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22/10/2020 | FRANCE | N°17/06473

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 22 octobre 2020, 17/06473


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 22 OCTOBRE 2020



(Rédacteur : Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller)





F N° RG 17/06473 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-KEN2







Monsieur [E] [G] [H] [Z]

Madame [J] [F] [B] épouse [Z]

SARL MOULIN DE VIGONAC





c/



Monsieur [O] [I]

SARL PLATRIERS PEINTRES ASSOCIES

SARL DANIEL

SARL MJ JAMOT INSTALLATION ET PRESTATION DE SER

VICE

SARL MATHIS ET DANEDE

SAS SOCIETE DE COUVERTURE ETANCHEITE PERIGOURDINE (SCE P)

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS



























Nature de la décision : AU FOND











Grosse délivrée...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 22 OCTOBRE 2020

(Rédacteur : Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller)

F N° RG 17/06473 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-KEN2

Monsieur [E] [G] [H] [Z]

Madame [J] [F] [B] épouse [Z]

SARL MOULIN DE VIGONAC

c/

Monsieur [O] [I]

SARL PLATRIERS PEINTRES ASSOCIES

SARL DANIEL

SARL MJ JAMOT INSTALLATION ET PRESTATION DE SERVICE

SARL MATHIS ET DANEDE

SAS SOCIETE DE COUVERTURE ETANCHEITE PERIGOURDINE (SCE P)

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 07 novembre 2017 (R.G. 13/00978) par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d'appel du 23 novembre 2017

APPELANTS :

[E] [G] [H] [Z]

né le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 5] (SARTHE)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 8]

[J] [F] [B] épouse [Z]

née le [Date naissance 3] 1951 à [Localité 7] (GABON)

de nationalité Française

Co-gérant(e) de société, demeurant [Adresse 8]

SARL MOULIN DE VIGONAC immatriculée au RCS de PERIGUEUX sous le n° 398 003 921, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

sis [Adresse 8]

Représentés par Me Claire LE BARAZER de la SCP CLAIRE LE BARAZER & LAURÈNE D'AMIENS, avocat au barreau de BORDEAUX et assistés de Me Murielle NOEL de l'ASSOCIATION GRAND-BARATEAU-NOEL, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉS :

[O] [I]

de nationalité Française

Architecte, demeurant [Adresse 11]

Représenté par Me Julien MAZILLE de la SCP LATOURNERIE - MILON - CZAMANSKI - MAZILLE, avocat au barreau de BORDEAUX

SARL PLATRIERS PEINTRES ASSOCIES

sur appel provoqué de la MAF

sis [Adresse 10]

SARL MJ JAMOT INSTALLATION ET PRESTATION DE SERVICE

sur appel provoqué de la MAF

sis [Adresse 13]

Représentées par Me Edwige HARDOUIN, avocat au barreau de BORDEAUX et assistées Me Myriam LENGLEN de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de PERIGUEUX

SARL DANIEL prise en la personne de ses représentants légaux

sur appel provoqué de la MAF

sis à [Adresse 6]

non représentée mais régulièrement assignée

SARL MATHIS ET DANEDE

sur appel provoqué de la MAF

sise [Adresse 9]

Représentée par Me Marie JOUANNEAUX substituant Me Jean-philippe RUFFIÉ de la SCP CABINET LEXIA, avocat au barreau de BORDEAUX

SAS SOCIETE DE COUVERTURE ETANCHEITE PERIGOURDINE (SCE P)

sur appel provoqué de la MAF

sis [Adresse 12]

Représentée par Me Bénédicte LAGARDE-COUDERT de la SELAS NUNEZ-LAGARDE COUDERT-MARTINS DA SILVA, avocat au barreau de PERIGUEUX

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

sis [Adresse 1]

Représentée par Me David LARRAT de la SELARL H.L. CONSEILS, avocat au barreau de PERIGUEUX et assistée de Me Férouze MEGHERBI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 septembre 2020 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Jeanne LAVERGNE-CONTAL, Président et Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller chargé du rapport,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie Jeanne LAVERGNE-CONTAL, Président,

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

- par défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

M. [E] [Z] et Mme [J] [B] épouse [Z] sont propriétaires d'un ensemble immobilier situé commune de Brantôme (Dordogne), lieu-dit Moulin de Vigonac, composé d'un ancien moulin et de divers autres bâtiments.

Selon contrat en date du 27 mars 2001, ils ont conclu avec la SARL Le Saint-Sicaire, dont M. et Mme [Z] sont associées et M. [Z] le gérant, un bail commercial portant sur cet ensemble immobilier, à destination d'une activité d'hôtel, café, brasserie, salon de thé, pour une durée de neuf années. Par décision du 21 novembre 2007, la dénomination de la SARL Le Saint-Sicaire a été modifiée en celle de SARL le Moulin de Vigonac.

Par acte sous seing-privé en date du 16 mai 2005, M. et Mme [Z] ont conclu avec M. [O] [I], architecte assuré auprès de la Compagnie Mutuelle des Architectes Français (MAF), un contrat d'architecte portant sur des travaux de réalisation d'un hôtel-restaurant dans l'ensemble immobilier pour un montant total de 354.928,25 euros.

Le contrat prévoyait que la durée des travaux devait être de 7 mois. Ceux-ci ont débuté au mois d'octobre 2006.

L'ouverture de l'établissement à la clientèle a été autorisée par la commission de sécurité le19 juin 2008.

Alléguant l'existence de divers préjudices imputables aux manquements de l'architecte et notamment en raison du retard dans les travaux, la SARL Moulin de Vigonac a fait assigner, par actes en date des 4 et 5 juin 2013, M. [I] et son assureur la MAF devant le tribunal de grande instance de Périgueux afin d'engager sa responsabilité sur le fondement des articles 1134 et 1147 anciens du code civil, M. et Mme [Z] étant intervenus volontairement à l'instance aux côtés de la SARL Moulin de Vigonac par conclusions du 10 février 2017.

