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09/06/2022 | FRANCE | N°19/03408

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 09 juin 2022, 19/03408


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------







ARRÊT DU : 09 JUIN 2022







N° RG 19/03408 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LCYO









Monsieur [D] [F]

Madame [G] [Z] épouse [F]





c/



SNC [Adresse 5]



























Nature de la décision : AU FOND



























Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 juin 2019 (R.G. 18/07480) par la 7ème chambre civile du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 18 juin 2019



APPELANTS :



[D] [F]

né le 05 Mai 1955 à [Localité 6]

de nationalité Française,

d...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 09 JUIN 2022

N° RG 19/03408 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LCYO

Monsieur [D] [F]

Madame [G] [Z] épouse [F]

c/

SNC [Adresse 5]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 juin 2019 (R.G. 18/07480) par la 7ème chambre civile du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 18 juin 2019

APPELANTS :

[D] [F]

né le 05 Mai 1955 à [Localité 6]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

[G] [Z] épouse [F]

née le 22 Mai 1952 à [Localité 7]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

Représentés par Me MOUSSEAU de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

La SNC [Adresse 5]

S.N.C, immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 809632656 dont le siège social est [Adresse 1] prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Sylvie BOCHE-ANNIC de la SELARL CABINET FORZY - BOCHE-ANNIC - MICHON, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 avril 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Madame Catherine LEQUES, Conseiller,

Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Par un acte en date du 12 octobre 2016, M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] ont acquis en l'état futur d'achèvement un appartement de type T4 au sein du programme immobilier '[Adresse 5]' situé [Adresse 3], au prix de 436 177 euros, auprès de la société en nom collectif [Adresse 5].

Aux termes d'un protocole signé les 26 et 27 juin 2017, la SNC [Adresse 5] s'est engagée à livrer l'appartement au plus tard le 21 juillet 2017 et à justifier du retard existant.

M. et Mme [F] se sont engagés à verser le solde restant dû au titre des travaux supplémentaires et au titre de la climatisation, soit 1a somme totale de 5 622 euros TTC tout en renonçant à se prévaloir de certaines non conformités d'ores et déjà constatées.

Le 28 juillet 2017, M. et Mme [F], convoqués pour la livraison de l'appartement, ont relevé divers désordres qu'ils ont fait constater par voie d'huissier.

La livraison de l'appartement est finalement intervenue le 22 août 2017 avec réserves.

En 1'absence de règlement amiable du litige, M. et Mme [F] ont, par acte d'huissier délivré le 17 août 2018, assigné la SNC [Adresse 5] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins d'indemnisation de leurs préjudices.

Par jugement rendu le 5 juin 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- prononcé le rabat de l'ordonnance de clôture au jour des plaidoiries, avec réouverture des débats,

- condamné la SNC [Adresse 5] à verser à M. et Mme [F] les sommes suivantes :

- 621,88 euros TTC au titre du carrelage douche et WC

- 480,80 euros TTC au titre du pare-douche

- 5 000 euros au titre de la perte de chance de louer leur bien

- 517,92 euros au titre des frais de garde-meubles

- débouté M. et Mme [F] de leurs autres demandes d'indemnisation, ainsi que de leur demande de production de pièces,

- condamné la SNC [Adresse 5] à verser à M. et Mme [F] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépetibles,

- dit que la SNC [Adresse 5] sera condamnée aux dépens,

- dit y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Par déclaration électronique en date du 18 juin 2019, M. et Mme [F] ont relevé appel du jugement en ce qu'il les a déboutés de leurs autres demandes d'indemnisation, ainsi que de leur demande de production de pièces.

M. et Mme [F], dans leurs dernières conclusions d'appelants en date du 29 mars 2022, demandent à la cour, de :

- confirmer le jugement seulement en ce qu'il a condamné SNC [Adresse 5] à leur verser les sommes suivantes :

- 621,88 euros au titre du carrelage douche et WC

- 480,80 euros au titre du pare-douche

- 5 000 euros au titre de la perte de chance de louer leur bien

- 517,92 euros au titre des frais de garde meubles

- 2 000 euros au titre des frais irrépétibles

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné SNC [Adresse 5] aux dépens.

