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23/05/2019 | FRANCE | N°17/01456

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 23 mai 2019, 17/01456


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------







ARRÊT DU : 23 MAI 2019



(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,)



PRUD'HOMMES



N° RG 17/01456 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-JW52







SARL DECOVET



c/



Madame [O] [A] épouse [K]

SAS MEM DIFFUSION

















Nature de la décision : AU FOND










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Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 février 2017 (R.G. n°16/00400) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 07 mars 2017,





APPELANTE :



SARL DECOVETagissan...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 23 MAI 2019

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,)

PRUD'HOMMES

N° RG 17/01456 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-JW52

SARL DECOVET

c/

Madame [O] [A] épouse [K]

SAS MEM DIFFUSION

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 février 2017 (R.G. n°16/00400) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 07 mars 2017,

APPELANTE :

SARL DECOVETagissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 432 .05 3.7 59

assistée et représentée par Me Philippe DUPRAT de la SCP DAGG, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

Madame [O] [A] épouse [K], née le [Date naissance 1] 1974, de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

assistée et représentée par Me Stanislas LAUDET, avocat au barreau de BORDEAUX

SAS MEM DIFFUSIONprise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 3]

assistée et représentée par Me Alain GUERIN de la SELARL A. GUERIN & J. DELAS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 mars 2019 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Madame Emmanuelle LEBOUCHER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Sylvaine Déchamps,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Exposé du litige :

Selon un contrat de travail à durée indéterminée du 19 novembre 2007, la société FB Développement devenue la société Decovet, exploitant des magasins de vêtements d'occasion sous l'enseigne Maboul, a engagé Mme [K] en qualité de vendeuse.

La convention collective applicable est celle du commerce de détail de l'habillement et des articles textiles.

A compter du 1er septembre 2009, Mme [K] a été employée en qualité de responsable des magasins de vente.

Par lettre du 1er mars 2011, elle a été informée que son contrat de travail était transféré, au magasin de [Localité 1] sans modification de ses attributions et rémunération. Aucun avenant contractuel n'a été conclu à cet effet.

Le 12 octobre 2015, la société Decovet a notifié à Mme [K] le transfert de son contrat à la société Mem Diffusion, suite à la cession des magasins de [Localité 1] et de [Localité 2].

Par courrier du 9 novembre 2015, Mme [K] a contesté le transfert de son contrat de travail auprès de la société Decovet en faisant valoir que ses fonctions de responsable des ventes de l'ensemble des magasins s'y opposait

Par courrier du 19 novembre 2015, la société Decovet a confirmé à Mme [K] le transfert de son contrat de travail.

Par courrier du 1er décembre 2015, Mme [K] a mis en demeure la société Decovet de lui confirmer le maintien de son contrat de travail dans l'entreprise et de tenir son engagement de reprise d'ancienneté au 19 novembre 2007.

Par courrier du 11 décembre 2015, la société Decovet a maintenu sa position.

Par courrier du 1er janvier 2016, la société Decovet a informé Mme [K] du transfert du contrat de travail à la société Mem Diffusion à compter de ce jour.

Le 16 février 2016, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux aux fins de :

' voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur

' voir condamner solidairement les sociétés Decovet et Mem Diffusion au paiement des sommes suivantes :

* 47 079 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 11 769,75 euros à titre d'indemnité de préavis outre 1 176,98 euros au titre des congés payés afférents

* 5 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi lié à l'absence de reprise d'ancienneté

* 6 802,92 euros à titre d'indemnité légale de licenciement

* 136 943,12 euros à titre de rappel de salaire au titre de repositionnement au statut de cadre de 2010 à 2015, outre 13 694,23 euros au titre des congés payés afférents

* subsidiairement, 37 565,83 euros à titre de rappel de salaire consécutif au repositionnement au statut agent de maîtrise de 2010 à 2015, outre 3 756,58 euros au titre des congés payés afférents

