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07/03/2018 | FRANCE | N°15/04638

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 07 mars 2018, 15/04638


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 07 MARS 2018



(Rédacteur : Madame Catherine DUPOUY DE GORDON, Présidente)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 15/04638







Monsieur [U] [F]



c/



SARL Shékina Réseau Sécurité venant aux droits de Monsieur [L] [L] exerçant sous l'enseigne 'Shekina Réseau Sécurité'















Nature de la décisio

n : AU FOND













Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greff...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 07 MARS 2018

(Rédacteur : Madame Catherine DUPOUY DE GORDON, Présidente)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 15/04638

Monsieur [U] [F]

c/

SARL Shékina Réseau Sécurité venant aux droits de Monsieur [L] [L] exerçant sous l'enseigne 'Shekina Réseau Sécurité'

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 juin 2015 (R.G. n°F 14/00625) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 21 juillet 2015,

APPELANT et intimé :

Monsieur [U] [F]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 1], de nationalité Africaine, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Magali BISIAU, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE et appelant par déclaration d'appel 23 juillet 2015 :

SARL Shékina Réseau Sécurité venant aux droits de Monsieur [L] [L] exerçant sous l'enseigne 'Shekina Réseau Sécurité' prise en la personne de son gérant M. [L] domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]

représentée par M. [L] en personne

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 janvier 2018 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente chargée d'instruire l'affaire et Madame Annie Cautres, conseillère,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente

Madame Nathalie Pignon, présidente

Madame Annie Cautres, conseillère

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [U] [F] a été engagé par Monsieur [L] exerçant sous l'enseigne SHEKINA RÉSEAU SÉCURITÉ, selon contrat de travail à durée indéterminée, signé le 1er octobre 2013, en qualité d'agent de sécurité et gardiennage.

Il n'a passé aucune visite médicale d'embauche.

La relation de travail s'est interrompue le 31 janvier 2014, sans procédure de licenciement.

Le 3 mars 2014, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux, aux fins notamment de voir :

- juger son licenciement abusif et irrégulier,

- condamner son ex-employeur à lui verser diverses sommes à titre d'indemnité ainsi que de dommages et intérêts, outre différentes demandes accessoires.

Par jugement du 30 juin 2015, le conseil de prud'hommes de Bordeaux, section activités diverses, a :

- condamné M. [L] à verser à M. [F] les sommes de :

* 500 € à titre d'indemnité de préavis, outre 50 € à titre de congés payés afférents,

* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière,

* 500 € à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche,

* 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit, dans la limite de neuf mois de salaire, calculés sur la moyenne des trois dernier mois, et l'a ordonnée pour le surplus sur la moitié des dommages et intérêts, soit 1.000€,

- condamné M. [L] à régulariser les charges sociales sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la date de notification, le Conseil

se.réservant la liquidation de l'astreinte

M. [F] a interjeté appel de cette décision le 21 juillet 2015 (instance n° 15/4638).

M. [L] a également interjeté appel de la décision le 28 juillet 2015 (instance n° 15/4840).

Les deux instances on été jointes le 12 août 2015 sous le n° 15/4638.

Par courrier du 23 décembre 2017, M. [L] a fait connaître que l'entreprise qu'il dirigeait depuis 2013 en statut d'entreprise individuelle avait changé de statut juridique depuis le 20 novembre 2017 et qu'elle était devenue une SARL en conservant son appellation d'origine. Il a joint à son courrier les extraits Kbis justifiant de la modification intervenue.

Par conclusions déposées le 29 décembre 2017 et développées oralement à l'audience, M. [F] conclut demande à la cour, à titre principal :

- de juger que la SARL Shékina Réseau Sécurité vient aux droits de M. [L] [L],

- de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SARL Shékina Réseau Sécurité à verser à M. [F] la somme de 2000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et irrégulier, la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour absence de passage une visite médicale auprès de la médecine du travail ainsi que dans les dispositions relatives au principe du préavis et des congés payés sur préavis,

- en revanche, de réformer le jugement en ce qui concerne le montant des condamnations prononcées de ce chef en condamnant la SARL Shékina Réseau Sécurité à lui verser la somme de 407,84 euros au titre du préavis et celle de 40,78 euros au titre des congés payés sur préavis,

- de le réformer également en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé et de condamner de ce chef la SARL Shékina Réseau Sécurité à lui verser la somme de 9.788,22 € au titre de l'article L.8223-1 du code du travail,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SARL Shékina Réseau Sécurité à lui verser la somme de 900 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner l'intimée à lui verser, en cause d'appel, la somme de 2000 € de ce même chef outre les dépens.

