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10/01/2018 | FRANCE | N°15/04588

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 10 janvier 2018, 15/04588


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 10 JANVIER 2018



(Rédacteur : Madame Isabelle LAUQUE, Conseiller,)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 15/04588







SAS LOOMIS FRANCE



c/



Madame [H] [X]

















Nature de la décision : AU FOND













Notifié par LRAR le :



LRAR

non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 juillet 20...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 10 JANVIER 2018

(Rédacteur : Madame Isabelle LAUQUE, Conseiller,)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 15/04588

SAS LOOMIS FRANCE

c/

Madame [H] [X]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 juillet 2015 (R.G. n°F 13/03303) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 16 juillet 2015,

APPELANTE :

SAS Loomis France, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 479 048 597 RCS Bobigny

représentée par Me Arnaud SAINT LEGER de la SCP SAINT LEGER ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Madame [H] [X]

née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 1], de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Thibault SAINT MARTIN substituant Me Xavier DELAVALLADE de la SCP DGD, avocats au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue 13 novembre 2017 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente

Madame Isabelle Lauqué, conseillère

Madame Annie Cautres, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Madame [H] [X] a été embauchée par la Société VALIANCE FIDUCIAIRE par contrat de travail à durée déterminée du 12 août 2002, puis en contrat de travail à durée indéterminée selon avenant du 26 mars 2003, en qualité d'agent administratif, statut employé, coefficient 120 de la convention collective nationale étendue des Transports-.

Le 1er octobre 2004, son contrat de travail a été transféré à la société SECURITAS Transport de fonds, devenue la SAS LOOMIS France.

À compter du 9 mars 2005, Mme [X] a été reconnue invalide et a bénéficié d'une pension d'invalidité de catégorie 1, puis, à compter du 1er juillet 2012, de catégorie 2.

Elle a sollicité auprès de son employeur le bénéfice d'une rente d'invalidité complémentaire due en vertu du contrat de prévoyance souscrit par ce dernier auprès de la Compagnie d'assurance AG2R mais par courrier du 10 mai 2011, cette dernière l'a informée de son refus de donner une suite favorable à sa demande formulée plus de 5 ans après la décision d'invalidité initiale.

Le 4 août 2012, la SAS LOOMIS France a licencié Mme [X] en lui reprochant ne pas avoir justifié de son absence dans un délai de 72h et d'avoir de ce fait 'désorganisé cruellement le planning de l'agence'.

Le 14 septembre 2012, Mme [X] et son employeur ont conclu une transaction pour mettre fin au litige né de la mesure de licenciement prévoyant le versement d'une indemnité transactionnelle de 2.432 € à titre de dommages et intérêts au bénéfice de Mme [X] qui, en contre partie renonçait à toutes autres prétentions.

Le 21 novembre 2013, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux pour demander la condamnation de la SAS LOOMIS France au paiement de sommes correspondant à la capitalisation de la rente qu'elle aurait dû percevoir de la Compagnie AG2R au titre de la rente invalidité complémentaire outre des dommages et intérêts.

Par jugement du 3 juillet 2015, le conseil de prud'hommes de Bordeaux a condamné la SAS LOOMIS France à payer à Mme [X] les sommes de :

- 64.770,07 € au titre de la rente d'invalidité qu'elle aurait dû percevoir de l'AG2R sur la période du 1er avril 2005 jusqu'au 1er juillet 2012,

- 8.181,51 € au titre de la portabilité de cet avantage,

- 5.000 € à titre de dommages et intérêts,

- 850 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et frais éventuels d'exécution.

La SAS LOOMIS France a interjeté appel de cette décision le 20 juillet 2015.

Par conclusions récapitulatives déposées le 29 septembre 2017, développées oralement à l'audience auxquelles la Cour se réfère expressément, la SAS LOOMIS France conclut à la réformation du jugement attaqué.

Elle demande à la Cour de constater que Mme [X] est irrecevable en ses demandes et à titre subsidiaire de la débouter de l'ensemble de ses prétentions.

Elle fait valoir qu'en signant la transaction du 14 septembre 2012, elle a expressément renoncé à ses droits à ce titre dès lors qu'elle était informée du refus de la Compagnie AG2R dès 2011.

Sur le fond, elle soutient que Mme [X] ne l'avait pas informée dans les temps de son placement en invalidité et qu'elle n'a rien sollicité pendant le délai de 5 ans qui était ouvert.

