COUR D'APPEL DE BORDEAUX
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 31 MAI 2022
N° RG 19/06558 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LLSO
[D] [Z]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 33063/02/19/26673 du 09/01/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
c/
[M] [W]
Nature de la décision : AU FOND
22G
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 novembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de BORDEAUX (cabinet 9, RG n° 19/02973) suivant déclaration d'appel du 13 décembre 2019
APPELANTE :
[D] [Z]
née le 17 Octobre 1986 à BORDEAUX (33000)
de nationalité Française
Profession : Vendeuse, demeurant 1 Passage de l'Abbé Berland - 33460 LABARDE
Représentée par Me Marie-Laure MEYNARD-BOBINEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉ :
[M] [W]
né le 08 Novembre 1983 à BRUGES (33520)
de nationalité Française, demeurant 43 rue de Lattre de Tassigny, Apt. 127 - Bât. G - Résidence - Solesse - 33290 BLANQUEFORT
Représenté par Me ANDOLFATTO loco Me Christa POULET-MEYNARD de la SELARL CPM AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 avril 2022 hors la présence du public, devant la Cour composée de :
Président : Hélène MORNET
Conseiller: Danièle PUYDEBAT
Conseiller : Isabelle DELAQUYS
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Florence CHANVRIT
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.
Mme [D] [Z] et M. [M] [W] ont contracté mariage le 12 mai 2012 sans contrat de mariage préalable à leur union.
De cette union sont nés trois enfants :
- [U], le 31 juillet 2006,
- [Y], le 25 septembre 2008,
- [J], le 11 décembre 2009.
Par ordonnance de non-conciliation en date du 27 juin 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a notamment :
- attribué la jouissance du véhicule de marque Renault Megane à l'époux,
- attribué la jouissance du véhicule Renault Modus à l'épouse,
- dit que l'époux devra assurer le règlement provisoire du crédit à la consommation souscrit auprès de la Société Générale jusqu'en juillet 2013 et qu'à compter du mois de juillet 2013, Mme [W] prendra en charge les mensualités de ce crédit à hauteur de 145 euros par mois,
- dit que l'époux devra assurer le règlement provisoire du crédit à la consommation souscrit auprès de la société carrefour.
Par jugement en date du 4 décembre 2014, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a prononcé le divorce de Mme [Z] et M. [W].
Par acte d'huissier en date du 26 mars 2019, M. [W] a fait assigner Mme [Z] devant le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux pour voir :
- constater qu'il s'est acquitté pour la période de juillet 2013 à janvier 2019 de la somme de 19 714,92 euros au titre du prêt commun Société Générale pour le compte de la communauté,
- condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 9 570 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure et avec capitalisation des intérêts.
Par jugement en date du 28 novembre 2019, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a notamment :
- condamné Mme [Z] à payer à M. [W] la somme de 9280 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 avril 2018,
- ordonné la capitalisation des intérêts des sommes dues conformément à l'article 1343-2 du code civil à compter de la présente décision,
- débouté Mme [Z] de sa demande de dommage et intérêts pour procédure abusive,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision
- condamné Mme [Z] au pairement de M. [W] de la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties du surplus de leur demande,
- condamné Mme [Z] aux entiers dépens de l'instance.
Procédure d'appel:
Par déclaration d'appel en date du 13 décembre 2019, Mme [Z] a relevé appel de l'intégralité des dispositions du jugement de première instance.
Par ordonnance en date du 31 juillet 2020, le premier président a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement frappé d'appel.
Selon dernières conclusions en date du 12 mars 2020, Mme [Z] demande à la cour de :
- dire et juger Mme [Z] recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
- infirmer le jugement rendu par le juge aux affaires familiales le 28 novembre 2019,
En conséquence,
- débouter M. [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- dire et juger que le crédit souscrit par M. [W] auprès de la Société Générale n'a pas servi à l'acquisition d'un véhicule,
- constater que le véhicule, depuis le jugement de divorce, est à la disposition de M. [W],
- condamner M. [W] au paiement de la somme de 2 000 euros pour procédure abusive,
- condamner M. [W] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que l'emprunt souscrit par M. [W] seul et avant le mariage ne constitue pas un emprunt de communauté, ce qui la dégage ainsi de tout remboursement, conformément aux dispositions de l'article 1410 du code civil, les dettes dont les époux étaient tenus au jour de la célébration du mariage leur demeurant personnelles tant en capitaux qu'en arrérages ou intérêts.
Elle ajoute que le véhicule litigieux est d'ailleurs à l'entière disposition de M. [W] qui est titulaire de la carte grise, Mme [Z] ne l'utilisant jamais depuis le divorce.
Enfin, considérant la procédure engagée par M. [W] comme abusive et qui a engendré un préjudice moral pour Mme [Z], celle-ci demande réparation de ce préjudice.
Selon dernières conclusions en date du 28 février 2022, M. [W] demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le juge aux affaires familiales en date du 28 novembre 2019,
- débouter Mme [Z] du surplus de ses demandes,
- condamner Mme [Z] au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- débouter Mme [Z] de sa demande de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir que le jugement de première instance a constaté un accord entre les parties sur l'attribution du véhicule Renault Modus à Mme [Z], à charge pour elle de reverser à M. [W] la part du crédit afférent à l'acquisition de ce véhicule, soit 145 euros par mois.
Mme [Z] ne peut contester cette obligation dans la mesure où elle a commencé à exécuter cette décision en payant deux mensualités de 145 euros dus.
M. [W] ajoute que si l'emprunt a bien été souscrit avant le mariage, il a fait l'objet d'un rachat au sein d'un crédit compact qui a englobé l'achat du véhicule à un autre emprunt souscrit pour régler les frais du mariage des parties.
