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30/11/2017 | FRANCE | N°16/04615

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 30 novembre 2017, 16/04615


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 30 NOVEMBRE 2017



(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 16/04615

















SAS PSA RETAIL FRANCE



c/



Monsieur [L] [N]





















Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 2...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 30 NOVEMBRE 2017

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 16/04615

SAS PSA RETAIL FRANCE

c/

Monsieur [L] [N]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 juin 2016 (R.G. n° F 15/00958) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 12 juillet 2016,

APPELANTE :

SAS PSA RETAIL FRANCE, venant aux droits de la SCA SIASO RIVE DROITE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

N° SIRET : 348 901 521

représentée par Me Christophe BIAIS de la SELARL BIAIS ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

Monsieur [L] [N]

né le [Date naissance 1] 1954, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Adeline CORNIC, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 octobre 2017 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,

Madame Catherine MAILHES, Conseillère,

Madame Sophie BRIEU, Vice Présidente Placée

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : G. TRIDON DE REY

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

M. [N] a été engagé par la société Siaso Rive Droite au mois d'octobre 1972 dans le cadre d'un contrat d'apprentissage suivi d'un contrat à durée indéterminée après qu'il ait

obtenu un diplôme de CAP carrossier.

Il a effectué l'intégralité de sa carrière dans l'entreprise devenue la société Commerciale Automobile Rive droite (SCA SIASO). En dernier lieu, il occupait les fonctions de conseiller commercial carrosserie sur le site de [Localité 1], statut agent de maîtrise.

Par courrier du 30 juin 2014, M. [N] a fait valoir ses droits à la retraite. Après exécution de son préavis, il a quitté définitivement l'entreprise le 31 août 2014.

Le 27 avril 2015, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux afin de voir d'une part, juger que son départ à la retraite est équivoque et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'autre part, condamner la société à lui payer les sommes suivantes :

indemnité de préavis article 4-10 CCN (3 mois) : 9 285,00 euros

congés payés sur préavis : 928,00 euros

indemnité de licenciement : article 4-11 CCN : 39 028,00 euros

indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse (18 mois) : 55 710,00 euros

requalification du départ à la retraite en prise d'acte de la rupture du contrat de travail et départ équivoque contraint par l'employeur

art 700 du code de procédure civile : 3 500 euros

exécution provisoire de la décision,

Demande reconventionnelle

art 700 du Code de Procédure Civile : 3 500 euros

Par jugement du 28 juin 2016, le conseil de prud'hommes a :

dit que le départ à la retraite de M. [N] du 30 juin était équivoque et s'analysait en une prise d'acte de rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

condamné la société Siaso Rive Droite à verser à M. [N] les sommes suivantes:

39 028,00 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

9 285,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

928,00 euros au titre des congés payés sur préavis ;

rappelé que l'exécution provisoire est de droit pour les sommes fixées à l'article R.L454 14 du code du travail, conformément aux dispositions de l'article R.1454 28 du code du travail, dans la limite maximum de neuf mois de salaires calculée sur la moyenne des trois derniers mois, cette moyenne étant de 3 095,00 euros

50 000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

800,00 euros à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire ;

débouté la société Siaso Rive Droite de sa demande reconventionnelle et la condamné aux entiers dépens et frais éventuels d'exécution.

***

Par déclaration de son avocat au greffe de la Cour du 12 juillet 2016, la société Siaso Rive Droite a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 5 septembre 2017 au greffe de la Cour et développées oralement, la société Siaso Rive Droite devenue la société PSA Retail demande à la Cour de :

infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bordeaux le 28 juin 2016,

En conséquence,

dire et juger que le départ en retraite de M. [N] était volontaire, clair et non équivoque,

En conséquence,

débouter purement et simplement M. [N] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Reconventionnellement,

condamner M. [N] à verser à la société Siaso Rive Droite venant aux droits de la société Siaso Rive Droite la somme de 3 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M. [N] au paiement des entiers dépens de la présente procédure et éventuels frais d'exécution.

***

Dans ses écritures enregistrées au greffe le 29 juillet 2017 au greffe de la Cour et développées oralement, M. [N] conclut à la confirmation dont appel, sauf en ce qui concerne le montant des indemnités pour rupture abusive du contrat de travail qu'il demande à la cour de porter aux sommes réclamées en première instance. Il sollicite, en outre, la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués sont d'une gravité telle qu'ils rendent impossible la poursuite du contrat de travail soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Il incombe au salarié de prouver les manquements qu'il allègue et leur gravité.

M. [N] soutient que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité résultat et a exercé des pressions pour qu'il parte à la retraite. Il explique qu'à partir du mois de mai 2014 son supérieur hiérarchique direct, M. [C], lui a fait des reproches sur des réparations qui ne lui étaient pas imputables. Il a très mal vécu cette situation s'en est ouvert à l'assistante sociale de l'entreprise, au médecin du travail et au directeur du site et a du être arrêté en mai et juin 2014 et a consulté un psychologue. Le 24 juin 2014, une table ronde a été organisée à l'initiative de la direction pour discuter de son cas en présence notamment d'un représentant du personnel et du médecin du travail. On lui a alors signifié qu'il n'était plus apte à son poste en raison de colères fréquentes et de son incapacité à proposer des solutions dans un contexte de tensions et qu'il devait prendre sa retraite alors qu'il ne voulait pas le faire avant 2 ans. Six jours plus tard, il présentait sa demande de départ à la retraite par crainte, selon lui, de sanctions ou d'être privé de son indemnité de départ d'un montant de 25.992 euros.

