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16/06/2022 | FRANCE | N°19/02877

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 16 juin 2022, 19/02877


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 16 JUIN 2022





F N° RG 19/02877 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LBEN







Monsieur [G] [W]

Madame [U] [O] épouse [W]





c/



Monsieur [J] [E]

Madame [L] [D] [I] épouse [E]



























Nature de la décision : AU FOND























Grosse délivrée le :



aux avocats





Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 février 2019 (R.G. 15/03276) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 22 mai 2019



APPELANTS :



[G] [W]

né le 31 Mars 1950 à [Localité 7] ([Localité 7])

de ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 16 JUIN 2022

F N° RG 19/02877 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LBEN

Monsieur [G] [W]

Madame [U] [O] épouse [W]

c/

Monsieur [J] [E]

Madame [L] [D] [I] épouse [E]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 février 2019 (R.G. 15/03276) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 22 mai 2019

APPELANTS :

[G] [W]

né le 31 Mars 1950 à [Localité 7] ([Localité 7])

de nationalité Française

Retraité, demeurant [Adresse 1] - [Localité 4]

[U] [O] épouse [W]

née le 01 Avril 1952 à [Localité 8] ([Localité 8])

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1] - [Localité 4]

Représentés par Me Raphaël MONROUX de la SCP HARFANG AVOCATS, avocat au barreau de LIBOURNE

INTIMÉS :

[J] [E]

né le 20 Avril 1960 à [Localité 6] ([Localité 6])

de nationalité Française

Frigoriste, demeurant [Adresse 1] - [Localité 4]

[L] [D] [I] épouse [E]

née le 17 Mars 1960 à [Localité 6] ([Localité 6])

de nationalité Française

Aide-soignante, demeurant [Adresse 1] - [Localité 4]

Représentés par Me Daniel DEL RISCO, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 mai 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :

M. [Z] [W] et Mme [U] [O] épouse [W] sont propriétaires d'un immeuble situé au numéro [Adresse 1] dans la commune de [Localité 4], situé implanté sur une parcelle cadastrée DC n°[Cadastre 2] constituant l'ancien lot n°154 d'un lotissement 'Les pièces de [Localité 5]'.

Leur propriété est contigue de celle cadastrée DC n°[Cadastre 3] constituant le lot n°153 appartenant à M. [J] [E] et Mme [L] [D] [I] épouse [E].

Considérant que M. et Mme [E] ont manqué à leurs obligations contractuelles découlant du cahier des charges, M. et Mme [W] ont, après l'échec d'une tentative de conciliation, assigné leurs voisins le 18 mars 2015 devant le tribunal de grande instance de Bordeaux afin de les enjoindre à en assurer le respect.

Par jugement du 11 février 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- condamné M. et Mme [E] à démolir le retour du mur en parpaings qu'ils ont construit en limite séparative des parcelles cadastrées DC n°[Cadastre 2] et DC n°[Cadastre 3] situées à Cestas dans le délai de trois mois de la signification du présent jugement et passé ce délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant deux mois ;

- débouté M. et Mme [W] de toutes leurs autres demandes ;

- débouté M. et Mme [E] de leurs demandes reconventionnelles ;

- condamné M. et Mme [W] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

M. et Mme [W] ont relevé appel de cette décision le 22 mai 2019.

Dans leurs dernières conclusions en date du 15 avril 2022, M. et Mme [W] demandent à la cour, au visa des articles 15, 800, 802 du code de procédure civile, L442-9 du code de l'urbanisme, 1134 et 1143 du code civil :

- de les recevoir en leur appel et les y déclarer bien fondés ;

- de confirmer le jugement du 11 février 2019 en ce qu'il a condamné les époux [E] à démolir le retour du mur en parpaings qu'ils ont construit en limite séparative des parcelles cadastrées DC[Cadastre 2] et DC[Cadastre 3], sous astreinte ;

- d'infirmer la décision entrepris pour le surplus et, statuant à nouveau :

- de constater les manquements contractuels au cahier des charges ;

