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19/05/2022 | FRANCE | N°18/06227

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 19 mai 2022, 18/06227


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------







ARRÊT DU : 19 MAI 2022







N° RG 18/06227 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KXMQ









La SA D'HLM CLAIRSIENNE





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Monsieur [A] [I] [D] [Z]

Monsieur [V] [L] [T] [H]-[Y]

Monsieur [C] [D] [Z]

Monsieur [M] [Z]-[H]

Madame [D] [X] [D] [Z]

Monsieur [K] [W] [D] [Z]

Madame [O] [A] [Z]

Madame [P] [Z]

Monsieur [U] [D] [T] [Z]
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Le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23]





















Nature de la décision : AU FOND















Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 17 octobre 201...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 19 MAI 2022

N° RG 18/06227 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KXMQ

La SA D'HLM CLAIRSIENNE

c/

Monsieur [A] [I] [D] [Z]

Monsieur [V] [L] [T] [H]-[Y]

Monsieur [C] [D] [Z]

Monsieur [M] [Z]-[H]

Madame [D] [X] [D] [Z]

Monsieur [K] [W] [D] [Z]

Madame [O] [A] [Z]

Madame [P] [Z]

Monsieur [U] [D] [T] [Z]

Le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 17 octobre 2018 (R.G. 17/06202) par la 7ème chambre civile du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 20 novembre 2018

APPELANTE :

La SA D'HLM CLAIRSIENNE, société anonyme, dont le siège social est situé [Adresse 1] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me FRIEDE substituant Me Clotilde GAUCI de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[A] [I] [D] [Z]

né le 05 Janvier 1988 à [Localité 19]

de nationalité Française

Profession : Coordinateur

demeurant [Adresse 12]

Jérôme [L] [T] [H]-[Y]

né le 26 Avril 1967 à [Localité 20]

de nationalité Française

Profession : Restaurateur,

demeurant [Adresse 4]

[C] [D] [Z]

né le 04 Juillet 1996 à [Localité 19]

de nationalité Française

Profession : Sellier garnisseur,

demeurant [Adresse 6]

[M] [Z]-[H]

né le 28 Avril 1988 à [Localité 24]

de nationalité Française

Profession : Infirmier,

demeurant [Adresse 10]

[D] Audrey [D] [Z]

née le 18 Mars 1991 à [Localité 21]

de nationalité Française

Profession : Psychologue,

demeurant [Adresse 5]

[K] [W] [D] [Z]

né le 14 Janvier 1992 à [Localité 19]

de nationalité Française

Profession : Chef de produit,

demeurant [Adresse 3]

[O] [A] [Z]

née le 29 Mai 1992 à [Localité 19]

de nationalité Française

Profession : Comédienne,

demeurant [Adresse 11]

[P] [Z]

née le 22 Octobre 1989 à [Localité 19]

de nationalité Française

Profession : Comédienne,

demeurant [Adresse 7]

[U] [D] [T] [Z]

né le 09 Février 1990 à [Localité 19]

de nationalité Française

Profession : Chef de produit,

demeurant [Adresse 9]

Représentés par Me Florence PASQUON de la SELARL PMB & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistés de Me Eric VEZZANI, avocat au barreau de NICE

INTERVENANTE :

Le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23] sis [Adresse 23] représenté par son Syndic en exercice, la société SA D'HLM CLAIRSIENNE, société anonyme, dont le siège social est situé [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal, domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Clotilde GAUCI de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Madame Catherine LEQUES, Conseiller,

Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Le 28 novembre 2000, la société anonyme HLM Clairsienne a réceptionné un immeuble situé [Adresse 23] (33 600), parcelle cadastrée section BR n° [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 16] et [Cadastre 17], comprenant des logements locatifs sociaux et quatre commerces en rez-de-chaussée.

Cet immeuble construit en limite de propriété est voisin d'un autre immeuble, situé [Adresse 8] avec cour à l'arrière, parcelle cadastrée section BR n° [Cadastre 13], et appartenant aux intimés ( les consorts [Z]).