- reformer le jugement en ce qu'il les a déboutés du surplus de leurs demandes.

Statuant à nouveau,

- condamner la SNC [Adresse 5] à leur verser :

- une somme de 2.112 euros TTC au titre de la mise en peinture des plinthes ;

- une somme de 1 939 euros TTC au titre du changement de la porte d'entrée ;

- une somme de 3 971 euros TTC au titre du changement du meuble de la salle de bain ;

- une somme de 187 euros au titre du changement du vitrage rayé ;

- une somme de 208,38 euros au titre du changement de la cuvette des WC.

- une somme de 1 188 euros TTC au titre de la main d''uvre payée pour le changement du pare-douche et du carrelage des toilettes et de la salle de bains.

- d'une somme de 962,50 euros au titre de la remise en état de la porte fenêtre du salon (devis [P]),

- une somme de 3 157 euros au titre de la reprise du carrelage de la cuisine (devis [P]),

- une somme de 275 euros au titre de la reprise de deux fissures apparues sur une cloison et le plafond d'une chambre (devis [P]).

- une somme de 4 000 euros au titre des pénalités de retard.

- une somme de 2 000 euros chacun au titre du préjudice moral subi.

- condamner la SNC [Adresse 5], sous une astreinte de 200 euros par jour de retard dans le délai de 10 jours à compter de la signification du jugement à intervenir, à changer la chaudière pour la remplacer par un chauffe-eau F14 E de Saulnier Duval.

- condamner la SNC [Adresse 5] à leur communiquer sous une astreinte de 200 euros par jour de retard dans le délai de 10 jours à compter de la signification du jugement à intervenir, à leur communiquer :

- le DIUO

- le justificatif de la mise en service et de la garantie de la chaudière de marque Saunier Duval

- condamner SNC [Adresse 5] à leur verser somme de 43 000 euros pour compenser la perte de valeur de leur appartement (10% du prix de vente) compte tenu de l'absence de communication du certificat de performance énergétique BBC Effinergie RT 2012 de leur appartement.

- débouter la SNC [Adresse 5] de son appel incident et plus généralement de toutes ses demandes.

- condamner la SNC [Adresse 5] à leur verser une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner la SNC [Adresse 5] au coût du constat d'huissier du 28 juillet 2017.

- condamner la SNC [Adresse 5] aux entiers dépens.

La SNC [Adresse 5], dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 2 décembre 2019, demande à la cour, de :

- débouter M. et Mme [F] de leur appel et rejeter l'intégralité des demandes formulées à son encontre;

Sur son appel incident :

- réformer le jugement rendu en ce qu'il a condamné à payer à M. et Mme [F] les sommes de :

- 5 000 euros au titre de la perte de chance de louer leur bien de [Localité 4] ;

- 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Statuant à nouveau :

- débouter M. et Mme [F] de leurs demandes d'indemnisation au titre de la perte de chance de louer leur immeuble de [Localité 4] ;

- débouter M. et Mme [F] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. et Mme [F] à lui verser une somme de 2 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 mars 2022.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'appel principal de M. et Mme [F].

Sur la levée des réserves

Le tribunal a considéré, sur le fondement de l'article 1642-1 d code civil, qu'au vu des factures produites et du procès-verbal de livraison du 22 août 2017, les demandes de M. et Mme [F] au titre de la levée des réserves étaient justifiées pour les sommes de 621,88 euros TTC au titre du carrelage douche et WC (Pièce n°13) et de 480,80 euros TTC au titre du pare-douche, les autres demandes ayant été rejetées au motif que les justificatifs n'étaient pas suffisants, seuls des devis étant visés sous la forme d'un récapitulatif et aucune demande chiffrée n'étant formulée concernant le remplacement de la chaudière.

M. et Mme [F] ont relevé appel du chef de décision aux termes duquel leurs demandes d'indemnisation ont été rejetées par le tribunal en faisant valoir que la SNC [Adresse 5] qui n'a pas constitué avocat devant le tribunal de grande instance n'a jamais malgré leurs demandes procédé à la levée des réserves, faisant valoir que les devis produits sont suffisants à rapporter la preuve du coût de travaux, eux-même n'étant pas en mesure d'en assurer la charge financière.

