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21/06/2022 | FRANCE | N°19/04145

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 21 juin 2022, 19/04145


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 21 JUIN 2022



RP





N° RG 19/04145 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LE2V









[E] [M]



c/



Société THELEM ASSURANCES

























Nature de la décision : AU FOND

























r>
Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 6, RG : 18/03236) suivant déclaration d'appel du 19 juillet 2019





APPELANT :



[E] [M]

né le [Date naissance 2] 1977 à [Localité 6] (CONGO)

demeurant [Adresse 1] - [Localité 3]
...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 21 JUIN 2022

RP

N° RG 19/04145 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LE2V

[E] [M]

c/

Société THELEM ASSURANCES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 6, RG : 18/03236) suivant déclaration d'appel du 19 juillet 2019

APPELANT :

[E] [M]

né le [Date naissance 2] 1977 à [Localité 6] (CONGO)

demeurant [Adresse 1] - [Localité 3]

représenté par Maître Servan KERDONCUFF de la SELARL KERDONCUFF AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Société THELEM ASSURANCES, société d'assurances mutuelles à cotisations variables, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 8] - [Localité 4]

représentée par Maître Luc BOYREAU de la SCP LUC BOYREAU, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Elsa GREBAUT COLLOMBET, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 mai 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Roland POTEE, président,

Vincent BRAUD, conseiller,

Bérengère VALLEE, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le 12 août 2013, sur la commune de [Localité 7] ([Localité 7]), M. [E] [M] a été victime d'un accident de la circulation impliquant le véhicule de M. [C], assuré auprès de la compagnie Thelem Assurances.

Transporté aux urgences du centre hospitalier d'[Localité 5], le certificat médical initial mentionne que M. [E] [M] a présenté des contusions cervicales, dorsales et lombaires, des douleurs du coude droit, des contractures musculaires, entraînant une incapacité temporaire totale de travail de 1 jour et un arrêt de travail de 2 jours.

Le 15 août 2013, après une chute dans le sous-sol de son domicile, M. [E] [M] est retourné au centre hospitalier d'[Localité 5] où a été diagnostiquée 'une hernie discale avec protusion postérieure médiane sous réserve d'interprétation par un radiologue'.

Mandaté par la GMF, assureur de M. [E] [M], le docteur [A] a établi un rapport d'expertise le 8 mars 2014 dont les conclusions ont été contestées par celui-ci, ce qui a conduit la GMF et son assuré à convenir le 14 avril 2015 de la mise en place d'un compromis d'expertise amiable, confiée au docteur [T].

L'expert a déposé son rapport le 9 janvier 2017, au terme duquel il conclut à l'absence de lien certain, direct et exclusif entre l'accident du 12 août 2013 et les manifestations neurologiques apparues 3 jours après les faits traumatiques, ainsi qu'à l'existence d'un état antérieur pathologique.

Par actes d'huissier des 30 mars, 3 et 4 avril 2018, M. [E] [M] a fait assigner la société Thelem Assurances, la CPAM des Landes et la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale devant le tribunal de grande instance de Bordeaux sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 et de l'article 144 du code de procédure civile, aux fins de voir statuer sur l'imputabilité à l'accident du 12 août 2013 'de la décompensation des discopathies dégénératives protusives lombaires avec les manifestations neurologiques apparues le 15 août 2013', et ordonner une mesure d'expertise médicale à cet effet.

Par jugement du 11 juillet 2019, le tribunal a :

- constaté que le droit à indemnisation de M. [E] [M] suite à l'accident de la circulation dont il a été victime le 12 août 2013 n'est pas contesté par la société Thelem Assurances,

- débouté M. [E] [M] de toutes ses demandes,

- condamné M. [E] [M] aux dépens de la procédure,

- déclaré le jugement opposable à la CPAM des Landes et à la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale.

M. [M] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 19 juillet 2019.

Par ordonnance du 18 décembre 2019, le conseiller de la mise en état x a :

- constaté la caducité de la déclaration d'appel de M. [M] en date du 19 juillet 2019, mais seulement à l'égard de la CPAM des Landes et de la CNMSS,

- dit que la procédure d'appel se poursuit normalement à l'égard de la société Thelem Assurances.

