La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/01/2019 | FRANCE | N°15/03962

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 10 janvier 2019, 15/03962


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------











ARRÊT DU : 10 JANVIER 2019



(Rédacteur : Madame Catherine MAILHES, Conseillère)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° RG 15/03962 - N° Portalis DBVJ-V-B67-IVWY





















Société URSSAF AQUITAINE



c/



Etablissement Public SDIS













Nature de la décision

: AU FOND





Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :

Décision...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 10 JANVIER 2019

(Rédacteur : Madame Catherine MAILHES, Conseillère)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° RG 15/03962 - N° Portalis DBVJ-V-B67-IVWY

Société URSSAF AQUITAINE

c/

Etablissement Public SDIS

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 mai 2015 (R.G. n°20120695) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GIRONDE, suivant déclaration d'appel du 30 juin 2015,

APPELANTE :

URSSAF AQUITAINE

Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

représentée par Me HODARD loco Me Thierry WICKERS de la SELAS EXEME ACTION, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Etablissement Public SDIS Service départemental d'incendie et de secours de la Gironde

pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

représenté par Me Jean-Philippe RUFFIÉ de la SCP CABINET LEXIA, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 novembre 2018, en audience publique, devant Madame Catherine MAILHES, Conseillère chargée d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, président

Madame Catherine MAILHES, conseillère

Madame Emmanuelle LEBOUCHER, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Florence Chanvrit Adjoint Administrative faisant

fonction de Greffière

Greffier lors du prononcé : Sylvaine Dechamps

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Exposé du litige

Le service départemental Incendie et de Secours de la Gironde (SDIS) a fait 1'objet d'un contrôle comptable d'assiette des cotisations pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010.

Le 17 novembre 2011, une lettre d'observations a été adressée au SDIS faisant état de

plusieurs chefs de redressement pour un montant total de 245 564 euros dont 215 626 euros en cotisations et 29.938 euros au titre des majorations.

Le SDIS a fait valoir ses observations par lettre du 21 décembre 2011 et par courrier du 26 décembre 2011, les inspecteurs du recouvrement ont maintenu l'intégralité du redressement.

Par courrier recommandé du 29 décembre 2011 reçu le 30 décembre 2011, l'Urssaf a mis en demeure le SDIS de payer la dite somme.

Le SDlS a saisi la Commission de recours amiable de la Caisse en contestation du redressement par courrier recommandé avec accusé de réception du 23 janvier 2012.

Il a également saisi la commission de recours amiable par courrier du 23 février 2012 en contestation de la lettre de confirmation des observations.

Par courrier déposé le 23 avril 2012, le SDIS a formé devant le tribunal des affaires de

sécurité sociale de la Gironde un recours contre la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l'URSSAF de la Gironde au titre de la nullité de la mise en demeure en raison de l'irrégularité de la procédure de contrôle, des frais professionnels non justifiés, frais liés à la prévoyance professionnelle, de la CSG/CRDS sur part patronale au financement des régimes complémentaires de prévoyance subventions aux mutuelles, de la taxe de prévoyance, des prestations d'action sociale des personnes de l'Etat, allocations enfants handicapés, des prestations allouées par l'employeur service d'action sociale.

Par un jugement en date du 21 mai 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale a :

ordonné la jonction des recours n°20120695 et n°20120878,

validé la procédure de contrôle sur la forme,

annulé les chefs de redressement relatifs aux frais liés à la mobilité professionnelles et aux prestations allouées par le Service d'Action Sociale,

maintenu pour le surplus le redressement ayant donné lieu à la lettre d'observations du 17 novembre 2011, et à la mise en demeure du 29 décembre 2011 à l'encontre du SDIS de la Gironde,

condamné l'URSSAF Aquitaine venant aux droits de l'URSSAF de la Gironde à rembourser au SDIS de la Gironde les sommes versées au titre des deux chefs de redressement annulés,

déclaré acquise à l'URSSAF Aquitaine le surplus des sommes versées par le SDIS de la Gironde en paiement de la mise en demeure du 29 décembre 2011,

annulé l'observation pour l'avenir concernant les prêts accordés aux salariés à des taux préférentiels et l'utilisation des véhicules de service,

ordonné le maintien des autres observations pour l'avenir,

dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

***

Par déclaration de son avocat au greffe de la Cour du 30 juin 2015, l'URSSAF a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions du 16 juin 2017, reçues au greffe de la Cour, l'URSSAF demande à la Cour de :

déclarer recevable et bien fondé l'appel relevé par l'URSSAF Aquitaine,

statuant à nouveau :

infirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde en date du 21 mai 2015 en ce qui concerne :

- le chef de redressement concernant les frais liés à la mobilité professionnelle,

- le chef de redressement prestations allouées par l'employeur : Service d'Action Sociale,

- observation pour l'avenir : prêts accordés aux salariés à des taux d'intérêts préférentiels,

- observation pour l'avenir : utilisation des véhicules de l'entreprise

confirmer pour le surplus le jugement en date du 21 mai 2015,

valider le redressement opéré et la mise en demeure du 29 décembre 2011 pour un montant de 245 564,00 euros dont 215 626,00 euros en cotisations et 29 938,00 euros en majorations de retard,

déclarer acquise à l'URSSAF Aquitaine la somme de 245 564,00 euros réglée le 30 janvier 2012,

condamner le SDIS à payer la somme de 2400 euros (8hx250 x TVA 20%) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

***

Aux termes de ses conclusions du 21 juin 2017, reçues au greffe de la Cour, le SDIS faisant appel incident demande à la Cour de :

I) sur l'appel de l'URSSAF

dire et juger I'URSSAF infondée en son appel à l'encontre du jugement du 21mai 2015 rendu par le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde, et l'en débouter,

confirmer le jugement du 21 mai 2015 rendu par le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde en ce qu'il a :

annulé les chefs de redressement relatifs aux frais liés à la mobilité professionnelle et aux prestations allouées par le service d'action sociale,

condamné I'URSSAF à rembourser au SDIS les sommes versées au titre des deux chefs de redressement annulés,

annulé les observations pour l'avenir concernant les prêts accordés aux salariés à des taux préférentiels et l'utilisation des véhicules de service,