La SNC [Adresse 5], faisant sienne la motivation du tribunal, conclut au rejet des demandes de M. et Mme [F], en ajoutant qu'ils sont eux-mêmes à l'origine de certains retards et non conformités qu'ils dénoncent, n'ayant eu de cesse de modifier les travaux prévus et de demander des travaux supplémentaires à l'origine du retard dans la livraison, que M. et Mme [F] ne produisent aucune pièce complémentaires pour justifier leurs demandes, soutenant qu'elle est à même si M. et Mme [F] la laissent intervenir de faire procéder à l'achèvement des travaux en reprenant les réserves mentionnées dans le procès-verbal du mois d'août 2017 qu'elle reconnaît.

La SNC [Adresse 5] n'ayant pas relevé appel de la condamnation au paiement des somme de 621,88 euros et 480,80 euros TTC, la condamnation prononcée à ce titre est définitive.

M. et Mme [F] sollicitent sur le fondement de l'article 1642-1 du code civil, la levée des réserves et le paiement des sommes suivantes :

- 2212 euros au titre de la mise en peinture des plinthes

- 1939 euros au titre du changement de la porte d'entrée

- 3971 euros au titre du changement du meuble de la salle de bains

- 187 euros au titre du changement du vitrage rayé

- 208,38 euros au titre du changement de la cuvette des WC.

- 1188 euros au titre des frais de main d'oeuvre pour le changement du pare-douche et du carrelage des toilettes et de la salle de bains.

- 962,50 euros au titre de la remise en état de la porte -fenêtre du salon.

En application de l'article 1642-1 du code civil, le vendeur d'un immeuble à construire est tenu des défauts de conformité et vices de construction apparents lors de la réception ou lors de la prise de possession par l'acquéreur.

Il n'est pas contesté que M. et Mme [F] ont agi dans le délai imparti pour ce faire par les articles 1642-1 et 1648 al 2 du code civil.

Le tribunal, sans écarter la réalité des défauts invoqués, a estimé que les devis produits n'étaient pas suffisants pour justifier la demande de M. et Mme [F].

La SNC [Adresse 5] est mal fondée à invoquer le comportement de M. et Mme [F] qui aurait été à l'origine de certaines non-conformités alors que dans un protocole d'accord du 26 juin 217 elle a accepté les modifications déjà réalisées ainsi que de nouvelles dont M. et Mme [F] acceptaient le coût, le protocole précisant que la livraison devait intervenir au mois de juillet 2017.

Il ressort du procès-verbal de livraison établi contradictoirement entre les parties le 22 août 2017 qui seul peut être pris en compte, le document établi entre M. et Mme [F] et leur conseil n'étant pas opposable à la SNC [Adresse 5], que sont relevés les défauts de conformité suivants :

- reprise nécessaire de la peinture dans le séjour/salle à manger au niveau des plinthes et de l'encadrement des prises, les plinthes étant également notées comme à reprendre dans le dégagement et les chambres 2 et 3,

- meuble à régler dans la cuisine,

- absence de carrelage dans les WC et sur certains murs de la salle de bains,

- le meuble de la salle de bain est de 120 centimètres alors que M. [F] voudrait du 140, outre des traces de peintures, des éclats en divers endroits, les encadrements prises étant tâchés et des défauts concernant l'extérieur au titre desquels aucune demande n'est formulée.

M. et Mme [F] ont ensuite par lettres recommandées avec AR adressées à la SNC [Adresse 5] les 25 juillet 2017, 7 septembre 2017 et 11 juillet 2018 signalé les défauts de conformité suivants :

- verre rayé sur la cloison industrielle,

- cuvette WC non conforme à la demande,

- canon de la porte provisoire de l'appartement à changer,

- chaudière gaz non conforme,

- porte d'entrée non conforme,

- calfeutrement des menuiseries extérieures à vérifier,

- fenêtre séjour et porte séjour voilées,

- fissures sur cloison dans la chambre,

outre dans une troisième lettre du 22 septembre 2017 diverses non conformités pour lesquelles aucune demande n'est formée.