Par conclusions déposées le 4 avril 2022, M. [E] [M] demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

- réformer le jugement dont appel, comme ayant violé le principe de réparation intégrale,

- constater qu'il ne présentait, avant l'accident du 12/08/13, aucun état antérieur connu ni soigné, ni symptomatique, dans la région du rachis lombaire.

- juger l'imputabilité à l'accident du 12/08/13 avec contusion lombaire, de la décompensation, dans tous ces effets néfastes, des discopathies dégénératives protrusives lombaires emportant des manifestations de lombo-sciatalgie bilatérales, avec les manifestations neurologiques apparues le 15 août 2013 :

* dérobement des deux membres inférieurs ayant provoqué une chute au sol en marchant.

* manifestations neurologiques avec incontinence urinaire et anale.

* les manifestations de sciatiques avec hypo-esthésie sur les territoires neurologiques des deux membres inférieurs.

- ordonner une mesure d'expertise médicale et désigner à cet effet tel expert qu'il plaira avec la mission suivante :

Préalablement à la réunion d'expertise, recueillir dans la mesure du possible, les convenances des parties et de leurs représentants avant de fixer une date pour le déroulement des opérations d'expertise. Leur rappeler qu'elles peuvent se faire assister par un médecin conseil et toute personne de leur choix.

Après avoir recueilli les renseignements nécessaires sur l'identité de la victime et sa situation, les conditions de son activité professionnelle, son statut et/ou sa formation s'il s'agit d'un demandeur d'emploi, son mode de vie antérieur à l'accident et sa situation actuelle.

1. A partir des déclarations de la victime, au besoin de ses proches et de tout sachant, et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités de traitement, en précisant le cas échéant, les durées exactes d'hospitalisation et, pour chaque période d'hospitalisation, le nom de l'établissement, les services concernés et la nature des soins.

2. Recueillir les doléances de la victime et au besoin de ses proches et les transcrire fidèlement, l'interroger sur les conditions d'apparition des lésions, l'importance, la répétition et la durée des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences.

3. Dans le respect du Code de déontologie médicale, décrire au besoin l'état antérieur de la victime mais uniquement s'il est susceptible d'avoir une incidence directe sur les lésions ou leurs séquelles. Dans cette hypothèse, évaluer le dommage sans tenir compte de cet état antérieur.

4. Procéder contradictoirement à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime.

5. A l'issue de cet examen et, au besoin après avoir recueilli l'avis d'un sapiteur d'une autre spécialité (sapiteur Psychiatre), analyser dans un exposé précis et synthétique :

* La réalité des lésions initiales ;

* La réalité de l'état séquellaire ;

* L'imputabilité certaine des séquelles aux lésions initiales dont se plaint notamment la victime en précisant au besoin l'incidence d'un état antérieur. L'évaluation devra être réalisée en considérant l'imputabilité de la décompensation, dans tous ces effets néfastes, des discopathies dégénératives protrusives lombaires emportant des manifestations de lombo-sciatalgie bilatérales, notamment les manifestations neurologiques apparues moins de 72 heures après l'accident, le 15 août 2013, avec pour suites :

* dérobement des deux membres inférieurs ayant provoqué une chute au sol en marchant.

* manifestations neurologiques avec incontinence urinaire et anale.

* les manifestations de sciatiques avec hypo-esthésie sur les territoires neurologiques des deux membres inférieurs.

6. Arrêt des activités professionnelles : Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité d'exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle.

7. Déficit fonctionnel temporaire : Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles habituelles. En cas de déficit partiel, décrire le ou les niveaux de déficit partiel et préciser leur durée.

8. Fixer la date de consolidation et, en l'absence de consolidation, dire à quelle date il conviendra de revoir la victime ; préciser dans ce cas les dommages prévisibles pour l'évaluation d'une éventuelle provision.