Mme [Z] était parfaitement au courant de la souscription de l'emprunt étant donné qu'ils vivent ensemble depuis 2005 et que les fonds empruntés ont été versés sur un compte joint.
M. [W] souligne que le fait que la dette soit antérieure au mariage et donc propre à l'époux n'exonère pas Mme [Z] de sa participation étant donné que le régime matrimonial ne concerne pas uniquement le passif ou l'actif de la communauté mais doit aussi s'entendre au sens des créances entre les époux.
Il énonce par ailleurs que contrairement à ce qu'avance Mme [Z], celle-ci a bien fait usage du véhicule que le juge aux affaires familiales lui a attribué.
Enfin, il avance que la demande de dommages et intérêts formulée par Mme [Z] ne peut aboutir puisque Mme [Z] ne donne aucune preuve que le préjudice qu'elle subit est directement lié à la procédure judiciaire engagée par M. [W].
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 mars 2022
L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 12 mars 2022 et mise en délibéré au 24 mai 2022, prorogé au 31 mai 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la prise en charge du remboursement du crédit afférent au véhicule Renault Modus :
Il ressort des pièces versées aux débats par les parties, telles visées par leurs bordereaux de communication, et notamment des pièces numérotées 3, 6, 7 et 14 de l'intimé, que M.[W] a fait l'acquisition, suivant bon de commande signé le 18 novembre 2010, d'un véhicule Renault Modus à l'aide d'un crédit DIAC souscrit à son seul nom ; qu'il a ensuite souscrit un crédit Compact auprès de la Société Générale pour un montant total de 18 484 euros, regroupant le solde du crédit DIAC s'élevant alors à la somme de 9 614,90 euros.
L'ensemble de ces opérations ont été passées par M. [W] seul, avant le mariage célébré le 12 mai 2012, quelles qu'aient pu être les informations connues de Mme [Z], dès lors que les futurs époux partageaient leur vie depuis plusieurs années et que la somme empruntée auprès de la Société Générale a été versée sur le compte joint.
Conformément aux dispositions de l'article 1410 du code civil, la nature personnelle à M [W] de la dette d'emprunt, dont il était tenu au jour de la célébration du mariage, n'est en conséquence pas discutable.
Mme [Z] en titre toutefois à tort la conséquence qu'elle est dégagée de tout remboursement de cet emprunt, alors même qu'il résulte expressément des décisions judiciaires intervenues dans le cadre de la procédure de divorce des époux [Z]-[W] les éléments suivants :
-L'ordonnance de non-conciliation (pièce n°1 de l'intimé) en date du 27 juin 2013, statuant à titre provisoire sur l'attribution de la jouissance ou de la gestion des biens communs ou indivis, autres que le logement du ménage, au visa de l'accord des parties quant à la jouissance des véhicules du ménage, a notamment attribué la jouissance du véhicule Renault Modus à l'épouse et dit que l'époux devra assurer le règlement provisoire du crédit à la consommation souscrit auprès de la Société Générale jusqu'en juillet 2013 et qu'à compter du mois de juillet 2013, Mme [W] prendra en charge les mensualités de ce crédit à hauteur de 145 euros par mois ;
-Le jugement prononçant le divorce sur le fondement des dispositions des articles 233 et 234 en date du 4 décembre 2014 a, sur le fondement de l'article 267 du même code, ordonné la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux et donné acte aux parties de leurs accords relatifs à la liquidation du régime matrimonial, en vertu desquels, en particulier :
-Le crédit souscrit à la Société Générale sera réglé par M. [W],
-Le véhicule Renault Modus sera attribué à Mme [Z] à charge pour elle de reverser à M. [W] la part du crédit afférent à l'acquisition de ce véhicule, soit 145 euros par mois.
C'est donc par une juste analyse que le premier juge a pu ainsi caractériser l'accord formé entre les parties, tant au stade de l'ordonnance de non-conciliation qu'à la date du divorce, au terme duquel le véhicule Renault Modus sera attribué à Mme [Z] à charge pour elle de reverser à M. [W] la part du crédit afférent à l'acquisition de ce véhicule, soit 145 euros par mois, ce à compter du mois de juillet 2013.
S'agissant des autres moyens des parties, il y a lieu de rappeler que la cour n'est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation.
La convention entre les ex époux [W] a fait naître une dette personnelle sur la tête de Mme [Z] à l'égard de M.[W] qui n'a été que très partiellement été honorée par la débitrice, sur une période de deux mois.
Il convient en conséquence de confirmer le premier juge qui a condamné Mme [Z] de payer à M.[W] le solde des échéances pour un total de 9 280 euros, cette somme portant intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure adressée par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 avril 2018 (pièce n°5 de l'intimé).
Les intérêts échus étant dus pour plus d'une année, il y a lieu également de confirmer la disposition du jugement ordonnant la capitalisation des intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.
Sur la demande de dommages et intérêts :
Mme [Z] échouant dans ses prétentions, tant en première instance qu'en appel, demeure indigente à démontrer le caractère abusif et fautif de la procédure engagée à son encontre.
La décision sera confirmée e ce qu'elle a débouté Mme [Z] de cette demande.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Mme [Z] qui succombe sera condamnée aux entiers dépens de l'appel.
Il apparaît en outre équitable de la condamner à verser à M. [W] la somme de 1 500 euros au titre des frais de procédure de M. [W] et de la débouter de cette demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 28 novembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [D] [Z] aux entiers dépens de l'appel ;
La condamne à verser à M. [M] [W] une indemnité de 1 500 euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
La déboute de ses demandes plus amples ou contraires.
Signé par Hélène MORNET, Présidente de chambre et par Florence CHANVRIT, Adjointe Administrative principale faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente