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09/05/2019 | FRANCE | N°17/03592

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 09 mai 2019, 17/03592


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------







ARRÊT DU : 09 MAI 2019



(Rédacteur : Madame Emmanuelle LEBOUCHER, Conseillère,)



PRUD'HOMMES



N° RG 17/03592 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-J4HD







Madame [D] [I]



c/



EURL GRADIGNAN SUD AUTOMOBILES

















Nature de la décision : AU FOND

















Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 mai 2017 (R.G. n°16/00019) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 15 juin 2017,





APPELANTE :

Madame [D] [I]

née le [Date ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 09 MAI 2019

(Rédacteur : Madame Emmanuelle LEBOUCHER, Conseillère,)

PRUD'HOMMES

N° RG 17/03592 - N° Portalis DBVJ-V-B7B-J4HD

Madame [D] [I]

c/

EURL GRADIGNAN SUD AUTOMOBILES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 mai 2017 (R.G. n°16/00019) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 15 juin 2017,

APPELANTE :

Madame [D] [I]

née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

assistée et représentée par Me Estellia ARAEZ, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

EURL GRADIGNAN SUD AUTOMOBILES [Adresse 2]

N° SIRET : 394 160 147 00028

assistée et représentée par Me Eric GROSSELLE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 mars 2019 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Madame Emmanuelle LEBOUCHER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Sylvaine Déchamps,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 1er février 1995, la société Gradignan Sud Automobiles a engagé Mme [I] en qualité d'employée administrative.

A compter du 30 novembre 2014, Mme [I] a été employée à temps complet. Au dernier état de la relation de travail, elle exerçait les fonctions de secrétaire, échelon neuf.

Plusieurs arrêts de travail ont émaillé l'année 2014 et à compter du 25 février 2015, Mme [I] a été placée en arrêt de travail et n'a pas repris son activité jusqu'à son licenciement.

Après deux visites médicales de reprise, tenues les 6 et 23 juillet 2015, le médecin du travail a déclaré Mme [I] inapte au poste d'employée administrative et à toute activité professionnelle dans la société Gradignan Sud Automobiles mais a indiqué la possibilité d'occuper un emploi similaire dans une autre entreprise.

Le 25 août 2015, Gradignan Sud Automobiles a convoqué Mme [I] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 4 septembre 2015.

Le 9 septembre 2015, la société Gradignan Sud Automobiles a licencié Mme [I] pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 6 janvier 2016, Mme [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux aux fins de voir condamner la société Gradignan Sud Automobiles au paiement des sommes suivantes :

48 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

1 564 euros nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

2 300 euros bruts à titre de rappel de prime exceptionnelle pour les mois de décembre 2013, décembre 2014, juin 2014 et juin 2015 ;

2 000 euros nets à titre dommages et intérêts pour préjudice subi découlant du retard dans la remise de l'attestation Pôle emploi ;

1 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 18 mai 2017, le conseil de prud'hommes de Bordeaux a rejeté l'ensemble des demandes formulées par Mme [I].

Par déclaration du 15 juin 2017, Mme [I] a régulièrement fait appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions enregistrées au greffe le 3 avril 2018, Mme [I] sollicite de la cour qu'elle infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau :

juge nul son licenciement en raison du harcèlement moral à l'origine du licenciement pour inaptitude physique à l'emploi ;

juge que le licenciement pour inaptitude à l'emploi trouve son origine dans les manquements de l'employeur à son obligation de sécurité en matière de protection de la santé ;

juge que la société Gradignan Sud Automobiles a manqué à son obligation de reclassement ;

condamne la société Gradignan Sud Automobiles au paiement des sommes suivantes :

- 10 000 euros nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice résultant des faits de harcèlement moral,

- 48 000 euros nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail,

- 1 564 euros nets au titre du solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 2 300 euros bruts au titre rappel des primes exceptionnelles pour les mois de décembre 2013, décembre 2014, juin 2014 et juin 2015,

- 2 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice découlant du retard dans la remise de l'attestation Pôle emploi,

- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens en ce compris les éventuels frais d'exécution.

Sur le harcèlement moral et la nullité du licenciement, Mme [I] estime exposer des faits qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'il en est ainsi des pièces médicales mentionnant la dégradation des conditions de travail avec l'arrivée de M. [N] à la tête de l'entreprise ; des prescriptions médicamenteuses de son médecin traitant et du psychiatre ; des entretiens avec le psychologue du travail ; des arrêts de travail et du bilan psycho-social. Elle ajoute les éléments de l'enquête du contrôleur du travail, l'existence d'une plainte pénale pour harcèlement déposée par un autre salarié à l'égard de M. [N], les nombreuses attestations de salariés qu'elle produit. Elle souligne l'abus de pouvoir de M. [N], tels que le non-paiement de ses heures supplémentaires, le blocage de son salaire, la suppression de primes exceptionnelles, le retard dans l'envoi de l'attestation de salaire lors de l'arrêt maladie de 2015, le retard dans l'envoi dans documents de fin de contrat et la maltraitance managériale. Elle conteste que son accident de la circulation de février 2015 soit la cause de son inaptitude.

Mme [I] estime que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, celui-ci n'ayant pris aucune mesure pour protéger la santé de la salariée. Elle soutient que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement car il n'a jamais interrogé le médecin du travail sur son aptitude résiduelle et qu'il n'a fait aucune recherche au sein du réseau Renault.

Elle précise ses demandes financières.

Aux termes de ses dernières conclusions du 14 janvier 2019, la société Gradignan Sud Automobiles sollicite de la cour qu'elle :

confirme le jugement en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes de Mme [I] ;

à titre incident, le réforme pour le surplus et, statuant à nouveau, condamne Mme [I] au paiement des sommes suivantes :

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

La société Gradignan Sud Automobiles expose que l'arrêt de travail de Mme [I] à compter de février 2015 est en lien avec son accident de la circulation et non avec un harcèlement moral et que cet accident est la seule cause à son inaptitude.

L'employeur conteste tout fait de harcèlement. Il fait valoir que l'ensemble des éléments médicaux ne fait que reprendre les déclarations de Mme [I] et les difficultés qu'elle évoque sont communes à toute activité professionnelle. Il conteste la valeur probatoire des attestations et témoignages recueillis lors de l'enquête pénale pour harcèlement moral contre M. [N], enquête initiée par un autre salarié et conclue par une relaxe. Il ajoute que toutes les instances civiles ont rejeté l'existence de harcèlement. Il souligne que l'ambiance pesante notée ne peut être assimilée à un harcèlement.

Il estime que Mme [I] ne subissait pas de surcharge de travail. Il met en avant le mécontentement de certains clients quant à l'attitude de la salariée.

La société Gradignan Sud Automobiles soutient qu'elle a parfaitement respecté son obligation de sécurité ; qu'elle s'est mobilisée après l'enquête du contrôleur du travail et les remarques du médecin du travail ; qu'une rencontre a été organisée entre M. [N], le médecin du travail et un psychologue du travail en septembre 2014 et qu'une société a été mandatée pour mettre au normes les ressources humaines en juin 2014.

Elle affirme avoir exercé son pouvoir de direction en tant qu'employeur ; qu'elle a acquis un garage en nette difficulté ; qu'elle a procédé à des modifications et a permis un redressement de la situation et qu'il a été mis fin à des pratiques contestables de crédit au profit des salariés, ce qui n'est pas constitutif d'un harcèlement managérial.

Sur le reclassement, M. [N] souligne que l'avis du médecin du travail excluait toute activité au sein de l'entreprise, ce qui lui interdisait de proposer un poste en son sein. Il précise que la société Gradignan Sud Automobiles ne fait pas partie d'un groupe mais qu'il a pris le soin de contacter quatre garages pour solliciter le reclassement de Mme [I].

Il s'oppose à l'ensemble des demandes de Mme [I].

La clôture a été fixée au 4 février 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

MOTIVATION

Sur le harcèlement moral :

Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail le harcèlement moral d'un salarié se définit par des agissements répétés, ayant pour objet ou effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel. En application de l'article L 1152-2 du même code, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral, ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

En application de l'article L 1154-1 du même code il incombe au salarié d'établir des faits permettant de présumer l'existence d'un tel harcèlement, éléments au vu desquels la partie défenderesse doit prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

L'article L 1152-3 du code du travail ajoute que toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissances des dispositions des articles L 1152-1 et L 1152-2 est nulle.

