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05/07/2018 | FRANCE | N°16/01622

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 05 juillet 2018, 16/01622


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------









ARRÊT DU : 05 JUILLET 2018



(Rédacteur : Madame Sandra Higelin, Vice-Présidente Placée)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 16/01622

















Madame X... Y...



c/



SAS PARK HOTEL





















Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu l...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 05 JUILLET 2018

(Rédacteur : Madame Sandra Higelin, Vice-Présidente Placée)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 16/01622

Madame X... Y...

c/

SAS PARK HOTEL

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 février 2016 (R.G. n° F13/02817) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 09 mars 2016,

APPELANTE :

Madame X... Y...

née le [...] à ROUMANIE

de nationalité Roumaine, demeurant [...]

représentée par Me Aurélie Z..., avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS PARK HOTEL, prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

représentée par Me A... loco Me Matthieu B... de la SELARL TOSI GALINAT B..., avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 mai 2018 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,

Madame Catherine MAILHES, Conseillère,

Madame Sandra HIGELIN, Vice Présidente Placée

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : G. TRIDON DE REY

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Selon contrat à durée indéterminée à temps plein en date du 30 septembre 2011, Mme Y... a été embauchée par la société Park Hôtel, exploitant un hôtel Holiday Inn à Pessac, et appartenant au Groupe Intercontinental, en qualité de femme de chambre.

Elle a été placée en arrêt de travail, du 19 septembre 2012 au 20 janvier 2013. Elle a été opérée du canal carpien sur les deux poignets et a été reconnue en maladie professionnelle par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie.

En janvier 2013 Mme Y... a été déclarée apte à la reprise du travail par le médecin du travail.

Par la suite, elle a développé une tendinite aux deux épaules qui lui a occasionné trois semaines d'arrêt maladie du 10 mai au 15 juin 2013.

Le 28 juin 2013, le médecin du travail l'a déclaré inapte au poste et indiqué la nécessité de procéder à une étude de poste.

Le 29 juillet 2013, lors de la deuxième visite médicale, le médecin l'a déclarée apte à reprendre son travail avec restriction des tâches.

Elle a repris le travail le 7 août 2013.

Mme Y... a été à nouveau en arrêt de travail à compter du 29 novembre 2013.

A l'issue des deux visites de reprise, elle a été déclarée inapte à tous travaux de ménage, même à un poste adapté, le médecin du travail précisant ' reclassement ou mutation à rechercher sans gestes répétitifs des membres supérieurs'.

Le 24 décembre 2013, la société Park Hôtel a proposé un poste de réceptionniste à Mme Y..., poste qu'elle a refusé.

Elle a été licenciée pour inaptitude professionnelle le 22 janvier 2014.

Mme Y... et trois autres salariées ont déposé une plainte pénale pour harcèlement moral et discrimination raciale à l'encontre de Mme C..., directrice de l'hôtel.

Mme Y... a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail, aux torts exclusifs de l'employeur, et condamner ce dernier à lui verser les sommes suivantes :

dommages et intérêts pour discrimination raciale et violation de l'obligation de santé et de sécurité : 20 000 euros,

indemnité de licenciement : 642,13 euros,

indemnité compensatrice de préavis : 3210,66 euros,

congés payés sur préavis : 321,06 euros,

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (art. L1235-3 du code du travail) : 20 000,00 euros,

indemnité pour non respect de la procédure de licenciement : 1 605,33 euros

article 700 du code de procédure civile : 2 000,00 euros.

La Société Park Hôtel s'est opposée à ces demandes, et a conclu à titre reconventionnel à la condamnation de Mme Y... au paiement d'une indemnité de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement en date du 30 septembre 2014, le Conseil des prud'hommes de Bordeaux a, conformément à la demande de la salariée, sursis à statuer sur ces demandes dans l'attente de l'issue de la procédure pénale.