9. Déficit fonctionnel permanent : Indiquer si, après la consolidation, la victime subit un déficit fonctionnel permanent ; évaluer l'altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles mentales ou psychiques en en chiffrant le taux. Dire si des douleurs permanentes (c'est-à-dire chroniques) existent et comment elles ont été prises en compte dans le taux retenu. Au cas où elles ne l'auraient pas été compte tenu du barème médico-légal utilisé, majorer ledit taux en considération de l'impact de ces douleurs sur les fonctions physiologiques, sensorielles, mentales et psychiques de la victime. Décrire les conséquences de ces altérations permanentes et de ces douleurs sur la qualité de vie de la victime. Dans l'hypothèse d'un état antérieur préciser en quoi l'accident a eu une incidence sur cet état antérieur et décrire les conséquences.

10. Assistance par tierce personne : Indiquer le cas échéant si l'assistance ou la présence constante ou occasionnelle d'une aide humaine (étrangère ou non à la famille) a été et/ou est nécessaire pour accomplir les actes de la vie quotidienne ; décrire précisément les besoins en tierce personne; préciser la nature de l'aide à prodiguer et sa durée quotidienne.

11. Dépenses de santé futures : Décrire les soins futurs et les aides techniques compensatoires au handicap de la victime (prothèses, appareillages spécifiques, véhicule) en précisant la fréquence de leur renouvellement.

12. Frais de logement et/ou de véhicule adapté : Donner son avis sur d'éventuels aménagements nécessaires pour permettre, le cas échéant, à la victime d'adapter son logement et/ ou son véhicule à son handicap.

13. Pertes de gains professionnels futurs : Indiquer si le fait générateur ou le déficit fonctionnel permanent entraîne l'obligation pour la victime de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle, d'adapter celle-ci ou de changer d'activité professionnelle.

14. Incidence professionnelle : Indiquer si le fait générateur ou le déficit fonctionnel permanent entraîne d'autres répercussions sur son activité professionnelle actuelle ou future (obligation de formation pour un reclassement professionnel, pénibilité accrue dans son activité, « dévalorisation » sur le marché du travail, etc.). Dire notamment si les douleurs permanentes (c'est-à-dire chroniques) sont susceptibles de générer des arrêts de travail réguliers et répétés.

15. Souffrances endurées : Décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales découlant de blessures subies pendant la maladie traumatique (avant consolidation) ; les évaluer distinctement dans une échelle de 1 à 7.

16. Préjudice esthétique temporaire et/ou définitif : Décrire et donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique, en distinguant éventuellement le préjudice temporaire et définitif. Evaluer distinctement les préjudices temporaire et définitif de 1 à 7.

17. Préjudice sexuel : Indiquer s'il a existé ou s'il existera un préjudice sexuel (atteinte organique ou fonctionnelle, perte ou diminution de la libido, perte du plaisir, perte de fertilité ou autres troubles ... ).

18. Préjudice d'établissement : Dire si la victime subit une perte d'espoir ou de chance de normalement réaliser un projet de vie familial.

19. Préjudice d'agrément : Indiquer si la victime est empêchée en tout ou partie de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisir.

20. Préjudices permanents exceptionnels : Dire si la victime subit des préjudices permanents exceptionnels correspondant à des préjudices atypiques directement liés aux handicaps permanents.

21. Dire si l'état de la victime est susceptible de modifications en aggravation.

22. Etablir un état récapitulatif de l'ensemble des postes énumérés dans la mission.

23. Dire que l'expert devra s'adjoindre tout spécialiste de son choix, notamment sapiteur Psychiatre.

24. Dire que l'expert devra communiquer un pré rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits.

- dire qu'il appartiendra à M. [J] de saisir le Tribunal Judiciaire au fond pour liquider son préjudice corporel, suivant le dépôt du rapport.

- déclarer la décision à intervenir opposable à la CPAM et à la CAISSE NATIONALE MILITAIRE DE SECURITE SOCIALE DE TOULON.

- condamner la société THELEM assurance à verser à M. [M] la somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel, les frais de signification de l'arrêt à intervenir, ainsi que les frais d'exécution.

Par conclusions déposées le 15 avril 2022, la compagnie Thelem Assurances demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire,

- ordonner une mesure d'expertise médicale et désigner à cet effet tel expert qu'il plaira avec la mission suivante :

A. PRÉPARATION DE L'EXPERTISE ET EXAMEN

Point 1 ' Contact avec la victime

Dans le respect des textes en vigueur, dans un délai minimum de 15 jours, informer par courrier M. [J] [F], victime d'un accident survenu le 15 août 2013 de la date de l'examen médical auquel il devra se présenter.

