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03/05/2018 | FRANCE | N°17/00560

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 03 mai 2018, 17/00560


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 03 MAI 2018



(Rédacteur : Madame Sandra HIGELIN, Vice-Présidente Placée)



BAUX RURAUX



N° de rôle : 17/00560

















SAS [K]



c/



Monsieur [P] [L]

Monsieur [S] [P]

Monsieur [I] [P]

Monsieur [U] [P]





















Nat

ure de la décision : AU FOND

















Notifié par LETTRE SIMPLE le :



Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 décembre 2016 (R.G. n°5113000001) par le Tribunal paritaire des baux ruraux d'ARCACHON, suivant déclaration d'appel du 26 janvier 2017,






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COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 03 MAI 2018

(Rédacteur : Madame Sandra HIGELIN, Vice-Présidente Placée)

BAUX RURAUX

N° de rôle : 17/00560

SAS [K]

c/

Monsieur [P] [L]

Monsieur [S] [P]

Monsieur [I] [P]

Monsieur [U] [P]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LETTRE SIMPLE le :

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 décembre 2016 (R.G. n°5113000001) par le Tribunal paritaire des baux ruraux d'ARCACHON, suivant déclaration d'appel du 26 janvier 2017,

APPELANTE :

SAS [K], agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me ROQUAIN de la SCP RMC ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Monsieur [P] [L]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 1] (MAROC)

demeurant c/o Cabinet de Me [N], [Adresse 2]

Monsieur [S] [P]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 2]

demeurant c/o Me [N], [Adresse 2]

Monsieur [I] [P]

né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 3]

demeurant c/o Me [N], [Adresse 2]

Monsieur [U] [P]

né le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 4]

demeurant C/O Me [N], [Adresse 2]

Représentés par Me Philippe QUERON, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 mars 2018 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Madame Sandra HIGELIN, Vice Présidente Placée

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Le 24 mars 1980, Mme [C] épouse [L] a donné à bail à la société civile [K] un ensemble de parcelles en nature de terre, prés, vignes et cultures diverses situées commune du [Localité 5] (33), lieudit "[Localité 6]" pour une superficie de 156 ha 50a 20 ca.

Ce bail a été conclu pour une durée de 18 ans, à compter du 1er janvier 1980.

Le bail a été renouvelé le 1er janvier 1998, puis le 1er janvier 2007, à échéance au 31 décembre 2015.

Mme [C] épouse [L] est décédée le [Date décès 1] 1980, et les parcelles objet du bail à long terme sont depuis le 28 décembre 2011 la propriété de l'indivision [L]/[P] aux termes d'un partage familial passé par-devant Maître [Y], notaire à [Localité 7], le 28 décembre 2011.

Au cours du bail a été constituée le 26 décembre 2000 la société par actions simplifiée à associé unique (SASU) [K] Pépinière, cette société étant devenue l'exploitante des parcelles initialement louées à la Société civile [K].

Le 19 juin 2013, l'indivision [L]/[P] saisissait par lettre recommandée avec accusé de réception, le tribunal paritaire des baux ruraux d'Arcachon, aux fins de voir, à titre principal, résilier le bail pour faute du preneur et à titre subsidiaire, se voir autoriser à ne pas renouveler le bail à l'échéance du 31 décembre 2015.

le 29 juin 2013, l'indivision [L]/[P] a fait délivrer à la SASU [K] Pépinière un congé avec refus de renouvellement pour le 31 décembre 2015, sur le fondement des articles L411-46 et L411-53 du Code rural et de la pêche maritime, congé donné au motif de l'article L411-35 du code rural et de la pêche maritime prévoyant que toute sous-location ou cession de bail rural est interdite.

Par courrier recommandé en date du 28 octobre 2013, la SASU [K] Pépinière a saisi le même tribunal paritaire des baux ruraux en contestation du congé délivré par les bailleurs le 29 juin 2013.

