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06/12/2017 | FRANCE | N°15/05124

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 06 décembre 2017, 15/05124


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 06 DÉCEMBRE 2017



(Rédacteur : Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 15/05124







Monsieur [I] [N]

Madame [X] [T]

Madame [S] [P]

Monsieur [V] [Q] [V]

Madame [K] [Z] épouse [B]



Syndicat SUD GROUPE BPCE



c/



GIE IT-CE











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Nature de la décision : AU FOND











Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Gr...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 06 DÉCEMBRE 2017

(Rédacteur : Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 15/05124

Monsieur [I] [N]

Madame [X] [T]

Madame [S] [P]

Monsieur [V] [Q] [V]

Madame [K] [Z] épouse [B]

Syndicat SUD GROUPE BPCE

c/

GIE IT-CE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 juin 2013 (R.G. n°F10/1843) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 11 juillet 2013,

APPELANTS :

Monsieur [I] [N]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]

Monsieur [V] [Q] [V]

né le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 2], demeurant [Adresse 2]

Madame [K] [Z] née [B]

née le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 3], demeurant [Adresse 3]

assistés de Me Apolline ARQUIER, substituant Me Stéphane DUCROCQ, avocats au barreau de LILLE,

Madame [X] [T]

née le [Date naissance 4] 1952 à [Localité 4], demeurant [Adresse 4]

Madame [S] [P]

née le [Date naissance 5] 1959 à [Localité 3], demeurant [Adresse 5]

représentées par Me Apolline ARQUIER, substituant Me Stéphane DUCROCQ, avocats au barreau de LILLE,

Syndicat SUD GROUPE BPCE, pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 6]

représenté par Me Apolline ARQUIER, substituant Me Stéphane DUCROCQ, avocats au barreau de LILLE,

INTIMÉ :

GIE IT-CE venant aux droits du GIE GCE Technologies, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 7]

représenté par Me Jean-Marc CHONNIER, avocat au barreau de BAYONNE

***

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue 23 octobre 2017 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente

Madame Isabelle Lauqué, conseillère

Madame Annie Cautres, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le GIE IT-CE appartient actuellement au groupe BPCE.

Il assure les activités de maîtrise d'oeuvre informatique pour les adhérents du groupement, dont les Caisses d'Epargne, la Sa BPCE et des filiales appartenant au groupe BPCE.

Les salariés du GIE IT-CE bénéficient du statut collectif applicable au personnel des Caisses d'Epargne.

Le 19 décembre 1985, un accord collectif a prévu notamment l'octroi aux salariés de trois primes, une prime de durée d'expérience, une prime familiale et une prime de vacances, outre une gratification de fin d'année.

Le 20 juillet 2001, la Caisse Nationale des Caisses d'Epargne a dénoncé l'accord de 1985 ainsi qu'un accord du 8 janvier 1987 relatif à la définition d'une rémunération effective et minimale.

La dénonciation est devenue effective à l'issue d'un délai de survie de 15 mois, soit le 22 octobre 2002, faute d'accord de substitution, et les avantages individuels acquis ont été incorporés au contrat de travail.

Puis le 11 décembre 2003, un accord a été conclu, définissant une rémunération annuelle minimale (RAM).

Le 28 juin 2010, six salariés ont saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux afin d'obtenir, à titre principal, la condamnation de l'employeur à procéder à la réécriture des bulletins de salaire depuis novembre 2002, sous astreinte, ainsi qu'à leur verser différents rappels de primes, avec intérêts.

Le syndicat Sud Groupe BPCE est intervenu volontairement et a sollicité, à titre principal, des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Par jugement du 13 juin 2013, le conseil de prud'hommes a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de rappel de gratification de fin d'année, a jugé que les demandeurs avaient été pleinement remplis de leurs droits à primes, devenues des avantages individuels acquis, dont le montant a définitivement été figé à la suite de la dénonciation des accords les sous-tendant, a débouté en conséquence les demandeurs et le syndicat Sud Groupe BPCE de l'intégralité de leurs demandes, a débouté le GIE IT-CE de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné les demandeurs aux dépens.

Le 12 juillet 2013, les six demandeurs et le syndicat Sud Groupe BPCE ont relevé appel de la décision.

Par un courrier reçu le 25 juillet 2013, Mme [R] [I] a fait connaître qu'elle souhaitait se désister purement et simplement.

