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03/05/2018 | FRANCE | N°17/00561

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 03 mai 2018, 17/00561


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 03 MAI 2018



(Rédacteur : Madame Sandra HIGELIN, Vice-Présidente Placée)



BAUX RURAUX



N° de rôle : 17/00561

















Société DARBONNE



c/



Monsieur [S] [H]

Monsieur [K] [C]

Monsieur [Q] [C]

Monsieur [T] [C]





















Nature de la décision : AU FOND



















Notifié par LETTRE SIMPLE le :



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 décembre 2016 (R.G. n°5113000002) par le Tribunal paritaire des baux ruraux d'ARCACHON, suivant déclaration d'appel du 26 janvier...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 03 MAI 2018

(Rédacteur : Madame Sandra HIGELIN, Vice-Présidente Placée)

BAUX RURAUX

N° de rôle : 17/00561

Société DARBONNE

c/

Monsieur [S] [H]

Monsieur [K] [C]

Monsieur [Q] [C]

Monsieur [T] [C]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LETTRE SIMPLE le :

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 décembre 2016 (R.G. n°5113000002) par le Tribunal paritaire des baux ruraux d'ARCACHON, suivant déclaration d'appel du 26 janvier 2017,

APPELANTE :

Société DARBONNE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]

Représentée par Me ROQUAIN de la SCP RMC ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Monsieur [S] [H]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 1] (Maroc)

demeurant C/o Me [F], [Adresse 2]

Monsieur [K] [C]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 2]

demeurant C/o Me [F], [Adresse 2]

Monsieur [Q] [C]

né le [Date naissance 3] 1982 à [Localité 3]

demeurant C/o Me [F], [Adresse 2]

Monsieur [T] [C]

né le [Date naissance 4] 1987 à [Localité 4]

demeurant C/o Me [F], [Adresse 2]

Représentés par Me Philippe QUERON, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 mars 2018 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Madame Sandra HIGELIN, Vice Présidente Placée

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Le 24 mars 1980, Mme [P] épouse [H] a donné à bail à la société civile Darbonne un ensemble de parcelles en nature de terre, prés, vignes et cultures diverses situées commune [Localité 5] (33), lieudit "[Localité 6]" pour une superficie de 156 ha 50a 20 ca.

Ce bail a été conclu pour une durée de 18 ans, à compter du 1er janvier 1980.

Le bail a été renouvelé le 1er janvier 1998, puis le 1er janvier 2007, à échéance au 31 décembre 2015.

Mme [P] épouse [H] est décédée le [Date décès 1] 1980, et les parcelles objet du bail à long terme sont depuis le 28 décembre 2011 la propriété de l'indivision [H]/[C] aux termes d'un partage familial passé par-devant Maître [R], notaire à [Localité 7], le 28 décembre 2011.

Au cours du bail a été constituée le 26 décembre 2000 la société par actions simplifiée à associé unique (SASU) Darbonne Pépinière, cette société étant devenue l'exploitante des parcelles initialement louées à la Société civile Darbonne.

Le 19 juin 2013, l'indivision [H]/[C] a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'Arcachon, aux fins de voir, à titre principal, résilier le bail pour faute du preneur et à titre subsidiaire, se voir autoriser à ne pas renouveler le bail à l'échéance du 31 décembre 2015.

le 29 juin 2013, l'indivision [H]/[C] a fait délivrer à la SASU Darbonne Pépinière un congé avec refus de renouvellement pour le 31 décembre 2015, sur le fondement des articles L411-46 et L411-53 du Code rural et de la pêche maritime, congé donné au motif de l'article L411-35 du code rural et de la pêche maritime prévoyant que toute sous-location ou cession de bail rural est interdite.

Par courrier recommandé en date du 28 octobre 2013, la SASU Darbonne Pépinière a saisi le même tribunal paritaire des baux ruraux en contestation du congé délivré par les bailleurs le 29 juin 2013.

Par jugement du 30 décembre 2016, le tribunal paritaire des baux ruraux a :

*dit que le congé délivré par l'indivision [H]/[C] n'a pas lieu d'être du fait de l'absence de bail

*débouté la SASU Darbonne Pépinière de l'ensemble de ses demandes,

*condamné la SASU Darbonne Pépinière au paiement d'une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens.

Par déclaration de son avocat au greffe de la Cour du 26 janvier 2017, la SASU Darbonne Pépinière a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 24 novembre 2017 au greffe de la Cour, la SASU Darbonne Pépinière demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, et, statuant à nouveau:

*de dire et juger que la cession du bail a été expréssement agréée par l'indivision [H]/[C] dans le cadre de l'acte authentique de partage du 28 décembre 2011,

* de dire et juger que le motif invoqué dans le congé délivré par l'indivision, à savoir le manquement à l'article L 411-35 du Code rural, n'est pas justifié,

* d'ordonner en conséquence son maintien dans les lieux en vertu d'un nouveau bail commençant à courir le 1er janvier 2016, et ce conformément à l'article L 411-54 du Code rural

* de condamner l'indivision au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées le 4 janvier 2018 au greffe de la Cour, M. [H] et les consorts [C] demandent à la Cour de :

confirmer les termes du jugement entrepris,

à titre subsidiaire en cas d'infirmation du jugement, valider le congé délivré tant dans sa forme que dans son fond par voie d'huissier en date du 29 juin 2013 au visa de l'article L.411-35 du code rural et de la pêche maritime,

condamner la SASU Darbonne Pépinière au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens toutes taxes comprises.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L 411-35 du Code rural, sous réserve des dispositions particulières aux baux cessibles hors du cadre familial prévues au chapitre VII du présent titre et nonobstant le dispositions de l'article 1717 du Code civil, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie, avec l'agrément du bailleur, au profit du conjoint ou partenaire d'un pacte civil de solidarité du preneur participant à l'exploitation, ou aux descendants du preneur ayant atteint m'âge de la majorité ou ayant été émancipés. A défaut d'agrément du bailleur, la cession peut être autorisée par le Tribunal paritaire.

