La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/07/2019 | FRANCE | N°18/04905

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 3ème chambre famille, 22 juillet 2019, 18/04905


COUR D'APPEL DE BORDEAUX





TROISIÈME CHAMBRE CIVILE





--------------------------











ARRÊT DU : 22 JUILLET 2019





(Rédacteur : Catherine ROUAUD-FOLLIARD, Présidente)








N° RG 18/04905 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KTPZ

















X... D...





c/





W..., H... P...























<

br>




Nature de la décision : AU FOND

















Grosse délivrée le :





aux avocats :


Décisions déférées à la Cour :





- sur renvoi de cassation d'un arrêt (Pourvoi n° R 17-22.645) rendu le 04 juillet 2018 par la Première chambre Civile de la Cour de Cassation,


- en suite d'un arrêt (RG 16/00648) rendu le 16 mai 20...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 22 JUILLET 2019

(Rédacteur : Catherine ROUAUD-FOLLIARD, Présidente)

N° RG 18/04905 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KTPZ

X... D...

c/

W..., H... P...

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats :

Décisions déférées à la Cour :

- sur renvoi de cassation d'un arrêt (Pourvoi n° R 17-22.645) rendu le 04 juillet 2018 par la Première chambre Civile de la Cour de Cassation,

- en suite d'un arrêt (RG 16/00648) rendu le 16 mai 2017 par la 3ème Chambre civile de la Cour d'appel de BORDEAUX,

- sur appel d'un jugement (RG 12/04296) rendu le 07 janvier 2016 par la chambre de la famille (cabinet 5) du tribunal de grande instance de BORDEAUX,

- selon déclaration de saisine en date du 27 août 2018

APPELANTE :

X... D...

née le [...] à CAUDERAN (33200)

de nationalité Française,

demeurant [...]

Représentée par Me Valérie JANOUEIX de la SCP BATS - LACOSTE - JANOUEIX, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Maryannick BRAUN de la SELARL MESCAM & BRAUN, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

W..., H... P...

né le [...] à LIBOURNE (33500)

de nationalité Française,

domicilié [...]

Représenté par Me Christian G..., avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du cpc, l'affaire a été débattue le 21 mai 2019 hors la présence du public, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Michèle ESARTE, Présidente et Marie-Hélène PICHOT, Conseiller, chargés du rapport,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Catherine ROUAUD-FOLLIARD

Conseiller :Michèle ESARTE

Conseiller :Marie-Hélène PICHOT

Greffier lors des débats : Evelyne GOMBAUD

Greffier lors du prononcé : Audrey COLLIN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.

M. P... et Mme D... se sont mariés le 1er juillet 1978 à Cercoux (17) sans contrat de mariage préalable. De leur union, sont issus deux enfants :

- U..., né le [...] ,

- C..., née le [...] , désormais tous deux majeurs.

Mme D... a présenté une requête en divorce le 10 mai 2012 au juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux.

Par ordonnance de non-conciliation en date du 29 octobre 2012, le juge aux affaires familiales a, principalement :

- attribué la jouissance du logement du ménage situé lieudit aux [...] à titre gratuit à l'épouse,

- attribué la jouissance du domicile [...] à l'époux,

- fixé à 800 euros par mois le montant de pension alimentaire que l'époux devra verser à l'épouse au titre du devoir de secours.

Sur appel de l'épouse et selon arrêt en date du 09 avril 2013, la cour d'appel de Bordeaux a ordonné l'interversion de la jouissance des maisons des époux, en imposant une jouissance à titre onéreux pour chacun d'eux.

Par jugement en date du 07 janvier 2016, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a, principalement :

- prononcé le divorce des époux pour altération du lien conjugal,

- rappelé que les effets du divorce seront reportés au jour de l'ordonnance de non-conciliation,

- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux et commis pour y procéder Maître Q... V... , notaire à Arcachon,

- alloué à l'épouse une prestation compensatoire en capital à hauteur de 80 000 euros ainsi qu'une rente viagère de 400 euros par mois indexés,

- débouté M. P... de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil,

- rejeté toute autre demande,

- dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.