* 2 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat

* 871,45 euros à titre de rappel de salaires variable au titre du mois de septembre 2015 outre 87,15 euros au titre des congés payés afférents

* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Par jugement du 14 février 2017, le conseil de prud'hommes de Bordeaux a :

' prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K] aux torts de la société Decovet

' requalifié la classification de Mme [K] à la position d'agent de maîtrise, catégorie B, depuis le 1er février 2013

' mis hors de cause la société Mem Diffusion

' condamné la société Decovet à verser à Mme [K] les sommes suivantes :

* 7 682,79 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 768,27 euros au titre des congés payés afférents

* 4 524,70 euros à titre d'indemnité de licenciement

* 680,35 euros à titre de rappel de salaire, au titre de son repositionnement outre 68,03 euros au titre des congés payés afférents

* 871,45 euros à titre de rappel de salaire sur la rémunération variable outre 87,14 euros au titre des congés payés afférents

* 25 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L 1235-3 du code du travail

* ordonné d'office le remboursement par l'employeur des indemnités chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois d'indemnités chômage, conformément à l'article 1235-4 du code du travail

* 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

' rejeté le surplus des demandes de Mme [K]

' rejeté la demande reconventionnelle de la société Mem Diffusion de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile

' condamné la société Decovet aux dépens outre les éventuels frais d'exécution

' rejeté la demande reconventionnelle de la société Decovet fondée sur l'article 700 du code de procédure civile

Par déclaration du 7 mars 2017, la société Decovet relevé appel du jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 13 septembre 2017, la société Decovet sollicite de la cour :

' à titre principal, qu'elle :

* infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

* déclare irrecevable et mal fondée l'action en résiliation judiciaire de Mme [K] à son encontre

* juge que la classification de Mme [K] pour le poste occupé est de niveau 8 de la classification de la convention collective

* statue ce que de droit sur la demande de rappel de prime d'ancienneté sauf à la fixer à la somme de 586,85 euros bruts, outre les congés payés pour 56,68 euros bruts

* statue ce que de droit sur la demande de rappel de la prime variable pour septembre 2015 sauf à fixer l'éventuel rappel à la somme de 680,35 euros

* rejette le surplus des demandes formulées par Mme [K]

' à titre subsidiaire, en cas de reconnaissance de la position A1 de la convention collective, qu'elle :

* juge que le rappel de salaire est de 165 euros bruts outre 16,50 euros bruts au titre des congés payés afférents et que le rappel de prime d'ancienneté est de 933,31 euros bruts, outre les congés payés

* rejette le surplus des demandes formulées par Mme [K]

' plus subsidiairement, en cas de reconnaissance de la position B de la convention collective, qu'elle :

* juge que le rappel de salaire est de 16 357 ,28 euros outre 1 635,72 euros de congés payés afférents et que le rappel de prime d'ancienneté est de 2 766,57 euros, outre les congés payés

* rejette le surplus des demandes de Mme [K]

' à titre infiniment subsidiaire, en cas de confirmation de la résiliation judiciaire pour absence d'application de l'article L 1224-1 du Code du travail, qu'elle :

* réduise l'indemnité de préavis à la somme de 3 903,92 euros, l'indemnité de licenciement à la somme de 3 220,72 euros et les dommages et intérêts à la somme de 4 000 euros

* réforme le jugement pour le surplus des sommes allouées

' en tout état de cause, condamne Mme [K] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures remises au greffe le 13 juillet 2017, Mme [K] sollicite de la cour qu'elle :

' confirme le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société Decovet et, subsidiairement et à titre incident, de la société Mem Diffusion

' fixe la moyenne des trois derniers mois du salaire reconstitué de la salariée à la somme de 3 923,25 euros

' condamne la société Decovet et, subsidiairement et à titre incident, la société Mem Diffusion au paiement des sommes suivantes :

- à titre principal et incident, 116 656,43 euros à titre de rappel de salaires consécutif au repositionnement du salarié au statut cadre de 2010 à 2015 et 11 666,64 euros au titre des congés payés afférents