Par actes en dates des 11 et 18 mars 2014, la MAF a appelé en garantie :

- la SARL PLATRIERS PEINTRES ASSOCIES (PPA), lot plâtrerie et isolation,

- la SARL DANIEL, lot revêtements de sols,

- la SARL MJ JAMOT, lot électricité et plomberie,

- la SARL MATHIS et DANEDE, lot lot charpente et couverture,

- la SARL COUVERTURE ET ETANCHEITE PERIGOURDINE (SCEP), lot étanchéité.

Par jugement en date du 7 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Périgueux a :

- rejeté la demande de la SARL Moulin de Vigonac et de M. et Mme [Z] d'écarter des débats le rapport rédigé par M. [R] [P] ;

- dit qu'aucun lien contractuel n'est justifié entre la SARL Moulin de Vigonac et M. [I];

- déclaré irrecevable en conséquence l'action intentée par la SARL Moulin de Vigonac à l'encontre de M. [I] et de son assureur la MAF sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour défaut de qualité ;

- déclaré prescrite l'action intentée par M. et Mme [Z] à l'encontre de M.[I] et de son assureur la compagnie Mutuelle des Architectes Français ;

- déclaré irrecevable en conséquence l'intervention volontaire de M. et Mme [Z] à la présente instance ;

- déclaré irrecevable comme prescrite la demande en paiement présentée par M. [I] à l'encontre de la SARL Moulin de Vigonac ;

- rejeté la demande de dommage et intérêts présentée par la SARL SCEP à l'encontre de la MAF;

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions ;

- condamné la SARL Moulin de Vigonac prise en la personne de son représentant légal à verser à M. [I] la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL MOULIN de VIGONAC prise en la personne de son représentant légal à verser à la MAF la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la MAF prise en la personne de son représentant légal à verser à la SARL MATHIS ET DANEDE la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la MAF prise en la personne de son représentant légal à verser à la SARL SCEP la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la MAF prise en la personne de son représentant légal à verser à la SARL PPA la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la MAF prise en la personne de son représentant légal à verser à la SARL MJ JAMOT INSTALLATION ET PRESTATION DE SERVICE la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL MOULIN de VIGONAC prise en la personne de son représentant légal à supporter la charge des dépens de la présente instance ;

- autorisé, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, Maître LARRAT à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration en date du 23 novembre 2017, la SARL MOULIN de VIGONAC et M. et Mme [Z] ont formé appel de cette décision.

Par acte en date du 14 mai 2018, la MAF a assigné aux fins d'appel provoqué la SARL PPA, la SARL DANIEL, la SARL JAMOT installations et prestations de service, la SARL MATHIS et DANEDE et la SARL SCEP.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 21 novembre 2019, a été constatée l'irrecevabilité des conclusions signifiées par la SARL PPA et la SARL MJ JAMOT installations et prestations de service le 4 décembre 2018 et par la SAS SCEP le 17 août 2018.

Par leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 17 juillet 2018 et signifiées à la SARL DANIEL par acte du 16 août 2018, la SARL MOULIN de VIGONAC et M. et Mme [Z] demandent, sur le fondement des articles 1147, 1383, 1134 anciens du code civil et 2224 du code civil, 12, 33 et 36 du code des devoirs professionnels des architectes et 565 du code de procédure civile, de :

- dire et juger l'appel interjeté par la SARL MOULIN de VIGONAC à l'encontre du jugement prononcé le 7 novembre 2017 par le tribunal de grande instance de Périgueux recevable et bien fondé,

- dire et juger l'appel interjeté par M. [E] [Z] et Mme [J] [B] son épouse à l'encontre du jugement prononcé le 7 novembre 2017 par le tribunal de grande instance de Périgueux recevable et bien fondé,

Réformant la décision déférée,

- dire et juger que la SARL MOULIN de VIGONAC a la qualité de maître d'ouvrage et qualité à agir sur le fondement de l'article 1147 dans son ancienne rédaction du code civil à l'encontre de Monsieur [O] [I] et à défaut au visa des dispositions de l'article 1383 dans son ancienne rédaction du code civil ,

- dire et juger la SARL MOULIN de VIGONAC recevable, au visa des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile, à invoquer à titre subsidiaire en cause d'appel l'article 1383 du code civil dans son ancienne rédaction, le visa ne constituant pas une demande nouvelle et ne se heurtant pas au principe de la concentration des moyens,

- dire et juger M. et Mme [Z] recevables et bien fondés en leur intervention volontaire,

- dire et juger que M. [I] a manqué à ses obligations de conseil et d'information constituant une faute contractuelle et subsidiairement délictuelle,

- dire et juger que M. [I], architecte et maître d''uvre a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle et à défaut délictuelle en raison du retard pris au début et dans l'exécution des travaux,

-dire et juger M. [I] responsable des préjudices subis par la SARL MOULIN de VIGONAC,

- condamner M. [I], in solidum avec la MAF, à verser à la SARL MOULIN de VIGONAC, la somme de 146.304 euros au titre de la perte d'exploitation se décomposant comme suit :

- perte de marge bénéficiaire : 56.000 euros

- charges d'exploitation : 90.304 euros

- à défaut, concernant les charges d'exploitation et les loyers :

- condamner in solidum la MAF et M. [I] à verser à M. et Mme [Z] la somme de 41.250 euros au titre des loyers impayés,

- condamner in solidum la MAF et M. [I] à verser à la SARL MOULIN de VIGONAC la somme de 49.054 euros au titre des charges d'exploitation déduction faite de la créance de loyers,

- dire et juger que M. [I] a commis une faute de nature contractuelle et à défaut de nature délictuelle en n'appliquant pas les pénalités de retard prévues à l'article 2 du CCAG,