Dans le courant de l'année 2006, les locataires commerciaux de la société HLM Clairsienne se sont plaints d'inondations.

La société HLM Clairsienne a fait constater ces désordres d'infiltration d'eau par Maître [B], huissier de justice de [Localité 18], qui s'est déplacé sur les lieux le 14 février 2006.

En 1'absence de solution amiable pour remédier aux désordres, la société HLM Clairsienne a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux qui, par une ordonnance du 14 décembre 2009, a désigné M. [F] pour procéder aux opérations d'expertise.

Concomitamment, une expertise dommages-ouvrages a été diligentée et le rapport du cabinet Eurisk a été déposé le 25 mai 2010.

Dans le courant du mois de novembre 2010, la société HLM Clairsienne a fait réaliser un certain nombre de travaux qui n'ont cependant pas permis de faire cesser les infiltrations.

Elle a alors fait intervenir la societe A2i, agence d' inspection et d'investigation, laquelle a établi un rapport en juin 2015.

La société HLM Clairsienne a de nouveau fait constater ces désordres d'infiltration d'eau par Maître [J] [G], huissier de justice de [Localité 18], qui s'est déplacé sur les lieux le 6 janvier 2016.

En l'absence de règlement amiable du litige, la société HLM Clairsienne a, par actes d'huissier en date des 21, 22, 23, 26, 27, 30 juin et 3 juillet 2017, assigné les consorts [Z] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux au visa des articles 640 et 641 du code civil, aux fins, notamment, à titre principal d'ordonner à l'indivision [Z] de réaliser divers travaux et à titre subsidiaire d'ordonner une nouvelle expertise judiciaire.

Par jugement rendu le 17 octobre 2018, le tribunal a :

- prononcé le rabat de la clôture au jour des plaidoiries avec réouverture des débats,

- rejeté comme irrecevable l'exception d'incompétence soutenue par l'indivision [Z],

- écarté les fins de non recevoir tirées du défaut de droit d'agir de la société HLM Clairsienne dont les demandes sont déclarées recevables,

- débouté la société HLM Clairsienne de l'intégralité de ses demandes,

- débouté les consorts [Z] de leurs demandes de dommages et intérêts ainsi que d'amende civile,

- condamné la société HLM Clairsienne à verser aux consorts [Z] la sormme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- dit que la société HLM Clairsienne sera condamnée aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise, qui seront recouvrés conforrnement à l'article 699 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Le tribunal a essentiellement retenu que les infiltrations relèvent de la responsabilité de l'entreprise et du maître d'oeuvre auxquels la société Clairsienne avait confié ses travaux , du fait de l'absence d'un système d'étanchéité conforme aux prescriptions du DTU.

Par déclaration du 20 novembre 2018, la société HLM Clairsienne a relevé appel du jugement en ce qu'il a débouté la société HLM Clairsienne de l'intégralité de ses demandes, condamné la société HLM Clairsienne à verser aux consorts [Z] la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles et condamné la société HLM Clairsienne aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile .

Par conclusions du 7 mars 2022 le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23] ( le syndicat des copropriétaires ) représenté par son syndic la société Clairsienne est intervenu à l'instance.

Dans ses dernières conclusions en date du 18 mars 2022, la société HLM Clairsienne et le syndicat des copropriétaires demandent à la cour, au visa des articles 640, 641, 1382 ancien du code civil, 144 et 910-4 du code de procédure civile, ainsi que de l'article 3.3.2 du règlement de la zone UP73 du PLU de [Localité 18] Métropole, de :

- prononcer le report de l'ordonnance de clôture au jour de l'audience des plaidoiries,

- prononcer la recevabilité et le bien-fondé de la société Clairsienne en ses demandes,

- prononcer l'irrecevabilité et le rejet des demandes de l'indivision [Z] tendant à voir prononcer l'irrecevabilité de la société Clairsienne en son appel du jugement ainsi que l'ensemble des demandes à l'encontre de la société Clairsienne

- prononcer la recevabilité du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23] sis [Adresse 23] représenté par son syndic en exercice la société SA D'HLM Clairsienne, en sa qualité d'intervenant volontaire à cette procédure,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- débouté la SA d'HLM Clairsienne de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la société D'HLM Clairsienne à verser aux consorts [Z] la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamné la SA D'HLM Clairsienne aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

Statuant à nouveau :

- prononcer l'irrecevabilité de l'indivision [Z] concernant ses demandes tendant à voir prononcer l'irrecevabilité des demandes de la société Clairsienne pour défaut de qualité d'agir et d'intérêt d'agir, la demande de l'indivision [Z] étant irrecevable au regard de l'article 910-4 du code de la procédure civile.

