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03/05/2022 | FRANCE | N°19/01374

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 03 mai 2022, 19/01374


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 03 MAI 2022



RP





N° RG 19/01374 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5GD









[B] [Z]



c/



SCI LOGIS DU [L]



[C] [K]























Nature de la décision : AU FOND
























r>

Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 février 2019 par le Tribunal de Grande Instance d'ANGOULEME (RG : 16/02568) suivant déclaration d'appel du 11 mars 2019





APPELANT :



[B] [Z]

né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 12]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 11]



représen...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 03 MAI 2022

RP

N° RG 19/01374 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K5GD

[B] [Z]

c/

SCI LOGIS DU [L]

[C] [K]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 février 2019 par le Tribunal de Grande Instance d'ANGOULEME (RG : 16/02568) suivant déclaration d'appel du 11 mars 2019

APPELANT :

[B] [Z]

né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 12]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 11]

représenté par Maître Michel PUYBARAUD de la SCP MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SCI LOGIS DU [L], inscrite au registre du commerce et des sociétés d'Angoulême sous le numéro 432 522 993, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège sis [Adresse 4]

représentée par Maître Katell LE BORGNE de la SCP LAVALETTE AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTERVENANTE SUR ACTE D'APPEL PROVOQUE :

Maître [C] [K]

née le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 9]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 7]

représentée par Maître Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 mars 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Roland POTEE, président,

Vincent BRAUD, conseiller,

Bérengère VALLEE, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Par acte notarié du 3 juin 2004, dressé en l'étude de maître [V] [O], notaire à [Localité 14], avec la participation de maître [M] [P], notaire à [Localité 15], la SCI Logis du [L], représentée par son gérant, M. [G] [L], a fait l'acquisition auprès de la SCI du Pontouvre, représentée par son gérant M. [B] [Z], d'un ensemble immobilier sur la commune de [Localité 10] pour un prix de 363.200 €.

La SCI Logis du [L] n'avait pu, à cette époque, faire l'acquisition de la parcelle cadastrée BC [Cadastre 2] appartenant à M. [Z], dont les bâtiments étaient contigus à l'ensemble immobilier et l'entrée commune.

Dans ces circonstances, M.[Z] est intervenu à l'acte du 3 juin 2004 pour constitution d'un pacte de préférence dans les termes suivants :

'Pour le cas où Monsieur [B] [Z], ci-dessus intervenant, se déciderait à vendre l'immeuble contigu à ceux présentement vendus, cadastré section BC n° [Cadastre 2] pour 4 a 75 ca, dont il est propriétaire en vertu de l'acte de Maître [W] [P], Notaire à [Localité 13], du 24 novembre 1995, Volume 1995 P N° 6630,

Il déclare s'engager pour une durée de quinze ans à compter de ce jour inclusivement envers l'acquéreur, ce qui est accepté en son nom par Monsieur [G] [L], à lui donner la préférence sur tout amateur ou acquéreur qui se présenterait à lui.

Il s'oblige en conséquence, à lui faire connaître le prix demandé ainsi que les modalités de paiement et toutes autres conditions auxquelles il serait disposé à traiter et à lui notifier par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au siège de sa société.

La date de l'avis de réception de cette lettre par la SCI Logis du [L] fixera le point de départ du délai de 2 mois avant l'expiration duquel ladite société devra faire connaître à Monsieur [Z] son intention d'user du droit de préférence. Passé ce délai, sans manifestation de sa part, la SCI Logis du [L] sera définitivement déchue de ce droit.

Bien que le droit conféré à l'acquéreur ne constitue pas une restriction au droit de disposer du promettant, au sens de l'article 28-2° du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, les présentes seront, conformément à l'article 37-1 du décret précité, et seulement à titre d'information des tiers, publiées au bureau des hypothèques compétents par les soins du Notaire soussigné et aux frais de l'Acquéreur. Pour la perception du salaire de Monsieur le Conservateur audit bureau des hypothèques il est évalué à la somme de 1.000,00 euros.'