Point 2 ' Dossier médical

Se faire communiquer par la victime ou son représentant légal tous documents médicaux relatifs à l'accident, en particulier le certificat médical initial, le(s) compte(s) rendu(s) d'hospitalisation, le dossier d'imagerie'

Point 3 ' Situation personnelle et professionnelle

Prendre connaissance de l'identité de la victime ; fournir le maximum de renseignements sur son mode de vie, ses conditions d'activités professionnelles, son statut exact ; préciser, s'il s'agit d'un enfant, d'un étudiant ou d'un élève en formation professionnelle, son niveau scolaire, la nature de ses diplômes ou de sa formation ; s'il s'agit d'un demandeur d'emploi, préciser son statut et/ou sa formation.

Point 4 ' Rappel des faits

A partir des déclarations de la victime (et de son entourage si nécessaire) et des documents médicaux fournis :

4.1. Relater les circonstances de l'accident.

4.2. Décrire en détail les lésions initiales, les suites immédiates et leur évolution.

4.3. Décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l'autonomie et, lorsqu'elle a eu recours à une aide temporaire (matérielle ou humaine), imputable à l'accident à l'origine de l'expertise, en préciser la nature, la fréquence et la durée.

Point 5 ' Soins avant consolidation correspondant aux Dépenses de Santé Actuelles (DSA)

Décrire tous les soins médicaux et paramédicaux mis en oeuvre jusqu'à la consolidation, en précisant leur imputabilité, leur nature, leur durée et en indiquant les dates exactes d'hospitalisation avec, pour chaque période, la nature et le nom de l'établissement, le ou les services concernés.

Point 6 ' Lésions initiales et évolution

Dans le chapitre des commémoratifs et/ou celui des documents présentés, retranscrire dans son intégralité le certificat médical initial, en préciser la date et l'origine et reproduire totalement ou partiellement les différents documents médicaux permettant de connaître les lésions initiales et les principales étapes de leur évolution.

Point 7 ' Examens complémentaires 18

Prendre connaissance des examens complémentaires produits et les interpréter.

Point 8 ' Doléances

Recueillir et retranscrire dans leur entier les doléances exprimées par la victime (et par son entourage si nécessaire) en lui faisant préciser notamment les conditions, date d'apparition et importance des douleurs et de la gêne fonctionnelle, ainsi que leurs conséquences sur sa vie quotidienne, familiale, sociale...

Point 9 ' Antécédents et état antérieur

Dans le respect du code de déontologie médicale, interroger la victime sur ses antécédents médicaux, ne les rapporter et ne les discuter que s'ils constituent un état antérieur susceptible d'avoir une incidence sur les lésions, leur évolution et les séquelles présentées.

Point 10 ' Examen clinique

Procéder à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime. Retranscrire ces constatations dans le rapport.

B. ANALYSE ET ÉVALUATION

Point 11 ' Discussion

11.1. Analyser dans une discussion précise et synthétique l'imputabilité à l'accident des lésions initiales, de leur évolution et des séquelles en prenant en compte, notamment, les doléances de la victime et les données de l'examen clinique ; se prononcer sur le caractère direct et certain de cette imputabilité et indiquer l'incidence éventuelle d'un état antérieur.

11.2. Répondre ensuite aux points suivants.

Point 12 ' Les gênes temporaires constitutives d'un Déficit Fonctionnel Temporaire (DFT)

Que la victime exerce ou non une activité professionnelle :

- Prendre en considération toutes les gênes temporaires subies par la victime dans la réalisation de ses activités habituelles à la suite de l'accident ; en préciser la nature et la durée (notamment hospitalisation, astreinte aux soins, difficultés dans la réalisation des tâches domestiques, privation temporaire des activités privées ou d'agrément auxquelles se livre habituellement ou spécifiquement la victime, retentissement sur la vie sexuelle).

- En discuter l'imputabilité à l'accident en fonction des lésions et de leur évolution et en préciser le caractère direct et certain.

- En évaluer le caractère total ou partiel en précisant la durée et la classe pour chaque période retenue.