Selon l'article L 411-38 du même Code, le preneur peut apporter le bail rural à une société dont il est membre, à condition toutefois que le bailleur ait donné son autorisation.

La SASU Darbonne Pépinière fait en l'espèce valoir qu'elle appartient au Groupe Darbonne, lequel a toujours exploité les terres par l'intermédiaire soit de la société civile Darbonne, soit de la SASU Darbonne Pépinière. Elle indique encore que la modification de la structure d'exploitation par le Groupe Darbonne n'a aucune incidence sur le sort du bail dans la mesure où la SASU Darbonne Pépinière, qui résulte de la transformation de la société civile Darbonne, a continué d'exécuter les clauses et conditions du bail dont cette dernière était titulaire.

La SASU Darbonne Pépinière argue à titre subsidiaire de l'agrément tacite des bailleurs, faisant valoir que ceux-ci ne se sont jamais opposés aux paiements des fermages effectués par elle depuis 2001. Elle ajoute que l'indivision avait été informée de ce qu'elle était sa locataire, aux termes de l'acte authentique de partage dressé par Maître [R], Notaire, et fait valoir qu'en signant cet acte de partage, les héritiers bailleurs ont agréé de manière expresse à la cession.

Les Consorts [H]/[C] font pour leur part valoir que la SASU Darbonne Pépinière n'est pas issue de la transformation de la société civile Darbonne, titulaire du bail, mais a été constituée ex nihilo, bénéficiant d'un apport partiel d'actif appartenant à la société civile Darbonne, cette dernière ayant été radiée du RCS le 27 novembre 2011, de sorte que la SASU Darbonne Pépinière est bien une nouvelle société, nonobstant son appartenance au Groupe Darbonne, ce qui justifie le caractère prohibé de la cession du bail.

Ils contestent en tout état de cause tout agrément à la cession du droit au bail, résultant de l'acte notarié de partage, et de l'acceptation des paiements des fermages.

Il résulte du contrat de bail initial versé aux débats que le preneur était la société civile Darbonne.

Le 1er chapitre du bail, intitulé 'obligations du preneur', précise que le preneur ne doit procéder à aucune cession de bail, ni à aucune sous-location, même partielle, sauf exceptions listées, nécessitant l'agrément préalable du bailleur ou du Tribunal paritaire.

L'extrait KBIS de la SASU Darbonne Pépinière, immatriculée au Registre du commerce et des sociétés le 26 décembre 2000, fait mention de la précision suivante, effectuée le 7 janvier 2002: 'apport partiel d'actif d'une branche d'activité de pépinière par la société civile Darbonne.'.

Il convient toutefois de relever qu'il n'est justifié d'aucun élément relatif aux modalités de cet apport.

La Cour observe en outre que la société civile Darbonne a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 27 novembre 2001, alors que la SASU Darbonne Pépinière a été immatriculée onze mois auparavant, le 26 décembre 2000.

Il s'ensuit que la SASU Darbonne Pépinière ne peut, contrairement à ce qu'affirme l'appelante sans produire la moindre pièce, résulter de la transformation de la société civile Darbonne, et constitue bien une personne morale nouvelle et différente.

La société civile Darbonne a ainsi fait un apport de droit au bail à une autre personne morale, la SASU Darbonne Pépinière, sans solliciter l'accord préalable du bailleur.

L'appelante argue à titre subsidiaire de l'agrément des bailleurs, du fait de l'encaissement des fermages versés par elle, et de la précision contenue dans l'acte notarié de partage quant à sa qualité de locataire des parcelles louées.

Il est cependant constant que l'acceptation par un bailleur, même durant plusieurs années, du paiement des fermages par le cessionnaire du bail, ne suffit pas à elle seule à caractériser une manifestation claire et non équivoque du bailleur à la cession.

Quant à l'acte notarié, il convient de relever que s'il mentionne dans le rappel de la situation locative des biens partagés, que certains étaient loués à la Société Darbonne Pépinière, il ne précise rien quant à la nature juridique de cette société.

Il ne peut en tout état de cause être tiré argument de ce que les indivisaires ont acquiescé à cet acte de partage mentionnant la location de certaines parcelles à la Société Darbonne Pépinière, sans plus de précisions, pour caractériser leur agrément à la cession du bail par la Société civile Darbonne à la SASU Darbonne Pépinière.

La cession prohibée du bail entraînant résiliation du bail, le congé délivré le 29 juin 2013 par les Consorts [H]/[C] n'avait pas lieu d'être en l'absence de bail.

La décision des premiers juges ayant constaté que le congé litigieux n'avait pas lieu d'être, ayant débouté la SASU Darbonne Pépinière de ses demandes, et l'ayant condamnée au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens, sera dès lors confirmée.

La SASU Darbonne Pépinière, succombant en ses demandes, supportera la charge des entiers dépens de la présente instance.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [S] [H], M. [K] [C], M. [Q] [C] et M. [T] [C], la part des frais non compris dans les dépens, et il convient en conséquence de condamner la SASU Darbonne Pépinière au paiement d'une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 30 décembre 2016 par le Tribunal paritaire des baux ruraux,

Y ajoutant,

Condamne la SASU Darbonne Pépinière au paiement d'une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SASU Darbonne Pépinière aux entiers dépens de l'instance.

Le présent arrêt a été signé par Eric Veyssière, Président et par Gwenaël Tridon de Rey, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 17/00561
Date de la décision : 03/05/2018

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°17/00561 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-03;17.00561 ?
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