M. P... a relevé appel de cette décision en sa disposition relative à la prestation compensatoire. Mme D... a formé appel incident.

Par un arrêt en date du 16 mai 2017, la cour a réformé la décision sur le montant et les modalités de la prestation compensatoire, sauf en ce qui concerne l'indexation de la rente, et se faisant :

- dit que M. P... s'acquittera de la prestation compensatoire sous la forme de l'attribution de la moitié de l'usufruit de la maison de Lanton d'une valeur de 111 750 euros et d'une rente viagère,

- condamné M. P... à verser à Mme D... une rente viagère de 800 euros par mois,

- confirmé pour le surplus la décision déférée et rejeté les autres demandes,

- condamné M. P... à payer à Mme D... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. P... aux dépens d'appel.

M. P... a formé un pourvoi en cassation contre cette décision.

Par un arrêt en date du 04 juillet 2018, la première chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt rendu par la cour d'appel de Bordeaux seulement en ce qu'il a dit que M. P... s'acquittera d'une prestation compensatoire sous la forme de l'attribution de la moitié de l'usufruit de la maison de Lanton d'une valeur de 111 750 euros et d'une rente viagère et le condamne à payer une rente viagère de 800 euros par mois. La Cour renvoie par ailleurs les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée et condamne Mme D... aux dépens. Selon la Haute juridiction, la cour d'appel n'a pas constaté que les modaltiés prévues à l'article 274 alinéa 1 du code civil n'étaient pas suffisantes pour garantir le versement de cette prestation, et a donc privé sa décision de base légale au regard de ce texte.

Mme D... a saisi la cour d'appel de Bordeaux le 27 août 2018 désignée comme Cour de renvoi par l'arrêt de cassation.

Aux termes de ses dernières conclusions du 05 avril 2019, Mme D... demande à la cour de :

- déclarer irrecevables les conclusions signifiées par M. P... le 27 décembre 2018 au visa de l'article 961 du code de procédure civile,

- constater l'insuffisance de garanties apportées par M. P... au paiement de la prestation compensatoire au regard des dispositions des articles 274 alinéa 1 et 277 du code civil,

- principalement, allouer à Mme D... une prestation compensatoire de 200 000 (deux cent mille) euros payable par attribution de la part d'usufruit de son mari sur la maison de Lanton à hauteur de 111 750 euros outre un captial de 88 250 euros assortie d'une rente viagère de 800 euros par mois, à compter du 29 juin 2016,

- subsidiairement, allouer à Mme D... une prestation compensatoire de 430 352 euros payable par attribution de la part d'usufruit de son mari sur la maison de Lanton à hauteur de 111 750 euros outre un capital de 318 602 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, allouer à Mme D... une prestation compensatoire de 430 352 euros payable en capital,

- condamner M. P... au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions du 27 décembre 2018, M. P... demande à la cour de :

- réformer la décision prise par le juge aux affaires familiales en ce qu'il a fixé une prestation compensatoire au profit de Mme D...,

- dire n'y avoir lieu à prestation compensatoire et à défaut dire que cette prestation compensatoire prendra la fome de l'attribution à Mme D... de la part qui serait revenue à M. P... portant sur l'immeuble situé à [...], à titre de paiement de cette prestation compensatoire,

- débouter Mme D... du surplus de ses demandes,

- condamner Mme D... à payer à M. P... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens y compris ceux de première instance.

En application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour renvoie aux conclusions des parties pour l'exposé des moyens.

SUR QUOI LA COUR;

Mme D... demande que soient écartées les conclusions de M. P... du 27 décembre 2018 au visa de l'article 961 du Code de procédure civile;

Elle fait valoir que l'adresse indiquée par M. P... sur les dites conclusions (ADAV33, [...] ) n'est pas son domicile depuis le 31 décembre 2018, qu'en mai 2017, à l'huissier de justice qui a tenté en vain de lui signifier l'arrêt rendu le 16 mai 2017, M. P... a déclaré au téléphone qu'il était actuellement en Espagne et n'avait ni domicile ni lieu de travail en France et refusait de communiquer son adresse actuelle en Espagne.

