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03/05/2022 | FRANCE | N°19/02213

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 03 mai 2022, 19/02213


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 03 MAI 2022



RP





N° RG 19/02213 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K7MQ









[G] [V]

SAS LE SAINT DES SEINS



c/



SOCIETE POUR LA PERCEPITON DE LA REMUNERATIION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION AU PUBLIC DES PHONOGRAMMES DU COMMERCE (SPRE)

























Nature de la d

écision : AU FOND























Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 février 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 13/09984) suivant déclaration d'appel du 18 avril 2019





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COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 03 MAI 2022

RP

N° RG 19/02213 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K7MQ

[G] [V]

SAS LE SAINT DES SEINS

c/

SOCIETE POUR LA PERCEPITON DE LA REMUNERATIION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION AU PUBLIC DES PHONOGRAMMES DU COMMERCE (SPRE)

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 février 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 13/09984) suivant déclaration d'appel du 18 avril 2019

APPELANTES :

[G] [V]

née le 20 Novembre 1953 à [Localité 4]

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

SAS LE SAINT DES SEINS, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 3]

représentées par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistées de Maître COUDRIER substituant Maître Sébastien BRUNET de la SCP CAMILLE et Associés, avocats plaidants au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE :

SOCIETE POUR LA PERCEPITON DE LA REMUNERATIION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION AU PUBLIC DES PHONOGRAMMES DU COMMERCE (SPRE), prisse en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siége sis [Adresse 2]

représentée par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Sophie BARA de la SELARL OX, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 mars 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Roland POTEE, président,

Vincent BRAUD, conseiller,

Bérengère VALLEE, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

La Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (ci-après la SPRE) est une société civile de gestion collective des droits voisins du droit d'auteur des artistes-interprètes et des producteurs de phonogrammes.

La SPRE a pour mission légale de percevoir, sous le contrôle du ministère de la Culture, la rémunération dite équitable, prévue à l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, due aux artistes-interprètes par les établissements qui diffusent publiquement à des fins commerciales des phonogrammes, qu'il s'agisse de musique attractive ou de sonorisation, dès lors que lesdits phonogrammes font l'objet d'une communication directe dans un lieu public ou d'une radiodiffusion. Cette rémunération perçue par la société SPRE est ensuite répartie par moitié entre les artistes-interprètes et les producteurs.

Son barème et ses modalités de versement sont déterminés par une commission créée par l'article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle. En application de l'article L. 214-1 du même code, plusieurs catégories de barèmes de la rémunération équitable ont été arrêtées par ladite commission, en fonction de l'importance donnée à la musique diffusée, à savoir :

- un barème concernant les 'lieux sonorisés', soit les établissements qui diffusent un fond sonore, cette musique étant 'une composante accessoire à l'activité commerciale' (décision réglementaire de la commission du 9 septembre 1987, titre III - à partir du 1er février 2010, décision réglementaire de la commission du 5 janvier 2010, article 1),

- un barème concernant les 'discothèques et établissements similaires' (décision réglementaire du 30 novembre 2001, articles 1 et 2),

- un barème applicable aux 'bars et/ou restaurants à ambiance musicale' (BAM-RAM), soit les établissements 'diffusant de la musique amplifiée attractive constituant une composante essentielle de l'activité commerciale' institué par décision réglementaire de la commission du 5 janvier 2010 (article 2), avec effet au 1er février 2010.

Pour les discothèques et établissements similaires, comme pour les bars et/ou restaurants à ambiance musicale, la rémunération équitable est égale à 1,65 % de 'l'ensemble des recettes brutes (') hors taxes' de l'établissement, 'confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d'un établissement' (décision réglementaire du 30 novembre 2001, articles 1 et 2 ; décision réglementaire du 5 janvier 2010, article 2).

À la différence des discothèques ou établissements similaires, les bars et/ou restaurants à ambiance musicale peuvent cependant bénéficier de l'application des normes de réduction prévues à l'annexe 2 du protocole d'accord conclu le 10 novembre 2011 entre la SPRE et les syndicats professionnels.

En vertu des dispositions légales et réglementaires, tout établissement diffusant de la musique de sonorisation ou de la musique attractive a l'obligation d'une part, de communiquer spontanément tout justificatif comptable et fiscal des éléments nécessaires au calcul de cette rémunération, et d'autre part, de régler la rémunération due. En outre, une facturation d'office est adressée au redevable qui ne justifie pas de ses recettes.