Le 1er décembre 2014, le Tribunal correctionnel de Bordeaux a relaxé Mme C..., directrice de l'hôtel, des faits de discrimination et de harcèlement.

Mme Y... a sollicité la remise de l'affaire au rôle.

Par décision du 29 février 2016, le conseil de prud'hommes a :

débouté Mme Y... de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée aux entiers dépens,

débouté la société Park Hôtel exerçant sous l'enseigne Holiday Inn de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Par déclaration de son avocat au greffe de la Cour du 9 mars 2016, Mme Y... a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 13 avril 2016 au greffe de la Cour et développées oralement, Mme Y... demande à la Cour de :

infirmer en tous points le jugement critiqué,

et par conséquent,

dire et juger que la société Park Hôtel a commis un manquement à l'obligation de santé et de sécurité,

dire et juger que le licenciement pour une inaptitude professionnelle est sans cause réelle et sérieuse,

par conséquent

condamner la société Park Hôtel à lui verser les sommes suivantes :

20 000 euros à titre de dommages intérêts pour violation de obligation de santé et de sécurité ;

30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

assortir la décision de l'intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes sur l'ensemble des sommes,

condamner l'employeur aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions déposées le 24 avril 2018 au greffe de la Cour et développées oralement, la société Park Hôtel demande à la Cour de :

- Sur la demande au titre du manquement à l'obligation de sécurité :

à titre principal :

dire et juger que la demande de Mme Y... au titre du manquement à l'obligation de sécurité relève de la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale,

à titre subsidiaire :

dire et juger que la demande de Mme Y... se heurte au principe de l'autorité de la chose jugée au pénal,

à titre infiniment subsidiaire :

dire et juger que les faits allégués ne sont pas démontrés,

en tout état de cause :

débouter Mme Y... de sa demande,

- Sur la demande de licenciement sans cause réelle et sérieuse :

constater que l'avis d'inaptitude résulte de pathologies reconnues comme maladies professionnelles,

dire et juger que Mme Y... ne peut invoquer un manquement à l'obligation de sécurité qui relève de la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale,

dire et juger que la procédure de licenciement pour inaptitude professionnelle a été respectée,

dire et juger que l'obligation de recherche de reclassement a été respectée

dire et juger que le licenciement de Mme Y... pour inaptitude professionnelle est valable et bien fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- en tout état de cause :

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouter en conséquence Mme Y... de l'ensemble de ses prétentions fins et conclusions

la condamner au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité de résultat

Aux termes de l'article 4121-1 du Code du travail, l'employeur prend toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent:

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail

2° Des actions d'information et de formation

3° la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et rendre à l'amélioration des situations existantes.

Selon les dispositions de l'article L 4121-2 du Code du travail, l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants:

1° Eviter les risques,

2° Evaluer les risques à la source

3° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé

5° Tenir compte de l'état de l'évaluation de la technique

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L 1152-1 et L 1153-1

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.

Il est admis que ne méconnaît pas l'obligation légale de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L 4121-1 et L 4121-2 du Code du travail.

Mme Y... reproche en l'espèce à l'employeur d'avoir manqué à son obligation de préserver sa santé et sa sécurité, obligation de résultat, en lui ayant imposé une surcharge de travail, en lui ayant servi des repas impropres à la consommation, en ayant manifesté à son encontre des attitudes humiliantes et vexatoires à caractère raciste.

La Cour observe toutefois que les pathologies à l'origine de l'avis d'inaptitude de Mme Y... ont été reconnues maladies professionnelles et que celle-ci a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, fondée sur la violation de l'obligation de sécurité.

Or, il est constant que si la juridiction prud'homale est seule compétente pour connaître d'un litige relatif à l'indemnisation d'un préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail, relève en revanche de la compétence exclusive du Tribunal des affaires de sécurité sociale l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, qu'ils soient ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Il en résulte sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice né du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, formée devant la juridiction prud'homale, est irrecevable.