A titre subsidiaire, elle avance que Mme [X] ayant contribué à la perte de son droit à une rente complémentaire, ses demandes devront être limitées à la somme de 32.385,35 euros correspondant à la capitalisation de la rente et à la seule somme de 8.181,51 euros au titre de la portabilité de la prévoyance.

Par conclusions déposées le 24 août 2017 et développées oralement à l'audience auxquelles la Cour se réfère expressément, Mme [X] demande à la Cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la SAS LOOMIS France à lui payer la somme de 64.770,07 € au titre de la rente d'invalidité qu'elle aurait dû percevoir de l'AG2R sur la période du 1er avril 2005 jusqu'au 1er juillet 2012 et la somme de 8.181,51 € au titre de la portabilité de cet avantage.

Elle conclut à sa réformation pour le surplus et réclame le paiement d'une somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts et de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle réplique que la transaction n'a réglé que la contestation relative à son licenciement et qu'en conséquence, sa demande est recevable.

Enfin, elle soutient que son employeur était informé dès 2005 de son placement en invalidité et qu'en s'abstenant de constituer le dossier auprès de la Compagnie AG2R, la SAS LOOMIS France a commis une faute l'obligeant à payer des dommages et intérêts correspondant aux indemnités complémentaires perdues.

Elle invoque enfin un préjudice important né de la perte de ses droits complémentaires et de sa situation pour réclamer des dommages et intérêts supérieurs à ceux alloués en première instance.

DISCUSSION

-Sur la recevabilité des demandes de Mme [X]

En application des articles 2044 et 2048 du code civil, la transaction, contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître, se renferme dans son objet.

Elle emporte donc renonciation des parties signataires à faire valoir en justice les droits et prétentions sur lesquels porte l'accord.

L'article 2049 du même code précise que la transaction ne règle que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.

Il s'évince de ce texte que l'effet de la transaction est limité à la contestation que les parties ont entendu régler et qu'une formule de renonciation très large ne peut avoir pour conséquence de priver une des parties de son droit de faire valoir une prétention fondée sur une contestation distincte de celle réglée par la transaction.

En l'espèce, la transaction signée entre Mme [X] et la SAS LOOMIS France le 14 septembre 2012 précise l'étendue de la contestation qu'elle règle, dans les termes suivants :

'Madame [H] [F] contestait la mesure prise à son encontre, estimant que le motif évoqué d'absence injustifiée qualifié de faute grave, était excessive puisqu'elle était absente depuis déjà plusieurs mois et que cette absence ne pouvait désorganiser le service.

Madame [H] [F] estimait que le motif de son licenciement qualifié de faute grave, était de nature à lui causer un préjudice moral et financier qu'il convenait de réparer. Elle précisait que cette qualification pouvait être retenue par un nouvel employeur et que compte tenu des conditions actuelles d'emploi, de son age et de son état de santé elle aurait vraisemblablement des difficultés à retrouver du travail. Elle demandait de requalifier la faute en cause réelle et sérieuse.

Pour sa part, la société confirmait que le comportement de Madame [H] [F] n'était pas admissible.

En effet, il ne peut être toléré de la part du salarié le refus de se conformer aux dispositions légales et conventionnelles de justifier de son absence dans un délai de 72 heures et que cette absence désorganisait cruellement le planning de l'agence.

La société ajoutait que le refus de Madame [H] [F] de se conformer aux dispositions légales et conventionnelles rendait impossible la poursuite de l'activité de Madame [H] [F] en son sein.

Elle précisait que l'argumentation de Madame [H] [F] dénotait une véritable méconnaissance de ses obligations et une insubordination caractérisée.

La société maintenait ainsi sa position, quant à la réalité des faits reprochés au salarié, motivant le licenciement de Madame [H] [F].

Les parties soussignées se sont alors rapprochées, et après discussions et concessions mutuelles ont décidé de mettre définitivement fin aux litiges ayant existé entre elles par une formule transactionnelle.'

Ainsi, il résulte de ce préambule à la transaction que la seule contestation que les parties ont soumis à leur discussion est celle du licenciement de Mme [F] - [X].

Aussi, l'étendue de la renonciation prévue à l'article 3 de la transaction 'à toutes autres prétentions en nature ou en argent relatives tant à l'exécution qu'à la rupture de son contrat de travail, et d'une manière plus générale pour quelque cause que ce soit', en ce qu'elle porte sur des prétentions pouvant être fondées sur une contestation distincte de celle du licenciement et qui ne sont pas expressément prévues par la transaction, ne peut faire obstacle à la recevabilité de la demande de Mme [X] fondée sur la faute de l'employeur.