Point 13 ' Arrêt temporaire des activités professionnelles constitutif des Pertes de Gains Professionnels Actuels (PGPA)

En cas d'arrêt temporaire des activités professionnelles, en préciser la durée et les conditions de reprise. En discuter l'imputabilité à l'accident en fonction des lésions et de leur évolution rapportées à l'activité exercée.

Point 14 ' Souffrances endurées

Décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales liées à l'accident s'étendant de la date de celui-ci à la date de consolidation.

Elles sont représentées par « la douleur physique consécutive à la gravité des blessures, à leur évolution, à la nature, la durée et le nombre d'hospitalisations, à l'intensité et au caractère astreignant des soins auxquels s'ajoutent les souffrances psychiques et morales représentées par les troubles et phénomènes émotionnels découlant de la situation engendrée par l'accident et que le médecin sait être habituellement liées à la nature des lésions et à leur évolution ». Elles s'évaluent selon l'échelle habituelle de 7 degrés.

Point 14 bis ' Dommage esthétique temporaire constitutif d'un Préjudice Esthétique Temporaire (PET)

Dans certains cas, il peut exister un préjudice esthétique temporaire dissociable des souffrances endurées ou des gênes temporaires. Il correspond à « l'altération de [son] apparence physique, certes temporaire mais aux conséquences personnelles très préjudiciables, liée à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers. »

Il convient alors d'en décrire la nature, la localisation, l'étendue et l'intensité et d'en déterminer la durée.

Point 15 ' Consolidation

Fixer la date de consolidation, qui se définit comme « le moment où les lésions se sont fixées et ont pris un caractère permanent tel qu'un traitement n'est plus nécessaire si ce n'est pour éviter une aggravation, et qu'il devient possible d'apprécier l'existence éventuelle d'une Atteinte permanente à l'Intégrité Physique et Psychique ».

Point 16 ' Atteinte permanente à l'Intégrité Physique et Psychique (AIPP) constitutive du Déficit Fonctionnel Permanent (DFP)

Décrire les séquelles imputables, fixer par référence à la dernière édition du « Barème indicatif d'évaluation des taux d'incapacité en droit commun », publié par le Concours Médical, le taux éventuel résultant d'une ou plusieurs Atteinte(s) permanente(s) à l'Intégrité Physique et Psychique (AIPP) persistant au moment de la consolidation, constitutif d'un déficit fonctionnel permanent. L'AIPP se définit comme « la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant d'une atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable donc appréciable par un examen clinique approprié, complété par l'étude des examens complémentaires produits; à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liés à l'atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours ».

Point 17 ' Dommage esthétique constitutif du Préjudice Esthétique Permanent (PEP)

Donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du dommage esthétique imputable à l'accident. L'évaluer selon l'échelle habituelle de 7 degrés, indépendamment de l'éventuelle atteinte physiologique déjà prise en compte au titre de l'Atteinte permanente à l'Intégrité Physique et Psychique.

Point 18-1 ' Répercussions des séquelles sur les activités professionnelles constitutives des Pertes de Gains Professionnels Futurs (PGPF), de l'Incidence Professionnelle (IP), d'un Préjudice Scolaire Universitaire et de Formation (PSUF)

En cas de répercussion dans l'exercice des activités professionnelles de la victime ou d'une modification de la formation prévue ou de son abandon (s'il s'agit d'un écolier, d'un étudiant ou d'un élève en cours de formation professionnelle), émettre un avis motivé en discutant son imputabilité à l'accident, aux lésions et aux séquelles retenues.

Se prononcer sur son caractère direct et certain et son aspect définitif.

Point 18-2 ' Répercussions des séquelles sur les activités d'agrément constitutives d'un

Préjudice d'Agrément (PA)

En cas de répercussion dans l'exercice des activités spécifiques sportives ou de loisirs de la victime effectivement pratiquées antérieurement à l'accident, émettre un avis motivé en discutant son imputabilité à l'accident, aux lésions et aux séquelles retenues.

Se prononcer sur l'impossibilité de pratiquer l'activité, sur son caractère direct et certain et son aspect définitif.