M. P... qui n'a pas conclu depuis le 27 décembre 2018, n'a pas répondu à ce moyen.

Aux termes des articles 960 et 961 du Code de procédure civile, l'acte de constitution d'avocat de l'intimé indique, si la partie est une personne physique, ses nom, prénoms, domicile, profession, nationalité et date et lieu de naissance; les conclusions des parties ne sont pas recevables tant que les indications sus mentionnées n'ont pas été fournies. Cette fin de non recevoir peut être régularisée jusqu'au prononcé de la clôture

La constitution d'avocat de M. P..., notifiée par voie électronique le 21 décembre 2018 et ses conclusions d'intimé du 27 décembre 2018 indiquent l'adresse suivante; [...], [...] .

Mme D... ne produit pas les pièces 121 et 122 qu'elle annonce et qui indiqueraient que l'huissier de justice aurait reçu l'information de ce que M. P... vivrait en Espagne et n'aurait ni domicile ni lieu de travail en France et refuserait de communiquer son adresse actuelle en Espagne. N'est pas non plus produite de pièce indiquant que l'adresse mentionnée par M. P... dans l'acte de constitution d'avocat et dans ses conclusions du 27 décembre 2018 ne serait pas son domicile.

Dès lors, les conclusions déposées par M. P... le 27 décembre 2018 sont recevables.

L'arrêt de la Cour de cassation remet la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé du 16 mai 2017 et examinera le jugement du tribunal de grande instance de 16 janvier 2016 dont appel partiel a été relevé en sa disposition relative à la prestation compensatoire.

Ce jugement a retenu la disparité des conditions de vie des parties résultant de la rupture du mariage et a alloué à Mme D... une prestation compensatoire en capital de 80 000€ ainsi qu'une rente viagère mensuelle de 400€.

Aux termes de ses conclusions, Mme D... fait valoir que la situation des époux doit être examinée à la date du 27 juin 2016 et mentionne précisément ses problèmes de santé l'ayant conduite à cesser son activité de gérante de tutelles; Mme D... indique les éléments du patrimoine immobilier et mobilier de la communauté ainsi que les récompenses dues de part et d'autre. Elle précise les sommes reçues par chacun à titre gratuit en reprochant à M. P... d'entretenir l'opacité de ses revenus. Elle fait état de ses charges et revenus.

M. P... répond que Mme D... qui travaillait depuis 20 ans en qualité de gérante de tutelle n'a cessé cette activité qu'en considération de la procédure de divorce au cours de laquelle elle a perçu une pension alimentaire au titre du devoir de secours; il évalue le montant de ses pensions de retraite sur lequel il ne pourrait verser de rente et propose, si une prestation compensatoire était décidée, qu'elle reçoive la pleine propriété de l'immeuble commun sis à Gironde sur Dropt dont la valeur serait déterminée au jour du partage.

Aux termes de l'article 270 du Code civil, le divorce met fin au devoir de secours des époux ; l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation compensatoire destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire et prend la forme d'un capital fixé par le juge.

Selon l'article 271 du Code civil, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. Sont pris en compte divers critères qui seront examinés à la date du 27 juin 2016, jour des conclusions de Mme D... dans la procédure d'appel.

* le mariage aura duré 37 ans dont 34 ans de vie commune;

* âgé de 60 ans en 2016, M. P... ne fait pas état de problème de santé dans ses conclusions mais produit un rapport d'expertise consécutif à des blessures résultant d'une agression en date du 7 juin 2013. Ce rapport mentionne des déficits temporaires et un déficit fonctionnel permanent de 2% sans retentissement professionnel (les séquelles étant de nature à pouvoir le gêner temporairement dans les activités de loisirs jusqu'à la consolidation sans contre indiquer la reprise de ses activités).