- de condamner M. et Mme [E] à :

replanter 29 essences de feuillus, au nombre des souches comptabilisées par l'huissier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir ;

remettre en état initial la clôture et les fils tenseurs haut et bas en limite séparative des fonds cadastrés DC[Cadastre 2] et DC[Cadastre 3], sous astreinte de 200 euros par jour de retard courant à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir ;

démolir l'aire de stationnement/chemin de circulation aménagé en façade de la parcelle cadastrée DC8 et à engazonner ou paysager l'intégralité du terrain en façade de la propriété, sauf à laisser une allée d'accès de 3 mètres de large, sous astreinte de 200 euros par jour de retard courant à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision à intervenir ;

déblayer les gravois et terre et à supprimer le muret édifié sur la parcelle cadastrée DC8 afin de supprimer toute servitude de ruissellement d'eau pluviale et de servitude de vue illicite, sous astreinte de 200 euros courant à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision à intervenir;

supprimer l'intégralité des panneaux PVC de couleur blanc érigé sur leur parcelle.

- condamner solidairement M. et Mme [E] à leur payer à titre de dommages et intérêts une somme de 3 000 euros pour l'ensembles des préjudices subis ;

- les condamner solidairement à payer une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner aux entiers dépens en ce compris les frais des quatre constats d'huissier et d'exécution éventuels, sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile.

Ils font notamment valoir que :

- le cahier des charges s'impose à tous les colotis, sans limitation de durée ; il est imprescriptible ; aux termes de l'article L442-9 du code de l'urbanisme, il est de nature contractuel ;

- l'article 18 du cahier des charges contractualise les dispositions du règlement de lotissement, leur conférant une valeur détachable du règlement de lotissement ; ces dispositions étaient caduques pour le règlement du lotissement mais pas dans le cahier des charges ; les photos prises pas l'huissier démontrent que la taille des souches ne concerne manifestement par celle d'un arbuste mais bien d'un arbre adulte et donc de haute tige ; il existe donc une infraction aux dispositions du cahier des charges en raison du défaut de remplacement des essences abattues ;

- les travaux réalisés lors de la construction du mur en parpaings et de la piscine sont à l'origine de nombreuses dégradations sur le grillage séparatif constatés par constats d'huissier ; il n'est pas établi que des 'réparations' ont été effectuées par les époux [E] ; les constats d'huissier démontrent l'état du grillage et l'origine des détériorations qui ne peuvent être qu'imputées aux intimés ;

- l'article 18 du cahier des charges prévoit que 'l'espace libre entre la clôture sur rue et le bâtiment principal doit être aménagé en jardin d'agrément ou en espace vert' ; par constat d'huissier il est constaté une 'absence de jardin d'ornement devant la maison' et 'l'absence d'essence végétale de type arbre ou arbuste' ; les époux n'ont donc pas respecté les dispositions de l'article 18 du cahier des charges ;

- l'épandage des terres formant rehaussement ne semble pas visé au cahier des charges mais cette situation est de nature à créer un trouble de voisinage anormal ; la création du muret en parpaings par les époux [E] ne permet pas de remédier au trouble ; le rehaussement de terre du fonds voisin créé une servitude illicite de vue au préjudice du fonds des époux [W] constatée par constat d'huissier ; le muret en limite séparative fait office de clôture dès lors illicite eu égard aux dispositions de l'article 18 du cahier des charges ; l'ensemble justifie que le muret soit démoli et le remblai de terre supprimé;

- les panneaux érigés sur l'ensemble de la propriété des époux [E] sont manifestement en rupture avec l'harmonie du lotissement ; certains panneaux tombés au sol démontrent l'absence d'harmonie telle qu'imposée ; une colonne de 10 parpaings cassés s'élevant à 2,10 mètres au-dessus du mur non démoli vient également dénaturer le paysage et troubler l'harmonie ; cette rupture doit s'appréhender au regard de l'ensemble des clauses du cahier des charges ;

- les infractions considérées leur causent un préjudice certain.

Suivant leurs dernières conclusions du 16 avril 2022, M. et Mme [E] demandent à la cour de : 

- confirmer le jugement déféré ;

- constater qu'ils ont démoli le retour du mur en parpaings qu'ils ont construit en limite séparative des parcelles cadastrées DC[Cadastre 2] et DC[Cadastre 3] à [Localité 4] ;

- constater que l'ensemble des points qui sont reprochés par les consorts [W] aux consorts [E] ne sont nullement justifiés, ou à tout le moins, résolus ;

- débouter purement et simplement M. et Mme [W] de l'intégralité de leurs demandes, non justifiées en droit et en fait ;

