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12/12/2019 | FRANCE | N°16/00757

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 12 décembre 2019, 16/00757


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------







ARRÊT DU : 12 DÉCEMBRE 2019



(Rédacteur : Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller)





N° RG 16/00757 - N° Portalis DBVJ-V-B7A-JBTG







SARL R.F.P.C.





c/



Monsieur [L] [G] [Z]

Monsieur [N] [F]

Madame [E] [U] épouse [F]

Monsieur [I] [H]

SARL VAR MARINE

SARL GALLAY MEYRAN MARINE

SARL SOCIÉTÉ NOUVELLE CHANTIER NAVAL DES BAUX>
SCP BR ET ASSOCIES

SCP PAGES ET ASSOCIES

SARL BGYB

SARL BORA BORA YACHTING









Nature de la décision : AU FOND































Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jug...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 12 DÉCEMBRE 2019

(Rédacteur : Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller)

N° RG 16/00757 - N° Portalis DBVJ-V-B7A-JBTG

SARL R.F.P.C.

c/

Monsieur [L] [G] [Z]

Monsieur [N] [F]

Madame [E] [U] épouse [F]

Monsieur [I] [H]

SARL VAR MARINE

SARL GALLAY MEYRAN MARINE

SARL SOCIÉTÉ NOUVELLE CHANTIER NAVAL DES BAUX

SCP BR ET ASSOCIES

SCP PAGES ET ASSOCIES

SARL BGYB

SARL BORA BORA YACHTING

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 10 décembre 2015 (R.G. 11/04060) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 05 février 2016

APPELANTE :

SARL R.F.P.C. agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social sis [Adresse 6]

Représentée par Me Daniel LALANNE, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me MORE, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉS :

[X] [Z]

né le [Date naissance 2] 1941 à [Localité 17] ([Localité 1])

de nationalité Française

Profession : Président de société,

demeurant [Adresse 14]

Représenté par Me Nathalie CHAVEROUX, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Marie Paule CHAMBOULIVE de la SCP SOREL & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES

[N] [F]

né le [Date naissance 8] 1953 à [Localité 19] ([Localité 10])

de nationalité Française,

[E] [U] épouse [F]

née le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 15] ([Localité 9])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 18]

Représentés par Me RENOU substituant Me Marie TASTET, avocat au barreau de BORDEAUX

[I] [H] es qualité de « Liquidateur amiable » du « Cabinet d'Expertise maritimes et d'arbitrages PAGES et ASSOCIES »

de nationalité Française, demeurant [Adresse 11]

Représenté par Me Anne CADIOT-FEIDT de la SELARL CADIOT-FEIDT, avocat au barreau de BORDEAUX

et assisté de Me Eric GOIRAND, avocat au barreau de TOULON

SARL VAR MARINE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 22]. [Adresse 16]

non représentée, assignée selon acte d'huissier en date du 6 avril 2016 délivré à personne morale

SARL GALLAY MEYRAN MARINE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social si [Adresse 7]

non représentée, assignée selon acte d'huissier en date du 7 avril 2016 délivré selon PV 659

SARL SOCIÉTÉ NOUVELLE CHANTIER NAVAL DES BAUX prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 21]

non représentée, assignée selon acte d'huissier en date du 8 avril 2016 délivré à personne morale

SCP BR ET ASSOCIES es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « SOCIETE NOUVELLE CHANTIER NAVAL DES BAUX » prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 13]

non représentée, assignée selon acte d'huissier en date du 6 avril 2016 délivré à personne morale

SCP PAGES ET ASSOCIES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 12]

non représentée, assignée selon acte d'huissier en date du 8 avril 2016 délivré selon PV 659

SARL BGYB prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]

non représentée, assignée selon acte d'huissier en date du 6 avril 2016 délivré à personne morale

SARL BORA BORA YACHTING prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social

[Adresse 4]

non représentée, assignée selon acte d'huissier en date du 5 avril 2016 délivré à personne morale

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 octobre 2019 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Marie Jeanne LAVERGNE-CONTAL, Président,

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Madame Isabelle DELAQUYS, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT

Greffier lors du prononcé : Audrey COLLIN

ARRÊT :

- par défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le voilier de plaisance de 28 mètres de type Ketch, dénommé 'Bora Bora', a été fabriqué en Turquie au cours de l'année 1987.

