COUR D'APPEL DE BORDEAUX
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 03 JUILLET 2018
(Rédacteur : Catherine Z..., Président)
N° de rôle : 17/02593
MINISTERE PUBLIC
Près la Cour d'Appel de Bordeaux
c/
Aziz X...
Nature de la décision : AU FOND
10B
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 avril 2017 par la 1 ère chambre civile du tribunal de grande instance de Bordeaux (cabinet 1, RG n° 15/5184) suivant déclaration d'appel du 26 avril 2017
APPELANTE :
MINISTERE PUBLIC
Près la Cour d'Appel de Bordeaux
représenté par M. Lionel CHASSIN, Avocat Général
INTIMÉ :
Aziz X...
né le [...] à CONAKRY (GUINÉE)
de nationalité Française,
demeurant [...]
Représenté par Me Paul Y..., avocat au barreau de BORDEAUX et assisté de Me Aurélie LACLAU avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 22 mai 2018 en audience publique, devant la Cour composée de :
Présidente : Catherine Z...
Conseiller : Françoise ROQUES
Conseiller : Danièle PUYDEBAT
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Valérie DUFOUR
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.
M. Aziz X..., né le [...] à Conakry en république de Guinée, a souscrit le [...] une déclaration acquisitive de nationalité française devant le tribunal d'instance de Foix sur le fondement de l'article 21-12 du code civil. Cette déclaration a été enregistrée le 29 janvier 2014.
Par acte d'huissier de justice du 23 avril 2015, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bordeaux a fait assigner M. X... aux fins d'annulation de la déclaration de nationalité et de dire que M. X... n'a pas la nationalité française.
Par jugement du 4 avril 2017, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
- constaté l'accomplissement des formalités prévues à l'article 1043 du code de procédure civile,
- débouté le ministère public de sa demande d'annulation de l'enregistrement de la déclaration de nationalité sus visé ,
- constaté que M. X... est de nationalité française,
- ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil ,
Le ministère public a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 27 avril 2017.
Dans ses dernières conclusions du 4 septembre 2017, le ministère public demande à la cour de :
-constater le dépôt du récépissé prévu à l'article 1043 du code de procédure civile,
- annuler l'enregistrement de la déclaration de nationalité souscrite le 30 juillet 2013,
- dire que M. X... n'a pas la nationalité française,
- ordonner la mention de l'article 28 du code civil.
Dans ses conclusions du 7 mai 2018, M. X... prie la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner le ministère public au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
En application des dispositions de article 455 du Code de procédure civile, la cour renvoie aux conclusions des parties pour l'exposé de leurs moyens.
SUR QUOI LA COUR;
la cour constate le dépôt du récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civil.
Le ministère public fait valoir que :
- le jugement du 20 juillet 2015 du tribunal de première instance de Conakry n'a pas été légalisé en dépitde l'absence de convention internationale ou bilatérale entre les deux pays et qu'il ne peut être reconnu en France,
- deux actes de naissance différents ( 39 et 1814) ont été produits qui contiennent des mentions contradictoires et sont des faux,
- des vérifications faites par l'ambassade de France à Conakry confirment que l'acte de naissance 1814 est un faux,
- le jugement supplétif du 20 juillet 2015 a été rendu sur le fondementde l'article 193 du code civil guinéen qui n'avait pas à recevoir application et dissimule les motifs réels de la requête, ce qui constitue une fraude commise dans le seul but de régulariser la situation de M. X...,
- ce jugement a d'ailleurs été rendu le jour même de la requête c'est à dire sans investigation sérieuse et que la transcription est intervenue deux jours après au mépris du délai d'appel
- la justice française n'est pas liée par le passeport délivré par les autorités guinéennes
M. X... répond que :
- l'irrégularité de l'acte de naissance ne peut être remise en cause dès lors que le greffier du tribunal de Foix a procédé à son enregistrement.
- l'acte de naissance 39 a été perdu lors de la procédure de légalisation injustement réclamée par le ministère public et il a obtenu une photocopie certifiée conforme de l'extrait de l'acte de naissance qui a été légalisée par le ministère des affaires étrangères de Guinée ke 10 décembre 2013,
- la régularité internationale du jugement de Conakry ne peut être remise en cause en l'absence de preuve par le ministère public que ses intérêts ont été objectivement compromis,
- le tribunal de Conakry a fait une juste application de l'article 193 du code guinéen et que les voies de recours doivent être examinées au regard des articles 898 et 899 du code de procédure civil spécifiques aux actes d'état civil,
- le ministère public échoue à rapporter la preuve du caractère apocryphe de l'acte de naissance qui contient des mentions concordantes avec l'extrait d'acte de naissance 39 et avec son passeport délivré par les autorités guinéennes sur la base de cet acte de naissance.
En application des dispositions de article 455 du Code de procédure civile, la cour renvoie aux conclusions des parties pour l'exposé de leurs moyens.
Il est constant que les conditions de fond de l'article 21 -12 du code civil sont réunies.
et le ministère public ne le conteste pas.
Il revient au ministère public d'apporter la preuve de ce que l'enregistrement de la déclaration de nationalité souscrite par M. X... a été réalisé à tort.
Le caractère apocryphe des deux actes de naissance n'est pas établi par la pièce 4 du ministère public qui ne précise ni les moyens de la falsification ni les précisions quant à l'acte vérifié. Il n'est pas établi que cette pièce est une réponse à la demande faite par l'Ambassade de France en Guinée le 10 janvier 2014 qui figure en pièce 4 verso du ministère public;
Les deux actes d'état civil produits en photocopie par le ministère public ( pièces 2 et 3 ) ne comportent pas d'éléments contradictoires : la date de naissance, le nom et la date de naissance de l'enfant et de ses deux parents sont identiques ; le ministère public qui n'apporte aucune preuve contraire de la perte du premier acte de naissance présenté par M. X... , échoue à démontrer l'existence de contradictions par la seule énumération de numéros nécessairement différents.
Enfin, le ministère public n'établit pas que les dispositions du code civil guinéen n'auraient pas été respectées en ce que les dates précises et le lieu de naissance du père et de la mère ne sont pas précisés sur les actes de naissance.
La déclaration de nationalité dont le ministère public demande l'annulation a été effectuée régulièrement et la demande du ministère public sera rejetée sans qu'il soit nécessaire d'examiner la régularité du jugement de Conakry.
Le jugement entrepris sera confirmé dans toutes ses dispositions.
La demande visant à la condamnation du ministère public au paiement d'une somme au titre des frais irrépétibles sera rejetée.
Le trésor public supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
la cour, vu le rapport,
Constate le dépôt du récépissé exigé par l'article 1043 du code de procédure civile;
Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux le 4 avril 2017 en toutes ses dispositions;
Déboute M. X... de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile
Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil;
Laisse les dépens à la charge du trésor public.
L'arrêt a été signé par Catherine Z..., Présidente et par Valérie DUFOUR, greffier auquel elle a remis la minute signée de la décision.
Le Greffier La Présidente