A défaut, si par extraordinaire la Cour déclarait recevable l'indivision [Z] sur ses demandes d'irrecevabilité,

- prononcer sa qualité d'agir et d'intérêt d'agir ou à tout le moins du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23] sis [Adresse 23] représenté par son syndic en exercice la société SA d'HLM Clairsienne,

A titre principal

- prononcer que l'indivision [Z] (M. [V] [L] [T] [H]-[Y], M. [K] [W] [D] [Z], Mme [O] [A] [Z], M. [U] [D] [T] [Z], Mme [P] [Z], M. [M] [Z], M. [A] [I] [D] [Z], Mme [D] [X] [D] [Z], M. [C] [D] [Z]) a méconnu les dispositions des articles 640 et 641 du code civil ainsi que les dispositions de l'article 3.3.2 du règlement de la zone UP73 du PLU de [Localité 18] Métropole, qu'elle a également fait réaliser des travaux d'aménagement de son parking en 2005 lesquels ont enterré une partie du mur de la résidence appartenant à la société Clairsienne, éléments qui sont à l'origine des infiltrations litigieuses,

- ordonner à l'indivision [Z] (M. [V] [L] [T] [H]-[Y], M. [K] [W] [D] [Z], Mme [O] [A] [Z], M. [U] [D] [T] [Z], Mme [P] [Z], M. [M] [Z], M. [A] [I] [D] [Z], Mme [D] [X] [D] [Z], M. [C] [D] [Z]) de réaliser les travaux suivants :

' Terrassement au droit du mur de la résidence Clairsienne

' Nettoyage du soubassement et des fondations de la résidence Clairsienne

' Application de deux couches croisées et d'un revêtement bitumineux sur la totalité du soubassement de la résidence Clairsienne

' Pose d'une membrane auto adhésive

' Pose d'un drain en fond de fouilles et raccordements existants

' Remplissage en matériaux granuleux compactés par couche

' Réfection et raccordement du revêtement en calcaire

' Raccordement au réseau public de collecte des eaux pluviales des descentes d'eaux pluviales des bâtiments leur appartenant sis sur la parcelle sise [Adresse 8] et cadastrée section BR n° [Cadastre 13],

- ordonner que ces travaux interviendront dans un délai maximum de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- prononcer que passé ce délai courra une astreinte de 100 euros (cent euros) par jour de retard,

- prononcer qu'elle se réserve, en cas de besoin, le pouvoir de liquider l'astreinte,

A titre subsidiaire

- ordonner une nouvelle expertise judiciaire compte tenu des infiltrations persistantes et désigner tel expert qu'il plaira avec la mission suivante :

- Se rendre sur place,

- Visiter les lieux et les décrire,

- Déterminer si l'absence de canalisation des eaux de pluies sur le fonds de l'indivision [Z] participe à la survenance des infiltrations le mur de la société Clairsienne,

- Se faire remettre tous documents permettant de dater les travaux d'aménagement du parking de l'indivision [Z] et dire s'ils sont antérieurs ou postérieurs aux travaux de la Résidence entrepris par la société Clairsienne, ainsi que préciser la nature de ces travaux d'aménagement,

- Préconiser si nécessaire un relevé topographique de ces deux propriétés,

- Indiquer les travaux restant à réaliser pour qu'il soit mis fin aux désordres litigieux,

- Donner tous les éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de se prononcer sur les responsabilités encourues,

- Evaluer tous les préjudices subis en ce compris ceux qui résulteront des travaux de réparation,

- Déposer un pré-rapport et laisser aux parties un délai minimum de trois semaines pour déposer les Dires avant de remettre son rapport définitif.