- à titre subsidiaire, confirme le jugement déféré en ce qu'il l'a repositionnée au statut d'agent de maîtrise et à titre incident, 32 484,99 euros à titre rappel de salaires consécutif au repositionnement et 3 248,50 euros au titre des congés payés afférents

- en tout état de cause et à titre incident :

* 11 769,75 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 176,98 euros au titre des congés payés afférents

* 6 802,92 euros à titre d'indemnité légale de licenciement

* 47 079 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de reprise d'ancienneté

* 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat s'agissant de la préservation de la santé du salarié

* 871,45 euros à titre de rappel de salaire variable au titre du mois de septembre 2015 et 87,15 euros au titre des congés payés afférents

* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

' prononce l'anatocisme à compter de la saisine du conseil de prud'hommes pour les sommes ayant la nature de salaire et à compter de la décision pour les sommes ayant une nature indemnitaire.

Aux termes de ses dernières conclusions reçues par RPVA le 11 juillet 2017, la société Mem Diffusion demande à la cour :

' à titre principal, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a mise hors de cause

' à titre subsidiaire de :

* juger que le contrat de travail de Mme [K] a été transféré, en application de l'article L1224-1 du code du travail, au 1er janvier 2016, à son profit

* statuer ce que de droit sur les prétentions de la demanderesse au titre de la résiliation judiciaire, de ses rappels de salaires et autres demandes en dommages et intérêts

* lui donner acte de ses observations

* juger que la société Decovet relèvera indemne la société Mem Diffusion de toutes condamnations prononcées à son encontre

' en tout état de cause, condamne la partie succombante au règlement d'une somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 novembre 2018.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

Motifs de la décision

Sur la demande de résiliation du contrat de travail et de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail et de manquement à l'obligation de sécurité

Un salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquements de celui-ci à ses obligations. Lorsque les manquements sont établis et sont d'une gravité telle qu'ils empêchent la poursuite du contrat de travail, la résiliation judiciaire est prononcée aux torts de l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La preuve des manquements incombe au salarié.

Mme [K] soutient que la société Decovet a modifié unilatéralement son contrat de travail en ce qu'elle l'a rétrogradée du poste de responsable des ventes à celui de responsable de magasin avec suppression de ses missions de suivi des autres magasins alors qu'elle a bien exercé les fonctions de "responsable du développement des ventes détail France" et qu'elle n'a jamais signé d'avenant transformant son poste.

Elle ajoute que la cession du magasin de [Localité 1] ne pouvait entraîner le transfert de son contrat de travail dans la mesure où elle était responsable des ventes de tous les magasins de la société Decovet laquelle avait, d'ailleurs, vendu deux magasins au cours de la relation de travail sans que ses missions de responsable des ventes en soit affectée.

Pour cette double raison, elle sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Sur le premier point, la société Decovet objecte que le contrat de travail de Mme [K] n'a subi aucune modification unilatérale qui lui permettrait d'obtenir la résiliation de son contrat de travail. Elle indique que Mme [K] a accepté, moyennant une prime variable indexée sur les ventes du magasin, d'être affectée définitivement sur le site de [Localité 1] en tant que responsable de magasin, ainsi que cela a été formalisé par un courrier du 1er mars 2011, sans que cette affectation n'entrave sa mission de responsable national des ventes à laquelle elle ne consacrait que 10% de son temps de travail.

La cour retient, à cet égard, que d'une part, Mme [K] a signé, le 1er mars 2010, un avenant à son contrat de travail par lequel elle assurait, en l'absence de la nomination d'un responsable sur place, le suivi direct du magasin de [Localité 1] en contrepartie du versement d'une prime et d'autre part, que l'employeur a, par un courrier du 1er mars 2011, informé la salariée qu'elle était désormais rattachée au magasin de [Localité 1] et que ses fonctions, qualification et rémunération demeuraient inchangées. Ce courrier intitulé transfert du contrat de travail demandait à Mme [K] de retourner un exemplaire du document revêtu de sa signature avec la mention bon pour accord, ce dont la salariée s'est acquittée comme l'atteste la pièce versée aux débats.