La SAS Le Saint des Seins dont Mme [G] [V] est la dirigeante, exploite depuis la fin de l'année 2006, [Adresse 3], un établissement de bar-discothèque dénommé 'LE SAINT DES SEINS', ouvert du lundi au vendredi de 12 heures à 2 heures et le samedi de 16 heures à 4 heures.

L'établissement a été à l'origine soumis au barème de rémunération équitable fixé par la décision réglementaire du 30 novembre 2001 applicable aux 'discothèques et établissements similaires', puis, à compter de l'entrée en vigueur du barème applicable aux 'bars et/ou restaurants à ambiance musicale' le 1er février 2010, à ce dernier barème jusqu'à 23h30, et au barème applicable aux discothèques et établissements similaires après 23h30 et jusqu'à la fermeture de l'établissement.

Invoquant la non-exécution par la société Le Saint des Seins de ses obligations au titre de la rémunération équitable, et faute de parvenir à un règlement amiable du litige, la SPRE a, par acte d'huissier du 2 octobre 2013, assigné la société Le Saint des Seins et sa dirigeante Mme [V] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux, principalement aux fins de les voir condamner in solidum au paiement de la rémunération équitable impayée entre le 1er janvier 2008 et le 31 juillet 2018.

Par jugement du 5 février 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- dit que l'établissement exploité par la SAS LE SAINT DES SEINS, sis [Adresse 3], relève du barème applicable 'bars et/ou restaurants à ambiance musicale' tel que fixé par la décision réglementaire du 5 janvier 2010 au titre de son activité exercée jusqu'à 23h30, et du barème applicable aux 'discothèques et établissements similaires' tel que fixé par la décision réglementaire du 30 novembre 2001 au titre de son activité exercée à compter de 23h30 et jusqu'à la fermeture,

- dit que dans le cadre de son activité soumise au barème 'bars et/ou restaurants à ambiance musicale', la SAS LE SAINT DES SEINS peut prétendre au bénéfice des abattements forfaitaires prévus par l'annexe 2 du protocole d'accord du 10 novembre 2011 conclu entre la SPRE et les syndicats professionnels, sous réserve de justifier auprès de la SPRE, pour chaque exercice, qu'elle en remplit les conditions et de lui communiquer tous les justificatifs comptables nécessaires à leur application,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement engagée par la SPRE à l'encontre de la SAS LE SAINT DES SEINS,

- condamné la SAS LE SAINT DES SEINS à payer à la SPRE, au titre de la rémunération équitable due pour la période du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2018, la somme en capital de 89.044,23 € (quatre-vingt neuf mille quarante-quatre euros et vingt-trois centimes), avec intérêts au taux légal :

* sur la somme de 63.257,65 € à compter de la mise en demeure du 5 avril 2013,

* sur le solde à compter du jugement,

- ordonné la capitalisation des intérêts dus par années entières à compter du jugement en application de l'article 1343-2 du code civil,

- déclaré irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité personnelle engagée la SPRE à l'encontre de Mme [G] [V] pour la période antérieure au 16 septembre 2010,

- dit que Mme [G] [V] sera tenue de la condamnation ci-dessus prononcée, in solidum avec la SAS LE SAINT DES SEINS, à concurrence de la somme de 50.932,98 € (cinquante mille neuf cent trente-deux euros et quatre-vingt-dix-huit centimes) pour la période du 16 septembre 2010 au 31 juillet 2018,

- dit que Mme [G] [V] sera également tenue, in solidum avec la SAS LE SAINT DES SEINS, des intérêts au taux légal produits par cette somme pour la période du 16 septembre 2010 au 31 juillet 2018, dans les conditions précédemment énoncées, et avec capitalisation des intérêts à compter du jugement,

- condamné in solidum la SAS LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] à payer à la SPRE la somme de 2.000 € de dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel et moral subis,

- condamné in solidum la SAS LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] à payer à la SPRE la somme 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la SAS LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] aux dépens de l'instance, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

- rejeté toutes autres demandes comme non fondées.

Mme [V] et la société Le Saint des seins ont relevé appel de ce jugement par déclaration du 18 avril 2019.