A titre infiniment subsidiaire

- autoriser la société Clairsienne et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23] sis [Adresse 23] représenté par son syndic en exercice la société SA d'HLM Clairsienne, à accéder, à titre temporaire, au fonds appartenant à l'indivision [Z] (M. [V] [L] [T] [H]-[Y], M. [K] [W] [D] [Z], Mme [O] [A] [Z], M. [U] [D] [T] [Z], Mme [P] [Z], M. [M] [Z], M. [A] [I] [D] [Z], Mme [D] [X] [D] [Z], M. [C] [D] [Z]) afin de contrôler les travaux réalisés en 2010 et de réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux désordres d'infiltration,

En tout état de cause

- réformer le jugement de première instance en qu'il l'a condamnée au paiement d'un article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens en ce compris les frais de référé et d'expertise judiciaire,

- condamner l'indivision [Z] (M. [V] [L] [T] [H]-[Y], M. [K] [W] [D] [Z], Mme [O] [A] [Z], M. [U] [D] [T] [Z], Mme [P] [Z], M. [M] [Z], M. [A] [I] [D] [Z], Mme [D] [X] [D] [Z], M. [C] [D] [Z]) à payer à la société Clairsienne et au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23] sis [Adresse 23] représenté par son syndic en exercice la société SA D'HLM Clairsienne, la somme de 7 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner l'indivision [Z] (M. [V] [L] [T] [H]-[Y], M. [K] [W] [D] [Z], Mme [O] [A] [Z], M. [U] [D] [T] [Z], Mme [P] [Z], M. [M] [Z], M. [A] [I] [D] [Z], Mme [D] [X] [D] [Z], M. [C] [D] [Z]) aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP CGCB & ASSOCIES en application de l'article 699 du code de procédure civile, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Elle soutient essentiellement que :

- les intimés n'ont pas soulevé de fin de non recevoir dans leurs premières conclusions

- l'acte authentique de vente du 4 décembre 2017 avait été communiqué en premier ressort; il y est fait état du litige en cours avec l'indivision [Z] et du fait que le vendeur reste en charge de cette procédure.

- la société Clairsienne reste le propriétaire de l'immeuble même si elle a vendu un appartement le 4 décembre 2017 à l'un des locataires

- le syndicat des copropriétaires intervient à l'instance

- les eaux de pluie qui se déversent sur les toits des bâtiments implantés sur le fonds [Z] sont canalisées par des gouttières vers des descentes en façade qui déversent l'eau directement sur le sol, en direction du fonds Clairsienne, aggravant ainsi la servitude naturelle d'écoulement, au sens de l'article 641 du code civil

-les travaux d'aménagement du parking réalisés sur le fonds [Z] ont eu pour effet de rendre presque nulle l'absorption des eaux pluviales par les sols aggravant encore ainsi la servitude d'écoulement

- de plus à l'occasion de ces travaux, une partie du mur de la résidence Clairsienne a été enterrée, ce qui a encore aggravé cette servitude

- les infiltrations perdurent

- le DTU 20.1 n'était pas applicable lors de la construction de l'immeuble

- le système d'étanchéité retenu comme absent par l'expert n'était pas applicable puisque le mur n'était pas enterré à la construction

- ce système vise à stopper les remontées d'eau par capillarité et non les venues d'eau pluviales s'infiltrant par les soubassements

- l'indivision [Z] a contrevenu au règlement du PLU de [Localité 18] Métropole , selon lequel quand des travaux ont pour effet d'imperméabiliser une surface supérieure à 100m², une collecte vers le réseau public d'évacuation des eaux pluviales doit être réalisée : or, il a été créé un parking en matériau calcaire non drainant d'une surface de 550 m²

-l'attestation de la société Garonne BTP n'est pas probante

- une nouvelle expertise est nécessaire ; en effet, l'expert judiciaire ne s'est pas prononcé sur les conséquences de l'aménagement du parking par l'indivision [Z] car il est parti du postulat erroné qu'il existait lors de la contruction une différence d'altitude entre l'intérieur et l'extérieur de l'immeuble Clairsienne

- l'indivision [Z] n'a pas autorisé la réalisation de travaux de reprise depuis son fonds.