Il) à titre incident,

réformer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 21 mai 2015 en ce qu'il a :

validé la procédure de contrôle sur la forme ;

maintenu le surplus du redressement ayant donné lieu à la lettre d'observations du 17 novembre 2011 et à la mise en demeure du 29 décembre 2011 à l'encontre du SDIS ;

déclaré acquis à I'URSSAF Aquitaine le surplus des sommes versées par le SDIS en paiement de la mise en demeure du 29 décembre 2011 ;

ordonné le maintien des autres observations pour l'avenir,

en conséquence,

sur la mise en demeure :

dire et juger le SDIS de la Gironde fondé en ses demandes

y faisant droit

annuler la mise en demeure du 29 décembre 2011,

annuler le redressement et la lettre d'observations portant sur le contrôle du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 ;

annuler la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de I'URSSAF de la Gironde,

prononcer la décharge totale du rappel de cotisations pour un montant total, majoration comprise, de 245 564 euros,

condamner I'URSSAF à rembourser au SDIS les sommes versées au titre de l'ensemble des chefs de redressement contestés ;

lll.2) Sur la lettre d'observations :

dire et juger le SDIS de la Gironde fondé en ses demandes,

y faisant droit

annuler la lettre d'observations notifiée le 27 décembre 2011,

annuler le redressement et la lettre d'observations portant sur le contrôle du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 ;

annuler la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l'URSSAF de la Gironde ;

IV) En tout état de cause,

condamner I'URSSAF de la Gironde au paiement d'une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de I'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

***

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la mise en demeure

1/ Sur la nullité de la mise en demeure

Pour contester le jugement en ce qu'il a considéré qu'il était prouvé que les inspecteurs ayant procédé au contrôle avaient fait l'objet d'un agrément au regard des mentions figurant sur les cartes professionnelles respectives et en ce que le SDIS ne pouvait reprocher à l'Urssaf l'absence de débat contradictoire dès lors qu'entre la lettre d'observations et la mise en demeure, il n'avait formulé aucune remarque, le SDIS fait valoir que le contrôle est affecté de vices en ce que :

- l'Urssaf ne démontre pas que les inspecteurs chargés du recouvrement étaient agréés et assermentés à cette fin, se contentant d'affirmer qu'ils étaient titulaires d'une carte professionnelle et d'un agrément alors que d'une part, l'existence d'une carte n'est pas révélatrice de l'agrément que l'organisme intéressé doit recueillir du directeur régional des affaires sanitaires et sociales ou de la sécurité sociale conformément à l'article 3 de l'arrêté du 20 septembre 1994 et que d'autre part, la preuve de la légalité de ces mêmes agréments n'est pas rapportée puisqu'ils doivent être publiés au bulletin officiel en application de l'arrêté du 19 décembre 2003 et qu'en l'espèce,

* la décision d'agrément de Mme [Z] du 31 janvier 2004, qui mentionne un agrément définitif rétroactif au 1er janvier 2004, est illégale puisqu'à ce moment elle n'avait fait l'objet que d'un agrément provisoire, alors qu'il est un principe général du droit qu'un acte administratif ne saurait régir des situations constituées antérieures à son entrée en vigueur et qu'il n'est pas prouvé qu'il a été publié ;

* la date d'agrément de M. [I] portée sur sa carte professionnelle n'a strictement aucun rapport avec la date du 1er juin 1999 mentionnée sur la décision d'agrément communiquée par l'Urssaf et il apparaît ainsi qu'il a fait l'objet d'un nouvel agrément en raison du changement d'autorité entre l'arrêté du 20 septembre 1994 et celui du 19 décembre 2013, en sorte que la preuve de l'agrément n'est pas rapportée ni même celle d'une publication conforme aux dispositions de l'arrêté initial du 21 septembre 1994 et de la régularité de la délégation de signature attribuée au directeur adjoint M. [L] par le directeur régional ;

la validation législative des contrôles souffrant d'une telle irrégularité issue de l'article 73 I de la loi n°2003-1999 du 18 décembre 2003 est destinée à éviter une remise en cause intempestive de la régularité des agréments anciens et vient pallier une situation passée, n'ayant pas pour but d'organiser pour l'avenir la régularité de tous les agréments illégaux, en sorte que cette loi n'est pas applicable à la situation, précisant que ces cartes sont de simples cartes d'identité professionnelles sans valeur probante ; la validation législative appliquée par la Cour de cassation n'est pas conforme aux dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, comme réaffirmé dans un arrêt de la CEDH ;

- le contrôle a été mené en contrariété avec la charte du cotisant remise au SDIS, en violation du principe du dialogue permanent et du débat contradictoire puisqu'aucun planning de l'intervention des inspecteur n'a été fourni et que ces dernier n'ont pas formalisé de demande de rencontre consacrée au débat contradictoire.

L'Urssaf soutient quant à elle que les deux inspecteurs disposaient d'une autorisation provisoire d'exercer d'une durée de trois mois qui expirait le 29 mars 2003 et qu'ils avaient bénéficié d'une décision d'agrément définitif en application de l'article 6 de l'arrêté du 19 décembre 2003 le 30 janvier 2004, décisions publiées au Bulletin officiel en sorte qu'ils avaient toute autorité pour effectuer le contrôle réalisé au cours de l'année 2011. Elle précise que le principe de non rétroactivité des actes administratifs n'est applicable qu'aux actes réglementaires et non aux actes individuels et que le Conseil d'Etat admet la rétroactivité d'une décision administrative concernant les décisions récognitives se bornant à tirer les conséquence d'un état de fait antérieure et que de telles dispositions n'entraînent pas nécessairement l'annulation de la décision attaquée mais n'atteint que sa vertu à régir le passé, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque le contrôle n'a pas été effectué entre le 1er janvier 2004 et le 30 janvier 2004.

Elle soutient par ailleurs qu'une mesure de validation des agréments a été adoptée dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2004 aux termes de l'article 73§1 de la loi, que la cour de cassation a jugé de la conventionnalité de ces dispositions et que la Cour européenne des droits de l'homme a dans son arrêt du 25 novembre 2010 jugé que seuls les redressements notifiés avant 2004 sont susceptibles de faire l'objet d'une procédure en annulation pour défaut d'agrément des contrôleurs.