Par conclusions déposées le 9 mars 2022, elles demandent à la cour de :

- ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture en date du 1er mars 2022,

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* Dit que l'établissement exploité par la SAS LE SAINT DES SEINS sis [Adresse 3] relève du barème applicable « Bars et/ou restaurants à ambiance musical » tel que fixée par la décision réglementaire du 5 janvier 2010 au titre de son activité exercée jusqu'à 23 h 30 et du barème applicable aux discothèques et établissements similaires, tel que fixée par la décision réglementaire du 30.11.2001 au titre de son activité exercée à compter de 23 h 30 jusqu'à la fermeture,

* Dit que dans le cadre de son activité soumise au barème « bars et/ou restaurant à ambiance musicale », la SAS LE SAINT DES SEINS peut prétendre au bénéfice des abattements forfaitaires prévus par l'annexe 2 du protocole d'accord du 10 novembre 2011 conclu entre la SPRE et les Syndicats professionnels,

* Déclaré irrecevable comme prescrite, l'action en responsabilité personnelle engagée par la SPRE à l'encontre de Mme [G] [V] pour la période antérieure au 16 septembre 2010,

Réformant le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

- juger que l'exploitation d'une terrasse non sonorisée constitue une particularité au sens des décisions réglementaires du 30.11.2001 et du 05.01.2010,

- juger que le chiffre d'affaires réalisé sur une terrasse non sonorisée doit être, quel que soit le régime applicable ( BAM et discothèques et établissements similaires ) exclut de l'assiette de calcul de la rémunération équitable et dans les conditions propres à chacun de ces régimes,

En conséquence,

- débouter la SPRE de l'ensemble de ses demandes, et,

A titre principal

- juger qu'en application de ces régimes et des abattements s'y rapportant la rémunération équitable due par la société LE SAINT DES SEINS s'élève au titre des années 2008 à février 2022 à un montant total de se décomposant comme suit :

* Sur la base du barème BAM, '''''8.264.95 € TTC

* Sur la base du barème 'Établissement similaire à une discothèque' : 113.851,69 € TTC

Soit un total de 122.116,64 € TTC,

- juger que la société le SAINT DES SEINS a réglé la somme totale de 205.819,57 € TTC sur la période 2008 à fin février 2022,

- condamner la SPRE à lui restituer la somme indue de 83.702,93 € TTC.

À titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour estimerait qu'en l'absence de justificatifs comptables du chiffre d' affaires terrasse pour les années 2008 à fin février 2022, il n'y aurait pas lieu à appliquer un abattement terrasse,

- juger que la rémunération équitable totale due au titre des deux barèmes par la Société Le Saint des Seins s'élève pour la période de 2008 à fin février 2022 à la somme de 142.513 € TTC,

- juger que la société LE SAINT DES SEINS a réglé la somme totale de 205.819,57 € TTC sur la période 2008 à fin février 2022,

- condamner la SPRE à lui restituer la somme de 63.306.57 € TTC.

En toute hypothèse,

- juger que Mme [V], en sa qualité de dirigeante de la société LE SAINT DES SEINS n'a commis aucune une faute détachable de ses fonctions qui engagerait sa responsabilité civile personnelle sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

- en conséquence, débouter la SPRE de sa demande tendant à la voir condamner solidairement au paiement des rémunérations équitables dues par la société LE SAINT DES SEINS,

- ordonner la main levée des mesures conservatoires prises par la SPRE,

- débouter la SPRE de sa demande de dommages et intérêts comme étant injustifiée,

- condamner la société SPRE au paiement de la somme de 25.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 28 février 2022, la SPRE demande à la cour de :

Confirmant purement et simplement le jugement intervenu,

Et actualisant les sommes dues au titre de la rémunération équitable facturée et des paiements intervenus depuis la première instance,

En retenant le barème BAM pour l'activité exercée jusqu'à 23h 30, avec application des normes protocolaires aux recettes BAM, et le barème discothèques pour l'activité postérieure à 23h 30 :

- condamner la société LE SAINT DES SEINS à régler à la SPRE, pour la rémunération équitable impayée entre le 1er janvier 2008 et le 28 février 2022, au titre de ses activités de discothèque ou établissement similaire et de bar et/ou restaurant à ambiance musicale, la somme en capital de 5.072.14 € TTC (cinq mille soixante-douze euros et quatorze centimes toutes taxes comprises),uutre intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, avec capitalisation.