- condamner M. et Mme [W] à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais de signification et de constat effectué par Me Dupart huissier de justice, le 3 février 2016, dont distraction au profit de Me Del Risco, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Ils font notamment valoir que :

- concernant le défaut de remplacement des arbres coupés, aucune photographie prise avant les coupes critiquées n'est versée aux débats permettant de savoir si les arbres supprimés étaient des arbres de haute tige ; ils ont supprimé leur haie de cyprès à la demande de leurs voisins et les souches visées par l'huissier des consorts [W] peuvent être les leurs compte tenu de leur situation ; les cyprès ne peuvent être qualifiés d'arbres de haute tige ;

- ils ont effectué une réparation sur le grillage qui sépare leur terrain des consorts [W] pendant les vacances de février 2014 ; le grillage a été endommagé mais non pas de leur fait mais du fait des demandeurs lesquels ne font pas le nécessaire pour que leurs arbres soient entretenus ;

- par constat d'huissier il est indiqué 'A l'avant de la propriété à côté de l'aire de stationnement les requérants bénéficient d'un jardin d'ornement' ;

- le muret litigieux était destiné à supprimer les éventuels glissements de terres et ruissellement des eaux pluviales vers la propriété des époux [W] ; cette situation ne peut générer de trouble de voisinage qu'elle est au contraire destinée à les éviter ;

- les diverses clôtures construites par les colotis à savoir des murs en parpaings enduits, des clôtures vertes en PVC, des plaques en béton de couleur blanche ne créent aucune rupture d'harmonie ou d'unité du lotissement, le cahier des charges ne prévoyant pas de couleur spécifique ;

- ils ont respecté les conditions imposées dans la décision rendue par le tribunal de grande instance de Bordeaux et ont démoli le mur de parpaings ; l'astreinte n'a donc pas lieu d'être.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 avril 2022.

Dans de nouvelles conclusions signifiées par voie électronique le 21 avril 2022, M. et Mme [W] sollicitent le report de l'ordonnance de clôture, sa fixation au jour des plaidoiries et maintiennent leurs prétentions antérieures.

A l'audience, et avant les débats au fond, les parties se sont accordées sur le report de l'ordonnance de clôture et la fixation de sa date au jour des plaidoiries.

MOTIVATION

Sur les demandes de M. et Mme [W]

L'appel ne porte pas sur la question de la démolition sous astreinte du mur en parpaings édifié par M. et Mme [E] en limite séparative des parcelles cadastrées DC7 et DC8. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur ce point.

Il en est de même pour ce qui concerne l'application des règles contractuelles du cahier des charges entre colotis nonobstant la substitution des règles du plan local d'urbanisme à celles du règlement du lotissement désormais caduc. En effet, l'analyse du tribunal, reposant sur le fait que le cahier des charges d'un lotissement constitue, sans considération de sa date et de son contenu, un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues (3ème Civ, 14 septembre 2017 n°16-21.329), n'est pas combattue par les appelants. Pour leur part, M. et Mme [E] réclament la confirmation de la décision attaquée ayant estimé que les règles du cahier des charges avaient vocation à s'appliquer.

Les titulaires de l'action, ayant droit au respect des stipulations contractuelles, n'ont pas à établir qu'ils subissent, du fait de la violation de celles-ci, un quelconque préjudice personnel (Civ. 3ème, 21 juin 2000, n° 98-21.129).

Sur le remplacement des arbres

Certes, l'article II Na 13 inséré sous l'article VIII du règlement du lotissement est désormais sans effet en raison de la caducité de ce document.

Cependant, l'article 18 du cahier des charges, toujours applicable entre les colotis, prévoit, sous la mention 'espaces boisés à conserver ou à créer' que 'les acquéreurs et leurs constructeurs devront prendre toutes dispositions visant à protéger le boisement existant en choisissant l'implantation de la maison avec le souci de couper le minimum d'arbres et en attachant un soin particulier à la conservation des espèces feuillues, en prenant toutes dispositions au cours du chantier pour que les arbres subsistants ne souffrent pas et en remplaçant les arbres de haute tige abattus par des espèces feuillues'.

A leur arrivée, M. et Mme [E] ont laissé s'épanouir la haie se trouvant à proximité immédiate de la limite séparative.