Point 18-3 ' Répercussions des séquelles sur les activités sexuelles constitutives d'un Préjudice Sexuel (PS)

En cas de répercussion dans la vie sexuelle de la victime, émettre un avis motivé en discutant son imputabilité à l'accident, aux lésions et aux séquelles retenues.

Se prononcer sur son caractère direct et certain et son aspect définitif.

Point 19 ' Soins médicaux après consolidation / frais futurs correspondant aux

Dépenses de Santé Futures (DSF)

Se prononcer sur la nécessité de soins médicaux, paramédicaux, d'appareillage ou de prothèse, nécessaires après consolidation pour éviter une aggravation de l'état séquellaire ; justifier l'imputabilité des soins à l'accident en cause en précisant s'il s'agit de frais occasionnels c'est-à-dire limités dans le temps ou de frais viagers, c'est-à-dire engagés la vie durant.

Point 20 ' Conclusions

Conclure en rappelant la date de l'accident, la date et le lieu de l'examen, la date de Consolidation et l'évaluation médico-légale retenue pour les points 12 à 19.

Point 21 ' pré-rapport

Dire que l'expert devra communiquer un pré-rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrit,

- rejeter la demande tendant à voir préciser dans la mission de l'expert, qu'il convient de retenir l'imputabilité de la décompensation d'un état pathologique de discopathies dégénératives protrusives lombaires et de réaliser l'évaluation médico-légale avec leurs effets néfastes,

- donner acte à la concluante de ce qu'elle ne s'oppose pas à la désignation du Docteur [T] en qualité d'expert judiciaire,

- surseoir à statuer sur les autres demandes dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 17 mai 2022.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 3 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le jugement n'étant pas critiqué en ce qu'il a constaté que le droit à indemnisation de M. [E] [M], suite à l'accident de la circulation dont il a été victime le 12 août 2013, n'est pas contesté par la société Thelem Assurances, il convient d'examiner la seule question de l'imputabilité des séquelles à l'accident et de la demande d'expertise qui en découle.

M. [M] fait valoir que, contrairement aux conclusions du Dr [T], les séquelles dont il souffre sont imputables à l'accident de la circulation du 12 août 2013, rien ne permettant de prouver l'existence d'un état antérieur connu. L'appelant indique n'avoir jamais présenté de syndrome de discopathie lombaire dégénérative avant l'accident, l'apparition de celui-ci étant une décompensation d'un état antérieur latent, qui ne peut être de nature à réduire ou exclure son droit à indemnisation. M. [M] demande que soit retenue l'imputabilité de sa pathologie à l'accident du 12 août 2013 et sollicite une expertise judiciaire afin d'évaluer l'ensemble de ses préjudices.

La compagnie Thelem Assurances fait valoir en réponse qu'il est établi que M. [M] souffrait d'une discopathie dégénérative avant l'accident, qu'aucun élément médical ne permet de remettre en cause l'expertise du Dr [T] et que les deux rapports d'expertise concordants concluent à l'absence d'imputabilité de la décompensation à l'accident. L'assureur estime dès lors que la seule proximité temporelle entre l'accident du 12 août 2013 et la révélation de la pathologie dégénérative ne peut suffire à établir un lien de causalité entre les deux. À titre subsidiaire, si une expertise judiciaire devait être ordonnée, Thelem Assurances fait valoir qu'il appartient à l'expert d'apprécier l'imputabilité des manifestations neurologiques et qu'il ne peut lui être ordonné de la retenir d'office.

Il résulte des pièces versées à la procédure que le certificat médial initial du 13 août 2013, établi à la suite de l'accident de la circulation dont M. [M] a été victime le 12 août 2013, mentionne des contusions cervicales, dorsales et lombaires, une douleur au coude droit et des contractures musculaires, ayant entraîné une incapacité temporaire total de travail de 1 jour et un arrêt de travail de 2 jours. Dans son courrier adressé au médecin traitant de M. [M], le Dr [G], interne l'ayant examiné aux urgences, indique qu'au terme de la prise en charge, le diagnostic retenu est 'contusions dorsales et lombaires', précisant que la radiographie du rachis dorsal, cervical et lombaire, n'a rien révélé.