- condamner in solidum Mme [G] [V] à prendre en charge la condamnation prononcée à concurrence de 5.072.14 € TTC (cinq mille soixante-douze euros et quatorze centimes toutes taxes comprises) en capital au titre de la période de droits non prescrite pour elle du 16 septembre 2010 au 30 septembre 2021, avec intérêts de droit au taux légal à compter de l'arrêt, et capitalisation,

- condamner in solidum la société LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] au paiement de la somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts délictuels,

Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d'instance d'appel

- condamner in solidum la société LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] à verser à la SPRE la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance,

Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d'instance d'appel

- condamner in solidum la société LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] aux dépens de première instance, en application de l'article 699 code de procédure civile dont distraction au profit de Maître Laurence BARRE.

Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d'instance d'appel

Y ajoutant en cause d'appel :

- condamner in solidum la société LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] à verser à la SPRE la somme de 6.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner in solidum la société LE SAINT DES SEINS et Mme [G] [V] aux dépens d'appel, en application de l'article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître Annie Taillard.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 15 mars 2022.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 1er mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, il sera précisé que l'exécution partielle par la société le Saint des Seins de la condamnation en principal prononcée par le tribunal, à hauteur de 82 016,23 € le 23 février 2022 selon le décompte produit par la SPRE en pièce 2.10, ne vaut pas acquiescement au jugement, les appelantes indiquant qu'elles ne reconnaissent pas le bien-fondé des demandes de l'intimée et qu'elles n'ont dès lors pas réglé les condamnations prononcées au titre des intérêts légaux, des dommages et intérêts, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Par ailleurs, les questions relatives à la prescription de l'action de la SPRE et à l'existence d'une activité duale n'étant pas contestées par les appelantes, la cour n'en n'est pas saisie.

Sur la clôture de l'instruction

Au regard de l'accord des parties, il convient, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de révoquer l'ordonnance du 1er mars 2022 et de reporter la clôture de l'instruction au jour de l'audience.

Sur le montant de la rémunération équitable due par la société Le Saint des Seins

Les appelantes ne contestent pas la dualité de l'activité de la société Le Saint des Seins, en ce qu'elle relève, d'une part du barème applicable aux 'bars et restaurants à ambiance musicale', issu de la décision réglementaire du 5 janvier 2010 et entré en vigueur le 1er février 2010, et d'autre part, du barème applicable aux 'discothèques et établissements similaires' issu de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 et entré en vigueur le 1er janvier 2002. Il convient dès lors de déterminer le montant de la rémunération équitable due au titre de chacun de ces deux barèmes, dont les modalités d'application par la SPRE sont contestées par les appelantes.

1. Sur les modalités d'application du barème 'discothèques et établissements similaires'

L'article 1er de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 prévoit que: 'La rémunération due par les discothèques et établissements similaires est déterminée sur la base d'une assiette qui comprend l'ensemble des recettes brutes produites par les entrées ainsi que par la vente des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes, confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d'un établissement'.

Au termes de l'article 2 de la même décision : 'Le taux applicable à cette assiette est de 1,65 %. Sont déduits de cette assiette :

1- Un abattement de 12 % pour les établissements qui communiquent dans les quatre mois suivant la clôture de leur exercice social une déclaration certifiée de l'ensemble des recettes brutes détaillées réalisées au titre de cet exercice et une copie certifiée conforme par un expert-comptable ou un comptable agréé de la déclaration effectuée auprès de l'administration fiscale au titre de cet exercice ; cet abattement est pris en compte pour le calcul des paiements mensuels ;

2- Un abattement supplémentaire de 15 % pour les établissements qui s'acquittent, avant le 25 du mois d'émission de la facture, du montant facturé mensuellement ; cet abattement est porté à 17 % en cas de paiement par prélèvement automatique'.

Mme [V] et la société le Saint des Seins demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a considéré que l'activité duale de l'établissement donne lieu à application cumulative des deux régimes 'bars et/ou restaurants à ambiance musicale' jusqu'à 23h30 et 'discothèque et établissements similaires' de 23h30 à la fermeture. Elles font en revanche valoir que la terrasse non sonorisée exploitée par l'établissement constitue une particularité au sens des décisions réglementaires applicables et non un service rendu à la clientèle et que le chiffre d'affaires qu'elle génère doit donc être exclu de l'assiette de calcul de la rémunération équitable.