Par jugement du 30 décembre 2016, le tribunal paritaire des baux ruraux, statuant sur la requête des Consorts [K]/[P] a :

*dit l'indivision recevable et bien fondée en ses demandes*prononcé la résiliation du bail à long terme conclu initialement entre Mme [C] épouse [L] et la société civile [K]

* rejeté les demandes reconventionnelles de la SASU [K] Pépinière tendant à voir ordonner son maintien dans les lieux, et condamner la requérante au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

*condamné la SASU [K] Pépinière aux entiers dépens.

Par déclaration de son avocat au greffe de la Cour du 26 janvier 2017, la SASU [K] Pépinière a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 24 novembre 2017 au greffe de la Cour, la SASU [K] Pépinière demande à la Cour d'infirmer le jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux le 30 décembre 2016, ayant prononcé la résiliation du bail, et, statuant à nouveau:

- à titre principal,

*de dire et juger que la société civile [K] a été transformée en SASU [K] Pépinière, société commerciale, par un apport de bail, et que cette simple transformation n'est pas constitutive d'une cession prohibée de bail rural

* de dire et juger que le congé signifié par l'indivision le 29 juin 2013 n'est pas justifié par l'un des motifs visés par l'article L 411-31 du Code rural,

- à titre subsidiaire,

* de dire et juger que la cession de bail a été agréée expressément par l'indivision dans le cadre de l'acte authentique de partage du 28 décembre 2011

* de dire et juger que le congé signifié par l'indivision n'est pas justifié par l'un des motifs visés par l'article L 411-31 du Code rural

- en conséquence,

* de débouter l'indivision de ses demandes, tant principale que subsidiaire,

* d'ordonner son maintien dans les lieux au titre d'un nouveau bail d'une durée de neuf ans,

* de condamner l'indivision au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées le 4 janvier 2018 au greffe de la Cour, M. [L] et les consorts [P] demandent à la Cour de :

confirmer les termes du jugement entrepris,

à titre subsidiaire en cas d'infirmation du jugement, valider le congé délivré tant dans sa forme que dans son fond par voie d'huissier en date du 29 juin 2013 au visa de l'article L.411-35 du code rural et de la pêche maritime,

condamner la SASU [K] Pépinière au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens toutes taxes comprises.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la titularité du bail

Aux termes de l'article L 411-35 du Code rural, sous réserve des dispositions particulières aux baux cessibles hors du cadre familial prévues au chapitre VII du présent titre et nonobstant le dispositions de l'article 1717 du Code civil, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie, avec l'agrément du bailleur, au profit du conjoint ou partenaire d'un pacte civil de solidarité du preneur participant à l'exploitation, ou aux descendants du preneur ayant atteint m'âge de la majorité ou ayant été émancipés. A défaut d'agrément du bailleur, la cession peut être autorisée par le Tribunal paritaire.

Selon l'article L 411-38 du même Code, le preneur peut apporter le bail rural à une société dont il est membre, à condition toutefois que le bailleur ait donné son autorisation.

La SASU [K] Pépinière fait en l'espèce valoir qu'elle appartient au Groupe [K], lequel a toujours exploité les terres par l'intermédiaire soit de la société civile [K], soit de la SASU [K] Pépinière.

Elle indique encore que la modification de la structure d'exploitation par le Groupe [K] n'a aucune incidence sur le sort du bail dans la mesure où la SASU [K] Pépinière, qui résulte de la transformation de la société civile [K], a continué d'exécuter les clauses et conditions du bail dont cette dernière était titulaire.

La SASU [K] Pépinière argue à titre subsidiaire de l'agrément tacite des bailleurs, faisant valoir que ceux-ci ne se sont jamais opposés aux paiements des fermages effectués par elle depuis 2001. Elle ajoute que l'indivision avait été informée de ce qu'elle était sa locataire, aux termes de l'acte authentique de partage dressé par Maître [Y], Notaire, et fait valoir qu'en signant cet acte de partage, les héritiers bailleurs ont agréé de manière expresse à la cession.

