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26/03/2020 | FRANCE | N°17/06215

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 26 mars 2020, 17/06215


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 26 MARS 2020



(Rédacteur : Madame Catherine LEQUES, Conseiller)





F N° RG 17/06215 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-KDYZ







SA GARAGE ROBERT





c/



Monsieur [S] [D]

Madame [C] [N] épouse [D]

Madame [B] [D] épouse [H]



























Nature de la d

écision : AU FOND



























Grosse délivrée le :

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 06 janvier 2017 (R.G. 13/00759) par le Tribunal de Grande Instance de BERGERAC suivant déclaration d'appel du 15 mai 2017





APPELANTE :



SA GARAGE ROBERT

sis [Adr...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 26 MARS 2020

(Rédacteur : Madame Catherine LEQUES, Conseiller)

F N° RG 17/06215 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-KDYZ

SA GARAGE ROBERT

c/

Monsieur [S] [D]

Madame [C] [N] épouse [D]

Madame [B] [D] épouse [H]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 06 janvier 2017 (R.G. 13/00759) par le Tribunal de Grande Instance de BERGERAC suivant déclaration d'appel du 15 mai 2017

APPELANTE :

SA GARAGE ROBERT

sis [Adresse 8]

Représentée par Me David LARRAT de la SELARL H.L. CONSEILS, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉS :

[S] [D]

né le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 15]

de nationalité Française

Retraité, demeurant [Adresse 13] / FRANCE

[C] [N] épouse [D]

née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 15]

de nationalité Française

Retraitée, demeurant [Adresse 13] / FRANCE

[B] [D] épouse [H]

née le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 12]

de nationalité Française

Sans profession, demeurant [Adresse 16] / FRANCE

Représentés par Me Jean françois CAPOUL, avocat au barreau de BERGERAC

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 mars 2020 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Roland POTEE Président et Madame Catherine LEQUES, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Roland POTEE, Président,

Madame Catherine LEQUES, Conseiller

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

M.et Mme [S] [D], d'une part et Mme [B] [D], d'autre part, sont respectivement usufruitiers et nue-propriétaire d'un ensemble immobilier situé [Adresse 8] à [Localité 14], donné à bail commercial à la SAS Garage Robert ( la société Garage Robert) depuis 1982.

Les locaux loués au garage Robert, ont, après un incendie survenu en 1995, fait l'objet de travaux de reconstruction et de restructuration dont la maîtrise d''uvre a été confiée à M [P], assuré auprès de la société Allianz, et M.[F].

Estimant qu'une partie des constructions était édifiée sur une parcelle leur appartenant, M.et Mme [S] [D] et Mme [B] [D] ( les consorts [D]) ont fait établir un constat d'huissier le 9 septembre 2004, puis par acte du 13 juillet 2011, ont assigné le garage Robert devant le tribunal de grande instance de Bergerac pour obtenir la démolition des bâtiments empiétants sur leur parcelle cadastrée BL [Cadastre 10].

M. [P], la société Allianz, et M.[F], et la commune de [Localité 14] ont été appelés en cause par le garage Robert.

Par jugement en date du 6 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Bergerac a statué ainsi qu'il suit :

'déclare recevable et non prescrite l'action dirigée par les consorts [D] à l'encontre de la société Garage Robert

'condamne cette société à payer, sur production de la facture des travaux de démolition de l'extension qu'elle a fait réaliser sur la partie de la parcelle BL [Cadastre 10] [Adresse 11] à [Localité 14] ne faisant pas partie de l'assiette du bail et conservée à la jouissance des demandeurs, le coût de cette démolition et de la remise des lieux en état

'dit que faute par la société Garage Robert de payer ces travaux dans le mois de la présentation de la facture, elle pourra y être contrainte sous astreinte de 50 € par jour de retard passé ce délai

'condamne la société Garage Robert à payer aux consorts [D] au total la somme de 2000 € à titre de dommages-intérêts avec les intérêts au taux légal à compter du présent jugement

'rejette comme prescrites et surabondamment mal fondées les demandes formées par le garage Robert contre Monsieur [F], M. [P] et son assureur Allianz et contre la commune de [Localité 14]

'condamner la société Garage Robert à payer 1500 € au total aux consorts [D], 1000 € à M. [F], 1500 € au total à M. [P] et à son assureur Allianz et 1000€ à la commune de [Localité 14] au titre de l'article 700 du code de procédure civile

'condamne la société Garage Robert en tous dépens.