-a- sur l'agrément des inspecteurs

Aux termes des dispositions de l'article L.243-7 applicable au litige, les agents chargés du contrôle sont assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

Les cartes d'identité professionnelle d'inspecteur du recouvrement des inspecteurs ayant procédé au contrôle litigieux portent mentions pour :

- M. [I] d'un agrément au 1er janvier 2004 et d'une assermentation au 8 septembre 1999 ;

- Mme [Z] d'un agrément au 1er janvier 2004 et d'une assermentation au 4 mai 2004.

Selon les dispositions de l'arrêté du 9 décembre 2003 fixant les conditions d'agrément des agents chargés au sein des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociales et d'affiliations familiales et des caisses générales de sécurité sociales, du contrôle de l'application des législations de sécurité sociales pris en son article 5, il est prévu que :

Le directeur de l'Acoss délivre aux agents une autorisation provisoire d'exercer leurs fonctions à réception du dossier complet de demande d'agrément.

L'agrément pourra leur être accordé lorsque leur manière de servir et leurs aptitudes professionnelles auront été jugées satisfaisantes, dans le délai de six mois renouvelable une fois à compter de la date d'agrément.

La décision du directeur de l'Acoss accordant ou refusant l'agrément est notifée au directeur de l'organisme dont dépend l'agent et à l'intéressé.

Les décisions d'agrément provisoires et définitives sont publiées au Bulletin officiel du ministère chargé de la sécurité sociale.

L'agrément accordé à un des agents visés à l'article 1er est valable, pendant toute la carrière de l'agent et pour toutes les périodes pendant lesquelles il exerce des fonctions de contrôle, pour l'ensemble du territoire français.

L'autorisation provisoire d'exercer et l'agrément sont valables pour l'ensemble des opérations de contrôle mentionnées à l'article 1er.

Il ressort des pièces versées aux débats que :

- Mme [Z] a été agréée en qualité d'inspecteur du recouvrement à compter du 1er janvier 2004 par décision du directeur général de l'Acoss du 30 janvier 2004 après avoir été autorisée à exercer provisoirement pour une période de trois mois à compter du 29 décembre 2003, par décision de la même date ; elle fait partie de la liste des inspecteurs du recouvrement ayant obtenu une autorisation provisoire d'exercer en application des dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 19 décembre 2003, publiée au bulletin officiel du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité n° 2004-24 et de la liste des inspecteurs du recouvrement ayant obtenu l'agrément publiée au même bulletin officiel, sans que les décisions aient fait l'objet d'une publication ;

- M. [I] a été agréé à titre définitif en qualité d'inspecteur du recouvrement selon une première décision du 1er juin 1999 par le directeur régional des affaires sanitaires et sociales d'Aquitaine ; il a fait l'objet le 29 décembre 2003 d'une décision d'agrément provisoire à exercer les mêmes fonctions par le directeur général de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale à compter du 29 décembre 2009 puis d'une décision d'agrément définitive le 30 janvier 2004 à compter du 1er janvier 2004 ; il est également compris dans chacune des listes publiées au bulletin officiel visées pour Mme [Z].

L'illégalité de principe des actes administratifs sans distinction de leur nature ou de leur objet à raison de leur rétroactivité ne constitue pas une jurisprudence établie de l'ordre administratif, en sorte que ce moyen est inopérant pour permettre à la juridiction judiciaire d'apprécier la légalité des actes administratifs en cause.

Selon les dispositions de l'article 73§1 de la loi n°2003-1199 du 18 décembre 2003, il est prévu que :

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les procès-verbaux(...) les mises en demeure (...) et les contraintes(...) les ordres de recettes (...) sont réputés réguliers en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de l'illégalité de l'agrément du ou des agents ayant procédé aux opérations ou par le moyen tiré de l'incompétence de leur auteur.

Si par arrêt du 25 novembre 2010 (affaire LilyFrance C/ France), la Cour européenne des droits de l'homme a dit que l'intervention rétroactive de l'article 73 de la loi du 18 décembre 2003 ne reposait pas sur d'impérieux motifs d'intérêt général et a considéré qu'il y avait violation de l'article 6 de la convention, rendant inopérante la jurisprudence de la cour de cassation qui avait jugé de la conventionnalité de ces dispositions au regard de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales en précisant qu'obéit à d'impérieux motifs d'intérêt général l'intervention du législateur, qui sans régler le fond du litige ni priver le débiteur de la contribution du droit de contester le bien-fondé du redressement, est destinée à éviter le développement d'un contentieux de nature à mettre en péril le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et par suite la pérennité du système de protection sociale, il n'en demeure pas moins qu'en l'espèce, aucune intervention rétroactive de cet article est en jeu puisque le contrôle a été effectué en 2011 et que les agréments sont postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi le 19 décembre 2003. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'inconventionnalité de ces dispositions à raison de leur caractère rétroactif est inopérant.

Aussi les pièces apportées par l'Urssaf établissent que les deux inspecteurs disposaient d'agréments réguliers et que la demande d'annulation du contrôle, de la mise en demeure et des actes subséquents sera rejetée sur ce chef.

-b- sur le principe du contradictoire

L'Urssaf a respecté les dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale propres à assurer le principe du contradictoire,

- en informant le SDIS du contrôle prévu le 26 juillet 2011par l'envoi d'un avis par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er juillet 2011 mentionnant notamment qu'un document présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu'ils sont définis par le présent code lui sera remis dès le début du contrôle et précisant l'adresse électronique où ce document est consultable, qu'il a le droit de se faire assister du conseil de son choix,

- en adressant au SDIS la lettre d'observations par courrier recommandé reçu le 22 novembre 2011, portant mention de l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle outre les observations faites assorties de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés, du délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception à ces observations, de la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix,

- en adressant la mise en demeure de payer du 29 décembre 2011 postérieurement au délai d'observations, et les arguments liés à l'absence de fourniture d'un planning des différentes phases d'intervention des inspecteurs, à l'absence de formalisation de demande de rencontre sont sans incidence sur le respect du contradictoire.