*âgée de 63 ans en 2016, Mme D... produit les documents médicaux relatifs aux nombreux problèmes de santé qu'elle énumère ( hémorragie méningée en 2003, intervention chirurgicale sur un adénocarcinome du sein droit en 2003 et ablation d'une adénopathie axillaire droit en 2005, ablation de l'utérus, état dépressif réactionnel ) et un rapport médical du 2 août 2004 mentionnant des troubles liés à un anévrisme et concluant à une incapacité totale et définitive pour tout travail agricole.

* la déclaration des revenus de l'année 2015 de Mme D... indique une pension d'invalidité de 5 082€ et des pensions alimentaires de 9649€ versées par M. P... mais qu'elle ne perçoit plus depuis que le divorce est devenu définitif. Pour l'année 2017, Mme D... fait état d'une pension de retraite qui serait de 328€ par mois majoré d'un versement unique de 1 123€ au titre des retraites complémentaires.

Les charges de Mme D... qui vit dans la maison de Lanton s'élèvent à la somme de 609€ par mois ;

*la déclaration sur l'honneur de M. P..., datée de 2017 indique qu'il perçoit alors des prestations sociales de 2 270€ par mois et un revenu foncier de 600€ par mois. Sa déclaration sur l'honneur datée de 2018 indique un revenu foncier de 120€ par mois. Est aussi produit le détail de son imposition des revenus 2017 mentionnant des pensions d'invalidité de 38 241€ et un revenu foncier net de 1 953€.

Mais les revenus de M. P... en 2016 ne sont pas connus: ses conclusions ne les mentionnent pas et il indique seulement qu'il percevra des pensions de retraite à hauteur mensuelle de 2 274€ en produisant l' estimation de la retraite complémentaire qui lui sera servie par la CAVAMAC en avril 2020.

*la communauté comporte trois immeubles dont l'usufruit de celui de Lanton occupé par Mme D... et que l'expert a évalué en pleine propriété à hauteur de 447 000€, l'usufruit d'un immeuble sis à Gironde sur Dropt et que l'expert a évalué en pleine propriété à hauteur de 61 000€ et la pleine propriété d'un immeuble sis à Mongauzy et estimé par l'expert à la somme de 281 000€ dont M. P... a la jouissance depuis 2013.

* Mme D... fait état d'une récompense qu'elle devra à son époux pour une donation de somme d'argent reçue en héritage et ayant servi à l'acquisition d'un immeuble revendu pour acquérir la maison de Mongauzy et la cabinet d'assurances vendu en 2008.

* Mme D... affirme que M. P... est détenteur d'un patrimoine propre constitué de la nu- propriété pour le tiers des biens de sa mère, plusieurs immeubles dont un [...] et un appartement avec garage à Libourne qui lui procurait un loyer de 640€ par mois. M. P... ne vise pas ces biens dans ses déclarations sur l'honneur, se contentant de renvoyer au rapport d'expertise qui ne les vise pas. En tout état de cause, M. P... perçoit des revenus fonciers sans préciser la valeur du bien qui les génére.

*chaque époux devra une indemnité d'occupation que Mme D... calculée sur la base de l'expertise et qu'elle chiffre à hauteur de 59 794€ pour M. P... et de 71 500€ pour elle à la fin de l'année 2018.

*le capital mobilier de M. P... en 2016 n'est pas connu, ses conclusions ne l'évoquant pas même si sa pièce 26 indique des revenus de capitaux mobiliers de 4 306€ en 2017. Sa déclaration sur l'honneur de 2017 ne les mentionne pas et celle de 2018 mentionne des avoirs bancaires auprès de Boursorama, la Banque populaire et l'AFER sans précision des montants ni de leur origine.

Aucune précision n'est apportée quant à la valeur des véhicules ( moto, voituire BMW ,bateau de plaisance)

* M. P... dont les revenus de l'année 2016 de sont pas établis ne précise pas ses charges et Mme D... justifie des siennes pour un montant mensuel de 609€.

Ces éléments confirment l'existence d'une disparité dans les conditions de vie des parties, liées à la rupture du mariage et résultant tant des capacités financières des époux que de leur âge, de leur état de santé et de leurs droits à retraite.