Par arrêt du 27 mai 2014, l'affaire a été radiée pour défaut de diligence, en l'absence de conclusions des parties dans les délais impartis.

Le 7 juillet 2014, les cinq salariés maintenant leur appel et le syndicat Sud Groupe BPCE ont conclu et ont demandé la réinscription de l'affaire.

Le GIE IT-CE a également conclu le 12 janvier 2015.

Le 5 février 2015, les appelants ont déposé des conclusions récapitulatives et responsives.

Puis, à l'audience du 9 février 2015, les parties ont, d'un commun accord, sollicité le retrait du rôle et un arrêt de retrait du rôle a en conséquence été rendu le 18 février 2015.

Le 3 août 2015, M. [I] [N], Mme [X] [T], Mme [S] [P], M. [V] [Q] [V] et Mme [K] [Z] née [B] ainsi que le syndicat Sud Groupe BPCE ont de nouveau demandé la réinscription de l'affaire à laquelle il a été procédé sous le numéro 15/5124.

Des conclusions individuelles ont été déposées et les appelants ne s'y sont référés à l'audience du 23 octobre 2017, en ce qui concerne les demandes chiffrées.

L'ensemble des appelants et le syndicat Sud Groupe BPCE ont en outre déposé des conclusions récapitulatives et responsives auxquelles ils se sont également référé au cours de leur plaidoirie le 23 octobre 2017.

Ils demandent à la cour :

- d'ordonner à l'employeur de réécrire les bulletins de salaires en faisant apparaître sur des lignes distinctes le salaire et les primes de vacances, de durée d'expérience et familiale, le tout sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

- de condamner l'employeur, compte tenu de sa résistance abusive, au paiement d'une somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié,

- de condamner l'employeur au paiement d'un rappel de salaire afférent aux différentes primes tel que décrit par chaque demandeur dans le cadre de ses conclusions individuelles, outre les congés payés y afférents,

- de condamner l'employeur au paiement d'une somme de 10'000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié compte tenu du non paiement des primes,

- de le condamner à appliquer ces paiements pour la période postérieure à l'arrêté du chiffrage,

- de le condamner au paiement des intérêts de retard,

- de le condamner à payer au syndicat Sud la somme de 10'000 € à titre de dommages et intérêts par application des dispositions de l'article L2132-3 du code du travail,

- de le condamner à verser la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'adjuger à chaque concluant le bénéfice de ses demandes et écritures individuelles telles que déposées concomitamment aux conclusions générales.

Les appelants précisent qu'au vu des arrêts rendus par la cour de Cassation à cet égard, ils renoncent à formuler des demandes concernant le paiement d'un 13e mois et d'un rappel de salaire afférent à la RAM.

Par conclusions à nouveau transmises le 23 octobre 2017, reprenant les conclusions transmises le 12 janvier 2015, le GIE IT-CE demande quant à lui à la cour de débouter les appelants de l'intégralité de leurs demandes, de condamner chaque salarié à lui rembourser des salaires indûment perçus à savoir la part des augmentations générales annuelles calculées sur la base du montant de la prime familiale, de la prime d'expérience et de la prime de vacances ainsi qu'une partie de la part variable indûment perçue par les salariés demandeurs à savoir, pour M. [N], la somme de 2294,64 euros, pour Mme [T], la somme de 1649,36 euros, pour Mme [P], la somme de 2407,81 euros, pour Mme [S], la somme de 946,92 euros, pour M. [V], la somme de 2647,67 euros et pour Mme [B]-[Z], la somme de 2407,81 euros et de les condamner respectivement, ainsi que le syndicat Sud Groupe BPCE à verser la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En revanche, le GIE IT-CE a précisé qu'il ne soulevait plus la prescription des salaires dans la mesure où ce point a été tranché par la cour de Cassation.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux écritures déposées et oralement reprises.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera en premier lieu donné acte aux appelants de ce qu'ils renoncent à formuler des demandes concernant le paiement d'un 13e mois et d'un rappel de salaire afférent à la RAM.

D'ailleurs, si des chiffres apparaissent sur les tableaux de décompte en ce qui concerne la gratification de fin d'année, la part variable et la prime d'intéressement, il sera constaté qu'aucune demande de condamnation ne figure plus de ces différents chefs dans les dernières conclusions individuelles.

Il sera également donné acte au GIE IT-CE de ce qu'il ne soulève plus la prescription quinquennale en ce qui concerne la prescription des salaires.