L'audition de Mme [I] réalisée à l'occasion de la plainte pénale déposée par un autre salarié à l'encontre de M. [N] pour harcèlement moral fait état du fait qu'elle se sente constamment surveillée ; que le gérant lui parlait mal, lui manquait de respect et proférait à son encontre des propos humiliants en lui déclarant 'vous êtes nulle', 'vous êtes bonne à rien', en dénigrant son travail et en se mettant de manière injustifiée en colère à son égard . De plus, quatre salariés entendus au cours de cette enquête ont confirmé un comportement inadapté de M. [N] à l'égard notamment de Mme [I]. Trois autres salariés ont attesté dans le même sens et un client a témoigné de la dégradation de l'ambiance de travail ayant entraîné un changement de garage.

L'enquête du contrôleur du travail lors d'un contrôle effectué le 5 décembre 2013 mentionne qu'il 'ressort des entretiens avec le personnel de l'entreprise que plusieurs d'entre eux expriment des difficultés psychologiques et des souffrances au travail'.

Le médecin du travail a également alerté M. [N] sur les difficultés psychologiques rencontrées par plusieurs salariés par courrier du 28 novembre 2013.

Il ressort nettement des pièces médicales que Mme [I] a été arrêtée du 10 février 2014 au 22 juillet 2015 pour surmenage/angoisses/insomnies et état anxio-dépressif réactionnel qu'elle s'est vue prescrire des anxiolitiques par son médecin traitant ; qu'elle a été suivie par un psychiatre entre mai et novembre 2015 qui lui a prescrit un antidépresseur ; les observations due médecin du travail dès 2013 compte tenu des doléances de la salariée et les deux avis d'inaptitude au sein de la société Gradignan Sud Automobiles.

Les deux compte-rendus d'entretien des 19 juin 2014 et 21 mai 2015 avec la psychologue du travail font état de signes dépressifs importants en lien avec la sphère professionnelle. Le bilan psycho-social conclut à l'existence d'un harcèlement à type stratégique.

L'ensemble de ces faits établis par Mme [I] permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

En réponse, l'employeur indique qu'il a bénéficié d'une relaxe à la suite de la plainte de M. [E] à son encontre. Néanmoins, cette relaxe est sans incidence sur les déclarations des divers témoins concernant le comportement inadapté et les propos déplacés de M. [N] à l'égard de Mme [I]. Force est par ailleurs de constater que l'absence d'infraction pénale de harcèlement n'est nullement synonyme d'absence de harcèlement en droit du travail.

Les huit attestations produites au débat par l'employeur émanent toutes de salariés sous lien de subordination et dont au moins quatre d'entre eux sont entrés au sein de l'entreprise postérieurement aux faits reprochés au gérant.

M. [N] produit également un courrier daté du 30 décembre 2013 en réponse au contrôleur du travail où il précise que 'l'évaluation des risques professionnels est en réactualisation. Elle prendra en compte notamment le sujet des risques psychosociaux. Je vous informe que mon affichage obligatoire inclut désormais l'affichage sur la lutte contre le harcèlement. D'autre part, j'envisage de demander par courrier auprès de la médecine du travail leurs conseils pour prévenir ce risque dans mon entreprise'. Par courriers des 22 janvier et 15 juillet 2014, il a indiqué au médecin du travail que la refonte de l'évaluation des risques est en cours. Par courrier du 25 septembre 2014, le médecin du travail a mentionné l'avoir rencontré avec la psychologue du travail et que l'employeur avait entamé une démarche de prévention et les salariés n'ont pas exprimé de difficultés depuis plusieurs mois. S'il ne peut être contesté que M. [N] n'est pas resté inerte face aux alertes de l'inspection du travail et de la médecine du travail, ses réactions sont postérieures aux faits dénoncés par Mme [I].

Un contrat de prestation de services signé le 4 juin 2014 entre la société IAO conseil et la société BO invest dont M. [N] est le gérant a pour objet d'assurer l'accompagnement à l'organisation, de l'après-vente, le suivi de normes réglementaires et normes RH ainsi qu'un accompagnement commercial de l'entreprise Gradignan Sud Automobiles. Ce document ne permet pas de s'assurer qu'une société de conseil est intervenue pour réfléchir et aider M. [N] à mettre en place des mesures contre toute forme de harcèlement.

Ainsi, l'employeur n'établit pas que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En conséquence, la nullité du licenciement de Mme [I] est prononcée et le jugement du conseil de prud'hommes est infirmé.