Il résulte de ces éléments que, parallèlement à sa fonction de responsable des ventes au sein de la société, Mme [K] a accepté d'assurer la gestion du magasin de [Localité 1] en conservant sa qualification et sa rémunération initiale, outre une prime de résultat.

La salariée ne peut, dans ces conditions, se prévaloir d'une modification unilatérale de son contrat de travail.

Il reste, cependant, à vérifier si le contrat de travail de l'intéressée a été régulièrement transféré à l'occasion de la cession du magasin de [Localité 1].

L'article 1224-1 du Code du travail dispose que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. Le transfert est effectif lorsque le contrat de travail s'exécutait pour l'essentiel dans le secteur d'activité repris par la société cessionnaire alors même que l'employé avait continué à exercer des tâches dans un secteur encore exploité par la société cédante.

En l'espèce, la vente du fonds de commerce du magasin de [Localité 1] est intervenue par acte notarié établi le 15 janvier 2016, avec une entrée en jouissance du cessionnaire, la société Mem Diffusion, au 1er janvier 2016. L'acte de cession prévoit que les contrats de travail dont celui de Mme [K] sont transférés au cessionnaire par application des articles L 1224-1 et L 1224-2 du code du travail.

L'employeur démontre par une mesure objective de l'activité de la salariée et des attestations de salariés ayant travaillé avec elle que son emploi au sein du magasin de [Localité 1] représentait plus de 90% de son activité, ses interventions sur d'autres sites en tant que responsable des ventes étant limitées à quelques journées par an.

Il en résulte que Mme [K] exécutait son contrat de travail essentiellement en tant que responsable du magasin de [Localité 1] de sorte que la société Decovet n'a pas enfreint les dispositions d'ordre public de l'article L 1224-1 en organisant le transfert du contrat de travail de l'intéressée lors de la cession du magasin de [Localité 1] lequel constituait une entité économique autonome.

La société MEM Diffusion n'a d'ailleurs jamais contesté ce transfert et a assuré l'ensemble des obligations en découlant.

Le moyen soutenu par Mme [K] selon lequel la société Decovet a fait obstacle au maintien de son contrat de travail dans cette entreprise, ce qui constituerait à lui seul un motif de résiliation du contrat de travail, n'est donc pas fondé.

Les allégations de la salariée qui prétend que la société Decovet et la société MEM Diffusion auraient, par ailleurs exécuté le contrat de travail de façon déloyale en donnant des instructions contraires aux siennes sur la politique tarifaire et que l'attitude de la société Decovet qui s'est acharnée à l'évincer a contribué à dégrader son état de santé, ne sont étayées par aucun élément probant.

En l'absence de manquement de la société Decovet à ses obligations contractuelles, Mme [K] ,sera déboutée de sa demande de résiliation judiciaire dirigée contre son ancien employeur.

Le jugement sera réformé en ce sens.

Pour les mêmes motifs, Mme [K] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail et des manquements à l'obligation de sécurité. Il sera ajouté en ce sens au jugement qui a omis de statuer sur ce chef de demande.

Sur la demande de reclassification

Mme [K] sollicite son repositionnement au statut de cadre compte tenu de ses fonctions de responsable du développement des ventes de tous les magasins ; à titre subsidiaire, elle demande une reclassification au statut d'agent de maîtrise catégorie B et les rappels de salaires correspondant, postérieurement au 12 février 2011.

Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.

Le préambule de l'accord de branche du 12 octobre 2006 prévoit qu'en cas de polyvalence d'emploi, la pratique de l'emploi le plus fréquemment exercé sera retenue pour déterminer la classification. Il convient donc, dans le cas de Mme [K], d'apprécier sa classification au regard de son emploi de responsable de magasin. Celle-ci était rémunérée au niveau 8 de la grille indiciaire de la convention collective ce qui correspond à un emploi de première vendeuse confirmée.