Il en résulte que le jugement du conseil de prud'hommes sera infirmé en ce qu'il avait déclaré les demandes au titre de la gratification de fin d'année irrecevables au motif que les demandes n'avaient pas été introduites dans le délai de cinq ans à compter du mois de décembre 2002 mais il sera constaté qu'aucune demande n'est plus formulée au fond en ce qui concerne cette gratification.

Ainsi que cela a été soulevé à l'audience, le GIE IT-CE conclut à l'égard des six appelants en cause, ainsi qu'à l'encontre de Mme [H] [S], qui n'est pas partie

à l'instance comme ne faisant pas partie des demandeurs figurant dans le jugement objet de l'appel et, par voie de conséquence, ne faisant pas partie des appelants.

Sur la réécriture des bulletins de salaire

Le GIE IT-CE ne conteste pas les effets de la décision du 1er juillet 2008 rendue par la Cour de Cassation, posant le principe du maintien de la structure de la rémunération, c'est-à-dire de lignes distinctes figurant sur les bulletins de salaires, correspondant aux différents éléments du salaire dont les primes, puisque la structure de la rémunération constitue un avantage individuel acquis lorsque la source conventionnelle qui l'a instituée est dénoncée sans accord de substitution.

En revanche, il se prévaut des dispositions de l'article L3243-4 du code du travail lui faisant obligation de conserver les bulletins de salaire pendant cinq ans de sorte qu'il ne pourrait lui être fait obligation de rectifier des bulletins qu'il n'est plus tenu de conserver.

Le GIE IT-CE observe par ailleurs que l'intégration des avantages individuels acquis (AIA) dans le salaire de base, sur la période pour laquelle la réédition est demandée, s'est avérée plus avantageuse pour les salariés puisque cette intégration a majoré l'assiette des augmentations générales.

Enfin, il fait valoir la très grande difficulté technique et matérielle qu'entraîne la régularisation des bulletins de salaires, l'obligation pour les salariés de justifier et d'indiquer clairement le montant des AIA dont ils demandent l'inscription et l'application du principe découlant d'un arrêt de la cour de cassation du 30 novembre 2010 selon lequel un rappel de primes dû sur plusieurs mois pourrait figurer sur un seul bulletin de paie établi lors du paiement.

Toutefois, la demande des salariés tendant à la réécriture des bulletins de salaires au titre de l'avantage individuel acquis relatif à la structure de la rémunération n'est pas de même nature que celle tendant un rappel de primes sur plusieurs mois, cas dans lequel effectivement un seul bulletin de salaire peut être émis lors du paiement du rappel.

La très grande difficulté technique et matérielle qu'entraînerait la régularisation des bulletins de salaires n'est pas une circonstance de nature à faire obstacle à la condamnation de l'employeur dès lors qu'il s'agit d'un droit pour le salarié et que c'est à l'employeur qu'il appartenait de ne pas y porter atteinte par l'intégration unilatérale des primes dans le salaire de base, ne permettant plus aucune vérification par le salarié. Il est également sans incidence sur ce point que l'intégration dans le salaire de base ait été ou non plus favorable.

Au vu des dernières conclusions individuelles et des conclusions générales, la demande de réécriture n'est pas formulée à compter d'une date précise.

Sur ce point, l'employeur fait valoir à juste titre qu'en application de l'article L3243-4 du code du travail, il doit conserver un double des bulletins de salaire pendant cinq ans, ce qui est d'ailleurs conforme au délai de prescription prévu à l'article L3245-1 du même code, dans la rédaction de ces textes applicable en l'espèce.

En conséquence de l'obligation légale faite à l'employeur de conserver un double des bulletins de salaire pendant cinq ans, il sera ordonné au GIE IT-CE de procéder à la délivrance de bulletins de paie rectifiés à compter du mois de juillet 2005, puisque la demande de réécriture a été formée devant le conseil de prud'hommes, saisi le 28 juin 2010, et qu'il appartenait dès lors à l'employeur, avisé de la demande, de conserver le double des bulletins de salaire qui étaient encore en sa possession compte tenu du délai de cinq ans prévu à l'article L3243-4 sus-visé. La réécriture consistera à faire apparaître sur des lignes distinctes le salaire, la prime de vacances, la prime de durée d'expérience et la prime familiale, conformément à la demande.