A titre subsidiaire, il reprend les mêmes demandes, formulées à l'encontre de M. [L] et demande en toute hypothèse que les condamnations produisent intérêts à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.

Par conclusions déposées le 3 avril 2017 au nom de M. [L] et de la société Shekina Réseau Sécurité, M. [L] expose les éléments de son argumentation, qu'il a également développés oralement à l'audience, aux termes desquels il maintient les explications données au cours des différentes audiences et indique avoir effectivement remis à M. [F] un contrat de travail à durée indéterminée.

Il demande toutefois que les sommes qui ont pu être accordées à celui-ci soient retirées compte tenu des compromis et arrangements qui avaient pu intervenir entre eux. M. [L] conteste le travail dissimulé. Il ajoute n'avoir pu suivre une procédure de licenciement car M. [F] ne répondait pas aux courriers.

En ce qui concerne la création de la Sarl, M. [L] indique que tous les salariés ont été transférés à la nouvelle société dont il est le gérant.

Enfin, il sollicite une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile compte tenu de ses déplacements en raison de la procédure.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au vu des justificatifs communiqués par M. [L], l'activité de sécurité et gardiennage qu'il exerçait à titre individuel jusqu'au 20 novembre 2017, sous l'enseigne Shékina Réseau Sécurité, a été entièrement transférée à la SARL Shékina Réseau Sécurité, dont il est le gérant, et qui a commencé son activité le 20 novembre 2017.

M. [L] a d'ailleurs indiqué à l'audience que tous les salariés avaient été transférés à la nouvelle société.

Dans ces conditions, d'une part il sera donné acte à M. [L] et à la SARL Shékina Réseau Sécurité de ce que celle-ci vient aux droits de l'employeur initial de M. [F] et d'autre part, l'action du salarié à l'encontre de la SARL Shékina Réseau Sécurité sera déclarée recevable, bien que le contrat de travail ait été rompu avant le transfert d'activité, dès lors que les demandes de M. [F] sont nées à l'occasion de l'activité ultérieurement transférée.

*

Sur la visite médicale d'embauche

Ainsi que le rappelle M. [F] et le conseil de prud'hommes dans son jugement du 30 juin 2015, il s'agit d'une obligation incombant à l'employeur par application des dispositions de l'article R4624-10 du code du travail, étant observé en outre que le contrat de travail en faisait expressément mention.

À défaut d'avoir fait procéder à cette visite médicale, l'employeur est tenu d'indemniser le préjudice subi par le salarié. Il apparaît toutefois que M. [F] ne donne aucune explication circonstanciée à ce sujet de sorte que l'indemnisation du préjudice résultant du fait que son aptitude physique n'a pas été vérifiée sera limitée à une somme de 200 euros.

Sur le licenciement et ses conséquences

Il résulte clairement du contrat de travail signé par les parties le 1er octobre 2013 qu'il s'agissait d'un contrat de travail à durée indéterminée, à temps complet, avec dispense de la période d'essai.

Il résulte par ailleurs du certificat de travail signé le 3 février 2014 par M. [L] [L] que la relation de travail s'est terminée le 31 janvier 2014.

Certes, M. [L] a établi l'attestation destinée à pôle emploi en mentionnant au titre du motif de la rupture du contrat de travail, ' fin de contrat à durée déterminée' mais que ce document n'est pas susceptible de mettre fin de façon régulière à la relation de travail résultant d'un contrat à durée indéterminée.

Il appartenait à M. [L], en sa qualité d'employeur, de se conformer aux procédures prévues par le code du travail, s'il estimait devoir mettre un terme au contrat de travail le liant à M. [F] et le fait, affirmé par M. [L], que ce dernier ne répondait pas aux courriers, n'est pas susceptible de le dispenser de ses obligations d'employeur.

En conséquence, le licenciement intervenu en dehors de toute procédure régulière est nécessairement dépourvue de cause réelle et sérieuse de sorte que, par application des dispositions de l'article L 1235-5 du code du travail, le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a accordé de ce chef à M. [F], en réparation de son préjudice compte tenu des circonstances de la rupture du contrat, une somme de 2000 € à titre de dommages intérêts.