Ces défauts de conformité dont la réalité est établie par la comparaison des réserves émises sur le procès-verbal de livraison et la notice descriptive en ce qui concerne la porte palière, le meuble de la salle de bains lequel doit être en 140 centimètres, la présence de carrelage toute hauteur dans les WC, le pare-douche en verre dépoli dans la salle de bains, tandis que concernant les diverses reprises, aucune contestation n'est formulée par la SNC [Adresse 5] pas davantage que pour les autres défauts de conformité qu'elle propose d'ailleurs de reprendre étant rappelé que les défauts de conformité concernant le carrelage des WC et le pare-douche ont été définitivement réparés par le jugement entrepris. La demande de M. et Mme [F] est donc justifiée en son principe sous réserve qu'ils justifient du coût des travaux propres à permettre la levée de ces réserves.

Le tribunal a rejeté les demandes présentées à ce titre par M. et Mme [F] au motif que ceux-ci ne présentaient que des devis. Or, un devis peut valablement justifier du coût de travaux réparatoires, n'étant nullement exigé que les travaux soient effectués préalablement à la demande en paiement et que la facture de paiement soit présentée.

Au vu des pièces produites, sont justifiés par le devis établi par M. [P] lequel n'est pas contesté par la SNC [Adresse 5] la mise en peinture des plinthes (1920 euros), le remplacement de la porte d'entrée (1939 euros), le remplacement de la porte voilée du séjour (1099 euros), le remplacement du meuble de la salle de bains (2500+750). Il sera fait droit à ces demandes, soit à une somme totale de 8208 euros au titre de la levée des réserves.

Aucun devis ni facture ne sont produits concernant les autres postes, notamment aucun justificatif du défaut de conformité de la chaudière dont le remplacement par un chauffe-eau 14E Saunier-Duval est réclamé, la notice descriptive ne comportant aucune précision sur la marque ni sur le type de chaudière et le courriel du 4 mars 2017 allégué par les appelants ne contenant aucun engagement de la SNC [Adresse 5] de poser une chaudière telle que celle réclamée par eux, seules étant produites en sus les factures concernant les postes retenus par le tribunal et dont la cour n'est pas saisie.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il rejeté les demandes à ce titre et la SNC [Adresse 5] sera condamnée au paiement de la somme de 8208 euros au titre de la levée des réserves.

Sur la demande au titre des désordres.

M. et Mme [F] réclament ensuite l'indemnisation de désordres apparus postérieurement à la livraison signalés par un courrier recommandé en date du 11 juillet 2018 lesquels sont les suivants:

- les joints de la cuisine se délitent et le carrelage se décolle,

- deux fissures sont apparues sur une cloison et le plafond d'une chambre.

Ils réclament à ce titre :

-3157 euros au titre de la reprise du carrelage de la cuisine,

- 275 euros au titre de la reprise de fissures apparues sur une cloison et le plafond d'une chambre.

Le tribunal les a déboutés de leurs demandes à ce titre en l'absence d'élément probant, tels qu'une expertise amiable contradictoire ou un constat d'huissier, de nature à attester de l'existence de ces désordres.

M. et Mme [F] estiment que leur demande à ce titre est établie au vu du constat du huissier réalisé le 13 novembre 2019 confirmant l'existence de ces désordres.

La SNC [Adresse 5] conclut au débouté de M. et Mme [F] sans contester expréssément ces désordres.

M. et Mme [F] semblent avoir formé devant le tribunal leurs demandes à ce titre sur un fondement contractuel, aucun fondement juridique n'est invoqué devant la cour à l'appui de ses demandes, ni dans le corps des écritures, ni dans le dispositif. La demande sera examinée sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil ainsi que l'a fait le tribunal, seul ce fondement étant en la cause.

Aux termes du constat huissier du 13 septembre 2019, les joints se dégragrègent dans la cuisine et les carreaux sonnent creux au toucher. Aucune constatation n'est faite concernant les fissures alléguées, toutefois signalées dans le courrier du 11 septembre 2018.