M. et Mme [W] ont reproché cette situation à leurs voisins en mandatant un huissier qui a constaté le 27 novembre 2013 que la haie de ceux-ci était d'une hauteur supérieure à celle légalement autorisée et que certaines branches empiétaient la propriété de ses mandants.

Les appelants ont adressé le 29 janvier 2014, par l'intermédiaire de leur conseil, une lettre de mise en demeure à la suite de l'arrachage par M. et Mme [E] de la végétation séparative.

Un nouveaux procès-verbal de constat du 19 mai 2014 a relevé la présence de troncs d'arbres sciés en bordure de clôture.

L'huissier constatait le 26 septembre 2014 l'absence de haie sur la partie de la propriété de M. et Mme [E] en limite séparative générant ainsi une servitude de vue.

Enfin, l'officier ministériel dressait les 10 septembre 2015 et 12 février 2020 de nouveaux constats aux termes desquels 29 souches de troncs d'arbres taillés 'relativement récemment, en raison de la couleur du bois'se trouvent juste derrière la limite séparative sur la parcelle de M. et Mme [E]. Il note également l'absence de toute haie séparative, d'arbres à l'arrière de leur jardin et la seule présence de 5 arbustes sur la partie située entre la façade de l'immeuble et la clôture sur rue.

Si M. et Mme [W] ont initialement reproché à leurs voisins le débordement de la haie de cyprès implantée à proximité immédiate de la limite séparative, il n'est cependant pas établi qu'ils en ont sollicité la suppression comme l'affirme le tribunal.

Les parties s'opposent sur la notion 'd'arbres à hautes tiges'.

Si la taille d'un cyprès peut être effectivement très élevée comme le soutiennent les appelants, il n'est, en l'état des éléments fournis par les parties, pas possible de déterminer avec certitude que cette catégorie d'arbres doit être considérée à haute tige et entre donc dans les stipulations de l'article 18 du cahier des charges.

Dès lors, insuffisamment motivée, la demande présentée par M. et Mme [W] tendant à enjoindre à ses voisins, sous peine d'astreinte, de replanter 29 essences de feuillus sera rejetée. Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

Cependant, le cahier des charges stipule également que 'la nature des clôtures en bordure des voies publiques ou privées est imposée par le règlement du lotissement, s'agissant des clôtures en limite séparative des lots, elles seront exclusivement en nature de haies vives ou en bois simple comme il est prévu dans le règlement'.

Les procès-verbaux de constat des 10 septembre 2015 et 12 février 2020 font très clairement apparaître que la haie arrachée par M. et Mme [E] n'a toujours pas été remplacée par d'autres végétaux.

Il leur sera donc enjoint, sous peine d'astreinte dont les modalités seront définies dans le présent arrêt, de procéder à la réimplantation de végétaux en nature de haies vives ou en bois simple à une distance de 2m de la limite séparative des parcelles DC7 et DC8. Le nombre de 29 essences, avancé par les appelants, ne peut cependant être retenu en l'absence de réelle précisions sur ce point.

Sur le grillage séparatif

Il n'est pas contesté que M. et Mme [E] ont procédé, à la suite du jugement entrepris, à la démolition du mur en parpaings.

M. et Mme [W] estiment que les travaux réalisés par leurs voisins pour la construction de ce mur et de leur piscine ont occasionné de nombreuses dégradations sur le grillage séparatif.

Le constat d'huissier du 27 novembre 2013 dressé par Me Ithurburu, mandaté par M. et Mme [W], mentionne la présence du mur en parpaings et relève que le poteau supportant le grillage situé à l'angle des deux parcelles est penché et 'bouge'. De même, celui rédigé le 19 mai 2014 par le même officier ministériel fait état du caractère légèrement tordu à certains endroits de ce grillage.

Deux attestations produites par M. et Mme [E] font état de travaux réparatoires au mois de février 2014.

Le troisième procès-verbal du 26 septembre 2014 indique que le grillage mitoyen est coupé à deux endroits.

Le dernier constat du 10 septembre 2015 mentionne enfin la torsion d'une pointe de grillage, la coupure des barbelés à certains endroits, voire l'existence d'un trou.

Cependant, si ces pièces démontrent l'existence de nouvelles dégradations de la clôture en barbelés survenue après le mois de février 2014, le lien entre cette situation et les travaux entrepris par M. et Mme [E] n'est pas établi.