Au vu du solde de tout compte, aucune somme n'a été réglée au titre d'un préavis de sorte que le jugement du conseil de prud'hommes sera également confirmé sur le principe de ses dispositions à cet égard, sauf à ramener le montant des sommes accordées, sur la base d'un salaire brut mensuel moyen de 1435,31 euros, au vu des bulletins de salaires produits, à la somme de 358,83 euros au titre de l'indemnité de préavis et à la somme de 35,88 euros au titre des congés payés afférents.

Sur le travail dissimulé

En vertu de l'article L8221-5, 2° du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié notamment le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

La dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle et dans ce cas, le salarié, en cas de rupture de la relation de travail, a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Il importe peu à cet égard que l'employeur ait ensuite régularisé ou non sa situation à l'égard des organismes sociaux.

En l'espèce, il résulte des déclarations de M. [L] devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes qu'il a effectivement rémunéré M. [F] sur la base d'un salaire brut de l'ordre de 1700 € par mois sans régler la totalité des charges dues aux organismes sociaux. Il n'a d'ailleurs pas contesté devant la cour avoir versé à M. [F] des sommes supérieures à celles mentionnées sur les bulletins de salaire, indiquant qu'il aurait rémunéré le salarié plus qu'il n'aurait dû parce que celui-ci en avait vraiment besoin.

Il n'en demeure pas moins que les bulletins de salaires des mois de novembre 2013 et décembre 2013 font ainsi apparaître respectivement un salaire net à payer de 590,99 euros et 603,34 euros en raison de jours d'absence non rémunérés de sorte que la base de calcul des cotisations se trouvait également réduite à due concurrence. Il en a été de même au mois de janvier 2014.

Le caractère systématique de ce mode de fonctionnement révèle l'élément intentionnel de la dissimulation opérée afin de réduire le montant des charges sociales, quand bien même M. [F] aurait perçu la rémunération qui lui revenait voire plus selon les déclarations de son employeur.

Dès lors, la SARL Shékina Réseau Sécurité, en tant qu'elle vient aux droits de M. [L], sera condamnée à verser à M. [F] l'indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire soit, sur la base de la somme mensuelle de 1435,31 euros, une

indemnité d'un montant de 8611,86 euros.

Sur les intérêts légaux

Il sera rappelé que seules les condamnations au paiement de sommes ayant le caractère de créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les créances à caractère indemnitaire produisent quant à elles intérêts au taux légal à compter du jugement en ce qui concerne les sommes confirmées et à compter du présent arrêt en ce qui concerne les sommes chiffrées par celui-ci.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les dispositions du jugement du conseil de prud'hommes sur ce point ne seront pas confirmées.

Devant la cour d'appel, il est fait droit à la plupart des demandes de M. [F] de sorte que les dépens seront mis à la charge de la SARL Shékina Réseau Sécurité, venant aux droits de M. [L]. Celle-ci ne pourra en conséquence, pas plus que M. [L] lui-même, bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche, une nouvelle somme de 800 € sera accordée à M. [F] de ce chef au titre de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

Donne acte à M. [L] et à la SARL Shékina Réseau Sécurité de ce que celle-ci vient aux droits de l'employeur initial de M. [F],

Déclare en conséquence M. [F] recevable en ses demandes principales formulées à l'encontre de la SARL Shékina Réseau Sécurité en ce qu'elle vient aux droits de M. [L] [L],

Confirme le jugement du 30 juin 2015 dans toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité de préavis, de l'indemnité de congés payés sur préavis et des dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche, et sauf à préciser que les condamnations sont mises à la charge de la SARL Shékina Réseau Sécurité, venant aux droits de M. [L] [L],

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

Condamne la SARL Shékina Réseau Sécurité, venant aux droits de M. [L] [L], à verser à M. [U] [F] :

- la somme de 200 € à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche,

- la somme de 358,83 euros au titre de l'indemnité de préavis et la somme de 35,88 euros au titre des congés payés afférents,

- la somme de 8611,86 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

Rappelle que seules les condamnations au paiement de sommes ayant le caractère de créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les créances à caractère indemnitaire produisent quant à elles intérêts au taux légal à compter du jugement en ce qui concerne les sommes confirmées et à compter du présent arrêt en ce qui concerne les sommes chiffrées par celui-ci,

Condamne la SARL Shékina Réseau Sécurité, venant aux droits de M. [L] [L], à verser à Monsieur [U] [F] la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Shékina Réseau Sécurité, venant aux droits de M. [L] [L], aux dépens.

Signé par Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente et par Anne-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Catherine Dupouy de Gordon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 15/04638
Date de la décision : 07/03/2018

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°15/04638 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-07;15.04638 ?
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