Il s'ensuit que les modalités du contrôle ont été régulières et que la demande d'annulation de la mise en demeure à raison de l'irrégularité de la procédure sera rejetée ainsi que celles relatives à l'annulation de la lettre d'observations et du redressement.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a validé la procédure de contrôle sur la forme.

Sur le fond du redressement

1/ Sur les frais professionnels non justifiés- frais liés à la mobilité professionnelle

Les premiers juges ont annulé le redressement lié au versement d'une indemnité forfaitaire de changement de résidence à certains agents en considérant que le SDIS faisait application des articles 9 et 10 du décret 2001-654 du 19 juillet 2001 prévoyant le versement d'une indemnité dans le cadre de la mobilité professionnelle pour le fonctionnaire territorial et qu'il apportait des éléments suffisants pour justifier de l'attribution de cette indemnité de transport de mobilier en versant aux débats la liste des agents bénéficiaires de l'indemnité de changement de résidence, les arrêts de mutation concernant chaque agent et les justificatifs de frais de déménagement engagés par certains agents.

Pour contester le jugement, l'Urssaf fait valoir que les justificatifs versés ne permettent pas de démontrer la réalité des dépenses engagées par les agents mutés.

Le SDIS qui conclut à la confirmation du jugement estime qu'en application des articles 9 et 10 du décret n°2001-654 du 19 juillet 2001, le fonctionnaire a droit à l'indemnité forfaitaire prévue à l'article 25 ou 26 dès lors que le changement de résidence est rendu nécessaire par une nouvelle affectation et que l'arrêté du 20 décembre 2002 considère que de tels frais sont déductibles de l'assiette des cotisations et qu'en l'occurrence les documents qu'il verse sont suffisants pour justifier des frais engagés : liste des agents bénéficiaires, arrêtés de mutation correspondants, production de factures.

En application des dispositions de l'article 8 de l'arrêté du 20 décembre 2002,

l'employeur est autorisé à déduire de l'assiette des cotisations sociales les indemnités suivantes :...3°Les indemnités destinées à compenser les frais de déménagement exposés par le travailleur salarié ou assimilé, sous réserve que l'employeur justifie la réalité des dépenses engagées par le travailleur salarié ou assimilé.

Aussi dans ce cas précis, pour pouvoir exclure de l'assiette des cotisations l'indemnité de frais de déménagement, même s'agissant d'une indemnité de droit pour le travailleur dans le cadre de l'application du décret du 19 juillet 2001 dès lors qu'il est muté, l'employeur doit justifier de la réalité des dépenses engagées.

L'employeur ne peut se contenter des arrêtés de mutation et doit donc justifier des dépenses engagées par chacun des agents concernés.

Il a été constaté par les contrôleur de l'Urssaf que le SDIS alloue une indemnité forfaitaire de changement de résidence aux agents concernés, comprenant une indemnité forfaitaire pour transport mobilier calculée sur une estimation du volume du mobilier et la distance kilométrique entre l'ancien et le nouveau domicile outre des frais de transport remboursés sous forme d'indemnités kilométriques et que le SDIS ne subordonne pas le versement de ces indemnités à la fourniture de factures justifiant l'engagement des frais.

Le SDIS a produit des factures de déménagement ou frais de location de véhicule, justifiant des frais de déménagement pour huit agents seulement sur les 42 concernés permettant de considérer qu'il justifie des dépenses engagées pour ceux-ci ( MM.[T], [E], [A], [N], [C], [M], [R] et [J]) mais non à l'égard des autres, portant ainsi le montant des indemnités forfaitaires devant être réintégrées dans l'assiette des contributions Csg/Crds aux sommes suivantes:

- année 2008 :

41.133 euros donnant une base totalité de 39.899 euros- cotisations: 3.192 euros

- année 2009 :

13.506 euros -base totalité 13 102 euros- cotisations : 1.048 euros

- année 2010 : 6.823 euros - base totalité 6 618 euros- cotisations : 529 euros,

soit des régularisations d'un montant total de 4 769 euros calculé sur les 'base totalité' ci-dessus mentionnées' affectées du taux de 8% non contesté.

Aussi le chef de redressement du chef des frais liés à la mobilité professionnelle sera validé à hauteur de 4 769 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a annulé ce chef de redressement pour 6 020 euros.

2/ Sur les subventions accordée aux mutuelles, déduction Csg/crds sur part patronale au financement des régimes complémentaires de prévoyance

Pour contester le jugement entrepris, le SDIS soutient que l'article R.523-2 du code de la mutualité ne concernant que le cas du subventionnement du seul Etat employeur, son abrogation en 2006 n'a pas remis en question la possibilité pour les collectivités territoriales de poursuivre le subventionnement des mutuelles et que pour celles-ci, la lettre collective de l'Acoss n°2003-084 du 24 juillet 2003 et les lettres ministérielles des 22 mai 2003 et 21 avril 2004 qui ont admis l'exonération de la Csg/crds assise sur les contributions sont demeurées applicables pendant la période contrôlée et jusqu'à ce que le régime ait été modifié par le décret n°2011-1474 du 8 novembre 2011, qui ne peut avoir de portée rétroactive. Il s'oppose à l'application de la jurisprudence de [Localité 1] avancée par l'Urssaf, l'arrêt ayant fait l'objet d'une cassation.

L'article R.523-2 du code de la mutualité prévoyait que : 'L'Etat peut accorder aux mutuelles constituées entre les fonctionnaires, agents et employés de l'Etat et des établissements publics nationaux des subventions destinées notamment à développer leur action sociale et, dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la mutualité et du ministre chargé des finances, à participer à la couverture des risques sociaux assurée par ces mutuelles.'

Une telle possibilité a également été offerte aux collectivités territoriales par circulaire du 5 mars 1993.

Les lettres ministérielles des 22 mai 2003 et 21 avril 2004 ont admis l'exonération de la Csg/crds assise sur les contributions de prévoyance.