Si la salariée ne peut prétendre à la qualification de cadre qu'elle revendique car elle ne disposait pas de la délégation de pouvoir requise par la convention collective en matière commerciale et de gestion du personnel, il ressort, néanmoins, de ses attributions de responsable de magasin qu'elle remplissait les conditions pour bénéficier du statut d'agent de maîtrise catégorie A1 réservée aux salariés assurant de manière permanente la gestion courante du magasin et animant une équipe de vendeurs, la catégorie B ne lui étant, toutefois, pas accessible car elle n'était pas chargée de l'achat de nouveaux articles.

La salariée ne peut, cependant, prétendre à un rappel de salaires dans la mesure où l'employeur démontre qu'elle a perçu sur la période non prescrite (à compter du 18 février 2011) des salaires bruts, hors prime d'ancienneté et heures supplémentaires, dont les montants sont supérieurs à la rémunération conventionnelle minimale de la catégorie A1 du statut d'agent de maîtrise.

Le jugement sera réforme en ce sens.

Sur la demande au titre de la reprise d'ancienneté

Mme [K] reproche à l'employeur d'avoir méconnu un engagement qu'il avait pris dans un courrier du 4 septembre 2009 par lequel il lui indiquait qu'il reprenait son ancienneté acquise lors de son précédent contrat à compter du 19 novembre 2007.

Elle sollicite, en réparation de son préjudice, la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts.

Il résulte du courrier précité que le secrétaire général de la société Decovet s'est engagé en ces termes : " En complément de votre lettre d'embauche du 30 août 2019, je vous confirme que votre ancienneté relative à votre précédent contrat de travail sera reprise".

Cet engagement est clair et précis et lie la société Decovet qui ne peut s'en exonérer au seul motif que la salariée s'est prévalue de ce courrier tardivement.

Il sera alloué, en conséquence, à Mme [K] la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant d'un manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire variable au titre du mois de septembre 2015

Aux termes du contrat de travail, une rémunération de 30 euros bruts par point d'augmentation du chiffre d'affaires des magasins de la société par rapport à l'année précédente est versée à Mme [K].

En septembre 2015, les résultats de l'entreprise ont connu une progression de 39% par rapport à l'année précédente.

La salariée aurait donc dû percevoir une prime de 1170 euros. Or, il ne lui a été versée que la somme de 298,55 euros.

Ainsi, il lui reste dû la somme de 871,45 euros.

Le jugement sera confirmé sur le montant de la somme allouée mais, en application de

l'article L 1224-2 du code du travail, la société MEM Diffusion sera condamnée au paiement. Sur ce point, le jugement sera réformé.

Sur les autres demandes

La société Decovet sera condamnée à relever indemne la société MEM Diffusion des sommes mises à sa charge conformément aux dispositions de l'article L 1224-2, supportera la charge des dépens et versera à Mme [K] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que le contrat de travail de Mme [K] a été transféré à la société MEM Diffusion à compter du 12 octobre 2015,

Déboute Mme [K] de ses demandes au titre de la résiliation judiciaire et de la reclassification de son emploi,

Condamne la société MEM Diffusion à payer à Mme [K] les sommes suivantes :

- 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'engagement de reprise d'ancienneté

- 871,45 euros à tire de rappel de rémunération variable,

Dit que la société Decovet relevera indemne la société MEM Diffusion des condamnations mises à la charge de celle-ci,

y ajoutant,

Déboute Mme [K] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquements à l'obligation de sécurité,

Condamne la société Decovet à payer à Mme [K] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Decovet aux dépens.

Signé par Monsieur Eric VEYSSIERE, Président et par Sylvaine DECHAMPS, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Sylvaine DECHAMPS Eric VEYSSIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 17/01456
Date de la décision : 23/05/2019

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°17/01456 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-23;17.01456 ?
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