Une astreinte de 500 euros par mois de retard, à l'issue d'un délai de 6 mois à compter de la notification du présent arrêt, sera prévue pour chaque salarié, sans que la cour se réserve le pouvoir de la liquider.

Il est constant que la structure de la rémunération constituait, pour chacun des salariés concernés, un avantage individuel acquis et l'intégration des primes dans le salaire de base les a privés de la possibilité de vérifier de façon claire le respect de leurs droits.

Il sera donc accordé à chaque salarié la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes de rappel de primes

Le litige porte en premier lieu sur la proratisation, soutenue par le GIE IT-CE, en ce qui concerne les salariés à temps partiel.

Si les dispositions de l'article L 3123-10 du code du travail prévoient que la rémunération du salarié à temps partiel est proportionnelle à celle du salarié à temps complet, compte tenu de la durée de son travail et de son ancienneté dans l'entreprise, il n'en demeure pas moins que l'article L 3123-11 instaure quant à lui, au bénéfice des salariés à temps partiel, une équivalence de droits avec les salariés à temps complet, sous réserve, en ce qui concerne les droits conventionnels, de modalités spécifiques prévues par une convention ou un accord collectif de travail.

Or les articles 15 et 16 de l'accord collectif du 19 décembre 1985 ne contiennent aucune disposition relative à une proratisation des primes par rapport au temps de travail.

C'est donc à tort que le GIE IT-CE a appliqué une proratisation sur les primes en cause, lesquelles ont un caractère forfaitaire.

Le litige porte ensuite sur la prime familiale, en ce que l'article 16 de l'accord collectif prévoit qu'elle est accordée 'à chaque salarié du réseau chef de famille', ce dont le GIE IT-CE a déduit que, pour les couples travaillant tous deux dans l'entreprise, une seule prime était due, en outre sous la condition de l'existence d'enfants à charge.

Il porte en outre sur la prime de vacances, prévue à l'article 18 de l'accord, que le GIE IT-CE estime également ne devoir verser qu'à un seul des deux conjoints travaillant dans l'entreprise, dans les mêmes conditions que la prime familiale.

La cour ne peut toutefois que constater, ainsi que le soutiennent les appelants, et conformément à la jurisprudence constante de la cour de cassation, que les articles 16 et 18 ne contiennent aucune des restrictions appliquées par l'employeur que ce soit pour le versement unique en cas de conjoints tous les salariés de l'entreprise ou sur une définition limitative de l'enfant à charge justifiant le versement de la prime ou son arrêt.

Le GIE IT-CE ne peut davantage valablement se prévaloir de fiches techniques éditées par ses services, lesquelles n'ont pas de valeur conventionnelle, ou d'un avis de la Commission Paritaire Nationale, lequel n'a pas davantage valeur normative, et n'a entraîné aucune modification ou avenant relatif aux textes sus-visés de l'accord collectif.

En conséquence, il sera fait droit aux demandes des appelants tant en ce qui concerne la prime familiale, que la prime d'expérience et la prime de vacances, à concurrence des sommes figurant dans les dernières conclusions individuelles.

Enfin, le GIE IT-CE fait état d'erreurs qui seraient contenues dans les tableaux individuels comportant le décompte de chaque salarié, mais ne justifie pas de façon précise des erreurs commises, à savoir par quel salarié, sur quelle prime et pour quel montant, se bornant à des affirmations générales, par exemple que 'certains salariés demandeurs' seraient passés à temps complet et formuleraient des demandes au titre d'un temps partiel, ce qui ne résulte pas des tableaux effectués et n'est aucunement explicite alors que chaque salarié produit quant à lui un décompte précis, détaillé année par année, de l'année 2007 à l'année 2017, en ce qui concerne les rappels ou seulement les intérêts et que l'employeur est en possession des éléments qui auraient pu lui permettre de formuler des critiques précises, si elles étaient fondées.

Il sera rappelé que les demandes ne portent plus sur la prime d'intéressement ni sur la part variable, de sorte que les critiques de l'employeur sur ce point sont devenues sans objet.

Quant aux rappels relatifs aux congés payés et quant à l'incidence du caractère figé de la valeur acquise par les AIA lors de leur intégration, ils seront examinés ci-dessous.

Sur les congés payés afférents aux rappels

Il est constant que n'entrent pas dans le calcul de l'indemnité de congés payés les primes ou indemnités qui couvrent l'ensemble de l'année, temps de travail et temps de congés confondus, et dont le montant n'est pas diminué du fait des congés payés, qu'elles soient versées annuellement ou à des échéances plus rapprochées.