Sur la rupture du contrat de travail

* Sur le manquement à l'obligation de sécurité:

Mme Y... argue de la violation par l'employeur de son obligation de préserver sa santé et sa sécurité, caractérisée par une surcharge de travail et des conditions de travail délétères, ayant causé deux maladies professionnelles, reconnues comme telles par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie et non contestées, à l'origine de son inaptitude au poste de travail.

L'employeur fait pour sa part valoir que Mme Y... ne peut invoquer un quelconque manquement à l'obligation de sécurité pour contester le licenciement, dès lors que le Tribunal des affaires de sécurité sociale, saisi par la salariée d'une demande de reconnaissance de faute inexcusable, est seul compétent pour apprécier le manquement à l'obligation de sécurité.

La Cour rappelle toutefois que si l'indemnisation des dommages résultant d'une maladie professionnelle, qu'elle soit ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du Tribunal des affaires de sécurité sociale, la juridiction prud'homale est seule compétente pour statuer sur le bien fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dès lors, même lorsque le salarié est victime d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle, la juridiction prud'homale est seule compétente pour connaître de l'application des règles relatives à la rupture du contrat de travail.

Il est constant qu'est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu'il est démontré que l'inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée. En effet, dans une telle hypothèse, le licenciement, même s'il est fondé sur une inaptitude régulièrement constatée par le médecin du travail, trouve en réalité sa cause véritable dans ce manquement de l'employeur.

Mme Y... reproche en l'espèce à l'employeur d'avoir manqué à son obligation de sécurité de résultat, en lui ayant imposé une surcharge de travail, proposé des repas impropres à la consommation, et fait encore grief à Mme C..., directrice de l'hôtel, d'avoir adopté à son encontre des attitudes humiliantes, vexatoires, et discriminatoires.

La Cour relève toutefois que les faits portant sur la surcharge de travail, ainsi que sur les propos injurieux, discriminatoires et vexatoires, tenus par la directrice de l'hôtel, ont été examinés par le Tribunal correctionnel, lequel a considéré qu'ils n'étaient pas établis et a prononcé la relaxe de Mme C....

Il en résulte que la Cour ne peut à nouveau, dans le cadre de l'instance prud'homale, évoquer ces griefs, examinés par la juridiction pénale et dont la décision de relaxe est passée en force de chose jugée.

Sur le grief lié aux repas impropres à la consommation, non évoqué devant le Tribunal correctionnel, Mme Y... verse aux débats copie de son audition par les services de police de Bordeaux dans le cadre de la plainte déposée à l'encontre de Mme C..., directrice, aux termes de laquelle elle indique que la nourriture était insuffisante et parfois avariée, une attestation de Mme D..., qui a travaillé en interim au sein de l'hôtel en octobre et novembre 2012, évoquant la 'piètre qualité de la nourriture' et des yaourts périmés, ainsi que des photocopies de photographies des repas servis.

Dans la mesure où les copies de photographies sont de piètre qualité et dépourvues de toute force probante et où le témoignage de Mme D... est peu circonstancié, la preuve de ce manquement n'est pas rapportée.

* Sur l'absence de consultation des délégués du personnel:

Suivant les dispositions de l'article L 1226-10 du Code du travail, dispositions d'ordre public, en cas d'inaptitude résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, l'avis des délégués du personnel doit précéder la proposition de reclassement.

Il est constant qu'en matière d'inaptitude professionnelle, l'avis des délégués du personnel doit être recueilli avant l'engagement de la procédure de licenciement, sauf si l'employeur peut produire un procès-verbal de carence.

La Société Park Hotel justifie en l'espèce que lors de l'organisation des élections des délégués du personnel en 2010, aucune liste n'avait été présentée et aucun salarié ne s'était porté candidat, situation ayant conduit à l'établissement d'un procès-verbal de carence le 4 juin 2010, transmis à l'inspection du travail le même jour.