L'abrogation de l'article 523-2 du code de la mutualité par le décret n°2006-689 du 13 juin 2006 est consécutive à la décision du Conseil d'Etat du 26 septembre 2005 mettant en exergue que ces dispositions créaient une rupture d'égalité de traitement entre les mutuelles en réservant le bénéfice de subventions aux seules mutuelles exclusivement constituées d'agents de l'Etat et des établissements publics nationaux, la circulaire du 30 mars 2006 du ministère de la Fonction Publique précisant également que la commission européenne avait adressé à la France une recommandation proposant l'adoption pour le 1er janvier 2006 au plus tard de cinq mesures utiles concernant les aides d'Etat versées aux mutuelles.

Il est en outre constant que c'est sur la base de ce texte que la circulaire du 5 mars 1993 avait donné aux collectivités locales la possibilité de verser ce type de subventions aux mutuelles de fonctionnaires, agents et employés de l'Etat et des établissements publics nationaux.

Il s'ensuit que le versement de subventions par le SDIS à des mutuelles de fonctionnaires ou agents et employés de l'Etat et des établissements publics nationaux entraîne la réintégration de ces sommes dans l'assiette de Csg/crds.

En outre aux termes de la loi n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, il a été prévu en son article 39 l'insertion d'un article 22 bis sous l'article 22 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ainsi rédigé :

I.- les personnes publiques mentionnées à l'article 2 peuvent contribuer au financement des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles les agents qu'elles emploient souscrivent.

II.- La participation des personnes publiques est réservée aux contrats ou règlements garantissant la mise en oeuvre de dispositifs de solidarité entre les bénéficiaires actifs et retraités.

III- Les modalités d'application du présent article sont fixées par décrets en Conseil d'Etat.

L'article 2 de la loi précitée vise les fonctionnaires civils des administrations de l'Etats mais également des régions et départements, communes et de leurs établissement publics, à l'exclusion des fonctionnaires des assemblées parlementaires et magistrats.

Ce faisant, la refonte du régime de participation au financement des mutuelles issue de la loi de 2007 concernait également les collectivités locales, même si ce n'est que le décret n°2011-1474 du 8 novembre 2011 qui leur a permis de les mettre en application.

C'est donc à bon droit qu'en suite des constatations effectuées, les inspecteurs ont réintégré les subventions versées par le SDIS aux mutuelles telles que la MNT, MGPAR, MGAS et MNSP pour les années 2008 à 2010 donnant lieu à un rappel de cotisation de 79.057 euros.

Le jugement entrepris qui a validé ce chef de redressement sera en conséquence confirmé.

3/ Sur la taxe de prévoyance subventions aux mutuelles

Par des motifs identiques aux précédents, la cour adoptant en outre les motifs pertinents du jugement, confirme le jugement entrepris en ce qu'il a validé le redressement pour un montant de 81 503 euros au titre de la taxe de prévoyance des subventions aux mutuelles.

4/ Sur les allocations enfants handicapés

Les inspecteurs de l'Urssaf ont réintégré dans l'assiette des cotisations les allocations 'parents d'enfants handicapés de moins de vingt ans' versées aux agents du SDIS par le service d'action sociale en considérant qu'ils constituaient des éléments de rémunération soumis à cotisations et contribution au titre de la Csg/crds- régime général.

Le jugement a validé le redressement sur ce chef en considérant de la position de l'Accos, considérant que l'allocation aux parents d'enfants handicapés de moins de vingt ans est soumise à cotisation.

Pour contester le jugement, le SDIS soutient d'une part qu'aux termes de l'article L.136-2 III 3° du code de la sécurité sociale qui renvoie au 2° de l'article 81 du code général des impôts prévoyant que l'allocation a pour objectif de favoriser l'éducation des enfants atteints d'un handicap et placés dans les établissements spécialisés, les sommes versées à ce titre sont exclues de l'assiette des cotisations et la contributions et d'autre part que les sommes versées l'ont été au titre de secours, en fonction de situations exceptionnelles particulièrement dignes d'intérêt, permettant leur exclusion de l'assiette.

L'allocation pour enfant handicapés versée par le service d'action sociale pour le personnel n'est aucunement visée au 2° de l'article 81 du code général des impôts, concernant les prestations familiales et autres prestations d'origine légale ou réglementaire, en sorte que le moyen tiré de l'application des dispositions de l'article L.136-2 III 3° du code de la sécurité sociale sera rejeté.

Le moyen tiré de l'octroi des sommes au titre de secours en fonction de situations exceptionnelles particulièrement dignes d'intérêt sera également rejeté. En effet, l'allocation aux parents d'enfants handicapés de moins de vingt ans est servie dans tous les cas où les parents perçoivent l'allocation d'éducation spéciale, et non en fonction de situations exceptionnelles, de même que l'allocation spéciale pour jeune adulte atteints d'une maladie chronique ou d'un handicap et poursuivant des études, visant à faciliter leur intégration sociale.

Il s'ensuit que c'est bon droit que les premiers juges faisant application de l'alinéa 1 de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale prévoyant que tout avantage en espèces ou en nature versé en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations et de la circulaire Acoss concernant les prestations d'action sociales attribuées au personnel de l'Etat ont validé le redressement sur ce chef d'un montant de 3.920 euros.

Le jugement entrepris sera confirmé à ce titre.

5/Sur le financement d'actions sociales

Le jugement entrepris a annulé le redressement opéré au titre du financement d'actions sociales en faveur du personnel par le service d'action sociale en considérant d'une part que l'Urssaf se contente d'affirmer que le service d'action sociale n'est pas une structure analogue au comité d'entreprise sans s'interroger sur la nature sociale ou culturelle des prestations allouées par celui-ci et d'autre part que la circulaire Acoss n°86-17 du 14 février 1986 indique que l'employeur est assimilé au comité d'entreprise lorsque celui-ci, en l'absence de comité d'entreprise, gère lui-même les activités sociales ou culturelles normalement dévolues au comité d'entreprise.