- condamner M. [I], architecte et maître d''uvre à verser à la SARL MOULIN de VIGONAC la somme de 712.824 euros au titre des pénalités de retard non appliquées,

- dire et juger que M. [I], architecte et maitre d''uvre a commis une faute en sous-évaluant le coût réel des travaux engageant sa responsabilité contractuelle et à défaut délictuelle,

- En conséquence, le condamner in solidum avec la MAF à verser à la SARL MOULIN de VIGONAC, la somme de 220.611,60 euros à titre de dommages et intérêts au titre du surcout des travaux,

- condamner M. [I], architecte et maître d''uvre à verser à la SARL MOULIN DE VIGONAC et à défaut à M. [Z] es qualité de gérant, la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice moral,

- débouter M. [I] de ses demandes présentées à l'encontre de la SARL MOULIN de VIGONAC comme non fondées,

- débouter la MAF de ses demandes présentées contre la SARL MOULIN de VIGONAC et M. et Mme [Z],

- statuer ce que de droit sur les demandes présentées par la MAF et M. [I] à l'encontre des SARL Plâtriers Peintres Associés (PPA), SARL PORTE Martine, SARL MATHIS et DANEDE, SARL DANIEL, SARL M.J JAMOT Installation et Prestation de Services,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé la demande en paiement présentée par M. [I] à l'encontre de la SARL MOULIN de VIGONAC à hauteur de 3.169,51euros au titre du solde de ses honoraires, prescrite,

- condamner M. [I], in solidum avec sa compagnie d'assurance la MAF à verser à la SARL MOULIN de VIGONAC la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la MAF et M. [I] à verser à M. et Mme [Z] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M.[I], in solidum avec sa compagnie d'assurance la MAF aux entiers dépens.

Ils soutiennent essentiellement que :

Sur la recevabilité :

- c'est la SARL MOULIN de VIGONAC et non eux-même qui a la qualité de maître d'ouvrage. En effet, il convient de rechercher quelle était la commune intention des parties sur ce point, et en l'espèce c'est par erreur que le contrat d'architecte a été établi au nom de M. et Mme [Z] aux lieu de place de celui de la SARL Le Saint-Sicaire devenue Le MOULIN de VIGONAC, cette dernière en ayant réglé les honoraires de l'architecte de même qu'elle a réglé les entreprises, au moyen de deux prêts souscrits par elle de montants de 300.000 euros et de 150.000 euros, la SARL le MOULIN de VIGONAC ayant ainsi seule rempli les obligations nées du contrat d'architecte. En conséquence, elle a bien qualité à agir à l'encontre de M. [I] et de la MAF. Ils sollicitent la réformation du jugement sur ce point.

- A titre subsidiaire, la SARL MOULIN de VIGONAC demande que son action soit déclarée recevable sur le fondement de l'article 1383 ancien du code civil. Elle conteste sur ce point l'analyse de la MAF, faisant valoir que le principe de concentration des moyens n'est pas mis en cause, la demande n'étant pas nouvelle, seul le fondement juridique étant différent.

- M. et Mme [Z] demandent que leur intervention volontaire en qualités de gérant et de co-gérant de la SARL MOULIN de VIGONAC soit déclarée recevable. Ils font valoir que l'action intentée par la SARL MOULIN de VIGONAC a nécessairement interrompu le délai de prescription à leur égard en leur qualité de gérant et de co-gérant, les deux actions étant indivisibles, les demandes de réparation procédant des mêmes fautes commises par M. [I].

Sur la responsabilité de l'architecte et maître d''uvre :

- M. [I] n'a produit que de façon incomplète les documents contractuels malgré les demandes formées en ce sens, notamment les procès-verbaux de réception, et l'ensemble des documents signés par la SARL MOULIN de VIGONAC.

- les travaux auraient du démarrer mi-juin 2006 et s'achever 7 mois plus tard soit en janvier 2007, ainsi qu'il ressort de la page 7 du CCAP, or, ils n'ont débuté qu'en septembre 2006 pour s'achever en avril et mai 2008, la commission de sécurité ne s'étant d'ailleurs réunie que le 19 juin 2008, soit un retard de 16 mois et demi.

- ce retard dans l'exécution des travaux est imputable à une double faute de M. [I], une mauvaise analyse de la durée de la construction et l'absence d'intervention auprès des entreprises pour les contraindre à respecter le planning, aucun planning d'exécution des travaux n'ayant été prévu pour chacune des entreprises alors qu'il avait une mission complète, ses fautes propres étant directement à l'origine du préjudice subi sans qu'il y ait lieu à un partage de responsabilité avec les entreprises ni que des retards dans le paiement par le maître d'ouvrage puissent être allégués comme justifiant le retard pris par les entreprises. L'attitude du maître d'ouvrage qui aurait lui-même eu du retard dans l'exécution des travaux qu'il s'était réservés ne peut pas non plus être invoquée pour expliquer le retard dans l'exécution des travaux. En effet, les époux [Z] se sont réservés uniquement une partie du lot gros-'uvre et non le lot peinture comme le soutient la MAF, le gros-'uvre étant réalisé avant que ne démarrent les travaux réalisés par les entreprises retenues par M. [I],

la responsabilité de M. [I] est engagée sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil, et subsidiairement sur le fondement de l'article 1383 du code civil.

Sur le préjudice :

la SARL MOULIN de VIGONAC soutient avoir perdu 16 mois et demi d'exploitation. Elle décompose ses demandes comme suit :

- charges d'exploitation : 90,304 euros (loyers-41,250 euros - taxes foncières, assurances, rémunération du gérant sur la base de 1500 euros par mois, intérêts des emprunts)

- perte de marge bénéficiaire : 56,000 euros

- la mauvaise évaluation des travaux : certains travaux initialement inclus dans le montant global du marché n'ont pu être payés sur le montant prévu et ont été extraits du marché par M. [I]. Ces travaux ont dû être supportés en plus par la SARL MOULIN de VIGONAC qui demande à cet égard la somme de 220,611,60 euros.