La SPRE fait valoir qu'elle facture à bon droit la société Le Saint des Seins en vertu des deux barèmes applicables, que la terrasse constitue un service rendu aux clients de la discothèque qui peuvent y accéder librement durant les heures d'ouverture et que le chiffre d'affaires qui y est réalisé doit être inclus dans l'assiette de calcul, la décision réglementaire du 30 novembre 2001 prévoyant que la rémunération équitable est assise sur l'ensemble des recettes de l'exploitation, service inclus.

Il ressort des termes de l'article 1er de la décision réglementaire du 30 novembre 2001, que la rémunération équitable est assise sur 'l'ensemble des recettes brutes produites par les entrées ainsi que par la vente des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes'.

En l'espèce, dans le cadre de l'activité de discothèque du Saint des Seins, la terrasse non sonorisée ne saurait constituer une 'particularité de l'établissement' au sens de l'article 1er de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 dès lors que les modalités d'exploitation et de fonctionnement de cette terrasse non sonorisée démontrent qu'elle fait partie intégrante de l'établissement, les clients pouvant y accéder librement durant les heures d'ouverture de la discothèque. À ce titre, selon les procès-verbaux dressés les 22 février 2013 et 3 juin 2017, les agents agréés par le ministère de la Culture et assermentés dans les conditions prévues aux articles L.331-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, ont notamment effectué les constatations suivantes lors de leurs visites de l'établissement :

* Le 22 juin 2012 entre 23h30 et 23h40 : 'A l'extérieur, je constate la présence d'une terrasse non sonorisée, d'environ une quarantaine de places. Plusieurs clients y sont installés, pour fumer, boire et/ou discuter' (pièce 1.7 SPRE).

* Le 8 février 2013 entre 23h55 et 00h17 : 'Devant l'établissement, la terrasse accueille plusieurs clients qui fument et boivent' (pièce 1.10 SPRE).

* Le 3 juin 2017 entre 23h50 et 00h20 : 'A l'emplacement de la terrasse, la seule installation est un parasol. Il n'y a ni table, ni chaise, ni bar. Le parasol abrite quelques clients qui fument. La musique n'est pas audible de l'extérieur' (pièce 1.14 SPRE).

Il ressort de ces constatations effectuées entre 2012 et 2017 que la clientèle qui consomme en terrasse est la même que celle qui fréquente l'intérieur de l'établissement, ces mêmes clients allant et venant de l'intérieur vers l'extérieur et inversement, selon les moments de la soirée.

Par ailleurs, l'absence de mobilier permettant de s'attabler en terrasse constatée le 3 juin 2017, est confirmée par les photographies annexées au constat du 22 février 2013 (pièce 1.10 SPRE), établissant que la terrasse est seulement constituée d'un parasol abritant quelques clients qui fument, à l'exclusion de toute installation du type table, chaise ou bar.

Il en résulte que l'accès à la terrasse du Saint des Seins est une prestation supplémentaire offerte à la clientèle et accessoire à l'activité principale de discothèque se déroulant à l'intérieur de l'établissement, cet agrément permettant aux clients de s'aérer au cours de la soirée ou de discuter plus au calme qu'à l'intérieur.

Dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a considéré que la tarification de la rémunération équitable due par l'établissement Le Saint des Seins dans le cadre de l'application du barème 'discothèques et établissements similaires' devait être assise sur son chiffre d'affaires global, incluant celui réalisé sur la terrasse non sonorisée, qui ne constitue pas, en l'espèce, une particularité au sens de la décision réglementaire du 30 novembre 2001.

Par ailleurs, cette décision réglementaire permet l'exclusion des éventuelles recettes encaissées en dehors des heures de diffusion de musique attractive, dans le cadre d'une activité de 'musique vivante', à condition que le redevable en justifie par la production de recettes ventilées (pièces comptables telles que des comptes de résultats ou relevés de caisses horodatés). Cependant, les plannings produits en pièces n°23 à 25 par la société Le Saint des Seins et mentionnant les dates des concerts organisés de 2008 à 2013, ne permettent pas de connaître les recettes ventilées, de sorte que les appelantes ne peuvent valablement solliciter la prise en compte de l'activité de 'musique vivante' sur cette période.

En conséquence, le jugement qui a écarté dans leur intégralité les griefs formulés par Mme [V] et la société Le Saint des Seins quant aux modalités d'application à leur établissement par la SPRE du barème 'discothèques et établissements similaires', sera confirmé sur ce point.