Le 4 juin 2005, la société Bora Bora yachting, gérée par monsieur [D], a vendu ce navire à la S.A.R.L. RFPC, gérée par M. [B], pour la somme de 300.000 €.

Celle-ci a cédé le voilier le 1er septembre 2007 à madame [E] [U] épouse [F] et monsieur [N] [F] (les époux [F]). Le coût de la transaction a représenté la somme de 180.000 €.

Par la suite, les époux [F] l'ont vendu le 16 septembre 2010 à monsieur [X] [Z] pour un montant de 300.000 €.

Les deux dernières ventes ont été réalisées par l'intermédiaire d'un courtier (broker), en l'occurrence la société Gallay Meyran Marine, anciennement dénommée Yacht Brokerage.

Au mois de décembre 2010, M. [Z] a constaté une perforation de la coque du navire et fait appel à un expert amiable, M. [A], aidé d'un charpentier de marine. Ceux-ci ont décelé la présence de termites et ont évalué la réparation de la coque à la somme de 197.220 € dans un rapport déposé en février 2011.

Invoquant l'existence d'un vice caché, M. [Z] a, suivant exploit d'huissier du 29 mars 2011, assigné les époux [F] aux fins d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 197.220,40 €.

Les anciens possesseurs du voilier ont appelé dans la cause les sociétés RFPC, Bora Bora Yachting et Gallay Meyran Marine.

Par une première ordonnance du 29 mai 2012, le juge de la mise en état a ordonné l'instauration d'une expertise du voilier après avoir ordonné à la direction régionale des affaires maritimes de Méditerranée la délivrance, en original ou en copie, du rapport de mer dressé par M. [R] concernant ce bateau avec communication dudit document à l'expert désigné.

En cours d'instance, les époux [F] ont également appelé dans la cause, aux fins de leur rendre opposables les opérations d'expertise, la société BGYB, société de courtage (ex société Gallay Meyran Marine), ainsi que le cabinet d'expertise maritime et d'arbitrage Pages et Associés.

Pour des raisons identiques, la société RFPC a appelé dans la cause les S.A.R.L. Nouvelle chantier naval des Baux et Var maritime (société VM), ces deux sociétés ayant entretenu le bateau durant la période où elle en était le propriétaire.

Par une seconde ordonnance du 5 mars 2013, le juge de la mise en état a ordonné aux époux [F] de communiquer à la société BGYB tous les rapports et notes d'expertises antérieurs relatifs au voilier.

L'expert judiciaire, monsieur [S] [J], a déposé son rapport définitif le 25 avril 2014.

Maître [I] [H], en qualité de liquidateur du cabinet d'expertise Pages et Associés et la compagnie AXA France IARD, assureur du cabinet précité, sont intervenus volontairement à l'instance.

Par acte du 7 avril 2015, la société RFPC et la société Bora Bora yachting ont assigné la SCP BR et Associés, prise en la personne de maître [C] en qualité de mandataire judiciaire de la S.A.R.L. Nouvelle chantier navale des baux, placée en redressement judiciaire par jugement du 6 janvier 2012.

Par jugement en date du 10 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- condamné solidairement les époux [F] à payer à M. [Z] une somme de 160.194,26 € euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2011 ;

- condamné la société RFPC à garantir les époux [F] à hauteur de la somme de 160.194,26 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2011 ;

- fixé la créance de la société RFPC dans la procédure de redressement judiciaire de la société Nouvelle chantier navale des baux à hauteur de la somme de 160.194,26 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2011 ;

- dit qu'il y a lieu de mettre hors de cause, à défaut de prétention formulée à leur encontre, la sociétés BGYB, le Cabinet d'expertise Pagès et associés, Me [I] [H], en qualité de liquidateur amiable de la société précitée, et la compagnie AXA, assureur de la même société ;

- condamné solidairement les époux [F] à payer à M. [Z] une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société RFPC à payer aux époux [F] une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Nouvelle Chantier Naval des Baux à payer à la société RFPC une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- laissé à la charge de la société Bora Bora yachting, de la société AXA France IARD et de Me [I] [H] les frais engagés non compris dans les dépens ;

- débouté l'ensemble des parties des autres chefs de leurs demandes ;

- condamné in solidum les époux [F], la société RFPC et la société Nouvelle Chantier Naval des Baux à payer les dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Chaveroux et de Me Tastet ;

- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire.