- les pénalités de retard prévues par l'article 4-3-2 du CCAP : 712,824 euros.

- préjudice moral : 10,000 euros (cette demande est formée à titre subsidiaire au bénéfice de M. [Z])

Sur les demandes reconventionnelles :

concernant la demande au titre du solde d'honoraires réclamé par M. [I] (3169,51 euros TTC, elle en soulève la prescription quinquennale sur le fondement de l'article 2224 du code civil.

Sur les appels en causes formés par la MAF :

la SARL MOULIN de VIGONAC rappelle qu'elle ne formule aucune demande à l'encontre des entreprises concernées seule la responsabilité de M. [I] étant engagée.

Par conclusions notifiées par RPVA le 18 octobre 2018 et signifiées à la SARL DANIEL le 24 octobre 2018, M. [I] demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement du 7 novembre 2017 en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par la SARL MOULIN DE VIGONAC et les époux [Z] à l'encontre de M. [I],

A titre subsidiaire,

- statuer ce que de droit sur les fins de non-recevoir évoquées par la MAF dans le cadre de ses écritures ;

- dans l'hypothèse où celles-ci seraient jugées fondées, dire et juger que les demandes considérées comme irrecevables à l'égard de la MAF le sont également à l'égard de M. [I] ;

- débouter la SARL MOULIN de VIGONAC et les époux [Z] de l'ensemble de leurs demandes ;

A défaut, débouter la SARL MOULIN DE VIGONAC et les époux [Z] de leurs demandes en ce que :

- il n'est pas démontré l'existence de fautes commises par M. [I] dans l'exécution de sa mission de maîtrise d''uvre,

*elles correspondent à des fautes commises par d'autres intervenants, et excèdent la part de responsabilité susceptible d'être imputée à l'architecte

*elles excèdent les préjudices éventuellement subis par la SARL MOULIN de VIGONAC du fait des prétendues fautes commises,

A titre infiniment subsidiaire, condamner les Sociétés P.P.A, DANIEL, JAMOT, MATHIS ET DANEDE et SCEP et Mme [K] à garantir et relever indemne M. [I] des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre au titre du retard de chantier, du préjudice moral et des frais et dépens ;

- dire et juger que la MAF devra garantir M. [I] des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre dans les conditions prévues dans sa police d'assurance ;

En tout état de cause :

- condamner la SARL MOULIN de VIGONAC ou les époux [Z] à régler à M.[I] la somme de 3 169,51 euros à titre de solde d'honoraires ;

- A défaut, déduire le montant de ces honoraires du montant des condamnations susceptibles d'être prononcées au bénéfice de la SARL MOULIN de VIGONAC ou des époux [Z];

- condamner la SARL MOULIN DE VIGONAC au paiement d'une somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens;

- rejeter les demandes formées au même titre l'encontre de M. [I] ;

- écarter l'ensemble des demandes incidentes formées à l'encontre de M. [I] en cause d'appel.

Au soutien de ses demandes, il expose pour l'essentiel que :

- l'achèvement des travaux a été retardé en raison des conditions de réalisation des travaux dont les époux [Z] avaient conservé la charge et d'un arrêt du chantier du fait d'un problème de trésorerie et de non-règlement d'une partie des factures,

concernant la recevabilité, il sollicite la confirmation du jugement, observant sur la prescription de l'action des époux [Z] qu'ils sont intervenus volontairement à l'instance par conclusions du 10 février 2017, le délai quinquennal de prescription étant écoulé et le délai décennal n'étant en l'espèce pas applicable, l'action n'étant pas fondée sur l'existence de désordres. Par ailleurs, l'assignation délivrée par la SARL MOULIN de VIGONAC n'a pu avoir d'effet interruptif de prescription à leur égard, cet effet ne bénéficiant qu'à l'auteur de l'assignation. Il considère donc que la prescription est acquise pour des fautes commises entre 2005 et 2008.

- sur la responsabilité, il soutient que :

- concernant l'absence de communication de pièces contractuelles il n'a pu toutes les retrouver, la SARL MOULIN de VIGONAC ne lui ayant pas retourné toutes les pièces signées,

sur la durée des travaux, le délai prévu dans le dossier de consultation des entreprises n'était que prévisionnel et non impératif ; il conteste s'être engagé à ce que les travaux débutent au mois de juin 2006, affirmant que ceux-ci ont débuté en octobre 2006 de sorte qu'il était impossible qu'ils soient achevés au cours du mois de janvier 2007,

- le retard des travaux est imputables aux conditions de réalisation des travaux dont les époux [Z] avaient conservé la charge, d'un arrêt du chantier décidé par eux du fait d'un problème de trésorerie et de non-règlement d'une partie des factures des entreprises,

- concernant le dépassement de budget, la somme de 354 765,25 € ne constituait qu'un montant prévisionnel, susceptible de varier en fonction des détails du programme devant être fixés par le maître d'ouvrage, le contrat de maîtrise d''uvre ne s'analysant aucunement en un marché à forfait au sens des dispositions de l'article 1793 du code civil ; c'est sur la décision du maître d'ouvrage que certains travaux qui n'entraient pas dans l'enveloppe prévue ont été réservés par eux.

Sur les préjudices, M. [I] :

- sollicite la réduction de sommes réclamées, contestant que la SARL MOULIN de VIGONAC rapporte la preuve qu'elle s'est acquittée des charges d'exploitation dont elle réclame l'indemnisation, notamment la rémunération du gérant et le versement du loyer aux époux [Z] entre 2001et 2008,

- conteste le calcul des pénalités de retard et la demande au titre du surcoût des travaux, faisant valoir que le détail du prétendu surcoût de 167.409,54 euros n'est pas précisé, et qu'à supposer qu'il puisse lui être reproché une faute en lien avec l'évaluation des travaux, le seul préjudice dont la SARL MOULIN de VIGONAC serait susceptible de demander réparation correspondrait à la perte de chance pour elle de renoncer au projet ou de le modifier dans des conditions permettant d'en conserver l'équilibre.