En conséquence, constatant que la transaction signée le 14 septembre 2012 entre Mme [X] et la SAS LOOMIS France ne portait que sur la contestation du licenciement de la salariée, la Cour juge que la renonciation générale de Mme [X] à toutes autres demandes même distinctes de l'objet de la transaction ne peut valablement faire obstacle à sa demande fondée sur la faute de l'employeur à l'origine de la perte de son droit à obtenir une rente complémentaire d'invalidité.

Dès lors, la demande de Mme [X] sera déclarée recevable.

-Sur les demandes de Mme [X] formée au titre de la perte de son droit à bénéficier d'une rente complémentaire d'invalidité

Il n'est pas contesté que l'employeur de Mme [X] a souscrit auprès de la Compagnie AG2R un contrat de prévoyance au bénéfice de ses salariés leur permettant de percevoir notamment une rente d'invalidité complémentaire et qu'il lui incombait de constituer le dossier de demande de prestations.

Cette obligation faite à l'employeur est nécessairement subordonnée à la démonstration qu'il avait connaissance de la reconnaissance de l'invalidité de son salarié tenu de porter cette information à sa connaissance.

Dès lors, l'employeur qui, informé de la situation d'invalidité de son salarié, ne procède pas aux diligences qui lui incombe et qui de ce fait, prive son salarié du bénéfice d'un avantage qui lui était acquis, doit l'indemniser de son entier préjudice.

En l'espèce, il est justifié du classement en invalidité catégorie 1 de Mme [X] à compter du 1er avril 2005.

Si la décision de classement n'a pas été notifiée à l'employeur, en revanche, en produisant la fiche d'aptitude de la médecine du travail en date du 4 avril 2005 qui précise ' apte à temps partiel (invalidité cat 1 ) 22 h par semaine à repartir sur 5 jours - travail de préférence le matin' Mme [X] établit que son employeur a eu connaissance de son invalidité dès cette date.

En effet, cette fiche mentionne qu'un exemplaire de cette fiche d'aptitude était réservé à l'employeur et d'autre part, il apparaît que les préconisations du médecin du travail mentionnées sur cette fiche ont été prises en compte par l'employeur dans l'avenant au contrat de travail de la salariée du 22 avril 2005.

Dès lors, la Cour considère, comme le Conseil, que l'employeur a eu connaissance de la reconnaissance d'invalidité catégorie 1 de Mme [X] dès le mois d'avril 2005 et qu'il lui incombait en conséquence de constituer le dossier de demande de prestations auprès de la Compagnie AG2R au titre du contrat de prévoyance.

La défaillance de l'employeur de l'époque aux droits duquel vient la SAS LOOMIS France a fait perdre à Mme [X] le bénéfice d'une rente complémentaire d'invalidité pour la période comprise entre avril 2005 et un délai de 9 mois maximum après la rupture du contrat de travail.

Le préjudice de Mme [X] est donc parfaitement déterminé et correspond à la perte de ses droits qui s'élèvent à la somme totale de 72.951,58 euros soit 64.770,07 euros outre la somme de 8.181,51 euros.

En conséquence, la Cour confirme la décision du Conseil en ce qu'il a condamné la SAS LOOMIS France à payer ces sommes à Mme [X] qui lui sont allouées à titre de dommages et intérêts.

-Sur les autres demandes

Mme [X] ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui réparé par l'allocation de dommages et intérêts la remplissant de l'équivalent des droits perdus.

En conséquence, réformant la décision des premiers juges, la Cour déboute Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires.

La SAS LOOMIS France sera condamnée à payer à Mme [X] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

LA COUR

Réforme la décision attaquée en ce qu'elle a condamné la SAS LOOMIS France à payer à Mme [X] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts formée au titre de la privation de son complément de salaire ;

Confirme le jugement attaqué en toutes ses autres dispositions ;

Y ajoutant

Condamne la SAS LOOMIS France à payer à Mme [X] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SAS LOOMIS France aux dépens.

Signé par Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente et par Anne-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Catherine Dupouy de Gordon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 15/04588
Date de la décision : 10/01/2018

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°15/04588 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-01-10;15.04588 ?
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