Pour contester cette décision, l'Urssaf fait valoir que les inspecteurs ont relevé que les prestations d'action sociale en faveur du personnel mises en place par le SDIS étaient versées par l'intermédiaire du service d'action sociale pour le personnel et par l'intermédiaire du comité des oeuvres sociales (Cos), que rentrent dans le cadre de la dérogation les prestations allouées par le comité des oeuvres sociales, s'agissant d'une structure, associative subventionnée par l'employeur et qu'à l'inverse le service d'action sociale pour le personnel (Sasp) était une extension du service des ressources humaines et ne pouvait être considéré comme une structure analogue à un comité d'entreprise, du fait même de l'existence du COS. Elle ajoute, reprenant les dispositions de la circulaire Acoss n°86-17 du 14 février 1986, que dès lors qu'une partie des activités est gérée par le Cos et une autre par le Sasp, alors que l'article R.432-2 du code du travail dispose que le comité d'entreprise assure ou contrôle la gestion de toutes les activités sociales ou culturelles établies dans l'entreprise, les aides versées par le Sasp doivent être réintégrée dans l'assiette des cotisations.

Le SDIS qui conclut à la confirmation du jugement sur ce point, fait valoir que l'action sociale dans la fonction publique territoriale est régie par l'article 88-1 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 et qu'il ressort de cette disposition, confirmée par l'article L.2321-1 du code du travail que le SDIS n'a pas l'obligation de créer un comité d'entreprise et que les prestations sociales sont distinctes de la rémunération des agents territoriaux, qu'il n'est donc pas tenu de délivrer des prestations sociales par l'intermédiaire d'un comité d'entreprise et qu'il doit donc être assimilé à un comité d'entreprise lorsqu'il délivre lui-même directement des prestations sociales, sans que l'existence du Comité des oeuvres sociales y fasse obstacle puisqu'en application de l'article 9 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983, l'Etat les collectivités locales et leurs établissements publics peuvent confier à titre exclusif la gestion de tout ou partie des prestations dont bénéficient les agents à des organismes à but non lucratifs ou à des associations nationales régies par le loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. Il soutient également qu'aucun texte ne fait peser sur lui les obligations mentionnées par l'Urssaf et issues du code du travail.

Aux termes de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, sont considérés comme rémunérations pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, toutes les sommes allouées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion de du travail.

Il est de principe que tous les avantages qu'ils soient en espèce ou en nature attribuées par l'employeur rentrent dans l'assiette des cotisations, sauf exclusion prévue par la loi et que tous les avantages attribués par le comité d'entreprise sont à prendre en considération dans l'assiette des cotisations, à l'exclusion des secours attribués pour des situations dignes d'intérêt et des sommes ayant le caractère de dommages et intérêts.

Les tolérances administratives issues des instructions ministérielles ou de la circulaire Acoss assimilant l'employeur au comité d'entreprise lorsque celui-ci, en l'absence de comité d'entreprise gère lui-même les activités sociales ou culturelles normalement dévolues au comité d'entrepris, ne s'imposent pas au juge.

Selon les dispositions de l'article L.2321-1 du code du travail, les dispositions du titre deuxième relatif au comité d'entreprise sont applicables aux employeurs de droits privés ainsi qu'à leurs salariés, mais également aux établissements publics à caractère industriel et commerciales et aux établissement publics à caractère administratif lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé, ces dispositions pouvant faire l'objet d'adaptation par décret en Conseil d'Etat, sous réserve d'assurer les mêmes garanties aux salariés de ces établissements.

Il est constant que le SDIS, qui est un établissement local public autonome, est un établissement public à caractère administratif employant notamment des salariés de droit privé.

Selon l'article 88-1 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 : 'l'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale ou le conseil d'administration d'un établissement public local détermine le type des actions et le montant des dépenses qu'il entend engager pour la réalisation des prestations prévue à l'article 9 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, ainsi que des modalités de leur mise en oeuvre'.

Selon l'article 9 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983, l'Etat les collectivités locales et leurs établissements publics peuvent confier à titre exclusif la gestion de tout ou partie des prestations dont bénéficient les agents à des organismes à but non lucratifs ou à des associations nationales régies par le loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.

Il résulte de ces dispositions que dans un établissement public local, la gestion des activités sociales peut être partagée entre le conseil d'administration et un organisme à but lucratif, en sorte que les dispositions de l'article L. 2323-83 du code du travail donnant au comité d'entreprise l'exclusivité de la gestion des activités sociales et culturelles n'est pas applicable au SDIS, s'agissant d'un établissement public local autonome.

Pour autant, la gestion par l'employeur lui-même d'une partie seulement des prestations et aides sociales en application des dispositions précitées, dès lors qu'il en a confié une partie au Comité des oeuvres sociales ne permet pas de lui appliquer les tolérances administratives, prévues en l'absence de comité d'entreprise, lesquelles ne s'imposent d'ailleurs pas au juge.

Aussi c'est à bon droit que l'Urssaf a intégré dans l'assiette des cotisations limitée aux contributions Csg/crds, en l'absence de détail concernant le statut des bénéficiaires, les sommes versées et les avantages accordés aux agents du SDIS au titre des diverses prestations (prestations individuelles, dépenses de Noël, fêtes et cérémonies, bons d'achat rentrée scolaire, chèque vacances, prêts logement) représentant un redressement d'un montant de 31.134 euros.

Le redressement sera ainsi validé sur ce chef à hauteur du montant retenu par l'Urssaf et le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a annulé ce chef de redressement.

6/ Sur l'observation sur l'avenir concernant les notes de restaurant

Les inspecteurs de l'Urssaf ont constaté que les notes de restaurant faisant l'objet de remboursement au titre des frais généraux alors qu'elles ne mentionnaient pas toujours le nom des bénéficiaires ou le motif de la mission.

Ils ont considéré qu'en l'absence d'éléments permettant d'identifier les bénéficiaires, les sommes versées ou prises en charge par le SDIS au titre de ces notes de restaurant devaient être réintégrées des cotisations et contributions sociales mais qu'à titre exceptionnel il n'était pas procédé à cette réintégration mais demandé à l'employeur de veiller à indiquer sur les notes de restaurant, le nom de chaque bénéficiaire ainsi que le motif de la mission.

Le jugement a maintenu cette observation pour l'avenir.