Par la suite, la GMF, assureur de M. [M], a mandaté le Dr [A] pour l'examiner, lequel a conclu dans son rapport du 8 mars 2014, que les documents qui lui ont été présentés lui permettent de dire que 'l'accident de la voie publique' du 12 août 2013 et 'la chute dans l'escalier' du 15 août 2013 constituent deux événement successifs et que, sur le plan médico-légal, l'état actuel du patient n'est pas la conséquence directe, certaine et exclusive de l'accident du 12 août 2013.

Il ressort par ailleurs du rapport d'expertise contradictoire confiée au Dr [T] dans le cadre du compromis d'arbitrage entre la victime et son assureur, déposé le 9 janvier 2017, les éléments suivants :

- à la suite de l'accident de la circulation du 12 août 2013, le Dr [D], radiologue, a indiqué sur le compte-rendu de son bilan radiographique : 'AVP voiture. Résultats : [Z] cervical : sur le plan statique, absence d'anomalie. Sur le plan morphologique, respect de la hauteur des corps vertébraux. Absence d'anomalie des parties molles pré-vertébrales. [Z] dorsal : respect de la hauteur des corps vertébraux. [Z] lombo-sacré : absence de lésion osseuse traumatique vertébrale visible'.

- au terme de la prise en charge de M. [M] à l'hôpital consécutivement à la chute survenue le 15 août 2013 à son domicile, le diagnostic retenu après scanner du rachis lombaire était : 'hernie discale L4/L5 avec protrusion postérieure médiane'.

- les IRM effectués les 27 août 2013 et 6 janvier 2014 confirmaient l'existence de 'discopathies dégénératives protrusives aux étages L3/L4 - L4/L5 et L5/S1, sans véritable hernie discale ou conflit disco-radiculaire'.

- malgré la kinésithérapie, la rhumatologie et les infiltrations, les douleurs lombaires ont persisté et M. [M] a subi, à sa demande, une intervention chirurgicale de recalibrage lombaire L4/L5, réalisée le 5 janvier 2016 et à la suite de laquelle il continue de ressentir des douleurs.

Lors de la réunion d'expertise du 26 avril 2016, l'expert arbitre a sollicité le Dr [V], radiologue, afin de procéder à une relecture de l'IRM lombaire du 27 août 2013 et ce dernier a confirmé que cet examen ne mettait pas en évidence de hernie discale de type post-traumatique, qu'il n'existait pas de manifestation d'oedème, éliminant ainsi un processus d'origine traumatique récent, qu'il n'y avait aucun déplacement d'allure post-traumatique intervertébral, mais que les données de cet examen correspondent à une pathologie d'origine dégénérative.

Ainsi, après avoir indiqué que 'l'ensemble des spécialistes consultés ayant été dans l'incapacité d'expliquer clairement l'origine des manifestations douloureuses alléguées par M. [M], et retenant essentiellement une évolution d'une pathologie dégénérative en L4-L5', l'expert a conclu que :

- 'Les manifestations correspondant au dérobement des deux membres survenues le 15 août 2013, soit 3 jours après les faits traumatiques du 12 août 2013, ne peuvent être réputées comme directement en lien avec le traumatisme initial du 12 août 2013 et ce du fait que dans les constatations initiales du 13 août 2013, il n'est signalé aucune manifestation clinique, aucun trouble neurologique radiculaire, ni sphinctérien, et que d'autre part les examens radiographiques, puis scannographiques ne retrouvaient aucune lésion discale neurologique post traumatique et aucun déplacement de la charnière lombo-sacrée et qu'enfin l'examen d'IRM réalisé 12 jours après les faits traumatiques ne retrouve aucune anomalie d'allure post-traumatique récente, mais au contraire explique les troubles par l'évolution de discopathies lombaires étagées protusives pré-existantes et prédominantes en L4-L5'.

- Les lésions imputables aux conséquences de l'accident du 12 août 2013 consistent uniquement en des contusions et des contractures musculaires.

- L'état antérieur pathologique intervenant est le suivant :

- discopathies lombaires dégénératives protusives aux étages L3-L4, L4-L5 et L5-S1 déclarées comme étant asymptomatiques antérieurement à l'accident du 12 août 2013 ;

- antécédent de traumatisme cervical en 2011.