La parcelle cadastrée BC [Cadastre 2] a été cédée par M. [Z] à un tiers moyennant le prix de 15.000 €, suivant acte établi par maître [C] [K], notaire à [Localité 15], successeur de maître [M] [P], le 26 mai 2015.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 31 décembre 2015, maître [T], avocat de M. [G] [L] et de la SCI Logis du [L], écrivait à M. [B] [Z] pour lui reprocher un manquement fautif à ses obligations contractuelles découlant du pacte de préférence car il n'avait pas informé son client de son intention de céder la parcelle litigieuse. 

M. [Z] était mis en demeure en vain d'avoir à indemniser la SCI Logis du [L] de sa perte de chance d'acquérir le terrain vendu par le versement d'une somme de 15.000 € à titre de dommages intérêts outre celle de 1.000 € à titre de remboursement des frais de publication du pacte de préférence signé en 2004.

Le même jour, le conseil de la SCI Logis du [L] adressait un courrier recommandé avec avis de réception à maître [C] [K], lui reprochant de ne pas avoir vérifié les droits du vendeur ou purgé préalablement à la vente le droit de préférence contenu dans l'acte de 2004, droit de préférence qu'elle ne pouvait ignorer, étant successeur de maître [P], lequel avait participé à la rédaction de l'acte.

Maître [C] [K] était ainsi mise en demeure d'avoir à indemniser la SCI Logis du [L] de sa perte de chance d'acquérir le terrain vendu sur quoi Maître [K] réfutait ainsi tout manquement de M. [Z] à ses obligations contractuelles en faisant répondre par courrier de son avocat du 19 janvier 2016, que la SCI Logis du [L] avait bien été informée de l'intention de M. [Z] de céder la parcelle litigieuse, par courrier recommandé du 7 juillet 2011, non réclamé, dont elle joignait une copie, adressé à la SCI Logis du [L], [Adresse 5].

Maître [T] répondait que le siège social de sa cliente ne se situait pas et ne s'était jamais situé [Adresse 5], ce que M. [Z] ne pouvait ignorer, l'adresse du siège social de la SCI Logis du [L] étant mentionnée dans l'acte notarié du 3 juin 2004, ce dont il résultait que M. [Z] avait volontairement adressé sa lettre recommandée à une mauvaise adresse et qu'il n'avait donc pas respecté ses obligations contractuelles.

Aucun accord n'ayant pu intervenir entre les parties, la SCI Logis du [L] a fait assigner M. [Z] et maître [K] au visa des articles 1134, 1142 et 1382 du code civil dans leur version antérieure au 1er octobre 2016, aux fins de les entendre condamner in solidum, avec exécution provisoire, au paiement des sommes suivantes :

* 14.500 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice résultant de sa perte de chance d'acquérir le terrain pour lequel elle bénéficiait d'un pacte de préférence ;

* 1.000 € à titre de remboursement des frais de publication du pacte de préférence;

* et 2.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 14 février 2019, le tribunal de grande instance d'Angoulême a :

- dit que M. [Z] n'a pas respecté ses obligations découlant du pacte de préférence signé le 3 juin 2004 au bénéfice de la SCI Logis du [L],

- dit que Me [K], notaire, n'a commis aucune faute et que sa responsabilité n'est pas engagée,

- dit que la SCI Logis du [L] a perdu une chance d'acquérir la parcelle litigieuse et rapporte la preuve de l'existence d'un préjudice,

En conséquence,

- condamné M. [Z] à payer à la SCI Logis du [L] la somme de 10.000 € à titre de dommages intérêts,

- débouté M. [Z] de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive,

- débouté Me [K] de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M.[Z] à payer à la SCI Logis du [L] la somme de 1.500 € au titre de l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires au dispositif,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