En conséquence la réalité de ces désordres est établie. M. et Mme [F] produisent pour justifier du coût des travaux de reprise le devis de M. [P] d'un montant de 250 euros s'agissant de la reprise des fissures et (1260+400+960+250) 2870 euros s'agissant du carrelage de la cuisine soit une somme totale de 3120 euros au titre des désordres.

Il sera fait droit à ces demandes à hauteur de ces montants, le jugement étant infirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes.

Sur la demande de condamnation à produire des pièces sous astreinte.

Le tribunal a jugé que M. et Mme [F] ne démontraient pas la nécessité de la communication des deux documents réclamés.

M. et Mme [F] sollicitent en appel la condamnation sous astreinte de la SNC [Adresse 5], à produire :

- le DIUO, au motif que ce document, ayant pour objectif de permettre l'exécution en sécurité des interventions ultérieures pour la maintenance, est obligatoire par application des articles L. 4532-16 et R. 4532-97 du code du travail et de l'acte de vente.

- le justificatif de la mise en service et de la garantie de la chaudière de marque Saunier Duval afin d'obtenir, si nécessaire, une garantie par le fournisseur.

La SNC [Adresse 5] n'a pas conclu sur ce point.

- sur la remise du DIUO.

L'article L.4532-16 du code du travail dispose que 'Sauf dans les cas prévus à l'article L. 4532-7, au fur et à mesure du déroulement des phases de conception, d'étude et d'élaboration du projet puis de la réalisation de l'ouvrage, le maître d'ouvrage fait établir et compléter par le coordonnateur un dossier rassemblant toutes les données de nature à faciliter la prévention des risques professionnels lors d'interventions ultérieures.'

L'article R.4532-97 du code du travail prévoit la remise de ce dossier au maître d'ouvrage.

L'acquisition par M. et Mme [F] d'un appartement dans le cadre d'un contrat de vente en l'état futur d'achèvement n'entre pas dans les exceptions prévues par l'article L.4532-7 du code du travail.

L'acte de vente prévoit en page 39 à la clause 'Dépôt de pièces de fin de programme' le dépôt par le vendeur de divers documents dont un exemplaire du dossier d'interventions ultérieures sur l'ouvrage. Or, il résulte d'un courriel de Me [L] [H], notaire ayant reçu l'acte de vente, en date du 13 septembre 2019 que ce document ne lui a pas été remis.

L'obligation de remettre ce document ayant été prévue par l'acte de vente à la charge du vendeur et celui-ci n'y ayant pas déféré, la demande de communication de cette pièce est bien fondée. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande à ce titre et la SNC [Adresse 5] sera enjointe de produire de produire ce document sous astreinte ainsi qu'il sera précisé au dispositif suivant.

- sur le justificatif de la mise en service et de la garantie de la chaudière.

La remise de ces documents à l'acquéreur est nécessaire afin qu'il puisse faire entretenir la chaudière concernée et se prévaloir si nécessaire de la garantie contractuelle due par le vendeur.

Il sera également fait droit à la demande de communication de cette pièce sous astreinte comme il sera précisé au dispositif suivant.

Sur la demande au titre de la perte de valeur de l'appartement.

M. et Mme [F] demandent le paiement d'une somme de 43'000 euros à titre de dommages et intérêts en compensation de la perte de valeur de l'appartement (10 % du prix de vente) compte tenu de l'absence de communication du certificat de performance énergétique BBC Effinergie RT 2012 de leur appartement.

Le tribunal les a déboutés de la demande à ce titre au motif qu'ils ne démontraient pas en quoi l'absence de production de ce certificat entraîne une diminution de 10 % du prix de vente de l'appartement.

En appel, M. et Mme [F] font valoir que le prix de vente de leur appartement tient compte du paramètre lié à la performance énergétique et qu'un appartement conforme au label BBC Effinergie RT 2012 a une valeur supérieure à celle d'un appartement qui n'est pas soumis à cette norme.

La SNC [Adresse 5] a conclu au rejet de cette demande en faisant valoir que M. et Mme [F] ne justifient d'aucun préjudice à ce titre.

La notice descriptive versée aux débats prévoit effectivement que la construction sera conforme aux dispositions de réglementation thermique en vigueur lors de l'obtention du permis de construire laquelle correspond à la performance énergétique BBC Effinergie RT 2012.