S'agissant des modalités de paiement de la prestation compensatoire, Mme D... fait valoir que les garanties visées par l'article 277 du Code civil seraient insuffisantes dans la mesure où M. P... a adopté un comportement visant à échapper à ses obligations en cachant la location de la maison de Lanton, en ne payant pas la pension alimentaire due au titre du devoir de secours, en restant taisant sur sa situation financière et patrimoniale. Elle ajoute que la maison de Lanton qu'elle occupe est de plain- pied alors que celle de Mongauzy est trop grande et isolée et qu'une rente viagère est nécessaire eu égard à son âge et à ses problèmes de santé.

M. P... souhaite que la prestation compensatoire ne porte que sur la maison de Mongauzy.

Aux termes de l'article 274 du Code civil; le juge décide des modalités d'exécution de la prestation compensatoire en capital parmi les formes suivantes : versement d'une somme d'argent pouvant donner lieu à constitution de garanties prévues à l'article 277 du Code civil, attribution d'un bien en propriété ou en usufruit. Cette seconde modalité constitue cependant une modalité subsidiaire d'exécution de la prestation compensatoire en capital et ne peut être ordonnée que dans les cas où les modalités prévues par le 1° du même article n'apparaissent pas suffisantes pour garantir le paiement de la prestation compensatoire.

En l'espèce, les garanties prévues à l'article 277 du Code civil ne seraient pas fiables dans la mesure où, ainsi que rappelé par Mme D..., M. P... lui a caché la location de la maison de Lanton dont la jouissance lui était allouée comme il cèle aujourd'hui la consistance de ses revenus et avoirs immobiliers et mobiliers et qu'une mesure d'exécution forcée a dû être entreprise pour paiement de la pension alimentaire mise à sa charge au titre de l' obligation de secours en dépit de la situation financière et de santé de son épouse.

L'attribution de l'usufruit de la maison de Lanton que Mme D... occupe depuis plusieurs années et qui est compatible avec les difficultés de santé constitue une modalité d'exercice de la prestation compensatoire (il sera noté que la maison de Mongauzy dont M. P... propose la pleine propriété comporte un rez de chaussée et deux étages ainsi que des dépendances et des parcelles de terre d'une superficie de plus de 6 ha, que les photographies prises par l'expert révèlent un faible état d'entretien et que l'état de santé et les capacités financières de Mme D... ne lui permettraient pas d'y vivre en réalisant les dépenses nécessaires).

La valeur de l'usufruit de cette maison de Lanton est, eu égard à l'âge de Mme D... et à la valeur en pleine propriété, de 117 750€.

Ensuite, tant les nombreux problèmes de santé que l'âge de Mme D... ne lui permettent pas de travailler et le montant de sa pension de retraite est très insuffisant.

Pour ces raisons, la prestation compensatoire due par M. P... sera exécutée sous la forme de l'attribution de l'usufruit de la maison de Lanton d'une valeur de 117750€ et d'une rente viagère mensuelle de 600€ par mois.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Succombant, M. P... supportera les entiers dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS,

la cour, après rapport;

Dit recevables les conclusions de M. P... du 27 décembre 2018;

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 7 janvier 2016 en ce qu'il a condamné M. P... à payer à Mme D... une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 80 000€ et d'une rente viagère mensuelle de 400€ et statuant à nouveau de ce chef:

Condamne M. P... à payer à Mme D... une prestation compensatoire sous forme de l'attribution de l'usufruit de l'immeuble sis [...] pour une valeur de 117 750€ et d'une rente viagère mensuelle de 600€.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

Condamne M. P... aux entiers dépens de la procédure d'appel.

L'arrêt a été signé par Catherine ROUAUD-FOLLIARD, Présidente et par Audrey COLLIN, greffier auquel elle a remis la minute signée de la décision

le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre famille
Numéro d'arrêt : 18/04905
Date de la décision : 22/07/2019

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 06, arrêt n°18/04905 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-07-22;18.04905 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award