M. [B] [Z] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 11 mars 2019 et par conclusions déposées le 9 novembre 2021, il demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel

Pour fruit,

A titre principal :

- constater qu'il a respecté les obligations qui lui incombaient découlant du pacte de préférence dont bénéficiait la SCI Logis du [L] lorsque celui-ci a souhaité mettre en vente l'immeuble lui appartenant,

- constater, en tout état de cause, et dans l'hypothèse fort improbable où une faute serait retenue à son encontre, que la S.C.I. Logis du [L] n'a subi aucun préjudice,

- la débouter, par voie de conséquence, de l'ensemble de ses prétentions et décharger M. [Z] de toutes condamnations,

A titre subsidiaire :

- condamner Maître [K], Notaire, à relever indemne M. [Z] de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

Reconventionnellement,

- Condamner à titre principal la SCI Logis du [L] ou à titre subsidiaire, Maître [K], à lui verser une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner, dans les mêmes conditions et précédemment et selon les responsabilités retenues, aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, avec bénéfice de distraction.

Par conclusions du 10 novembre 2021, la SCI Logis du [L] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris, sauf a faire droit à l'appel incident de la SCI Logis du [L] quant au quantum des dommages et intérêts qui lui ont été alloués - et donc à le réformer de ce chef -, ainsi qu'à son appel provoqué à l'encontre de Me [K],

En conséquence, statuant à nouveau :

- condamner in solidum M. [Z] et Maitre [K] a verser à la SCI Logis du [L] :

* la somme de 14.500,00 € a titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice résultant de sa perte de chance d'acquérir le terrain pour lequel elle bénéficiait d'un pacte de préférence ;

* et la somme de 1.000,00 € à titre de remboursement des frais de publication du pacte de préférence de 2004,

- débouter M. [Z] et Maitre [K] de l'intégralité de leurs demandes.

- confirmer le jugement entrepris en ce que M. [Z] a été condamné à payer à la SCI Logis du [L] la somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles de première instance, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance.

- condamner in solidum M. [Z] et Maitre [K] à verser à la SCI Logis du [L] la somme de 3.000,00 € au titre des frais irrépétibles qu'elle est contrainte d'exposer en cause d'appel, outre aux entiers dépens d'appel.

Par conclusions du 17 novembre 2021, Me [C] [K] demande à la cour de :

- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, et y ajoutant,

- prononcer l'irrecevabilité de la demande nouvelle formulée par M. [Z] à son encontre,

- condamner tout succombant à verser à Maître [C] [K] une somme de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 15 mars 2022 avec une clôture de l'instruction par ordonnance du 1er mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes dirigées contre M.[Z]

M. [Z] fait grief au jugement entrepris d'avoir retenu une violation de ses obligations issues du pacte de préférence signé le 3 juin 2004, par l'envoi à une adresse erronée de l'offre de vente de la parcelle concernée par le pacte alors que :

- ce pacte n'imposait pas l'envoi de l'offre de vente à l'adresse du siège de la société telle qu'elle figure à l'acte,

- le siège de la SCI Logis du [L] indiqué au RCS se situe au [Adresse 6], comme le confirment les factures d'énergie produites et suite à la renumérotation de la voie en 2006, la SCI disposait d'une boîte aux lettres sur cette route au n° 47, adresse à laquelle l'offre a été adressée.

La SCI Logis du [L] réplique que l'adresse de son siège social au [Adresse 8], figurant à l'acte notariée de 2004 n'a pas changé avant 2019, qu'il n'existe pas de n° 47 [Adresse 5] à [Localité 10] suite à la renumérotation de la voie et que la SCI Logis du [L] n'a jamais disposé d'une boîte aux lettres aux n° 5 bis ou 27 ou 41 comme soutenu pas l'appelant, la SCI ne bénéficiant que d'une servitude de passage prévue sur la parcelle [Cadastre 2] pour permettre l'accès des locataires à leurs boîtes aux lettres.