Il n'est nullement soutenu par M. et Mme [F] que l'appartement acquis ne répond pas à cette réglementation, alors que seul un défaut de respect de celle-ci pourrait éventuellement entraîner une perte de valeur de leur bien. Ils ne soutiennent par ailleurs nullement que le diagnostic de performance énergétique prévu à l'acte de vente ne leur a pas remis par le vendeur tel que celui-ci s'y est engagé, alors que le label BBC peut figurer sur celui-ci.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande à ce titre.

Sur le retard de livraison.

Le tribunal a rejeté la demande de M. et Mme [F] fondée sur le retard de livraison au motif qu'aucune pièce contractuelle versée aux débats ne fait état du montant des pénalités de retard applicables.

M. et Mme [F] sollicitent une somme de 4000 euros à titre de pénalités de retard en faisant valoir que l'appartement devait être livré initialement le 30 avril 2017 mais ne l'a été que le 22 août 2017 sans que la SNC [Adresse 5] ne justifie ainsi qu'elle s'y était engagée dans le protocole d'accord à justifier des causes du retard, que durant ce délai ils ont été contraints de loger dans leur résidence secondaire située à [Localité 4] alors que cette maison est habituellement louée, se privant ainsi de revenus.

La SNC [Adresse 5] conclut à la confirmation du jugement.

L'acte de vente stipule que la livraison devait intervenir le 30 avril 2017. Il est prévu à la clause intitulée 'délai d'achèvement' que le délai d'achèvement est convenu sous réserve de la survenance d'un cas de force majeure ou d'une cause légitime de suspension de délai, étant notamment considérés comme causes légitimes de report du délai de livraison divers événements tels qu'intempéries, grèves, placements d'une entreprise sous une procédure collective, défaillance d'une entreprise, anomalies du sous-sol'

Selon le protocole d'accord transactionnel des 26 et 27 juin 2017 'La SNC [Adresse 5] s'engage à livrer l'appartement au plus tard à la fin de la troisième semaine du mois de juillet 2017. A défaut, des pénalités de retard pourront être appliquées. La SNC [Adresse 5] s'engage en outre à justifier du retard d'ores et déjà accumulé. A défaut de justificatifs probant, M. et Mme [F] se réservent la possibilité de solliciter des pénalités de retard '.

Il est constant que la livraison effective a eu lieu le 22 août 2017 tandis que les parties communes n'ont été livrées que le 27 mars 2018. La SNC [Adresse 5] ne justifie d'aucune cause légitime de suspension du délai de livraison ainsi qu'elle s'y était engagée dans le protocole d'accord, en sorte que le retard de livraison qui doit être calculé entre le 30 avril et le 22 août 2017 est de 113 jours s'agissant de l'appartement, la date de la livraison des parties communes au 27 mars 2018 n'étant justifiée par aucun document. C'est à juste titre que M. et Mme [F] font valoir que l'indemnisation du retard dans la livraison est due même si l'acte de vente n'a pas prévu de pénalités de retard, l'indemnisation consistant alors en l'allocation de dommages-intérêts.

M. et Mme [F] soutiennent que leur préjudice est constitué par l'obligation dans laquelle ils se sont trouvés de loger dans leur résidence secondaire située à [Localité 4] (Gironde) au lieu de la louer ainsi qu'ils en avaient l'habitude durant les périodes de vacances.

Cependant, M. et Mme [F] ne justifient nullement qu'ils louaient habituellement leur bien situé à Lacanau durant les périodes de vacances, produisant seulement un contrat de location pour deux semaines au mois de juillet 2018 moyennant le prix de 1200 euros par semaine, ces contrats postérieurs à l'année 2017 ne rapportant pas la preuve d'une location habituelle de ce bien ni de la privation d'une telle location l'été 2017, pas davantage qu'il n'est justifié que M. et Mme [F] ont occupé ce bien dans l'attente de la livraison de leur appartement, seuls étant justifiés les frais de garde-meubles auxquels a fait droit le tribunal, la condamnation prononcée à cet égard étant définitive.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en qu'il a débouté M. et Mme [F] de leur demande à ce titre.