2. Sur les modalités d'application du barème 'bars et/ou restaurants à ambiance musicale'

Il n'est pas contesté que ce barème issu de la décision réglementaire du 5 janvier 2010, est applicable à l'établissement le Saint des Seins depuis son entrée en vigueur le 1er février 2010, au titre de l'activité exercée à partir de l'heure d'ouverture jusqu'à 23h30.

L'article 2 de cette décision réglementaire dispose: 'La rémunération due par les établissements exerçant une activité de bars et/ou de restaurants à ambiance musicale, ci-après dénommés respectivement BAM et RAM est déterminée comme suit.

Sont considérés comme BAM et/ou RAM tous établissements recevant du public diffusant de la musique amplifiée attractive constituant une composante essentielle de l'activité commerciale.

La rémunération due est déterminée sur la base d'une assiette qui comprend l'ensemble des recettes brutes produites par les entrées, les vestiaires, les points-phone, les locations de salles, les participations publicitaires, les rétrocessions diverses ainsi que par la vente des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes, confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d'un établissement.

Le taux applicable à cette assiette est de 1,65 %'.

Ce texte prévoit un abattement de 12% tenant à la communication des justificatifs comptables de l'activité dans les 4 mois suivant la clôture de l'exercice social, ainsi qu'un abattement supplémentaire de 15% pour un paiement avant le 25 du mois d'émission de la facture, du montant facturé par la SPRE.

En outre, les établissements relevant du barème BAM/RAM peuvent bénéficier de l'application des normes de réduction prévues à l'annexe 2 du protocole d'accord conclu le 10 novembre 2011, entre la SPRE et les syndicats professionnels, qui prévoient des abattements forfaitaires en cas d'ouverture avant 18h (-50%), d'existence d'une activité de musique vivante (-10% par soirée de musique vivante en semaine) et l'exploitation d'une terrasse extérieure non sonorisée (-10%, pourcentage auquel peut se substituer le pourcentage de places assises sur la terrasse par rapport au nombre total de l'établissement).

Mme [V] et la société Le Saint des Seins font valoir que l'établissement est en droit de bénéficier des normes de réduction prévues à l'annexe 2 du protocole précité pour la part de ses recettes afférentes à son activité de bar à ambiance musicale, mais contestent les modalités de calcul retenues par le tribunal à ce titre.

La SPRE demande la confirmation du jugement qui a considéré qu'en vertu de l'annexe 2 du protocole d'accord du 10 novembre 2011, le Saint des Seins pouvait bénéficier de normes de réduction pour la part de ses recettes afférentes à son activité de bar à ambiance musicale. La SPRE fait par ailleurs valoir que, n'étant pas à jour de ses obligations de déclaration et de paiement de la rémunération équitable, la société Le Saint des Seins ne peut dès lors prétendre à la réduction de 5% au titre d'une adhésion au syndicat UMIH.

En l'espèce, la SPRE reconnaissant que la société le Saint des Seins bénéficie des normes de réduction prévues à l'annexe 2 du protocole pour son activité BAM, telles que retenues par le tribunal, à savoir les abattements forfaitaires prévus pour une ouverture avant 18h, l'activité de musique vivante et l'exploitation d'une terrasse extérieure non sonorisée, il convient de confirmer le calcul de la rémunération équitable retenu par le tribunal et tenant compte de ces abattements forfaitaires, sauf à actualiser le montant dû à la date du présent arrêt.

A ce titre, les méthodes de calcul détaillées par la SPRE et les montants par elle obtenus dans ce cadre, sont conformes aux dispositions légales et réglementaires applicables en l'espèce et rappelées supra, tandis que les données qu'elle a prises en compte sont confirmées par les justificatifs comptables, les factures et les décomptes produits à la procédure. Il est également établi que le solde de 5.072,14 € demandé par la SPRE selon décompte produit en pièce 2.11, tient effectivement compte de tous les montants réglés par la société le Saint des Seins jusqu'au 28 février 2022.

Par ailleurs, les moyens par lesquels Mme [V] et la société Le Saint des Seins entendent contester le calcul détaillé par la SPRE, aboutissent à un décompte erroné à plusieurs égards. En effet, les appelantes procèdent pour certains exercices, à l'application d'un abattement pour exploitation d'une terrasse non sonorisée erroné ou non justifié et/ou à l'application d'un abattement pour existence d'une activité de musique vivante sans pour autant communiquer de justificatifs comptables propres à établir une ventilation du chiffre d'affaires, ainsi qu'à l'application de l'abattement lié à l'adhésion syndicale UMIH dont elles ne peuvent bénéficier dans le cadre du barème BAM/RAM, faute pour elle d'être à jour de leurs obligations de déclarations et de paiement envers la SPRE comme l'exige l'article 3 du protocole d'accord du 10 novembre 2011.