La SCI Logis du [L] précise que la seule boîte aux lettres ayant existé au 5 bis concernait la SARL Logis du [L], marchand de biens qui a été dissoute le 31/12/2007 et dont l'adresse de correspondance pour la liquidation était en outre la même que celle de la SCI au [Adresse 8], que cette boîte aux lettre que certains locataires avaient l'habitude d'utiliser pour le dépôt des loyers, a été retirée courant 2010, suite à des dégradations.

Au vu des pièces soumises à la cour, il n'est nullement démontré par M. [Z] que la SCI Logis du [L], distincte de la SARL Logis du [L] qui avait son siège social au [Adresse 6], jusqu'à sa dissolution publiée en février 2008, ait fixé son siège social ou ait disposé d'une boîte aux lettres au n° 47 de cette route, numéro d'ailleurs inexistant après la renumérotation de la voie en 2005/2006, selon le cadastre de la commune (Pièce 10 et 11 de la SCI Logis du [L]) qui ne fait apparaître pour les parcelles en cause, que les n° 27, 41, 9 et 53.

Par ailleurs et comme l'a exactement noté le premier juge, le fait que la Poste ait retourné le courrier de M. [Z] du 7 juillet 2011 avec la mention 'non réclamé' au lieu de 'inconnu à cette adresse' ne permet pas de valider l'adresse du [Adresse 5].

M. [Z] n'établit pas non plus avoir été informé par la SCI Logis du [L] d'un changement d'adresse de son siège social par rapport à celle figurant à l'acte notarié du 3 juin 2004, soit au [Adresse 8].

Il a donc violé les obligations lui incombant aux termes du pacte de préférence contenu dans cet acte qui lui faisait obligation pour une durée de quinze ans, de donner la préférence à M. [G] [L], pour le cas où il se déciderait à vendre son immeuble et à lui notifier le prix demandé et les autres conditions de la vente par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au siège de sa société, cette adresse étant indiquée dans l'acte lui même.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu le manquement de l'appelant à ses obligations contractuelles.

Sur les demandes dirigées contre Me [K]

M. [Z] demande, à titre subsidiaire la condamnation de Me [K] à le relever indemne de toutes condamnations pouvant être prononcées contre lui.

Comme le fait valoir Me [K], cette demande, nouvelle en appel, apparaît irrecevable en application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, cette prétention ne pouvant s'analyser en une demande reconventionnelle ou comme l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des demandes soumises au premier juge.

S'agissant des demandes formées à l'encontre du notaire, sur le fondement de sa responsabilité délictuelle pour n'avoir pas vérifié les droits des parties et purgé le droit de préférence avant la vente, la SCI Logis du [L] reproche au tribunal de l'avoir écartée alors que Me [K] ne pouvait ignorer l'existence du pacte de préférence figurant à l'acte établi par son prédécesseur et publié, que l'acte de vente du 26 mai 2015 ne fait aucune mention de l'existence du pacte de préférence dont l'acquéreur n'a pas été informé et que le notaire n'a pas pu s'assurer du respect du pacte par M. [Z] au seul vu du courrier recommandé du 7 juillet 2011 envoyé à une adresse différente de celle du siège de la société.

Me [K] réplique en premier lieu que le notaire n'est garant que des intérêts des parties en présence à l'acte qu'il reçoit et qu'il a ainsi pour seule obligation d'alerter le promettant sur son obligation de notifier sa volonté de vendre au bénéficiaire du pacte, sans pouvoir avertir lui même ce dernier ou s'opposer à la vente et en second lieu, qu'elle a bien interrogé le vendeur quant à ses obligations de promettant à l'égard de la SCI Logis du [L] et qu'elle n'avait aucune raison de remettre en cause le justificatif présenté par M. [Z] s'agissant au surplus d'un courrier revenu avec la mention « non réclamé » et non « inconnu à cette adresse », de sorte qu'elle ne pouvait pas soupçonner que l'adresse mentionnée sur ledit courrier était erronée .