La MAF par conclusions notifiées par RPVA le 18 août 2020 et par acte d'huissier du 19 août 2020 à la SARL DANIEL demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- déclarer la SARL MOULIN de VIGONAC irrecevable en ses demandes ;

- déclaré les consorts [Z] prescrits en leurs demandes et par conséquent irrecevables en leur intervention volontaire ;

- les débouter de l'ensemble de leurs demandes.

A titre subsidiaire et pour le cas où le jugement serait réformé :

- dire et juger la SARL MOULIN DE VIGONAC irrecevable à agir sur le fondement délictuel en ce que sa demande est constitutive d'une demande nouvelle ;

- dire et juger la SARL MOULIN de VIGONAC irrecevable à agir sur le fondement délictuel en ce que sa demande se heurte au principe de la concentration des moyens ;

- dire et juger que l'action de la SARL MOULIN de VIGONAC ne peut profiter aux consorts [Z] s'agissant de l'effet interruptif de prescription ;

- les dire et juger prescrits en leur intervention volontaire.

A titre plus subsidiaire,

- dire et juger que les appelants ne rapportent pas la preuve des griefs allégués ;

- dire et juger qu'ils ne rapportent pas la preuve de la faute de M. [I].

A titre encore plus subsidiaire,

- dire et juger que M. [I] ne peut être tenu que de ses propres fautes ;

- dire et juger valable et applicable la clause d'exclusion de solidarité incluse dans le contrat d'architecte.

A titre infiniment plus subsidiaire,

- dire et juger que la SARL MOULIN de VIGONAC et les consorts [Z] n'apportent pas la preuve de leurs préjudices en lien avec les fautes alléguées ;

A titre encore infiniment plus subsidiaire

- dire et juger la MAF recevable et fondée à opposer son plafond de garantie à hauteur de 500.000 euros et sa franchise ;

- condamner sous astreinte de 150 euros par jour les Sociétés P.P.A, DANIEL, JAMOT, MATHIS ET DANEDE et SCEP à produire leur attestation d'assurance valide à la date des travaux outre celle valide au jour de la présente ;

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné la MAF à leur payer à chacune la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dire et juger que pour le cas où une condamnation quelconque serait prononcée à l'encontre de la MAF, celle-ci serait déclarée recevable et fondée à obtenir la garantie totale des Sociétés P.P.A, DANIEL, JAMOT, MATHIS ET DANEDE et SCEP ;

- rejeter la demande de la société SCEP tendant à voir condamner la MAF au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile ;

- condamner la SARL MOULIN DE VIGONAC au paiement d'une somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens lesquels pourront être recouvrés par Maitre David LARRAT en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir au soutien de ses prétentions, que :

- sur l'irrecevabilité de l'action de la SARL MOULIN de VIGONAC, le contrat de maîtrise d''uvre a été passé avec M. et Mme [Z], en leur qualité de maître de l'ouvrage ; elle conteste toute erreur lors de la signature du contrat, M. et Mme [Z] n'ayant jamais mentionné une quelconque erreur quant à la désignation du maître d'ouvrage ni émis de réserve, la SARL MOULIN de VIGONAC ne justifiant pas de sa qualité à agir (elle ne démontre ni avoir souscrit les prêts destinés au financement des travaux ni avoir réglé les entreprises ni sa qualité de propriétaire de l'établissement),

- la demande sur le fondement de l'article 1383 ancien du code civil est nouvelle et est irrecevable par application de l'article 564 du code de procédure civile,

- sur la prescription de l'action de M. et Mme [Z], elle maintient que la demande est prescrite ayant été formée le 6 février 2017 alors les faits étaient connus depuis 2008, l'effet interruptif de l'assignation délivrée par la SARL MOULIN de VIGONAC ne bénéficiant qu'à celui qui a diligenté l'action.

- elle conteste toute faute pouvant être reprochée à M. [I], tant en ce qui concerne :

*la durée des travaux, aucun ordre de service prévu à l'article 4-1 du CCAP n'étant versé aux débats, le contrat ne comportant aucun délai d'exécution assorti de pénalités dans l'hypothèse où celui-ci serait méconnu, seules les entreprises étant en outre responsables des retards d'exécution des travaux, aucune faute de l'architecte en lien avec le préjudice tiré du retard dans les travaux n'étant rapportée, de nombreux travaux ayant été réalisés par des entreprises sous la direction de M. et Mme [Z], M. [I] n'ayant aucune maîtrise des délais de réalisation de ces travaux,

*le dépassement du budget : elle conteste ce dépassement faisant valoir que le contrat d'architecte passé avec les époux [Z] prévoyait un montant estimatif de travaux susceptible de faire l'objet d'ajustements, les lots dont M. et Mme [Z] s'étaient réservés la charge ayant été exclus de cette estimation, le montant définitif global de l'intégralité des travaux n'étant pas connu.

- elle sollicite à titre subsidiaire l'application de la clause d'exclusion de solidarité prévue par le contrat d'architecte.

- sur les différents chefs de préjudice, elle en conteste le bien-fondé se basant pour ce faire sur le rapport amiable actualisé de M. [R] [P], estimant qu'il convient de tenir compte du chiffre d'affaires de l'établissement précédemment exploité par la SARL MOULIN de VIGONAC et qui aurait été fermé plus tôt si les travaux avaient été achevés plus tôt, soit 125,897 euros, le préjudice ne pouvant excéder la somme de 79,472,45 euros,

- Au soutien de son appel en garantie des entreprises ayant réalisé les travaux, elle fait valoir que seules les entreprises ont la maîtrise de leur temps d'exécution des travaux, et que la société SCEP ne justifie pas avoir exécuté les travaux dans les termes du contrat tant sur le plan du budget que sur celui du délai d'exécution.