Dans leurs dernières conclusions du 18 mars 2022, les consorts [Z] demandent de :

- révoquer l'ordonnance de clôture

- dire que la société Clairsienne a perdu toute qualité et tout intérêt à agir depuis la création du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 23] résultant de la vente du lot en date du 4 décembre 2017

- dire qu'elle n'avait pas qualité à agir lorsqu'elle a interjeté appel du jugement et la dire irrecevable en son appel

- dire l'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires en cause d'appel irrecevable en raison de l'irrecevabilité de l'appel principal

- dire en toute état de cause que l'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires est tardive et non justifiée par l'évolution du litige en l'état de l'existence du syndicat des copropriétaires depuis le 4 décembre 2017 et qu'il méconnaît les dispositions de l'article 15 du code de procédure civile

En conséquence

- déclarer irrecevables toutes les demandes articulées par la société Clairsienne et le syndicat des copropriétaires

- condamner la société Clairsienne à payer à l'indivision [Z] la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts et l'indemnité supplémentaire de 8000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

-la condamner aux dépens en ceux sompris ceux de référé et d'expertise judiciaire.

Subsidiairement

Vu le rapport d'expertise judiciaire du 9 mars 2010,

- dire et juger que l'immeuble de l'indivision [Z] n'est en aucune façon impliquée dans l'apparition des désordres affectant l'immeuble réalisé par la société Clairsienne.

- confirmer en conséquence le jugement du 17 octobre 2018 en ce qu'il a débouté la société Clairsienne de l'intégralité de ses demandes et spécialement :

-de sa demande de condamnation à exécuter les travaux (demande de surcroît irrecevable)

- de sa demande de nouvelle expertise

- de sa demande tendant à être autorisée à exécuter elle-même des travaux sur la propriété de l'indivision [Z]

- rejeter pour les mêmes motifs toutes les demandes du syndicat des copropriétaires

- infirmer le jugement du 17 octobre 2018 en ce qu'il a débouté l'indivision [Z] de sa demande de dommages et intérêts.

Et, statuant à nouveau de ce chef :

- condamner la société Clairsienne à payer à l'indivision [Z] la somme de 10 000 euros a titre de dommages et intérêts.

- condamner la société Clairsienne à payer à l'indivision [Z] une indemnité supplémentaire de 8 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner la société Clairsienne aux entiers dépens en ceux compris les frais de référé et d'expertise judiciaire.

Ils font essentiellement valoir que :

- en septembre 2005, un de leurs locataires commercial a fait réaliser par la société Mios BTP devenue Garonne BTP un reprofilage du parking et une rénovation de son revêtement par la mise en place d'un matériau naturel et non étanche

- ces travaux n'ont pas été réalisés au droit du mur de façade qui constitue le siège des infiltrations

- ils n'ont pas modifié l'altimétrie du terrain

- l'article 640 du code civil n'est pas applicable puisque le fonds Clairsienne n'est pas inférieur par rapport au fonds [Z]

-les prescriptions invoquées du PLU ne sont pas applicables puisqu'il n'a pas été créé de surface imperméabilisée

- la réalisation d'un drain sur le fonds [Z] nécessite l'accord de l'indivision et ne peut lui être imposée ; il appartient à la société Clairsienne de trouver une autre solution technique pour étancher son mur de façade par exemple en réalisant un cuvelage en face interne du mur de façade.

Les deux parties ont conclu pour la dernière fois le 18 mars 2022 et lors de l'audience de plaidoiries se sont entendues sur le report de la clôture au jour des plaidoiries.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les fins de non-recevoir

Les consorts [Z] soulèvent l'irrecevabilité de la société Clairsienne en son appel et en ses demandes pour défaut de qualité et d'intérêt à agir et l'irrecevabilité de l'intervention du syndicat des copropriétaires du fait de l'irrecevabilité de l'appel.