Le salarié affirme, en conséquence, que sa demande de départ en retraite était équivoque et s'analyse comme une prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La lettre du 30 juin 2014 aux termes de laquelle M. [N] a présenté sa demande de départ à la retraite est ainsi rédigée : ' ayant fêté mes 60 ans le 30 mai 2014 et remplissant les conditions nécessaires, je vous informe que je souhaite faire valoir mes droits à la retraite à compter du 31 août 2014. Je souhaite solder mes congés avant mon départ. Je vous remercie de me fournir à cette date mon solde de tout compte...'

Ce courrier exprime une volonté non équivoque du salarié à faire valoir ses droits à la retraite.

Contrairement à ce qui est soutenu par M. [N], rien n'indique dans le dossier que l'employeur était informé de ce que l'intéressé ne souhaitait pas quitter l'entreprise avant l'âge de 62 ans.

Le fait qu'il en ait parlé au médecin du travail ou à d'autres salariés ne constitue pas une preuve à cet égard.

S'il est exact que M. [N] a formalisé sa demande de départ à la retraite six jours après la réunion du 24 juin organisée à l'initiative du secrétaire du CHSCT en présence, notamment, du médecin du travail et de l'assistante sociale de l'entreprise au cours de laquelle sa situation a été évoquée compte tenu des difficultés dans l'exercice de ses fonctions confirmées par d'autres salariés de l'entreprise dont les attestations sont produites aux débats, il résulte de l'attestation de la directrice des ressources humaines, et du secrétaire du CHSCT présents également à la réunion, et dont la valeur probante des témoignages n'est pas sérieusement contestée par M. [N], que plusieurs solutions ont été évoquées pour aider ce dernier à surmonter ses difficultés (tutorat, changement d'affectation) sans qu'à aucun moment il ne lui soit demandé d'envisager son départ en retraite.

Dans ces conditions, M. [N] ne peut valablement se prévaloir de cette réunion pour soutenir que des pressions ont été exercées sur lui. Il en ressort, au contraire, que l'employeur avait mis en place avec le concours de tous les acteurs chargés de la protection de la santé et de la sécurité des salariés, un dispositif d'accompagnement personnalisé pour l'aider à surmonter ses difficultés.

Les reproches de son supérieur hiérarchique direct dans les mois précédant le départ de M. [N] reposent sur des éléments objectifs et en particulier sur le fait que celui-ci ne supportait plus les remarques des clients ainsi qu'en attestent les pièces du dossier dont des mises en garde qui lui ont été adressées entre 2006 et 2013.

Le fait que M. [N] se soit ouvert au médecin du travail de ses difficultés relationnelles au travail ne signifie pas pour autant qu'elles soient imputables à l'employeur. Ainsi, selon les témoignages produits aux débats dont celui de M. [Y], ancien chef de site de [Localité 1], M. [N] qui possédaient des compétences techniques indéniables, avait des réactions démesurées lorsqu'il était confronté à des situations imprévues ou à des tensions avec des clients ou des salariés de l'entreprise. ' il fallait être toujours très attentif à la forme pour communiquer avec M. [N] afin d'éviter qu'il ne se place en situation de rupture, voire de fermeture ' atteste M. [Y].

En tout état de cause, le médecin du travail a déclaré le salarié apte à la reprise du travail dans un avis du 11 juin 2014, soit quelques semaines avant la remise de sa lettre de démission.

En outre, M. [N] a exécuté son préavis sans faire part d'observations sur les circonstances de son départ en retraite.

Enfin, il ne peut être déduit du fait que M. [N] travaille à temps partiel chez un carrossier depuis son départ à la retraite, la preuve qu'il souhaitait rester au sein de la société Siaso Rive droite au sein de laquelle il exprimait un mal être en lien avec ses responsabilités dans une entreprise ayant une activité importante.

Il découle de ce qui précède que M.[N] ne rapporte pas la preuve d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité résultat ou de l'existence de pressions susceptibles de rendre équivoque son départ à la retraite et de justifier une rupture abusive du contrat de travail.

Le jugement sera, en conséquence, infirmé et M. [N] sera débouté de ses demandes indemnitaires résultant de la rupture du contrat de travail.

Sur les autres demandes

M. [N], partie perdante, supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré

Statuant à nouveau

Dit que la rupture du contrat de travail résulte du départ à la retraite de M. [N]

Déboute M. [N] de ses demandes indemnitaires pour rupture abusive du contrat de travail

Condamne M. [N] aux dépens de première instance

Y ajoutant

Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne M. [N] aux dépens d'appel

Signé par Eric VEYSSIERE, Président et par Gwenaël TRIDON DE REY Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 16/04615
Date de la décision : 30/11/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°16/04615 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-30;16.04615 ?
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