Concernant la demande sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, elle conteste que son appel en garantie présente un caractère malicieux, et affirme qu'il ne caractérise aucun usage intensif et injustifié de la procédure judiciaire.

Par conclusions signifiées le 26 juillet 2018, la SARL MATHIS ET DANEDE demande de :

- confirmer le jugement du 7 novembre 2017 en toutes ses dispositions,

En conséquence,

- dire et juger infondée la mise en cause de la SARL MATHIS ET DANEDE,

- condamner la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS à verser à la SARL MATHIS ET DANEDE la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Elle observe qu'aucune demande n'est formée à son encontre, la demande de relevé indemne formée par la MAF n'étant assortie d'aucune démonstration de sa faute.

Par conclusions notifiées le 19 août 2020, la SARL SCEP demande, sur le fondement des articles 9 et 32-1 du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- constater le défaut de qualité à agir de la SARL MOULIN de VIGONAC à l'encontre de M.[I],

- débouter la SARL MOULIN de VIGONAC de ses demandes sur le fondement des dispositions de l'article 1383 du code civil dans sa rédaction ancienne comme constituant une demande nouvelle frappée d'irrecevabilité,

- débouter la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS de toutes ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la MUTUELLE DES ARCHTIECTES FRANCAIS au paiement de justes dommages et intérêts qui ne sauraient être inférieurs à 2.000,00€ sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- condamner la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la partie succombant aux entiers dépens, de première instance et d'appel.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir pour l'essentiel que :

- elle reprend les moyens développés par M. [I] et la MAF sur les fins de non- recevoir.

- sur l'appel en garantie à son encontre, elle observe que le grief du dépassement de l'enveloppe budgétaire initiale ne peut lui être imputée dans la mesure où elle a formulé une proposition de prix pour le lot n°11 qui a été acceptée par la SARL MOULIN de VIGONAC, sous couvert du sceau de l'architecte Monsieur [I]. Concernant les délais d'exécution des travaux, elle soutient qu'elle n'a jamais régularisé de plannings de manière contractuelle avec le maître d''uvre ou le maître d'ouvrage et qu'elle est intervenue à la demande du maître d''uvre suivant les contraintes de chantiers et dans des délais extrêmement raisonnables.

- elle sollicite des dommages-intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, au motif que les griefs allégués ne concernent que la maîtrise d''uvre l'appel en cause n'ayant pour finalité que de rallonger les délais de procédure.

La SARL DANIEL n'a pas constitué avocat. L'assignation aux fins d'appel provoqué Mme [K] ne lui a pas été délivrée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 août 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande tendant à voir constater la recevabilité de l'appel.

Outre que la demande tendant à voir constater n'est pas une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile, la recevabilité de l'appel n'étant nullement contestée, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.

Sur les fins de non-recevoir.

- sur la qualité à agir de la SARL MOULIN de VIGONAC.

Le tribunal a jugé que la SARL MOULIN de VIGONAC ne justifiant d'aucun lien contractuel avec M. [I] était dépourvue de qualité à agir à l'encontre de M. [I] et de son assureur, M. et Mme [Z] apparaissant seuls avoir des liens contractuels avec M. [I]. Les appelants sollicitent la réformation de la décision sur ce point tandis que M. [I] et la MAF ainsi que l'ensemble des intimés en sollicitent la confirmation.

Il ressort des pièces versés aux débats que le contrat d'architecte conclu le 16 mai 2005 avec M. [I] relatif à un projet d'aménagement d'un moulin en hôtel-restaurant, a été passé avec M. et Mme [Z] en qualité de maîtres d'ouvrage.

Le dossier de consultation des entreprises comporte également leur nom en qualité de maître d'ouvrage, de même que les compte-rendu de chantier , les factures et les certificats de paiement versés au dossier.

Certes, la SARL MOULIN de VIGONAC et M. et Mme [Z] produisent le prêt consenti à la SARL Le Saint-Sicaire par la BNP PARIBAS par acte notarié du 26 janvier 2006 d'un montant global de 400.000 euros en deux tranches, l'une de 300.000 euros, l'autre de 100.000 euros dont l'objet défini dans le contrat est « le financement des dépenses afférentes à des travaux d'aménagement du bien immobilier à usage professionnel dont l'adresse est à [Localité 4] suivant des devis ou des factures communiqués par ailleurs à la banque », ainsi que le procès-verbal de l'assemblée générale des associés de la SARL Le Saint-Sicaire en date du 23 janvier 2006 autorisant M. [Z] à faire les démarches en vue de l'obtention du prêt destiné à l'aménagement du bien immobilier à usage professionnel dont l'adresse est à [Localité 4]. La SARL MOULIN de VIGONAC produit des éléments comptables (extraits du grand-livre auxiliaire, pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2009) faisant ressortir que des factures de travaux ont été effectivement été payées par la SARL MOULIN de VIGONAC, notamment à la SARL DANIEL, la SARL JAMOT, la SARL PPA, la SARL MATHIS ET DANEDE, intervenus dans le cadre de l'opération confiée à M. [I] ainsi qu'à celui-ci.