Les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause en application de l'article 123 du code de procédure civile , et les consorts [Z] , contrairement à ce que soutiennent les intimées, sont recevables à les opposer.

En application de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.

Par acte du 4 décembre 2017 versé aux débats, la société Clairsienne a vendu à un particulier deux lots de l'immeuble , qui était dès lors soumis depuis cette date au statut de la copropriété de sorte que le syndicat des copropriétaires avait seul qualité à agir en réparation de préjudices subis par les parties communes de l'immeuble.

L'acte de vente du 17 octobre 2017 contient des clauses informant l'acquéreur du ' litige en cours avec une indivision propriétaire d'un immeuble contigu à la présente propriété', de ce que 's'agissant des désordres affectant notamment les parties communes de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires pourrait devoir intervenir dans la procédure engagée ainsi que celles éventuellement à venir aux côtés ou en lieu et place du vendeur' et de ce que le ' syndicat des copropriétaires sera nécessairement maître d'ouvrage des éventuels travaux à réaliser sur les parties communes, que ces travaux résultent de cette procédure ou, plus largement, qu'ils soient nécessaires à l'éradication des désordres'.

Toutefois ces informations sont suivies de la clause suivante : 'le vendeur prendra à sa charge l'intégralité des frais en résultant, et notamment les frais de procédure et les frais inhérents aux travaux , sans que ceux-ci ne puissent être imputés ou répercutés sur le syndicat des copropriétaires ou sur les copropriétaires eux-même'.

La société Clairsienne s'est ainsi engagée à garantir le syndicat des copropriétaires de toutes les conséquences des désordres objet du litige l'opposant aux consorts [Z], tant en ce qui concerne les frais de procédure qu'en ce qui concerne la prise en charge des frais de travaux qui s'avéreraient nécessaires.

La société Clairsienne débitrice de cette obligation de garantie, a donc conservé après cette vente un intérêt actuel et certain à agir envers les consorts [Z] aux fins d'obtenir la réparation des désordres affectant l'immeuble.

Son appel et ses demandes sont recevables

Le syndicat des copropriétaires a qualité à agir à ses côtés et est recevable en son intervention.

Les fins de non-recevoir sont mal fondées et seront rejetées.

Sur le fonds

Dans son rapport en date du 9 mars 2010 l'expert judiciaire expose que :

- le rez de chaussée du bâtiment élevé par la société Clairsienne est construit sur son terrain en limite de propriété ; sur toute la longueur riveraine, il s'agit d'un mur sans ouverture revêtu d'un crépi teinté ; la cour de la propriété [Z] est revêtue de concassé calcaire 0/31.5 compacté sur toute la longueur ; en pied de mur, des traces verdatres témoignent d'un humidité qui remonte par capillarité.

- les eaux des toitures de la propriété [Z] sont recueillies par des gouttières et descentes qui s'évacuent directement dans le sol ; ces eaux imprègnent le revêtement de sol en calcaire et plus particulièrement dans la partie en contact avec le mur de la propriété Clairsienne

-le terrain extérieur au mur est plus haut de 18 cm que le sol intérieur : dans le cas d'un mur enterré, l'eau s'infiltre par capillarité dans tous les cas où l'eau est présente dans le sol proche ; les eaux de ruissellement au contact des murs en soubassement pendant suffisamment longtemps pénètrent dans le bâtiment à travers le mur, ou même en cheminant sous les fondations pour les soubassements, il faut créer une coupure de capillarité en interposant systématiquement à au moins 15cm au dessus du sol naturel et sur toute l'épaisseur du mur, un revêtement d'étanchéité.

L'expert indique n'avoir constaté aucune protection d'étanchéité contrairement aux prescriptions du DTU 20-1.

Il préconise la mise en oeuvre d'un système d'étanchéité conforme aux normes impliquant les travaux suivants :

-terrassement en pied de mur le long des fondations

- stockage des déblais sur le site

- nettoyage des murs et du soubassement

- enduit d'imprégnation en deux couches de revêtement bitumineux

- pose d'un drain en fonds de fouille avec raccordement aux évacuations EP

- pose d'une membrane bitumineuse auto adhésive ou d'une membrane en PEHD

- remplissage en matériaux granuleux compactés par couche

- pose d'un profil de finition en tête de membrane

- réfection et raccordement du revêtement en calcaire de la cour.