Sur le préjudice moral.

M. et Mme [F] sollicitent une somme de 2000 euros chacun en réparation de leur préjudice moral faisant valoir que la SNC [Adresse 5] ne les a pas tenus informés du retard dans la livraison, la livraison et les mois qui ont suivi ayant été émaillés de multiples difficultés et les parties communes étant restées en travaux pendant plusieurs mois, sans qu'il ait été répondu à leurs demandes relatives à la levée des réserves.

Le retard dans la livraison a nécessairement été source de tracasseries et d'inquiétude caractérisant un préjudice moral qu'il convient de réparer par l'allocation d'une somme de 1500 euros chacun à M. et Mme [F].

Sur l'appel incident de la SNC [Adresse 5].

Le tribunal a jugé que la perte de chance de M. et Mme [F] de pouvoir louer leur maison secondaire à Lacanau était démontrée, M. et Mme [F] ayant été contraints d'y vivre dans l'attente de la livraison de leur appartement tout en ayant recours à un garde-meuble. Il a ainsi accordé à M. et Mme [F] la somme de 5000 euros au titre de la perte de chance et 517,92 euros au titre des frais de garde-meubles, appel n'ayant pas été formée de la condamnation au paiement de cette dernière somme.

La SNC [Adresse 5] sollicite la réformation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. et Mme [F] la somme de 5 000 euros au titre de la perte de chance de louer leur bien à [Localité 4], en raison de l'absence de lien de causalité entre le retard de livraison et l'impossibilité de louer la maison à [Localité 4].

M. et Mme [F] prétendent que du fait du retard dans la livraison de leur bien, ils ont été contraints d'habiter dans leur maison secondaire située à [Localité 4], du fait de la vente de leur résidence principale, alors qu'ils louent habituellement cette résidence pendant à la période estivale. Dès lors, ils en déduisent qu'ils ont perdu la chance de louer leur résidence secondaire pendant la période estivale.

Il convient de relever que M. et Mme [F] ont motivé leur ddemande au titre des pénalités de retard en se prévalant du fait qu'ils ont été obligés d'occuper leur résidence secondaire durant la période retard dans le livraison.

La demande de dommages-intérêts au titre de la perte de chance est formée sur la même argumentation laquelle a été ci-dessus rejetée en sorte que celle-ci ne peut davantage fonder leur demande au titre de la perte de chance de louer leur bien.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la SNC [Adresse 5] à leur payer une somme de 5000 euros au titre de la perte de chance.

Sur les mesures accessoires.

La SNC [Adresse 5] demande la réformation du jugement en ce qu'elle a été condamnée à payer aux appelants une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Cependant, M. et Mme [F] ayant été au moins partiellement accueillis en leur appel, la SNC [Adresse 5], partie perdante, sera condamnée aux dépens ainsi qu'à leur payer une indemnité de procédure en sus de celle prononcée en première instance.

Par ces motifs,

Infirme le jugement entrepris uniquement en ce qu'il a :

- condamné la SNC [Adresse 5] à payer à M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] une somme de 5000 euros au titre de la perte de chance de louer leur bien,

- débouté M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] de leurs autres demandes d'indemnisation ainsi que de leur demande de production de pièces,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SNC [Adresse 5] à payer à M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] les sommes de :

- 8208 euros au titre de la levée des réserves,

- 3120 euros au titre des désordres,

- 1500 euros chacun en réparation de leur préjudice moral,

Déboute M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] de leur demande de remplacement de la chaudière,

Déboute M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] de leurs demandes au titre des pénalités de retard, de la perte de valeur de leur appartement et de la perte de chance de louer leur résidence secondaire,

Enjoint la SNC [Adresse 5] de communiquer à M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant deux mois :

- le DIUO

- le justificatif de la mise en service et de la garantie de la chaudière de marque Saunier-Duval,

Condamne la SNC [Adresse 5] à payer à M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en sus de la somme allouée à ce titre en première instance,

Déboute M. [D] [F] et Mme [G] [Z] épouse [F] de leurs autres demandes,

Condamne la SNC [Adresse 5] aux dépens d'appel.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/03408
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;19.03408 ?
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