Cependant, le contrat de bail commercial consenti le 27 mars 2001 par M. et Mme [Z] à la SARL Le Saint-Sicaire portant sur les locaux objets du contrat d'architecte confié à M. [I], prévoit que les travaux d'amélioration ne peuvent être entrepris par le preneur que sur autorisation expresse du bailleur, une telle autorisation n'étant pas alléguée. Par ailleurs, par avenant en date du 28 mars 2008, correspondant à l'époque de la fin des travaux, une augmentation du loyer a été prévue « en conséquence des importants travaux réalisés pour transformer les bâtiments existants du MOULIN de VIGONAC en hôtel-restaurant », ce qui démontre que ces travaux ont bien été entrepris par M. et Mme [Z], propriétaires des lieux. En outre, les éléments comptables produits ne sont pas certifiés par l'expert-comptable de la SARL MOULIN de VIGONAC en sorte que leur fiabilité n'est pas certaine. Ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, la qualité de propriétaires de M. et Mme [Z] des lieux objets de la rénovation les désigne en tant que maîtres d'ouvrage co-contractants de M. [I]. En conséquence, la qualité de maître de l'ouvrage de la SARL MOULIN de VIGONAC n'est pas démontrée, la SARL MOULIN de VIGONAC n'étant ainsi pas recevable à agir en responsabilité contractuelle à l'encontre de M. [I]. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

- sur la prescription de l'action de M. et Mme [Z].

Le tribunal a déclaré irrecevable comme prescrite sur le fondement de l'article 2224 du code civil l'intervention volontaire de M. et Mme [Z] à l'encontre de M. [I], ayant retenu que les fautes reprochées par les époux [Z] à M. [I], à savoir le retard dans l'exécution des travaux et la sous-évaluation de leur coût, étaient connus de ces derniers dès l'achèvement des travaux soit le 21 juin 2008 et à tout le moins le 20 octobre 2008. Les appelants sollicitent la réformation du jugement sur ce point tandis que les intimés en sollicitent la confirmation.

M. et Mme [Z] sont intervenus volontairement à la procédure devant le tribunal de grande instance de Périgueux par conclusions du 10 février 2017, en qualité de gérant et de co-gérant de la SARL MOULIN de VIGONAC. Ils font valoir que leur action est indivisible de celle de la SARL MOULIN de VIGONAC et que l'action intentée par la SARL MOULIN de VIGONAC a nécessairement interrompu le délai de prescription à leur égard. Dans leurs conclusions régularisées le 18 juillet 2018, ils précisent intervenir également en qualité de bailleurs de la SARL MOULIN de VIGONAC.

Cependant, dans le dispositif de leurs conclusions qui seul lie la cour, ils ne précisent pas en quelle qualité ils interviennent, fondant leur action sur la responsabilité contractuelle et à défaut, délictuelle. En tout état de cause, qu'ils agissent en qualité de gérant et de co-gérant de la SARL MOULIN de VIGONAC ou de bailleur, le délai de prescription est le délai quinquennal stipulé à l'article 2224 du code civil.

Sur le caractère indivisible de l'action des époux [Z] et de la SARL MOULIN de VIGONAC, les époux [Z] n'expliquent pas en quoi leur action serait indivisible de celle de la SARL MOULIN de VIGONAC. Or, l'indivisibilité de l'action suppose une invisibilité des droits ou des obligations des parties, ce qui n'est le cas en l'espèce, l'action en qualité de gérant et de co-gérant étant diligentée pour le compte de la SARL MOULIN de VIGONAC et l'action en tant que bailleur étant une action distincte qui repose sur le contrat de bail liant les parties.

Cet argument ne peut être retenu.

En application de l'article 2224 du code civil, le point de départ du délai de prescription d'une action personnelle ou mobilière se situe au jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce, les époux [Z] sont intervenus à l'instance par conclusions devant le tribunal de grande instance de Périgueux en date du 10 février 2017. Or, les travaux objets du contrat d'architecte en date du 6 mai 2005 étaient achevés le 23 juin 2008, date de la tenue de la commission de sécurité autorisant l'ouverture de l'établissement, le procès-verbal de réception étant en date du 30 mai 2008. Ils avaient donc connaissance à cette date des manquements reprochés à l'architecte et sur lesquels est fondée leur action. Le délai de prescription était donc écoulé au 10 février 2017, leur action étant prescrite.

Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point et de déclarer l'action des époux [Z] irrecevables comme étant étant prescrite.

Sur la demande subsidiaire de la SARL MOULIN de VIGONAC.

La SARL MOULIN de VIGONAC sollicite à titre subsidiaire que ses demandes soient examinées sur le fondement de l'article 1383 ancien du code civil.

Il convient de relever que par conclusions notifiéesle 19 août 2020, la SARL SCEP a répondu à la demande formée par la SARL MOULIN de VIGONAC à titre subsidiaire sur le fondement de l'article 1383 du code civil par ses conclusions notifiées le 17 juillet 2018. Ces conclusions dont la recevabilité n'a pas été contestée sont en tout état de cause recevables concernant la réponse à la demande nouvelle formée par les appelants par leurs conclusions notifiéesle 17 juillet 2018. Les demandes formées dans leurs conclusions déclarées irrecevables par ordonnance du conseiller chargé de la mise en état et reprises dans ces dernières conclusions sont en tout état de cause irrecevables.

M. [I], la MAF et la SARL SCEP soulèvent chacun l'irrecevabilité de cette demande, celle-ci étant nouvelle et se heurtant au principe de la concentration des moyens.

La SARL MOULIN de VIGONAC demande à la cour, pour le cas où les liens contractuels la liant à M. [I] ne seraient pas retenus, d'examiner ses demandes sur le fondement délictuel. Il s'agit donc des mêmes demandes, sur un fondement juridique différent, non invoqué en première instance, qui, en application de l'article 565 du code de procédure civile, ne constituent donc pas une demande nouvelle, et qui ne contreviennent donc pas au principe de la concentration des moyens.

La demande sur le fondement délictuel sera donc déclarée recevable.

Sur le fond, la SARL MOULIN de VIGONAC demande à la cour, si celle-ci confirmait la décision déférée en ce qu'elle a retenu l'absence d'existence de liens contractuels entre la SARL MOULIN de VIGONAC et M. [I], de faire droit aux demandes présentées au visa des dispositions de l'article 1383 ancien du code civil, les manquements commis par M. [I] (le retard dans l'exécution des travaux, la mauvaise appréciation du coût des travaux) étant directement à l'origine des préjudice subis par elle.