Le tribunal a notamment retenu que le preneur savait depuis les actes notariés de renouvellement de bail, et en tout cas, au moins depuis la rectification du permis de construire déposée en son nom par le cabinet d'architecture en 2003, qu'il avait construit sur un terrain ne faisant pas partie du bail, ce qu'il avait reconnu et même chiffré en termes de superficie pendant les opérations de constat fait par un huissier le 9 mars 2004, puis au cours des opérations de l'expertise amiable réalisée courant 2013.

La société Garage Robert a formé un appel le 15 mai 2017.

Par ordonnance en date du 9 novembre 2017, le président chargé de la mise en état a rectifié l'ordonnance rendue le 25 octobre 2017, qui avait constaté le désistement d'appel du Garage Robert et le dessaisissement de la cour, et a constaté le désistement partiel de l'instance d'appel de la société Garage Robert à l'encontre de M [P], la société Allianz, M.[F] et la commune de [Localité 14], le dessaisissement de la cour à l'égard de ces parties intimées et la poursuite de l'instance à l'égard de M.et Mme [S] [D] et Mme [B] [D].

Dans ses dernières écritures du 28 novembre 2017, la société Garage Robert demande de :

'réformer la décision déférée

'dire que les consorts [D] ne sont pas fondés à solliciter la démolition des constructions édifiées sur la parcelle objet du contrat de bail avant l'expiration de ce dernier

'débouter les autres parties de leurs demandes

'condamner solidairement les consorts [D] à verser à la société Garage Robert une somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

'condamner solidairement les consorts [D] aux dépens.

La société Garage Robert fait essentiellement valoir que :

'l'article 555 du Code civil n'est pas applicable en l'espèce : en effet, seule une partie du bâtiment d'une surface d'environ 40 m² est construite sur la parcelle [Cadastre 10] appartenant aux intimés ; il s'agit donc d'un empiètement au sens de l'article 545 du Code civil et non d'une construction sur le terrain d'autrui au sens de l'article 555 du Code civil ; le tribunal a donc, selon l'appelante, fondé à tort sa décision sur ce dernier article

'en application de l'article 555 du Code civil, la démolition ne peut être ordonnée lorsque la construction a été érigée de bonne foi : or la société appelante soutient que la consistance des biens loués n'a jamais été clairement établie, que l'absence de précision du bail et le temps passé depuis sa conclusion ont nécessairement brouillé les frontières de la surface objet du contrat de location de sorte que la mauvaise foi ne peut lui être valablement opposée

'la construction s'est faite avec l'accord des propriétaires, puisque le contrat de bail renouvelé du 25 janvier 1992 indique clairement que la location porte sur 'une parcelle de sol sur laquelle la société Garage Robert a construit un magasin d'exposition avec parking devant, le tout situé à [Localité 14] section BL numéro [Cadastre 10]", et donc que la construction a été érigée sur le terrain loué.

'la construction de l'extension litigieuse a été réalisée sans aucune opposition des consorts [D] : ainsi le procès-verbal de constat n'a été dressé que le 9 mars 2004, soit presque 10 ans après la fin des travaux, et la procédure n'a été engagée que le 13 juillet 2011 ce qui démontre selon l'appelante l'intérêt très relatif des consorts [D] pour ce problème

'en l'absence de convention contraire, le sort des constructions élevées par le preneur est réglé à l'expiration du bail par l'article 555 alinéa 1 et 2 du code civil, et le preneur reste propriétaire de ces constructions pendant la durée de la location, le propriétaire ayant le choix, à la fin du bail, si les constructions existent toujours, soit d'en exiger la suppression, soit de les retenir, à charge de payer l'une ou l'autre des indemnités prévues par l'article 555 du Code civil. La société appelante estime donc que le sort de ces constructions ne peut être réglé avant l'expiration du bail.

Dans leurs dernières écritures du 28 septembre 2017, les consorts [D] demandent de :

'confirmer le jugement déféré

'constater qu'ils ont subi un préjudice important et condamner la société Garage Robert à leur payer la somme de 80'000 € en réparation

'condamner la société Garage Robert à leur payer la somme de 10'000 € à titre de dommages-intérêts et 10'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

'condamner la société Garage Robert aux entiers dépens.