Or tel est le cas des primes de vacances, familiales et d'expérience, lesquelles sont forfaitaires de sorte que leur montant n'est pas affecté par les départs en congés.

Les demandes de ce chef seront en conséquence rejetées.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement des primes

Les demandeurs font valoir qu'ils sont contraints de continuer à faire valoir leurs droits en justice alors que la jurisprudence de la cour de cassation sur les principaux points en litige est acquise et constante.

Il apparaît effectivement que tel est le cas et que si des intérêts légaux sont dus, ils ne compenseront pas entièrement l'absence de disposition des primes au moment où elles auraient dû être perçues ni l'obligation de vaincre la résistance de l'employeur par une action en justice.

Il sera accordé à chaque salarié une somme de 800 euros en réparation de ce préjudice.

Sur l'actualisation et les intérêts de retard

Les salariés demandent la condamnation de l'employeur 'à appliquer ces paiements pour la période postérieure à l'arrêté du chiffrage' ce qui est relativement imprécis et ne permet donc pas de prononcer une condamnation déterminée quant à sa consistance exacte, en particulier sur l'assiette de calcul et le point de départ.

De plus, si la demande vise à assurer l'application par l'employeur des principes retenus par le présent arrêt en ce qui concerne l'absence de proratisation en raison des temps partiels et en ce qui concerne la notion d'enfant à charge et de chef de famille, rien ne permet d'anticiper que l'employeur ne s'y conformera pas alors qu'il s'agit maintenant d'une jurisprudence constante de la cour de cassation.

Cette demande de condamnation pour l'avenir sera en conséquence rejetée.

En ce qui concerne les intérêts légaux, il sera rappelé que pour les montants demandés au titre du rappel de créances salariales lors de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, ils seront dus à compter de celle-ci, valant mise en demeure.

Pour les sommes dues sur la période postérieure à la convocation, chaque versement dû produira des intérêts légaux à compter de sa date d'échéance.

Enfin, en ce qui concerne les dommages et intérêts, ils produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur la demande du syndicat Sud Groupe BPCE

L'intervention du syndicat est justifiée au regard de la portée du litige, relatif à l'interprétation d'un accord collectif soulevant une question de principe.

Un préjudice est causé à l'intérêt collectif des salariés par la résistance du GIE IT-CE à appliquer certaines dispositions d'un accord collectif, lequel sera réparé par le versement d'une somme de 800 euros.

Sur la demande reconventionnelle du GIE IT-CE

Il est de principe acquis que les avantages individuels acquis sont cristallisés au jour de leur incorporation dans le contrat de travail. Tel est en l'espèce le cas des primes d'expérience, de vacances et familiales.

En intégrant le montant de ces primes dans le salaire, sans maintenir leur mention distincte, l'employeur a unilatéralement contrevenu à l'avantage individuel acquis relatif à la structure de la rémunération.

Cette irrégularité ne peut générer aucune obligation pour l'employeur de maintenir au profit des salariés une progression du montant des primes en fonction de l'évolution du salaire de base.

Enfin, en ce qui concerne la répétition de l'indu, il est traditionnellement jugé que l'erreur commise lors du versement ne fait pas obstacle à l'exercice par son auteur de l'action en répétition.

Il ne peut donc qu'être fait droit au principe de la demande du GIE IT-CE en remboursement des sommes indûment versées en raison d'un calcul sur une base erronée en ce qu'elle intégrait des primes dont le montant a évolué alors qu'il aurait dû être figé.

Il sera observé que les appelants ne formulent aucune critique en ce qui concerne le principe de cette demande nouvelle en appel ni en ce qui concerne son montant calculé sur la base de tableaux communiqués en pièce 8.

En conséquence, il y sera fait droit pour les montants réclamés.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les appelants obtiennent satisfaction pour l'essentiel de leurs demandes de sorte que le jugement sera infirmé en ce qu'il avait mis les dépens à leur charge.