Cependant, la SARL MOULIN de VIGONAC, qui analyse les fautes reprochées à M. [I] uniquement d'un point de vue contractuel, les manquements étant ceux commis par l'architecte aux obligations nés de son contrat, ne précise nullement, s'agissant de ces manquements, en quoi ceux-ci constituraient une faute délictuelle à son égard. Il convient de relever que les époux [Z] ne sollicitent nullement la qualité de maîtres d'ouvrage de l'opération confiée à M. [I] et que les demandes de réparation ne sont formées que par la SARL MOULIN de VIGONAC, M. [Z] ne sollicitant, en qualité de gérant de la SARL MOULIN de VIGONAC, qu'une somme de 10.000 euros au titre de son préjudice moral.

Si l'inexécution fautive d'un contrat causant un dommage à un tiers engendre la responsabilité du débiteur de l'obligation inexécutée à l'égard de la tierce victime, encore faut-il que soit au préalable caractérisé en quoi consiste le manquement contractuel dont s'agit.

Or, en l'espèce, la qualité de maître d'ouvrage de la SARL MOULIN de VIGONAC n'ayant pas été retenue et celle-ci ne précisant pas en quoi les fautes contractuelles qu'elle alléguait constituent des fautes délictuelles à son égard, sa demande sur le fondement de l'article 1383 ancien est donc mal fondée et doit être rejetée.

Sur la demande de M. [Z] en qualité de gérant de la SARL MOULIN de VIGONAC.

M. [Z] demande, en sa qualité de gérant de la SARL MOULIN de VIGONAC une somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice de jouissance causé par les manquements de M. [I]. Il précise qu'il a dû lui-même procéder au remplacement d'équipements sanitaires qui n'étaient pas adaptés, reprendre certains travaux mal finis et supporter les menaces de la banque de cesser d'apporter son concours compte tenu du retard continuel dans les travaux. Outre qu'il ne rapporte pas la preuve des éléments de fait qu'il allègue, il s'agit de la conséquence des manquements contractuels allégués qui n'ont pas été retenus. La demande est donc mal fondée et doit être rejetée.

Sur les appels en garantie.

Aucune condamnation n'ayant été prononcée à l'encontre de M.[I] et de la MAF, il convient de constater que leurs appels en garantie à l'encontre des sociétés PPA, DANIEL, JAMOT, MATHIS ET DANEDE et SCEP sont sans objet.

Sur la demande reconventionnelle de M. [I].

M. [I] réclame reconventionnellement une somme de 3169,51 euros au titre d'un solde d'honoraires. Relevant que cette demande n'a été formée que par conclusions du 14 mai 2014, le tribunal a déclaré cette demande correspondant à un décompte définitif en date du 28 avril 2008 irrecevable comme prescrite, le délai de prescription quinquennal étant écoulé. M. [I] fait valoir que cette demande ne peut être considérée comme prescrite alors que la SARL MOULIN de VIGONAC et les époux [Z] contestent pour leur propre action l'acquisition de la prescription.

Pour justifier de sa créance, M.[I] produit un décompte de créance en date du 28 avril 2008 d'un montant de 3169,51 euros adressé à M. et Mme [Z]. La première demande relative à cette créance ayant été formée par conclusions du 14 mai 2014, le délai de prescription quinquennale édicté par l'article 2224 du code civil était alors écoulé, ce délai n'ayant pu être interrompu par l'action en justice intentée par la SARL MOULIN de VIGONAC par ailleurs postérieure au terme de celui-ci puisqu' intentée par assignation délivrée les 4 et 5 juin 2013.

La demande doit donc être rejetée. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de la SARL SCEP sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.

Ainsi que ci-dessus relevé, cette demande formée par conclusions du 17 août 2018 qui ont été déclarées irrecevables par le conseiller en charge de la mise en état, est irrecevable.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL MOULIN de VIGONAC et M. et Mme [Z] supporteront les dépens d'appel,

La SARL MOULIN de VIGONAC sera condamnée au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile de 2000 euros à M. [I] et de 1500 euros à la MAF, en sus des indemnités allouées sur le même fondement par le tribunal qui les a justement arbitrées.

La MAF sera pour sa part condamnée au paiement à la SARL MATHIS ET DANEDE d'une somme de 1500 euros sur le même fondement en sus des indemnités allouées sur le même fondement par le tribunal qui les a justement arbitrées.

La demande formée sur ce fondement par la SARL SCEP par conclusions du 17 août 2018 est irrecevable.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare recevable la demande de la SARL MOULIN de VIGONAC sur le fondement de l'article 1383 ancien du code civil,

Rejette la demande de la SARL MOULIN de VIGONAC sur le fondement de l'article 1383 du code civil,

Dit que les appels en garantie de la Mutuelle des Architectes Français et de M. [O] [I] sont sans objet,

Déclare prescrite la demande reconventionnelle en paiement de M. [O] [I],

Déclare irrecevables les demandes de la SARL SCEP sur le fondement de l'article 32-1 et de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL MOULIN de VIGONAC à payer à M. [O] [I] une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL MOULIN de VIGONAC à payer à la Mutuelle des Architectes Français une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Mutuelle des Architectes Français à payer à la SARL MATHIS ET DANEDE une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL MOULIN de VIGONAC et M. et Mme [Z] aux dépens, avec autorisation donnée à Maitre David LARRAT de recouvrer ceux-ci conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'arrêt a été signé par Marie-Jeanne LAVERGNE-CONTAL, Président et par Annie BLAZEVIC, Greffier auquel il a remis la minute signée de la décision.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/06473
Date de la décision : 22/10/2020

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 1B, arrêt n°17/06473 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-22;17.06473 ?
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