La S.A.R.L. RFPC a relevé appel de cette décision le 5 février 2016.

Dans ses conclusions en date du 9 novembre 2018, l'appelante demande à la cour de :

- réformer la décision déférée ayant fait droit à l'action en garantie des vices cachés diligentée à son encontre par les époux [F] ;

- dire que, si la présence de termites est jugée avérée au moment de la vente conclue avec les époux [F], elle ne constituait pas un vice caché au sens de la jurisprudence de la cour de cassation ;

- constater que les époux [F] n'ont pas entretenu le navire en bon père de famille conformément aux règles de l'art et ont agi comme des professionnels ;

- constater qu'ils ont caché à M. [Z] le rapport établi par le cabinet d'expertise maritime Pages et Associés préalablement à leur achat, l'expertise ayant eu lieu le 29 août 2007 ;

En conséquence,

- débouter les époux [F] de leur action en garantie à son encontre ;

- condamner les époux [F] au paiement de la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant ses écritures en date du 16 juin 2016, M. [Z] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné les époux [F] à lui payer la somme de 160.194.26 € au titre de la restitution de partie du prix ;

Y ajoutant,

- condamner in solidum la société RFPC avec les époux [F] à lui payer :

- la somme de 160.194.26 € au titre de la restitution d'une partie du prix ;

- la somme de 73.894.66 € à titre de dommages et intérêts ;

Subsidiairement,

- condamner la société RFPC à lui verser la somme de 73.894.66 € à titre de dommages et intérêts ;

- condamner in solidum la société RFPC et les époux [F] à lui payer la somme de 9.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par conclusions du 4 juillet 2016, maître [I] [H], ès qualité de liquidateur amiable du cabinet d'expertise Pages & Associés, sollicite sa mise hors de cause. Il réclame la condamnation de l'appelante à lui verser une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Cadiot-Feidt représentée par Me Anne Cadiot-Feidt.

Dans ses écritures du 12 mai 2017, les époux [F] demandent à la cour de :

A titre principal,

- condamner la société RFPC à indemniser Monsieur [Z] de l'ensemble de ses préjudices.

A titre subsidiaire,

- dire que la garantie des vices cachés actionnée par M. [Z] doit être supportée in fine par la société RFPC ;

- dire que toutes les sommes qui leur sont réclamées dans le cadre de cette instance devront être mises à la charge de la société RFPC ;

- dire que la S.A.R.L. RFPC avait connaissance du vice caché ;

En conséquence,

- condamner la société RFPC à leur verser les sommes de 12.000 € au titre de leur préjudice moral et 2.115,05 € au titre de leur préjudice matériel ;

- condamner toute partie succombante à leur octroyer la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec distraction au profit de maître Marie Tastet, Avocate à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Les sociétés BGYB, Bora Bora Yachting, Var Marine et la SCP Br Associés n'ont pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les dernières conclusions de l'appelante leur ont été respectivement signifiées les 4, 5 et 6 avril 2016, 3, 4 et 5 mai 2016 et 15 mai 2016.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 novembre 2018.

Appelée à l'audience du 27 novembre 2018, l'affaire a été renvoyée, en raison d'un mouvement de grève du barreau de Bordeaux, au 22 octobre 2019.

Par de nouvelles conclusions du 26 avril 2019, les époux [F] formulent des prétentions identiques à celles présentées dans leurs écritures précédentes.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 22 octobre 2019.

MOTIVATION

En l'absence de rabat de l'ordonnance de clôture et de réouverture des débats prononcés à l'audience du 27 novembre 2018, il convient de constater que les conclusions déposées par les époux [F] le 26 avril 2019 sont irrecevables.

Sur le vice caché et les responsabilités

Il résulte des dispositions de l'article 1641 du code civil que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'ensemble des parties ne conteste pas la présence de termites dans le bois des bordés qui suivent l'étrave et qui passent sous les cadènes observée dès le mois de février 2011 (cf rapports [A] et d'expertise judiciaire) ainsi que sur deux jambettes à l'avant bâbord (rapport [J] p 26).

Les galeries formées par ces insectes ont été dissimulées par un enduit de mastic rose rigide apposé sur l'intégralité de la coque puis par l'application d'une peinture inadaptée au milieu marin et non conformé aux règles de l'art.