Il a chiffré à la somme de 15 464,51 € le coût de ces travaux.

Selon lui, les désordres constatés sont les conséquences de travaux qui n'ont pas été réalisés à l'origine en suivant les règles de l'art.

Maître Dirou, conseil de la société Clairsienne , lui a adressé un dire ainsi rédigé ' il est nécessaire que vous précisiez si cette surélévation ( du terrain [Z] ) qui provient effectivement de travaux dans le courant de l'année 2005 est une cause du préjudice ou si elle n'a aucune incidence'.

Dans ce dire, Maître [S] procédait par affirmations quant à l'origine de la surélévation et contrairement à ce que soutient la société Clairsienne , ne demandait pas son avis à l'expert sur ce point mais lui demandait de dire si la surélévation constatée était une cause du préjudice.

L'expert a répondu à cette question en précisant :

' la différence d'altitude entre l'intérieur et l'extérieur impose une étanchéité pour contrarier les pénétrations d'eau par capillarité, et l'absence d'un système d'étanchéité conforme aux prescriptions du DTU est la cause des infiltrations'.

Ce rapport date de 2010.

Alors qu'il mettait en cause la pratique constructive, aucune action n'a été dirigée par la société Clairsienne contre les constructeurs.

La société Clairsienne a fait effectuer en novembre 2010 des travaux sur le mur litigieux comportant notamment le rebouchage de fissures et l'application d'un revêtement bitumineux suivant facture versée aux débats en pièce 6 par les consorts [Z] ; le montant de cette facture de 3729,25 € est bien inférieur au chiffrage de l'expert, ce dont il se déduit que n'a pas été mise en oeuvre dans sa totalité la solution réparatoire préconisée par ce dernier.

Les infiltrations se sont poursuivies malgré ces travaux.

La société Clairsienne et le syndicat des copropriétaires estime engagée la responsabilité des consorts [Z] dans la survenue des infiltrations pour trois motifs.

Il est soutenu que ce sont les travaux d'aménagement du parking sur le terrain [Z] qui ont eu pour effet de surélever ce terrain et donc d'enterrer le mur de la résidence.

La différence de niveau relevée par l'expert est de 18 cm.

La société Clairsienne et le syndicat des copropriétaires ne versent aux débats aucun élément de nature à rapporter la preuve, qui leur incombe, de leur affirmation, aucune conclusion de cet ordre ne pouvant notamment être tirée des photographies annexées au constat du 14 février 2006, contrairement ce qui est affirmé.

Il ressort au contraire de la facture d'aménagement du parking produite par les consorts [Z] et de l'attestation de l'entreprise y ayant procédé que ces travaux ont consisté à terrasser le terrain, évacuer les rejets à la décharge publique, fournir et mettre en place un géotextile et une couche de calcaire, ensuite compactée ; aucun apport de terres n'a été facturé de sorte que le fait de recouvrir le terrain d'un revêtement calcaire n'a pas pu avoir pour effet d'enterrer le mur voisin de 18 cm.

Il est ensuite soutenu que les consorts [Z] ont aggravé la servitude d'écoulement des eaux pluviales, car les eaux de pluie qui se déversent sur les toits des bâtiments implantés sur leur fonds sont canalisées par des gouttières vers des descentes en façade qui déversent l'eau directement sur le sol en direction du fonds Clairsienne .

En application de l'article 640 du code civil les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué et le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur.

Comme le font valoir à juste titre les intimés, leur fonds n'est pas situé en surplomb de celui de la société Clairsienne et ne peut être qualifié de fonds supérieur au sens de cet article.

Il ressort de toutes les constatations faites sur place que les eaux de pluie des bâtiments [Z] se déversent sur le propre terrain de l'indivision et ne s'écoulent pas sur le fonds voisin.