Au surplus, les appelantes ne peuvent valablement soutenir que l'application de certains abattements puisse donner lieu à une assiette de la rémunération équitable négative, alors que ces abattements s'appliquent, le cas échéant, en cascade, de sorte qu'il subsiste nécessairement une assiette positive servant au calcul des sommes dues à la SPRE.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société le Saint des Seins à payer à la SPRE, au titre de la rémunération équitable due pour la période du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2018, la somme en capital de 89.044,23 €, avec intérêts au taux légal, sur la somme de 63.257,65 € à compter de la mise en demeure du 5 avril 2013 et sur la somme de 25.786,58 € à compter du jugement, et d'y ajouter la condamnation de la société le Saint des Seins à payer à la SPRE la somme de 5.072,14 € au titre du solde de rémunération équitable restant dû pour la période allant du 1er janvier 2008 au 28 février 2022, avec intérêts au taux légal sur cette somme à compter du présent arrêt.

Sur la responsabilité personnelle de Mme [V]

Mme [V] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu que l'action en responsabilité personnelle engagée contre elle par la SPRE est prescrite pour la période antérieure au 16 septembre 2010. Elle critique cependant le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité personnelle pour la période du 16 septembre 2010 au 31 juillet 2018 et l'a condamnée in solidum avec la société Le Saint des Seins au paiement des condamnations prononcées, à concurrence de 50.932,98 €, faisant valoir qu'elle ne cherche pas à échapper au paiement de la rémunération équitable, qu'elle souhaite seulement que les particularités de son établissement soient prises en compte et qu'aucune faute détachable de ses fonctions n'est établie.

La SPRE ne conteste pas la prescription de son action en responsabilité personnelle de la dirigeante concernant de la période antérieure au 16 septembre 2010. Pour la période postérieure, elle fait valoir que le défaut de versement de la rémunération équitable est un délit, qu'il est de jurisprudence constante que le dirigeant qui diffuse des phonogrammes dans son établissement sans régler la rémunération équitable commet une faute détachable de ses fonctions engageant sa responsabilité civile personnelle et que Mme [V] a une connaissance précise de ses obligations, puisqu'elle a déjà été condamnée à titre personnel par arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 22 septembre 2010, pour avoir exploité un autre établissement de 2002 à 2006 sans régler la rémunération équitable. La SPRE sollicite dès lors la confirmation du jugement sur la responsabilité personnelle de Mme [V] et la fixation du quantum de son obligation à la somme de 5.072,14 €, outre intérêts légaux et capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil.

Les parties ne contestant pas la prescription de l'action en responsabilité personnelle de Mme [V] pour la période antérieure au 16 septembre 2010, le jugement sera confirmé sur ce point.

Concernant la période postérieure à cette date, il est constant que le dirigeant d'une société commerciale qui commet dans l'exercice de ses fonctions une infraction pénale intentionnelle, détachable de ses fonctions, engage sa responsabilité civile personnelle sur le fondement de l'article 1382 devenu 1240 du code civil, à l'égard des tiers auxquels cette faute a causé un préjudice.

Par ailleurs, le défaut de versement de la rémunération équitable due aux artistes-interprètes et aux producteurs de phonogrammes constitue une faute d'une particulière gravité, sanctionnée pénalement par les dispositions de l'article L.335-4 alinéa 3 du code de la propriété intellectuelle et en conséquence détachable de ses fonctions pour le dirigeant qui la commet.

En l'espèce, depuis la création de la société Le Saint des Seins, Mme [V] fait diffuser quotidiennement de la musique enregistrée dans son établissement, sans pour autant s'acquitter du paiement de la rémunération équitable, laquelle constitue une créance alimentaire pour les artistes, en application des articles L.131-8 et L.333-2 du code de la propriété intellectuelle.

En outre, Mme [V] ne procède pas aux règlements dus à la SPRE au titre de la rémunération équitable depuis le 1er janvier 2008, alors même qu'elle a déjà été condamnée à titre personnel par arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 22 septembre 2010 à raison du non paiement de la rémunération équitable entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2006 par la société La Couleur de la Culotte, exploitant l'établissement du même nom et dont elle est également la dirigeante.