L'ampleur du phénomène est avérée de sorte que les graves dégradations de la coque du navire le rendent impropre à sa destination (rapports [A] et [J]). Cette situation, qui n'a pu être révélée à M. [Z] qu'à la suite du décapage complet de la coque par sablage, caractérise l'existence d'un vice.

Dans leurs dernières écritures, les époux [F] admettent devoir garantir leur acquéreur des vices cachés affectant le bateau. Il importe donc peu de se prononcer sur les griefs invoqués par l'appelante à l'encontre de leurs acquéreurs, consistant en :

- l'existence d'une omission volontaire de leur part de transmettre à M. [Z] les informations figurant dans le rapport établi par le cabinet d'expertise maritime Pages et Associés ;

- l'application d'une peinture bi-composant non-conforme aux règles de l'art ;

- l'existence d'une tromperie à l'assurance, voire d'une organisation de leur insolvabilité.

Il en est de même pour ce qui concerne la question de l'identité du responsable de l'application d'un enduit en mastic rose visant à volontairement occulter le phénomène d'infestation. S'il n'est pas formellement établi que cette substance a été apposée par la S.A.R.L. RFPC sur la coque du navire en raison de l'absence d'éléments tangibles fournis par les propriétaires antérieurs, cela ne démontre en rien l'absence de termites au jour de la transaction conclue avec les époux [F].

Pour retenir la présence de ces insectes au sein de la coque du voilier en 2006, soit antérieurement à la date de la vente du navire par la S.A.R.L. RFPC aux époux [F], l'expert judiciaire a retenu les éléments suivants :

1) Il s'agit tout d'abord du témoignage recueilli auprès de M. [R], ancien chef de bord du navire suivant un contrat à durée déterminée de six mois couvrant la période comprise entre le 10 avril et le 10 octobre 2006.

Lorsqu'il travaillait pour le compte de la S.A.R.L. RFPC, celui-ci a en effet établi une liste des travaux à effectuer durant l'hiver 2006/2007. A la rubrique relative à la structure, il y est expressément indiqué qu'il convient de 'changer la jambette infectée par les termites' et qu'il est nécessaire de 'contrôler l'étendue de l'infestation'.

L'ancien chef de bord a en outre précisé avoir informé son employeur de cette situation dans un rapport mais ce document a été perdu par le service des affaires maritimes.

M. [R] a enfin fourni des photographies nécessairement réalisées durant la période d'exécution de son contrat de travail comme le confirme la datation informatique. Il précise qu'elles peuvent être datées entre le 10 avril et le 17 juin 2006 alors que le navire se trouvait effectivement, au regard des pièces produites par l'appelante, hors d'eau au chantier naval de Sanary. Ces images font apparaître la mise à nu de la coque. Il en ressort d'une part que le mastic rose est bien présent sur l'intégralité de surface de celle-ci et que la présence de galeries apparaît d'autre part nettement visible. Leur existence était totalement décelable par le Chantier Naval des Baux comme l'indique l'expert judiciaire (rapport pages 25 et 29)

Ces éléments étaient inconnus des époux [F] à la date de la transaction.

L'appelante soutient que ce témoignage n'apparaît pas probant en raison du litige qui l'oppose au témoin. Cependant, l'existence d'un conflit entre les deux parties ou de l'animosité alléguée ne peut être suffisamment démontrée par des écrits rédigés uniquement par ses soins. Le contrat de travail apparaît avoir été mené à son terme sans mesure disciplinaire ou tendant à réduire sa durée.

2) Il s'agit ensuite des investigations menées par M. [K]. En sa qualité de charpentier de marine, il a clairement indiqué à l'expert judiciaire que ses investigations tendent à démontrer que les termites ont infesté le bois de la coque depuis le neuvage du navire, ajoutant que l'étendue des dégâts atteste la longue durée de leur présence. Ces précisions de nature technique invalident l'affirmation de la S.A.R.L. RFPC selon laquelle l'existence de l'infestation ne pourrait physiquement pas remonter à l'année 2006.

3) Il s'agit ensuite du rapport établi le 4 septembre 2007 par le cabinet Pages et Associés qui est intervenu à la demande des époux [F]. Son rédacteur, en l'occurrence M. [Y], mentionne très clairement avoir observé la présence d'orifices situés dans une zone saine du bois de la face arrière de la membrure se trouvant sous le réservoir tribord 'qui pourraient indiquer une éventuelle présence de termites par le passé, à surveiller'. Il précise toutefois n'avoir réalisé qu'un examen visuel et opéré ses constatations alors que le bateau se trouvait à flot, ajoutant qu'une véritable expertise de son état nécessiterait la réalisation de nombreuses investigations techniques qui n'ont pas été sollicitées par les acquéreurs. En conséquence, il ne peut être allégué que l'attention des époux [F] a été suffisamment attirée sur le risque d'une nouvelle infestation compte-tenu de l'ancienneté de leur présence telle que relatée dans ce document.