Comme l'a relevé l'expert c'est précisément la présence d'eau dans le terrain [Z] qui entraîne par capillarité les infiltrations dans le mur enterré dont il appartenait à la société Clairsienne de se prémunir par un système d'étanchéité.

Le fonds [Z] recueille donc ses propres eaux de pluie et le fonds Clairsienne ne subit aucune servitude d'écoulement de ces eaux qui n'a dès lors pas pu être aggravée par les consorts [Z], contrairement à ce que soutiennent à tort la société Clairsienne et le syndicat des copropriétaires.

Il est enfin soutenu que les consorts [Z] n'ont pas respecté le PLU de [Localité 18] Métropole, en réalisant sur le parking un revêtement étanche d'une superficie supérieure à 100 m² sans mettre en oeuvre un système de traitement des eaux pluviales.

Les appelants produisent le PLU applicable à [Localité 22] dans sa première révision approuvée le 16 décembre 2016, qui prévoit en son article 3.3.2.1 ' tout terrain doit être aménagé avec des dispositifs permettant l'évacuation qualitative et quantitative des eaux pluviales... les eaux pluviales doivent rejoindre directement le milieu naturel, ( par infiltration dans le sol ou rejet direct dans les eaux superficielles) ; à défaut, les eaux pluviales peuvent être rejetées suivant le cas au caniveau, au fossé, dans un collecteur d'eaux pluviales ou un collecteur unitaire si la voie en est pourvue.

Dans ce dernier cas, pour les constructions nouvelles et les extensions , dès lors que la surface imperméabilisée projetée est supérieure à 100m², le débit est rejeté gravitairement au réseau public.'

Comme le font valoir les consorts [Z], d'une part la mise en place d'un revêtement au sol ne peut être qualifiée de 'construction nouvelle ' rendant applicable la règle du PLU invoquée, à supposer qu'elle ait été en vigueur à cette époque, et d'autre part il n'est pas établi que la surface du parking est imperméable puisqu'elle a été réalisée en calcaire compacté, qui n'est pas un matériau étanche.

Il n'est enfin pas établi que la création de ce revêtement ait pour effet de canaliser les eaux de pluie vers le terrain voisin.

C'est en effet sur le propre terrain des consorts [Z] que les eaux tombent et c'est dans ce terrain qu'elles s'infiltrent de sorte qu'il n'est par là contrevenu à aucune des règles invoquées par les appelants.

La cour dispose des éléments nécessaires pour statuer de sorte que la demande d'une nouvelle expertise qui ne permettrait pas de l'éclairer davantage sera rejetée par confirmation du jugement.

La responsabilité des consorts [Z] dans les désordres invoquées n'est pas établie.

La société Clairsienne et le syndicat des copropriétaires seront donc déboutés par confirmation du jugement de leur demande de condamnation des consorts [Z] à effectuer des travaux.

Les consorts [Z] ne peuvent davantage être condamnés à supporter la réalisation sur leur terrain de travaux impliquant notamment le creusement d'une tranchée et la mise en place d'un drain.

La demande de la société Clairsienne et du syndicat des copropriétaires tendant à obtenir l'autorisation d'accéder au fonds [Z] afin de réaliser des travaux sera rejetée par confirmation du jugement.

A défaut d'accord des parties sur ce point, il appartiendra à la société Clairsienne et au syndicat des copropriétaires de trouver une autre solution réparatoire.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive

L'abus du droit d'ester en justice n'est pas caractérisé en l'espèce et cette demande sera rejetée par confirmation du jugement

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

La société Clairsienne sera condamnée aux dépens d'appel et à payer aux consorts [Z] la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, en plus de la somme allouée de ce chef en premier ressort.

PAR CES MOTIFS

Déclare les consorts [Z] recevables mais non fondés en leurs fins de non -recevoir

Déclare la société Clairsienne recevable en son appel et ses demandes et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 23] recevable en son intervention volontaire

Confirme le jugement de ses chefs déférés

Y ajoutant

Condamne la société Clairsienne à payer aux consorts [Z] ensemble la somme de

2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société Clairsienne aux dépens d'appel

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/06227
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;18.06227 ?
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