Sur les demandes indemnitaires :

sur les dommages et intérêts en raison du licenciement :

Compte tenu des motifs retenus par la cour pour dire le licenciement de Mme [I] nul, de l'âge de la salariée, de son salaire et de son ancienneté au moment du licenciement, la cour s'estime suffisamment informée pour fixer à la somme de 30 000 euros la réparation intégrale du préjudice consécutif à la perte de son emploi.

sur les dommages et intérêts pour harcèlement moral :

Il est constant que le cumul entre des dommages et intérêts pour licenciement nul en raison d'un harcèlement et des dommages et intérêts pour réparer les faits de harcèlement eux-mêmes est possible.

En conséquence, il convient de réparer le préjudice subi par Mme [I] du fait du harcèlement en lui attribuant la somme de 5 000 euros.

sur le solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement :

Mme [I] affirme que la moyenne son salaire brut des douze derniers mois est de 1 980 euros mais ne donne aucune explication sur ce calcul qui par ailleurs ne peut correspond pas aux sommes figurant sur les bulletins de salaire produits.

De même, aucune explication n'est donnée sur le calcul du solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'application des dispositions de l'article 2.13 de la convention collective nationale des services de l'automobile ne permettant pas d'obtenir la somme réclamée.

La décision de première instance est confirmée sur ce point.

Sur les primes exceptionnelles :

Il ressort clairement des bulletins de salaire que Mme [I] bénéficiait d'une prime dite exceptionnelle depuis son embauche versée en juin et décembre de chaque année.

La société Gradignan Sud Automobiles ne conteste pas avoir cessé le versement de cette prime.

Cependant, contrairement à ce qu'affirme l'employeur, ce dernier s'il peut décider la suppression du versement d'une prime ayant le caractère d'un usage puisque versée depuis plus de quinze ans, n'en doit pas moins suivre la procédure applicable.

Il est établi que la société Gradignan Sud Automobiles n'a pas suivi la procédure notamment en informant les représentants du personnel ; en informant chacun des salariés concernés, individuellement, par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en mains propres contre décharge et en respectant un délai de prévenance 'raisonnable', c'est-à-dire 2 à 3 mois pour la dénonciation d'une prime versée tous les mois, et 10 à 12 mois pour une prime versée annuellement.

Mme [I] a donc droit au versement des primes pour les mois de décembre 2013, décembre 2014, juin 2014 et juin 2015. Le jugement du conseil de prud'hommes est infirmé.

Sur les dommages et intérêts pour retard de la remise de l'attestation Pôle Emploi :

S'il est établi que Mme [I] a été licenciée le 9 septembre 2015, il n'est pas contesté par la société Gradignan Sud Automobiles qu'elle n'a pas transmis l'attestation Pôle Emploi comme elle s'y était engagée.

Il en résulte un retard dans le traitement de la situation de Mme [I] mais ce retard n'est pas constitutif d'un préjudice puisqu'elle a pu être indemnisée à compter du mois d'octobre 2015, soit dans le mois suivant son licenciement.

Le premier jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [I] de cette demande.

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive :

Compte tenu de la solution retenue par la Cour concernant la nullité du licenciement en raison d'un harcèlement moral, cette demande est devenue sans objet.

Sur les dépens :

Succombant sur le harcèlement, la société Gradignan Sud Automobiles est condamnée aux dépens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Tenue aux dépens, la société Gradignan Sud Automobiles est condamnée à payer à Mme [I] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux du 18 mai 2017 en ce qu'il a débouté mme [D] [I] de ses demandes de paiement du solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages et intérêts pour retard dans la remise de l'attestation pôle Emploi

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux du 18 mai 2017 en ses autres dispositions,

Et statuant à nouveau,

Prononce la nullité du licenciement de Mme [D] [I] pour harcèlement moral,

Condamne la société Gradignan Sud Automobiles à payer à Mme [D] [I] les sommes suivantes :

30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,

5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

2 300 euros bruts au titre rappel des primes exceptionnelles pour les mois de décembre 2013, décembre 2014, juin 2014 et juin 2015,

Déclare sans objet la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par société Gradignan Sud Automobiles,

Y ajoutant,

Condamne la société Gradignan Sud Automobiles à payer à Mme [D] [I] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Gradignan Sud Automobiles aux dépens.

Signé par Monsieur Eric VEYSSIERE, Président et par Sylvaine DECHAMPS, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Sylvaine DECHAMPS Eric VEYSSIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 17/03592
Date de la décision : 09/05/2019

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°17/03592 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-09;17.03592 ?
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