4) Enfin, la présence 'ancienne' d'insectes nuisibles est relevée dans le rapport du 19 mai 2013 de M. [T], document établi non contradictoirement mais versé aux débats par l'appelante.

L'argumentation de la S.A.R.L. RFPC selon laquelle le bruit généré par le phénomène d'infestation n'a pas été entendu par les élèves du lycée de la [20] lors de leur intervention sur le navire postérieurement à la date de la vente de celui-ci aux époux [F], sera écartée. En effet, seul un appareil sophistiqué permet de détecter les nuisances sonores occasionnées par ces insectes. En outre, il n'est pas démontré que les élèves de l'établissement précité ont réalisé des travaux de rénovation sur les parties infestées.

La S.A.R.L. RFPC prétend également que les acquéreurs du bateau se sont comportés 'quasiment' en qualité de professionnel. Certes, M. [F] a acquis peu après la date de la cession divers matériaux, pour un montant avoisinant la somme de 24.000 €, afin d'entretenir et de rénover certaines parties du navire. Il sera toutefois relevé que les époux [F] n'ont pas procédé à son acquisition en qualité de commerçant. Il convient d'ajouter que les acquéreurs n'exercent pas une activité rémunérée en lien avec le nautisme. Enfin, l'application par M. [F] d'une peinture inadaptée sur la coque démontre un manque de professionnalisme certain qui confine à l'amateurisme. Cette argumentation doit donc être écartée.

Enfin, au regard du montant total des dépenses effectuées par les époux [F] pour réparer le voilier, il n'est pas établi que ceux-ci se sont montrés défaillants dans son entretien. L'expert judiciaire observe d'ailleurs que certaines réparations, réalisées notamment par les élèves d'un lycée professionnel, ont valorisé le bateau.

Ces éléments concordants apparaissent suffisants pour déterminer la présence des termites à la date de la cession du voilier par la S.A.R.L. RFPC aux époux [F]. Le jugement attaqué ayant ainsi condamné la S.A.R.L. RFPC à relever indemne les époux [F] des sommes mises à leur charge sera confirmé par substitution de motifs.

S'agissant de l'action intentée par M. [Z] à l'encontre de l'appelante, le jugement attaqué a justement écarté l'application des dispositions de l'article 1382 du code civil, texte dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016.

En cause d'appel, M. [Z] fonde justement sa demande à l'encontre de la S.A.R.L. RFPC sur l'action directe de nature contractuelle dont bénéficie le sous-acquéreur (arrêt de la première chambre civile de la cour de cassation du 19 janvier 1988). En effet, le vendeur est débiteur de la garantie des vices cachés non seulement envers l'acheteur avec lequel il a contracté mais également à l'égard de tous les sous-acquéreurs de la chose dans la mesure où la mauvaise foi des époux [F] n'est pas démontrée comme cela ressort des éléments développés ci-dessus.

L'appelante sera donc condamnée au titre de l'action en garantie des vices cachés.

Sur les demandes d'indemnisation

Aux termes des dispositions de l'article 1645 du code civil, le vendeur est tenu, outre la restitution du prix de la vente de l'immeuble, de tous les dommages et intérêts envers les acquéreurs à la condition de démontrer sa connaissance du vice affectant l'immeuble.

En application des dispositions de l'article 1646 du code civil, le vendeur ne sera tenu qu'à la restitution du prix et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente.

Sur les demandes présentées par M. [Z]

M. [Z] réclame, outre la mise à la charge des époux [F] de la somme de 160.194,26 €, leur condamnation in solidum avec la société RFPC à lui verser :

- la somme de 160.194.26 € au titre de la restitution d'une partie du prix ;

- la somme de 73.894.66 € à titre de dommages et intérêts.

La somme réclamée aux époux [F] au titre de la restitution du prix a déjà été définitivement accordée à M. [Z] par le jugement attaqué non frappé d'appel sur ce point, de sorte qu'elle ne saurait s'ajouter au montant déjà octroyé.