Les Consorts [L]/ [P] font pour leur part valoir que la SASU [K] Pépinière n'est pas issue de la transformation de la société civile [K], titulaire du bail, mais a été constituée ex nihilo, bénéficiant d'un apport partiel d'actif appartenant à la société civile [K], cette dernière ayant été radiée du RCS le 27 novembre 2011, de sorte que la SASU [K] Pépinière est bien une nouvelle société, nonobstant son appartenance au Groupe [K], ce qui justifie le caractère prohibé de la cession du bail.

Ils contestent en tout état de cause tout agrément à la cession du droit au bail, résultant de l'acte notarié de partage, et de l'acceptation des paiements des fermages.

Il résulte du contrat de bail initial versé aux débats que le preneur était la société civile [K].

Le 1er chapitre du bail, intitulé 'obligations du preneur', précise que le preneur ne doit procéder à aucune cession de bail, ni à aucune sous-location, même partielle, sauf exceptions listées, nécessitant l'agrément préalable du bailleur ou du Tribunal paritaire.

L'extrait KBIS de la SASU [K] Pépinière, immatriculée au Registre du commerce et des sociétés le 26 décembre 2000, fait mention de la précision suivante, effectuée le 7 janvier 2002: 'apport partiel d'actif d'une branche d'activité de pépinière par la société civile [K].'.

Il convient toutefois de relever qu'il n'est justifié d'aucun élément relatif aux modalités de cet apport.

La Cour observe en outre que la société civile [K] a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 27 novembre 2001, alors que la SASU [K] Pépinière a été immatriculée onze mois auparavant, le 26 décembre 2000.

Il s'ensuit que la SASU [K] Pépinière ne peut, contrairement à ce qu'affirme l'appelante sans produire la moindre pièce, résulter de la transformation de la société civile [K], et constitue bien une personne morale nouvelle et différente.

La société civile [K] a ainsi fait un apport de droit au bail à une autre personne morale, la SASU [K] Pépinière, sans solliciter l'accord préalable du bailleur.

L'appelante argue à titre subsidiaire de l'agrément des bailleurs, du fait de l'encaissement des fermages versés par elle, et de la précision contenue dans l'acte notarié de partage quant à sa qualité de locataire des parcelles louées.

Il est cependant constant que l'acceptation par un bailleur, même durant plusieurs années, du paiement des fermages par le cessionnaire du bail, ne suffit pas à elle seule à caractériser une manifestation claire et non équivoque du bailleur à la cession.

Quant à l'acte notarié, il convient de relever que s'il mentionne dans le rappel de la situation locative des biens partagés, que certains étaient loués à la Société [K] Pépinière, il ne précise rien quant à la nature juridique de cette société.

Il ne peut en tout état de cause être tiré argument de ce que les indivisaires ont acquiescé à cet acte de partage mentionnant la location de certaines parcelles à la Société [K] Pépinière, sans plus de précisions, pour caractériser leur agrément à la cession du bail par la Société civile [K] à la SASU [K] Pépinière.

C'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont prononcé la résiliation du bail conclu initialement entre Mme [C] épouse [L], et la société civile [K] en retenant l'existence d'une cession de droit au bail non autorisée, et débouté la SASU [K] Pépinière de ses demandes reconventionnelles.

La décision entreprise sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes

La SASU [K] Pépinière, succombant en ses demandes, supportera la charge des entiers dépens de la présente instance.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [P] [L], M. [S] [P], M. [I] [P] et M. [U] [P], la part des frais non compris dans les dépens, et il convient en conséquence de condamner la SASU [K] Pépinière au paiement d'une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 30 décembre 2016 par le Tribunal paritaire des baux ruraux,

Y ajoutant,

Condamne la SASU [K] Pépinière au paiement d'une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SASU [K] Pépinière aux entiers dépens de l'instance.

Le présent arrêt a été signé par Eric Veyssière, Président et par Gwenaël Tridon de Rey, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 17/00560
Date de la décision : 03/05/2018

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°17/00560 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-03;17.00560 ?
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