En effet, le constat dressé le 9 juin 2015 par Me Dupart, mandaté par les M. et Mme [E], relève le bon état général du grillage et que les branches coupées de certains végétaux situés sur le fonds de M. et Mme [W] s'appuient sur le grillage, le traversant et le déformant. Le nouveau procès-verbal établi le 3 février 2016 par le même officier ministériel constate le bon état général de la clôture en barbelés, notamment en ce qui concerne les fils tenseurs, situation observée après retrait des branches coupées.

Ces éléments, ajoutés à ceux retenus par le premier juge, ne permettent pas de considérer que les travaux entrepris par M. et Mme [E] sont à l'origine de la dégradation du grillage séparatif. Le jugement entrepris ayant rejeté la demande de M. et Mme [W] tendant à obtenir la condamnation sous astreinte de leurs voisins à remettre en état initial la clôture et les fils tenseurs haut et bas en limite séparative des fonds cadastrés DC7 et DC8 sera donc confirmé.

Sur l'aire de stationnement

Invoquant l'application de l'article 18 du cahier des charges selon lequel, au paragraphe 'aspect des lots divis, hors construction', il est stipulé que l'espace libre entre la clôture sur rue et le bâtiment principal doit être aménagé en jardin d'agrément ou en espace vert, M. et Mme [W] sollicitent la condamnation sous astreinte de leurs voisins à procéder à la démolition puis la végétalisation de l'aire de stationnement ainsi qu'aux nombreux déchets se trouvant sur leur propriété.

La question de la présence d'un espace gravillonné et non végétalisé n'a pas été posé en ces termes devant le premier juge mais M. et Mme [E] ne soulèvent pas pour autant son irrecevabilité.

Les constatations relatées dans les procès-verbaux de constat versés aux débats par les appelants se heurtent à celles dressées par Me Dupart, mandaté par les intimés. Ce dernier démontre en effet à côté de la présence de l'aire de stationnement d'un jardin arboré de sorte que la présence de végétaux est avérée, l'article 18 n'interdisant pas pour autant la construction d'un espace autre que revêtu d'herbe ou d'ornements naturels.

Quant à la présence de déchets divers, celle-ci a coïncidé avec la réalisation par M. et Mme [E] des travaux de construction d'un muret séparatif, de la piscine et d'un abri dédié. Les divers objets et autres gravas ont donc été uniquement consécutifs à ces opérations. Leur présence n'est plus constatée postérieurement à la venue de Me Dupart sur la propriété de M. et Mme [E] les 9 février 2016 (cf constat p3) et 25 octobre 2019.

Ces éléments ne peuvent que motiver la confirmation du jugement critiqué ayant rejeté les demandes de M. et Mme [W].

Sur l'exhaussement du terrain

Invoquant l'existence d'un trouble anormal de voisinage caractérisé par l'exhaussement du terrain de M. et Mme [E], initialement à hauteur de 30 à 40cm, M. et Mme [W] estiment que l'affaissement de partie surélevée qui est survenu par la suite a pour conséquence de drainer tout les alluvions et calcaires sur leur fonds et de créer une servitude d'écoulement, tant des eaux que de vue.

Le cahier des charges est muet sur la question de la surélévation d'une parcelle par l'un des colotis.

L'exhaussement du terrain appartenant à M. et Mme [E] est la conséquence des travaux relatifs à la construction de la piscine.

Aucun élément de nature technique ne permet d'établir que le fonds des appelants reçoit plus fortement les eaux pluviales de celui de M. et Mme [E]. De même, aucune stagnation d'eau ou de flaques n'est d'ailleurs relatée dans les différents constats produits par M. et Mme [W]. Au contraire, celui dressé le 3 février 2016 par Me Dupart exclut cette situation.

Les appelants estiment également que le petit muret édifié par leurs voisins, en violation de l'article 18 du cahier des charges, aggrave la pénétration des eaux de pluie sur leurs fonds

Il n'est cependant pas possible de considérer que cet ouvrage, d'une taille extrêmement réduite (20cm), a été construit en violation de ce texte, étant observé qu'il ne peut être écarté, à défaut d'éléments de nature technique contraires, que ce petit muret constitue un barrage utile à l'écoulement des eaux pluviales en direction de la propriété de M. et Mme [W].