Ainsi, Mme [V] avait une parfaite connaissance de ses obligations en la matière, dont elle n'a eu de cesse de retarder l'exécution et pour lesquelles elle a engagé et prolongé des pourparlers à des fins manifestement dilatoires. Nonobstant le refus infondé de la SPRE d'accorder à son établissement le bénéfice de certains abattements forfaitaires prévus à l'annexe 2 du protocole du 10 novembre 2011, Mme [V] a persisté durant plusieurs années dans son refus de communication à la SPRE d'éléments nécessaires au calcul des sommes dues et a reconnu être redevable d'un arriéré de rémunération équitable.

Il résulte de ces éléments que Mme [V] a commis une faute civile, qui engage sa responsabilité personnelle en sa qualité de dirigeante de la société Le Saint des Seins.

En conséquence, la responsabilité civile personnelle de Mme [V] en raison du non paiement par la société Le Saint des Seins de la rémunération équitable doit être retenue et le jugement confirmé sur ce point. Il convient de la condamner in solidum avec la société Le Saint des Seins à payer à la SPRE les sommes restant dues à ce titre pour la période du 16 septembre 2010 au 28 février 2022, soit un montant 5.072,14 €, ainsi que cela ressort du décompte produit en pièce 2.11 par l'intimée.

Sur la demande indemnitaire formée la SPRE

La SPRE fait valoir qu'elle est une société de perception et de répartition des droits et non une société de recouvrement de créances et que le recouvrement contentieux de la rémunération équitable constitue pour elle un coût non inhérent à la gestion des droits, qui vient s'imputer sur le montant revenant aux ayants droit. Elle fait ainsi valoir qu'elle subit un préjudice matériel, correspondant au coûts pré-contentieux et contentieux internes et un préjudice moral, résultant de l'atteinte à sa mission légale et du trouble causé à son fonctionnement du fait de l'infraction commise par la dirigeante de la société Le Saint des Seins. Elle sollicite en réparation la condamnation in solidum des appelantes à lui payer la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts, en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours de procédure.

En réponse, les appelantes estiment que la SPRE ne démontre pas les préjudices qu'elle invoque et concluent au débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Il est en l'espèce établi que le comportement fautif de la société Le Saint des Seins et de sa dirigeante, Mme [V], a contraint la SPRE à supporter des frais de gestion supplémentaires pour la mise en recouvrement des sommes dues au titre de la rémunération équitable, ce qui constitue pour elle un préjudice matériel. En outre, l'atteinte portée à son fonctionnement et aux droits des artistes-interprètes et producteurs de phonogrammes, dont elle assure la gestion dans le cadre de sa mission légale, constitue pour elle un préjudice moral. Ces préjudices subis par la SPRE seront réparés par la condamnation in solidum des appelantes à lui payer la somme de 2.000 €, confirmant le jugement de ce chef.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il y a lieu de confirmer le jugement du 5 février 2019 en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Sur ce fondement, la société Le Saint des Seins et Mme [V] supporteront la charge des dépens.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

En l'espèce, la société Le Saint des Seins et Mme [V] seront condamnées à verser à la SPRE la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Révoque l'ordonnance de clôture;

- Prononce la clôture de l'instruction à la date du 15 mars 2022 ;

- Confirme le jugement du 5 février 2019 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- Constate le paiement partiel en cours d'instance d'appel des condamnations prononcées par le jugement du 5 février 2019 ;

- Condamne la SAS Le Saint des Seins à payer à la Société pour la Perception de la Rémunération Équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE), au titre de la rémunération équitable restant due pour la période entre le 1er janvier 2008 et le 28 février 2022, la somme en capital de 5.072,14 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt;

- Ordonne la capitalisation des intérêts dus par année entière à compter du présent arrêt en application de l'article 1343-2 du code civil;

- Dit que Mme [G] [V] sera tenue in solidum avec la SAS Le Saint des Seins de la condamnation prononcée ci-dessus, à hauteur de 5.072,14 euros ;

- Condamne in solidum la SAS Le Saint des Seins et Mme [G] [V] à payer à la SPRE une somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Déboute les parties de leur demandes plus amples ou contraires ;

- Condamne in solidum la SAS le Saint des Seins et Mme [G] [V] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/02213
Date de la décision : 03/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-03;19.02213 ?
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