Pour contester le jugement à ce titre, le SDIS expose que les notes de restauration ne peuvent être remboursées que lorsque l'agent participe à une formation dans un des centres de formation du SDIS, à [Localité 2] ou à [Localité 3] et que lorsque le service de formation a organisé la restauration, il émet un bon de commande dont la dépense est parallèlement engagée par le service des finances sur production d'une facture et qu'il est susceptible de justifier à chaque fois de l'exonération pratiquée par la fourniture de la liste ou de l'émargement des participants à ces formations, démontrant l'impossibilité de regagner leur domicile ou le lieu de travail.

Or le SDIS ne fournit pas la liste des participants ni les éléments de nature à justifier que les conditions de travail interdisait pour chacun des participants de regagner sa résidence ou son lieu de travail pour le repas, en sorte que la présomption d'utilisation conforme à l'objet pour la fraction de la dépense n'excédant pas le montant fixé chaque année ne s'applique pas. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont maintenu l'observation pour l'avenir à ce titre.

7/ Sur l'observation pour l'avenir concernant les frais accordés aux salariés à des taux d'intérêts préférentiels :

Il a été constaté par les inspecteurs de l'Urssaf que le service d'action sociale alloue au personnel des prêts pour le logement, des prêts pour les soins médicaux et prêts sociaux, sans taux d'intérêt.

La loi n°84-46 du 24 janvier 1984 interdit aux entreprises n'ayant pas le statut d'établissement de crédit d'effectuer des opérations de banque. Par dérogation, il est permis aux employeurs de consentir à leurs salariés des prêts à intérêts, à condition qu'il s'agisse d'opérations exceptionnelles décidées pour des motifs d'ordre social.

Les inspecteurs ont considéré qu'ils s'agissaient de prêts octroyés à taux préférentiel dont le montant de l'économie faite par le salarié caractérisait un avantage devant être réintégré dans l'assiette des cotisation, par application des dispositions des articles L. 242-1, L.136-1 et L.136-2 du code de la sécurité sociale, de l'arrêté du 10 décembre 2002 outre de l'article 14 de l'ordonnance du 24 janvier 1996.

Le tribunal a considéré que ces avantages avaient la nature de secours et qu'ils devaient donc être exclus de l'assiette de cotisations.

Dès lors que c'est l'employeur qui a octroyé ces prêts dont le caractère préférentiel n'est pas discuté, pas plus que la légalité du principe, la nature de secours du prêt accordé n'est pas de nature à entraîner l'exclusion de l'économie faite par le salarié de l'assiette des cotisations, comme il a été précisé dans le cadre du financement des actions sociales, l'employeur ne pouvant être assimilé au comité d'entreprise.

C'est donc à tort que les premier juges ont annulé cette observation pour l'avenir, laquelle sera validée et le jugement entrepris sera infirmé à ce titre.

8/ Sur l'observation pour l'avenir portant sur les bases de déclaration auprès de Pôle Emploi :

Les inspecteurs de l'Urssaf ont constaté des écarts et divergences lors des rapprochements de masse effectués entre les tableaux récapitulatifs annuels des cotisations (Urssaf) et les déclarations de régularisation annuelle (Pôle Emploi) pour lesquelles le SDIS n'a pas été en capacité de fournir des explications.

Ils ont, compte tenu du montant des écarts, fait une observation pour l'avenir.

Le tribunal a maintenu cette observation au motif que le SDIS n'apportait aucun élément justifiant ces différences.

Pour contester cette décision le SDIS prétend que rien ne vient étayer les reproches de l'Urssaf et que si les tableaux laissent apparaître une différence entre les versements de cotisation versées et les cotisations dues à la faveur du SDIS, c'est en raison d'un trop-perçu qui a été confirmé par un courrier de Pôle Emploi du 2 avril 2010 qui lui a accordé une remise gracieuse et un autre du 10 février 2011.

Les constatations effectuées par les inspecteurs font foi jusqu'à preuve du contraire et en l'occurrence, malgré sa contestation de principe, le SDIS reconnaît l'existence d'une divergence.

Il ressort du courrier de Pôle Emploi du 2 avril 2010 que le SDIS bénéficiait d'un solde créditeur de 243,44 euros, à raison d'une remise gracieuse de 254 euros sur des pénalités de 10%, et le 10 février 2011, Pôle Emploi lui a notifié un avis de régularisation au titre de l'exercice 2010 et des exercices antérieurs pour un montant total de 974,64 euros en sa faveur. Pour autant, ces éléments n'expliquent pas et ne sont pas de nature à justifier les écarts entre les différences constatées dans les propres déclarations de l'employeur. Il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont maintenu l'observation pour l'avenir à ce titre.

9/ Sur l'observation pour l'avenir portant sur l'utilisation des véhicules personnels de l'entreprise

Les inspecteurs de l'Urssaf ont constaté que :

- de nombreux agents bénéficiaient de la mise à disposition gratuite permanente d'un véhicule,

- l'employeur avait déclaré que les véhicules devaient être utilisés uniquement à titre professionnel alors que pour les véhicules affectés de façon individuelle, aucun carnet de bord n'était tenu et que certains agents utilisaient ce véhicule uniquement dans le cadre de leur trajet domicile/lieu de travail,

- un seul carnet de bord avait été présenté, concernant un véhicule non affecté (véhicule pool).

Il ont considéré que l'employeur n'apportait pas la preuve de l'utilisation exclusivement professionnelle des véhicules mis à disposition permanente et gratuite, ni en ce qui concerne les agents utilisant exclusivement le véhicule pour le trajet domicile/lieu de travail, de la réunion des trois conditions : utilisation du véhicule nécessaire à l'activité professionnelle ; véhicule non mis à disposition de façon permanente ; l'impossibilité pour le salarié d'utiliser les transports en commun pour les trajets domicile/lieu de travail en raison de conditions ou d'horaires particuliers de travail ; et ont réintégré dans l'assiette des cotisations les avantages en nature en résultant, entraînant un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale d'un montant total de 215 616 euros.