Enfin, aucune constatation objective ne permet de démontrer que la surélévation de la propriété de M. et Mme [E] et la présence du petit muret permet à ceux-ci de bénéficier d'une vue sur le fonds de leurs voisins susceptible de constituer un trouble du voisinage.

En conséquence, le jugement ayant rejeté les demandes présentées par M. et Mme [W] sera confirmé.

Sur la présence des panneaux PVC et la rupture d'harmonie

S'appuyant sur le cahier des charges qui prévoit au paragraphe 'aspect des lots divis' l'interdiction de réaliser un aménagement dont le style risquerait de rompre l'harmonie ou l'unité d'ensemble du lotissement', M. et Mme [W] reprochent à leur voisin la réalisation :

- à proximité de la limite séparative, 'un abri de jardin à l'aide de panneaux PVC de couleur blanc et encadrement métallique ;

- dans le prolongement de cet ouvrage, d'un mur composée de panneaux PVC blancs avec encadrement métallique, situé dans le prolongement de la façade de la maison de M. et Mme [E] et parallèlement à la limite séparative ;

- au fond de leur propriété, d'une autre construction de type abri de jardin composée de panneaux PVC blancs avec encadrement métallique mais sans couverture ;

- au niveau de la limite séparative de leur propriété et de celle des époux [T], d'une clôture de panneaux de PVC blancs avec encadrement métallique.

Diverses photographies annexées au constat d'huissier du 6 juin 2017 sont versées aux débats.

Il doit être constaté que ce procès-verbal ne précise pas la hauteur des panneaux en PVC mais les parties s'accordent pour fixer celle-ci à 1,90 m.

En réponse, M. et Mme [E] font valoir que la construction de la piscine et des ouvrages dédiés a été autorisée par l'autorité administrative. Cependant, le cahier des charges, constitué d'un ensemble de règles contractuelles de droit privé, n'est pas pris en compte par l'autorité compétente pour délivrer les permis de construire.

A la lecture des différents constats d'huissier, la vue d'ensemble des propriétés faisant partie de l'ancien lotissement résultant de l'examen des nombreuses photographies versées aux débats, fait apparaître une certaine disparité dans les constructions et les matériaux employés et ce même si la végétalisation semble demeurer une préoccupation constante des colotis.

Au regard de ces éléments, de l'imprécision de la formule employée par le cahier des charges et sans pouvoir désormais se référer au règlement du lotissement désormais caduque, il n'est pas possible de considérer comme avéré le risque évoqué ci-dessus.

Une observation similaire prévaut pour ce qui concerne un morceau de mur en parpaings initialement non détruit au début de l'année 2020 par M. et Mme [E].

Enfin, certains objets entreposés sur la propriété de M. et Mme [E] ne peuvent être considérés comme des déchets, s'agissant notamment de tuiles.

Ces éléments motivent le rejet de la demande présentée par les appelants tendant à obtenir la démolition sous astreinte des installations en PVC et à procéder au déblaiement de divers objets.

En conclusion, l'arrêt ayant débouté M. et Mme [W] de la majeure partie de leurs prétentions, il ne sera en conséquence pas fait droit à leur demande de dommages et intérêts.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'une ou l'autre des parties, tant au stade de la première instance qu'en cause d'appel, le versement d'une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

- Infirme le jugement en date du 11 février 2019 rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu'il a rejeté la demande présentée par Mme [U] [O] épouse [W] et M. [G] [W] tendant à obtenir la condamnation de M. [J] [E] et Mme [L] [D] [I] épouse [E] à procéder à la réimplantation d'essences de feuillus, au nombre des souches comptabilisées par l'huissier, en limite des parcelles DC n°[Cadastre 2] et DC n°[Cadastre 3] ;

Et, statuant à nouveau dans cette limite :

- Condamne M. [J] [E] et Mme [L] [D] [I] épouse [E], sous peine d'astreinte de 50 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt et pendant une durée de six mois, à procéder à la réimplantation de végétaux en nature de haies vives ou en bois simple à une distance de 2m de la limite séparative des parcelles DC7 et DC8 en lieu et place des souches des arbres précédemment arrachés ;

- Confirme la décision déférée pour le surplus ;

Y ajoutant ;

- Rejette les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne in solidum Mme [U] [O] épouse [W] et M. [G] [W] au paiement des dépens d'appel qui pourront être directement recouvrés par maître Del Risco en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Annie BLAZEVIC, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/02877
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;19.02877 ?
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