Le GIE IT-CE sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

En outre, il sera condamné à verser à chaque appelant la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Donne acte aux appelants de ce qu'ils renoncent à formuler des demandes concernant le paiement d'un 13e mois et d'un rappel de salaire afférent à la RAM,

Donne acte au GIE IT-CE de ce qu'il ne soulève plus la prescription quinquennale en ce qui concerne la prescription des salaires,

Infirme en conséquence le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a déclaré les demandes au titre de la gratification de fin d'année irrecevables,

Constate toutefois qu'aucune demande au fond n'est plus formulée en ce qui concerne la gratification de fin d'année, ainsi que la part variable et la prime d'intéressement,

Constate que le GIE IT-CE conclut à l'égard de Mme [H] [S] qui n'est pas partie à l'instance ce qui rend les demandes irrecevables dans le cadre de la présente instance.

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté les appelants de leurs demandes au titre de la réécriture des bulletins de salaire, de la prime d'expérience, de la prime familiale et de la prime de vacances, ainsi que de leurs demandes de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Ordonne au GIE IT-CE de procéder à la délivrance de bulletins de paie rectifiés à compter du mois de juillet 2005, concernant M. [I] [N], Mme [X] [T], Mme [S] [P], M. [V] [Q] [V] et Mme [K] [Z] née [B], sous astreinte de 500 euros par mois de retard pour chaque salarié, à l'issue d'un délai de 6 mois à compter de la notification du présent arrêt, en faisant apparaître sur des lignes distinctes le salaire et les primes concernant chacun des salariés susnommés,

Condamne le GIE IT-CE à verser à M. [I] [N], Mme [X] [T], Mme [S] [P], M. [V] [Q] [V] et Mme [K] [Z] née [B] la somme de 800 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive à la délivrance de bulletins de salaire conformes,

Condamne le GIE IT-CE à verser :

- à M. [I] [N], la somme de 4.438,55 euros au titre d'un rappel de prime familiale,

- à Mme [X] [T], la somme de 2.401,34 euros au titre d'un rappel de prime de durée d'expérience, la somme de 836,70 euros au titre d'un rappel de prime de vacances et la somme de 821,29 euros au titre d'un rappel de prime familiale,

- à Mme [S] [P], la somme de 3476,52 euros au titre d'un rappel de prime de durée d'expérience, la somme de 3771,92 euros au titre d'un rappel de prime de vacances et la somme de 2662,78 euros au titre d'un rappel de prime familiale,

- à M. [V] [Q] [V] la somme de 7212,65 euros au titre d'un rappel de prime familiale,

- à Mme [K] [Z] née [B] la somme de 3324,58 euros au titre d'un rappel de prime de durée d'expérience, la somme de 2507,19 euros au titre d'un rappel de prime de vacances et la somme de 734,88 euros au titre d'un rappel de prime familiale,

Déboute les appelants de leurs demandes au titre des congés payés afférents,

Rejette la demande des appelants concernant la condamnation de l'employeur 'à appliquer ces paiements' pour la période postérieure à l'arrêté du chiffrage,

Condamne le GIE IT-CE à verser à M. [I] [N], Mme [X] [T], Mme [S] [P], M. [V] [Q] [V] et Mme [K] [Z] née [B] la somme de 800 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement des primes,

Dit que les intérêts légaux seront dus sur les montants demandés au titre du rappel de créances salariales lors de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, à compter de celle-ci, valant mise en demeure,

Dit que pour les sommes dues sur la période postérieure à la convocation, chaque versement dû produira des intérêts légaux à compter de sa date d'échéance,

Dit qu'en ce qui concerne les dommages et intérêts, ils produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Condamne le GIE IT-CE à verser au syndicat Sud Groupe BPCE la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif des salariés,

Condamne M. [I] [N] à rembourser au GIE IT-CE la somme de 2294,64 euros,

Condamne Mme [X] [T] à rembourser au GIE IT-CE la somme de 1649,36 euros,

Condamne Mme [S] [P] à rembourser au GIE IT-CE la somme de 2404,81 euros,

Condamne M. [V] [Q] [V] à rembourser au GIE IT-CE la somme de 2647,67 euros,

Condamne Mme [K] [Z] née [B] à rembourser au GIE IT-CE la somme de 2407,81 euros,

Confirme le jugement dans le surplus de ses dispositions non infirmées,

Condamne le GIE IT-CE à verser à M. [I] [N], Mme [X] [T], Mme [S] [P], M. [V] [Q] [V], Mme [K] [Z] née [B] et au syndicat Sud Groupe BPCE la somme de 800 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne le GIE IT-CE aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente et par Anne-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Catherine Dupouy de Gordon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 15/05124
Date de la décision : 06/12/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°15/05124 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-12-06;15.05124 ?
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