Toutefois, le tribunal n'a pu, sans se contredire, considéré à juste raison que le fait que la Poste ait retourné le courrier de M. [Z] du 7 juillet 2011 avec la mention 'non réclamé' au lieu de 'inconnu à cette adresse' ne permettait pas d'écarter le manquement de M. [Z] à ses obligations contractuelles, tout en estimant que ce même fait permettait d'exonérer le notaire de sa responsabilité délictuelle, dès lors que le courrier présenté au notaire par M. [Z] n'avait pas été adressé au siége social de la SCI Logis du [L], figurant à l'acte établi par le prédécesseur de Me [K] et que la mention de la Poste sur le courrier retourné ne suffisait pas à établir la validité de la nouvelle adresse du bénéficiaire du pacte de préférence.

Le défaut de vérification par Me [K] de la validité de la nouvelle adresse mentionnée au courrier présenté par M. [Z] consitue ainsi un manquement à son obligation de vérification des droits des parties et de purge du droit de préférence et le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef.

Sur les préjudices indemnisables

Les débats d'appel et les pièces soumises à la cour ne permettent pas de remettre en cause l'exacte analyse du premier juge confirmant la perte de chance subie par la SCI Logis du [L] pour ne pas avoir pu acquérir la parcelle litigieuse, regrouper ainsi plusieurs de ses parcelles et par la même, faire disparaître les servitudes grevant ces parcelles.

Toutefois, il ne doit pas être oublié que si le pacte de préférence avait été respecté et si la SCI Logis du [L] avait ainsi acquis la parcelle litigieuse offerte au prix de 15.000 €, elle aurait dû verser cette somme, ce qui est de nature à relativiser le préjudice financier résultant de la perte de chance subie qui sera ainsi ramené à 3.000 €.

Cette somme sera mise à la charge in solidum de M. [Z] et de Me [K], puisque leurs fautes respectives ont contribué à l'entier préjudice mais Me [K] ne supportera cette condamnation qu'à hauteur de 1.000€, compte tenu de la moindre gravité de sa faute par rapport à celle de M.[Z].

S'agissant de la demande en remboursement des frais de publication du pacte de préférence sur laquelle le tribunal a omis de statuer, il y a lieu de constater que les frais de publication restent dus, quelles que soient les conditions d'exécution du pacte et qu'ils ne constituent donc pas un préjudice indemnisable.

Il est équitable de mettre à la charge de l'appelant et de Me [K] qui supporteront in solidum les dépens de première instance et d'appel, une indemnité de 1.500 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais engagés en appel.

Les autres demandes fondées sur le même texte seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- dit que Me [K], notaire, n'a commis aucune faute et que sa responsabilité n'est pas engagée,

- condamné M. [Z] à payer à la SCI Logis du [L] la somme de 10.000 € à titre de dommages intérêts,

Statuant à nouveau dans cette limite;

Dit que Me [K] a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle;

Condamne M. [Z] in solidum avec Me [K] à payer à la SCI Logis du [L] la somme de 3.000 € à titre de dommages intérêts,

Dit que dans leurs rapports entre eux, Me [K] supportera cette condamnation à hauteur de 1.000 €;

Confirme le jugement pour le surplus et, y ajoutant;

Déclare irrecevable la demande de garantie de Maître [K], à relever indemne M. [Z] de toutes condamnations prononcées à son encontre,

Rejette la demande de M. [Z] au titre du remboursement des frais de publication du pacte de préférence;

Condamne M. [Z] et Me [K] à payer chacun à la SCI Logis du [L], la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Rejette les autres demandes au même titre;

Dit que la condamnation de M. [Z] aux dépens de première instance sera prononcée in solidum avec Me [K];

Condamne in solidum M. [Z] et Me [K] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/01374
Date de la décision : 03/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-03;19.01374 ?
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