Ils soutiennent essentiellement que :

-la société garage Robert n'est pas de bonne foi car elle savait qu'elle faisait construire une extension sur un terrain qui ne lui appartenait pas, puisque le bail renouvelé le 21 janvier 1992 porte sur une parcelle de sol sur laquelle le garage Robert a construit un magasin d'exposition avec parking devant ; que la société Garage Robert a demandé un permis de construire sur les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] appartenant à [T] Robert, qui disposait d'une superficie totale de 976 m² pour implanter son bâtiment de 571 m², ce qui ne rendait pas nécessaire l'empiètement sur la parcelle voisine

-le garage Robert a bénéficié pendant plus de 20 ans de cette extension, faisant ainsi prospérer son garage.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la démolition

Les auteurs des consorts [D] ont donné à bail à loyer à titre commercial à la société Garage Robert, dans un immeuble situé à [Localité 14] cadastré section BL numéro [Cadastre 6] (devenu BL [Cadastre 10] au cadastre rénové) 'un bâtiment en retrait de l'[Adresse 8], anciennement à usage d'atelier, bureaux et remise d'une contenance d'environ 530 m², avec terrain devant d'une contenance d'environ 900 m² et bande de terrains derrière d'une largeur de 3,50 m, étant expressément convenu que les consorts [N] se réservent : la maison d'habitation ainsi qu'une partie d'allée en pierres devant la maison côté cour devant la porte de la cuisine d'une largeur de 5 m et le droit de passage côté sud de la maison réservée, entre l'[Adresse 8] et le portail que la société preneuse va édifier, lequel droit de passage permettra l'accès à la partie d'allée derrière la maison'.

L'acte de renouvellement du bail en date du 25 janvier 1992 décrit ainsi les biens donnés à bail : une parcelle de sol sur laquelle la société Garage Robert a construit un magasin d'exposition avec parking devant, le tout situé à [Localité 14] cadastré section BL numero [Cadastre 10], étant précisé 'que le surplus des immeubles à usage commercial cadastré section BL [Cadastre 3] et [Cadastre 9] fera l'objet d'un autre bail.'

Il ressort de cet acte, que le garage Robert a construit entre 1982 et 1992 un magasin d'exposition avec parking devant sur la parcelle [Cadastre 10].

Les consorts [D] ne produisent pas d'acte ultérieur de renouvellement du bail.

La société Garage Robert verse aux débats la signification aux consorts [D] en date du 6 juillet 2009 de son acceptation de renouvellement de ce bail.

Un permis de construire un bâtiment à usage commercial avec aire de stationnement sur les parcelles BL [Cadastre 4] et [Cadastre 5] a été délivré le 8 mars 1996 à la SA Garage Robert.

Il n'est pas contesté par la société Garage Robert qu'une partie de l'extension du bâtiment construite par lui dans le cadre de ces travaux de rénovation et de restructuration du garage l'a été, pour une surface de 40 m², sur la parcelle BL [Cadastre 10] appartenant aux intimés.

La société Garage Robert a donc construit sur le terrain d'autrui en 1996 ou 1997.

Il ne démontre pas y avoir été autorisé par les consorts [D].

Ainsi que le fait valoir la société Garage Robert à titre principal, les dispositions de l'article 545 du code civil, selon lequel nul ne peut être contraint de céder sa propriété, sont applicables en l'espèce : en effet, le permis de construire sollicité et accordé à la société Garage Robert visait une construction sur les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5].

Or, cette construction empiète sur la parcelle [Cadastre 10] appartenant aux consorts [D], qui sont dès lors bien fondés à obtenir la démolition de la partie de l'immeuble empiétant sur le terrain dont ils sont propriétaires et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages-intérêts

En plus de la démolition aux frais de la société Garage Robert , la somme de 2000 € à titre de dommages-intérêts arbitrée par le premier juge est de nature à réparer entièrement le préjudice subi par M.et Mme [S] [D] et Mme [B] [D].

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Garage Robert à payer aux consorts [D] la somme de 2000 € de dommages-intérêts .

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société Garage Robert devra payer aux intimés la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et supporter les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision déférée

Y ajoutant

Condamne la société Garage Robert à payer aux consorts [D] ensemble la somme

de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société Garage Robert aux dépens d'appel.

L'arrêt a été signé par Roland POTEE, Président et par Annie BLAZEVIC, Greffier auquel il a remis la minute signée de la décision.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/06215
Date de la décision : 26/03/2020

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 1B, arrêt n°17/06215 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-03-26;17.06215 ?
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