en paiement.

Par jugement réputé contradictoire du 20 juin 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- condamné [X] [E] à verser à [J] [E] la somme en principal de 41 047,54 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 juin 2018 jusqu'au parfait paiement et a rejeté le surplus de la demande de ce chef,

- condamné [X] [E] à payer à [J] [E] la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

[J] [E] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 16 juillet 2019.

Par conclusions déposées le 28 avril 2022, il demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu par la 5e chambre du tribunal de grande instance de Bordeaux le 20 juin 2019, en ce qu'il a limité le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de [X] [E] à la somme de 41 047,54 et à 1 000 euros, la somme allouée au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement déféré pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- condamner [X] [E] à payer à [J] [E] la somme de 66 093,26 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 juin 2018,

- dire et juger que les intérêts seront capitalisés par années entières,

- condamner [X] [E] à payer à [J] [E] la somme de 1 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile en première instance, et 2 000 euros en cause d'appel, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées le 10 janvier 2020 comportant appel incident, [X] [E] demande à la cour de :

- débouter [J] [E] de son appel,

Faisant droit à l'appel incident de [X] [E],

- réformer le jugement,

À titre principal,

- débouter [J] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner [J] [E] au paiement d'une indemnité de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,

À titre subsidiaire,

- confirmer le jugement rendu le 20 juin 2019 sauf en ce qu'il a condamné [X] [E] à verser à [J] [E] :

- la somme de 1 824,96 euros au titre de frais de déménagement, cette somme étant manifestement prescrite,

- la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner le report du paiement des sommes dues à deux années,

À titre infiniment subsidiaire,

- accorder à [X] [E] la possibilité de s'acquitter de la dette au moyen de 24 règlements mensuels de 50 euros, le solde au dernier pacte,

- dire que les paiements s'imputeront en priorité sur le capital,

- dire que chaque partie conservera la charge de ses propres frais irrépétibles et dépens,

En toutes hypothèses,

- accorder à [X] [E] le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 2 mai 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 16 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le prêt

Aux termes de l'article 1892 du code civil, le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties livre à l'autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à la charge par cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité.

[J] [E] prétend avoir prêté la somme de 66.093 euros à son fils [X] [E].

[X] [E] fait valoir d'une part, qu'il n'est pas rapporté la preuve du versement à son profit de l'ensemble des sommes alléguées et d'autre part, qu'à supposer que ce soit le cas, il s'agissait de dons.

Aux termes de l'article 1315 ancien, alinéa premier, du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Il appartient donc à l'appelant de prouver le prêt allégué.

Aux termes de l'article 1341 ancien, alinéa premier, du même code, il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre.

Aux termes de l'article premier, alinéa premier, du décret du 15 juillet 1980 pris pour l'application de l'article 1341 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce, la somme ou la valeur visée à l'article 1341 du code civil est fixée à 1 500 euros.

Il s'ensuit que le prêt en cause devait être passé par écrit. Toutefois, selon l'article 1348 ancien, alinéa premier, du code civil, les règles ci-dessus reçoivent exception lorsque l'une des parties, n'a pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique.

Par une juste appréciation des circonstances de la cause et des liens affectifs unissant les parties qui sont père et fils, le premier juge a considéré que [J] [E] n'avait pas eu la possibilité morale de se procurer une preuve littérale des prêts allégués.

Il résulte des articles 1315 et 1348 précités qu'il incombe à [J] [E], qui s'est trouvé dans l'impossibilité morale de se procurer une preuve écrite, de prouver par tous moyens l'obligation dont il réclame l'exécution (1re Civ., 19 oct. 2016, no 15-27.387).

[J] [E] se prévaut tout d'abord d'un ordre de virement expressément intitulé 'prêt familial' d'un montant de 28.000 euros effectué par lui au bénéfice de son fils le 22 septembre 2015 en vue de l'aider à financer un achat immobilier situé sur la commune de [Localité 6], lieu du domicile actuel de [X] [E] qui ne conteste pas avoir reçu cette somme (Pièces 6, 13, 14 et 15 de l'appelant).

L'appelant justifie en outre par la production de ses relevés bancaires, de plusieurs virements effectués au profit de son fils :

- deux virements de 5.000 euros chacun en date des 7 et 14 avril 2015 (pièces 7 et 8)

- des virements d'un montant total de 1.405 euros intervenus entre décembre 2013 et novembre 2014 (pièce 18)

- un virement de 1.500 euros en date du 4 juin 2014 (pièce n°19)

soit au total : 12.905 euros.

Il verse en outre des bordereaux de versements échelonnés d'espèces au profit de son fils pour un montant total de 2.750 euros.

S'agissant de la somme réclamée de 1.525,01 euros correspondant aux frais de location de véhicule et de carburant engagés pour le déménagement de son fils selon factures des 13 mai et 13 juin 2012, c'est à bon droit que [X] [E] conclut à l'irrecevabilité de cette demande en paiement manifestement prescrite en application des dispositions de l'article 2224 du code civil selon lesquelles 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connapitre les faits lui permettant de l'exercer', l'assignation ayant été délivrée le 30 novembre 2018.

Si [J] [E] justifie d'un retrait en espèces d'un montant de 7.000 euros le 9 juillet 2015, rien n'établit en revanche qu'il a versé ce montant à son fils [X].

De même, il n'est nullement démontré que les achats de matériaux effectués par [J] [E] pour un montant de 13.628,30 euros ont bénéficié à son fils.

Au final, il est donc rapporté la preuve que [J] [E] a remis à [X] [E] la somme de 43.655 euros.

L'attestation de [K] [D] produite en pièce 4 par l'appelant confirme que la remise de ces fonds n'était revêtue d'aucune intention libérale.

En conséquence, [X] [E] sera condamné à rembourser à son père la somme de 43.655 euros, laquelle portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 juin 2018.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Sur ce fondement, [X] [E] sera condamné aux dépens d'appel qui seront recouvrés selon les modalités applicables en matière d'aide juridictionnelle.

Eu égard aux circonstances de la cause et à la situation respective des parties, il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris sauf à porter le montant de la condamnation à paiement à la somme de 43.655 euros,

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [X] [E] aux dépens d'appel qui seront recouvrés selon les modalités applicables en matière d'aide juridictionnelle,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/03982
Date de la décision : 28/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-28;19.03982 ?
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