Les premiers juges considérant que le SDIS justifiait de l'utilisation strictement personnelle des véhicules mis à disposition de certains salariés par la notification par écrit aux salariés visés de l'interdiction d'utiliser leur véhicule de service à des fins personnelles, ont annulé l'observation pour l'avenir.

Pour contester ce jugement, l'Urssaf fait valoir que l'interdiction donnée par écrit d'utiliser le véhicule à titre personnel est insuffisante pour caractériser une utilisation à des fins strictement professionnelles, l'agent pouvant contourner l'interdiction et que le SDIS ne rapporte pas la preuve de la mise en place effective d'un contrôle de l'utilisation de ces véhicules à des fins strictement professionnelles notamment par le tenue d'un carnet de bord.

Le SDIS soutient quant à lui que le principe de l'attribution d'un véhicule professionnel est respectueux des prescriptions de l'Acoss dès lors que seuls sont éligibles à l'attribution d'un véhicule avec remisage à domicile tous les agents concernés par des astreintes opérationnelle ou logistiques, que l'agent qui reçoit le véhicule renvoie un accusé de réception informant l'employeur s'il accepte ou non l'attribution du véhicule dans les conditions imposées par le SDIS qui l'informe par courrier que 'le véhicule de service avec remisage à titre gratuit est affecté à un agent dans le cadre strict de ses missions, avec autorisation de le remiser à titre gratuit', que 'en dehors du trajet domicile-travail, le véhicule ne peut en aucun cas être utilisé à des fins personnelles' et que 'pendant les périodes de congé ou d'absence prolongées, le véhicule doit stationner au service'.

Il considère que les trois conditions sont remplies pour que ne soient pas considéré comme avantage en nature les attributions de véhicule pour les trajets domicile/travail.

En application de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en nature alloué en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations.

Selon l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociales, sous réserve des dispositions de l'article 5 ci-dessous, lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel estimé en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.

Selon le lettre circulaire n°2005-129 du 19 août 2005, accompagnant la mise en oeuvre de la réforme des avantages en nature et frais professionnels opérée par les arrêts des 10 et 20 décembre 2002, la mise à disposition permanente d'un véhicule avec interdiction de l'utiliser pendant le repos hebdomadaire et durant les périodes de congés payés, ne donne pas lieu à avantage en nature au motif qu'il peut être considéré que le salarié utilise ce véhicule que pour des raisons professionnelles mais que cette interdiction doit être notifiée par écrit.

En l'espèce, la notification écrite de l'obligation de remise du véhicule pendant les périodes de congés ou d'absence prolongée outre de l'interdiction d'utilisation du véhicule à des fins personnelles par les formules 'en dehors du trajet domicile-travail, le véhicule ne peut en aucun cas être utilisé à des fins personnelles' et 'pendant les périodes de congé ou d'absence prolongées, le véhicule doit stationner au service', comprenant nécessairement l'interdiction d'utilisation pendant le repos hebdomadaire, sont suffisamment précises pour justifier un usage strictement professionnel.

Par ailleurs, les conditions liées à une utilisation nécessaire à l'activité professionnelle et à l'impossibilité du salarié bénéficiaire d'utiliser les transports en commun en raison de condition ou d'horaires particuliers de travail sont justifiées par l'attribution aux seuls personnels concernés par des astreintes opérationnelles ou logistiques, qui sont susceptibles de se rendre sur tous lieux d'intervention à tout moment du jour et de la nuit dans les meilleurs délais.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont annulé l'observation pour l'avenir à ce titre.

En définitive le redressement opéré et la mise en demeure du 29 décembre 2011 seront validés à hauteur de la somme totale de 244 132 euros soit de 214 374 euros en cotisations et de 29 758 euros à titre de majorations.

L'Urssaf Aquitaine venant aux droits de l'Urssaf de la Gironde devra rembourser au SDIS de la Gironde la somme trop perçue de 1.432 euros, correspondant à la différence entre les sommes versées d'un montant de 245.564 euros le 30 janvier 2012 et le montant validé du redressement.

Le SDIS sera débouté du surplus de ses demandes.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient de rappeler qu'il n'y a pas lieu à dépens en matière de sécurité sociale.

Néanmoins, le SDIS succombe essentiellement et sera en conséquence débouté de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire bénéficier l'Urssaf de la Gironde des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner le SDIS à lui verser une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a annulé les chefs de redressement relatifs aux frais liés à la mobilité professionnelle et aux prestations allouées par le service d'action sociale, en ce qu'il a condamné l'Urssaf Aquitaine venant aux droits de l'Urssaf de la Gironde à rembourser au SDIS de la Gironde les sommes versées aux titres des deux chefs de redressement annulés et en ce qu'il a annulé l'observation pour l'avenir concernant les prêts accordés aux salariés à taux préférentiels ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Valide le chef de redressement relatif aux frais liés à la mobilité professionnelle à hauteur de 4 769 euros ;

Valide le chef de redressement relatif aux prestations allouées par le service d'action sociale ;

Valide le redressement opéré et la mise en demeure du 29 décembre 2011 à hauteur de la somme totale de 244.132 euros soit de 214.374 euros en cotisations et de 29.758 euros à titre de majorations ;

Déclare acquise à l'Urssaf Aquitaine les sommes versées par le SDIS le 30 janvier 2012 dans la limite de 244.132 euros ;

Condamne l'Urssaf Aquitaine venant aux droits de l'Urssaf de la Gironde à rembourser au SDIS de la Gironde la somme de 1.432 euros trop perçue ;

Valide l'observation pour l'avenir concernant les prêts accordés aux salariés à taux préférentiels ;

Confirme le jugement entrepris sur le surplus,

Y ajoutant,

Déboute le SDIS de la Gironde du surplus de ses demandes,

Condamne le SDIS de la Gironde à verser à l'Urssaf Aquitaine venant aux droits de l'Urssaf de la Gironde une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle qu'il n'y a pas lieu à dépens.

Signé par monsieur Eric Veyssière, président, et par madame Sylvaine Déchamps, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

Sylvaine Déchamps Eric Veyssière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 15/03962
Date de la décision : 10/01/2019

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°15/03962 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-10;15.03962 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award