Il s'ensuit que la procédure de licenciement n'est entachée d'aucune irrégularité.

* Sur le manquement à l'obligation de recherche de reclassement:

Aux termes de l'article L 1226-10 du Code du travail dans sa version applicable au litige, lorsqu'un salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment , l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

Il est constant que si l'entreprise appartient à un groupe, le reclassement du salarié déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, doit être recherché à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation et le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Il appartient à l'employeur de justifier du périmètre de reclassement et de l'impossibilité, à la date du licenciement, de reclasser le salarié tant dans l'entreprise que dans le groupe.

En l'espèce, la salariée reproche en premier lieu à l'employeur de ne pas avoir consulté le médecin du travail dans le cadre de la recherche de reclassement, ce que la Société Park Hôtel conteste.

La Cour observe que si l'employeur fait état, dans la lettre de notification du licenciement en date du 22 janvier 2014, de la consultation du Docteur E... pour rechercher les possibilités de reclassement, il ne produit aucun élément justifiant de cette consultation, pas plus qu'il ne démontre que les propositions de postes de reclassement offertes à la salariée, ont été soumises au médecin du travail.

Mme Y... reproche en second lieu à l'employeur de n'avoir pas recherché, de manière loyale et sérieuse, des solutions de reclassement en interne, et de s'être abstenu de toute recherche en externe alors qu'il en avait l'obligation.

La Société Park Hotel le conteste, faisant valoir que la propositions de poste de réceptionniste soumise à la salariée était conforme à ses capacités, et, s'agissant des hôtels du groupe qu'elle n'a pas sollicités, que ces hôtels sont des franchises, totalement indépendantes, sans permutabilité possible du personnel.

La Cour observe sur ce dernier point que l'activité de franchisé ne suffit pas en soi à présumer l'absence de possibilité de permutation du personnel au sein du réseau, l'employeur ayant la charge de démontrer l'absence totale de permutabilité du personnel, preuve que la Société Park Hotel ne rapporte en l'espèce pas.

L'employeur justifie avoir proposé à la salariée un poste de réceptionniste, refusé par Mme Y..., et avoir interrogé huit établissements du groupe, situés dans le Val d'Oise et en Gironde.

La Cour observe toutefois que la société Park Hôtel, qui n'avait pas reçu lors du licenciement les réponses de tous les établissements interrogés, ne démontre pas en quoi le panel des entreprises qu'elle a choisi d'interroger constitue le seul périmètre de l'obligation de reclassement alors que le groupe auquel elle appartient comporte de nombreux sites, tant sur le territoire français qu'à l'étranger.

La Société Park Hotel ne justifiant pas avoir satisfait à son obligation de recherche de reclassement, laquelle, si elle n'est que de moyens, doit néanmoins être exécutée de manière loyale et sérieuse, il en résulte que le licenciement de Mme Y... est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La décision entreprise sera dès lors infirmée, et la société Park Hotel condamnée à verser à Mme Y..., qui avait une ancienneté d'un peu plus de deux ans à la date de son licenciement, la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L 1226-15 du Code du travail, cette somme, de nature indemnitaire, portant intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur les autres demandes

La Société Park Hotel, partie succombante, supportera la charge des entiers dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme Y... la part des frais non compris dans les dépens, et il convient en conséquence de condamner la Société Park Hotel à lui verser une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement prononcé le 29 février 2016 par le Conseil des prud'hommes en toutes ses dispositions critiquées,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice né du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité,

Dit que le licenciement de Mme Y... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la Société Park Hotel à verser à Mme Y... la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts, cette somme portant intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Y ajoutant,

Condamne la société Park Hotel à verser à Mme Y... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la société Park Hotel aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par Eric Veyssière, Président et par Gwenaël Tridon de Rey, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 16/01622
Date de la décision : 05/07/2018

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°16/01622 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-05;16.01622 ?
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