La décision déférée, par des motifs pertinents que la cour adopte, a justement rappelé que les époux [F] ignoraient l'existence du vice à la date de la vente du voilier à leur acquéreur de sorte qu'ils ne peuvent être tenus au paiement de sommes étrangères aux frais occasionnés par la vente. Le rejet de cette prétention sera donc confirmé.

Le montant, non contesté par l'ensemble des parties, des frais collatéraux a été chiffré par l'expert à la somme de 66.673,74 €. M. [Z] justifie, comme préconisé par M. [J] (page 25 du rapport) sa demande d'actualisation du montant total de son préjudice qui peut être fixé à la somme réclamée compte-tenu des dépenses exposées postérieurement à la date du dépôt du document expertal (factures Net Service des 31 mai et 30 septembre 2014, Altée Levage du 21 mars 2014 et de l'établissement Loire Atlantique Pêche et Plaisance du 19 juin 2014). La S.A.R.L. RFPC sera donc condamnée à lui verser la somme de 73.894,66 €.

Sur les demandes présentées par les époux [F]

La société RFPC doit être qualifiée de professionnelle dans le secteur de la vente de bateaux.

En cette qualité, elle doit donc supporter une présomption de connaissance du vice et donc de mauvaise foi qui joue même en présence d'un vice indécelable.

Les époux [F] réclament sa condamnation au paiement des sommes de 12.000 € au titre de leur préjudice moral et 2.115,05 € au titre de leur préjudice matériel.

Aucune pièce ou document ne démontre la réalité d'un préjudice matériel.

De même, l'atteinte à leur honneur ou leur considération n'est pas caractérisée. L'inopposabilité à M. [Z] d'une donation-partage de l'immeuble des époux [F] consentie à leurs trois enfants, résultant d'une autre décision du tribunal de grande instance de Bordeaux, n'est pas de nature à justifier l'existence d'un préjudice moral. Il en est de même du coût des frais de procédure dont la demande d'indemnisation doit être examinée au titre des frais irrépétibles. Le rejet de ces prétentions en première instance sera donc confirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Les sommes allouées par la décision de première instance seront intégralement confirmées.

En cause d'appel, il convient de condamner la S.A.R.L. RFPC à verser la somme de 2.500 euros aux époux [F] mais également à M. [Z] et à Me [I] [H], es qualité de mandataire judiciaire du cabinet Pages et Associés. Les autres prétentions de ce chef seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

- Déclare irrecevables les conclusions déposées le 26 avril 2019 par madame [E] [U] épouse [F] et monsieur [N] [F] ;

- Infirme le jugement en date du 10 décembre 2015 rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu'il a rejeté les demandes d'indemnisation présentées par monsieur [X] [Z] à l'encontre de la S.A.R.L. RFPC et, statuant à nouveau dans cette limite ;

- Condamne la S.A.R.L. RFPC à payer à monsieur [X] [Z] les sommes de :

- 160.194,26 euros (cent soixante mille cent quatre-vingt-quatorze euros et vingt-six centimes) au titre de la restitution du prix de vente du voilier ;

- 73.894,66 euros (soixante treize mille huit cent quatre-vingt-quatorze euros et soixante-six centimes) au titre de l'indemnisation des frais occasionnés par la vente ;

- Confirme la décision déférée pour le surplus ;

Y ajoutant ;

- Rejette les autres demandes présentées par monsieur [X] [Z] ;

- Condamne la S.A.R.L. RFPC à verser à madame [E] [U] épouse [F] et monsieur [N] [F], ensemble, une somme de 2.500 euros (deux mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la S.A.R.L. RFPC à verser à monsieur [X] [Z] une somme de 2.500 euros (deux mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la S.A.R.L. RFPC à verser à maître [I] [H], ès qualité de liquidateur amiable du cabinet d'expertise Pages & associés, une somme de 2.500 euros (deux mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Rejette les autres demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la S.A.R.L. RFPC au paiement des dépens qui pourront être directement recouvrés par maître [M] [O] et la SCP Cadiot-Feidt représentée par Me Anne Cadiot-Feidt, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

La présente décision a été signée par madame Marie-Jeanne Lavergne-Contal, présidente, et madame Audrey Collin, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 16/00757
Date de la décision : 12/12/2019

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 1B, arrêt n°16/00757 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-12;16.00757 ?
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