- 'Ne peuvent être réputées en lien direct certain et exclusif : les manifestations neurologiques apparues 3 jours après l'accident le 15 août 2013 avec :

- dérobement des deux membres inférieurs ayant provoqué une chute au sol en marchant,

- manifestations neurologiques avec incontinence urinaire et anale,

- manifestations de sciatiques avec hypo-esthésie sur les territoires neurologiques des deux membres inférieurs, et ce en l'absence de pathologie post-traumatique à type de hernie discale ou de trouble compressif retrouvés sur le scanner réalisé le 15 août 2013, ni sur l'IRM réalisée le 27 août 2013, ces deux examens confirmant un état dégénératif étagé au niveau lombaire.'

Le Dr [T] indique enfin que les séquelles fonctionnelles persistantes et imputables sont les suivantes :

- discrètes cervicalgies avec très légère limitation de la mobilité du rachis cervical lors des rotations, surtout vers la droite ;

- participation aux manifestations lombalgiques dans le cadre de la dolorisation de l'état antérieur pathologique intervenant.

Le rapport d'examen médico-légal du 7 avril 2012 établi suite à un accident survenu en 2011, sur lequel M. [M] se fonde pour soutenir qu'il ne présentait aucune pathologie à cette date, ne permet pas de tirer de conséquence quant aux faits litigieux, le médecin expert s'étant uniquement concentré en 2012 sur la région du rachis cervical, alors qu'en l'espèce, M. [M] invoque des douleurs lombaires.

M. [M] produit également en pièce n°4 un courrier du Dr [B], médecin au CHU de Bordeaux, daté du 2 mai 2017 à l'attention du 'médecin conseil assurance auto', indiquant que la lombalgie aigue dont il est victime ne peut être attribuée qu'aux suites de l'accident de la voie publique, toute autre cause n'ayant pu être retenue. Cependant, le cadre dans lequel ce médecin intervient n'est pas précisé et le courrier ne s'appuie sur aucun élément médical pour attribuer les douleurs résiduelles à l'accident du 12 août 2013.

Ainsi, en présence d'une pathologie lombaire dégénérative confirmée par les scanners et IRM des 15 et 27 août 2013, les lésions lombaires seraient nécessairement apparues indépendamment de tout accident, de sorte que cette pathologie dégénérative doit être assimilée à un état antérieur patent, peu important qu'elle n'ait été connue que postérieurement à l'accident de la circulation litigieux.

En outre, la proximité temporelle entre la chute survenue au domicile le 15 août 2013 et l'accident du 12 août 2013 ne peut suffire à établir l'imputabilité des séquelles à l'accident, étant au surplus précisé que les circonstances du second événement, à savoir la chute au domicile, ne reposent que sur les dires de la victime et les attestations de ses proches, tandis que le Dr [A], expert de l'assureur de M. [M], évoque dans son rapport 'une chute dans l'escalier'.

Enfin, la prise en compte par le Dr [T] au titre du déficit fonctionnel permanent (DFP) d'une 'participation à l'état douloureux dorso-lombaire dans le cadre de la dolorisation des discopathies dégénératives protrusives lombaires pré-existantes', constitue seulement une prise en compte de l'état antérieur pour le calcul du DFP et n'est pas, contrairement à ce qui est soutenu par l'appelant, de nature à modifier l'absence d'imputabilité des lésions à l'accident.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'aucune pièce ni aucun élément médical ne contredit utilement l'expertise particulièrement circonstanciée du Dr [T], seule analyse contradictoire versée à la procédure et qui permet d'établir l'absence de lien de causalité entre l'accident du 12 août 2013 et la pathologie lombaire dégénérative dont souffre M. [M], laquelle a suivi son propre cours.

En conséquence, l'imputabilité des séquelles invoquées à l'accident de la circulation en cause n'étant pas démontrée, l'expertise sollicitée ne se justifie pas et le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Il reviendra ainsi à l'appelant de saisir la juridiction compétente aux fins de liquidation de son préjudice corporel en l'état des éléments médicaux existants.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme le jugement du 11 juillet 2019 en toutes ses dispositions ;

- Condamne M. [E] [M] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/04145
Date de la décision : 21/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-21;19.04145 ?
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