COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE - SECTION A
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ARRÊT DU : 13 SEPTEMBRE 2017
(Rédacteur : Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,)
PRUD'HOMMES
N° de rôle : 16/03071
Monsieur [U] [I]
c/
SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES
SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES venant aux droits de la SARL MOULIN BUREL
Nature de la décision : AU FOND
Notifié par LRAR le :
LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par
voie de signification (acte d'huissier).
Certifié par le Greffier en Chef,
Grosse délivrée le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 avril 2016 (RG n° F 15/00165) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BERGERAC, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 10 mai 2016,
APPELANT :
Monsieur [U] [I], né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 1]
[Localité 1], de nationalité française, demeurant [Adresse 1],
Présent et assisté de Maître Valentine GUIRIATO de la SELARL JOLY-GUIRIATO-TRARIEUX, avocats au barreau de BERGERAC,
INTIMÉES :
SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES, siret n° 319 161 857, prise en la personne de son gérant Monsieur [U] domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],
SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES venant aux droits de la SARL MOULIN BUREL, siret n° 494 766 959, prise en la personne de son gérant Monsieur [U] domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],
Représentées par Maître Jean NEU, avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 juin 2017 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle Lauqué, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-François Sabard, président
Madame Isabelle Lauqué, conseiller
Madame Annie Cautres, conseiller
Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière,
ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
Monsieur [U] [I] a été embauché par la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES en qualité de chauffeur ambulancier du 22 novembre au 31 décembre 2010 dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée à temps complet.
Le 22 novembre 2010, la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES a signé une convention de mise à disposition de personnel à titre non lucratif portant sur la mise à disposition de M. [I], avec la SARL AMBULANCES MOULIN BUREL, entreprise dont le capital était détenu par la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES.
Le contrat de travail à durée déterminée de M. [I] a été renouvelé par avenants successifs à son contrat de travail signés respectivement avec la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES d'une part et avec la SARL AMBULANCES MOULIN BUREL d'autre part.
Enfin, par avenants du 26 septembre 2011, signés respectivement entre M. [I] et la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES d'une part et la SARL AMBULANCES MOULIN BUREL d'autre part, le contrat de travail à durée déterminée a été transformé en contrat de travail à durée indéterminée.
Pendant la durée de relation de travail, M. [I] a travaillé pour les deux sociétés, seule la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES assurant le règlement de son salaire.
Par courrier recommandé du 13 septembre 2014, cette dernière a convoqué M. [I] à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 24 septembre 2014 et lui a notifié une mise à pied conservatoire.
Par courrier du 29 septembre 2014, la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES lui a notifié son licenciement pour faute grave en lui reprochant d'avoir adressé un courrier menaçant au Directeur de la clinique [Établissement 1] qui avait signalé les propos violents tenus par M. [I] envers le responsable des services techniques de la clinique, fait ayant donné lieu à un avertissement.
Courant novembre 2014, la SARL MOULIN BUREL a été absorbée par transmission universelle de son patrimoine par son associé unique la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES.
Le 30 janvier 2015, M. [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Bergerac pour voir reconnaître une situation de co emploi et donc de travail dissimulé, pour voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail avec la SARL MOULIN BUREL et voir juger qu'il n'avait commis aucune faute justifiant son licenciement et qu'en outre, la SARL MOULIN BUREL ne lui avait pas notifié son licenciement.
En conséquence de quoi, M. [I] réclamait à la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES et à la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PERIGORD RÉUNIES venant aux droits de la SARL MOULIN BUREL une indemnité pour travail dissimulé, ses indemnités de rupture et des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi que des rappels de salaire au titre d'heures supplémentaires, de jours fériés et de dimanche travaillés, d'indemnité pour dépassement de l'amplitude journalière et des indemnités de repas.
Il réclamait en outre des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 25 avril 2016, le conseil de prud'hommes de Bergerac a jugé que M. [I] n'avait eu qu'un seul employeur, la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES, qu'il avait fait l'objet d'une mise à disposition au sein de l'entreprise MOULIN BUREL, que son licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse mais pas sur une faute grave et il a condamné la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES à payer à M. [I] les sommes suivantes :
- 3.776,94 euros au titre du préavis,
- 377,69 euros au titre des congés payés afférents,
- 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Conseil a en revanche débouté M. [I] de toutes ses autres demandes notamment de rappels de salaire.
M. [I] a interjeté appel de ce jugement le 10 mai 2016.
Par conclusions déposées le 12 juillet 2016, développées oralement à l'audience du 6 juin 2017 auxquelles la Cour se réfère expressément, M. [I] conclut à la réformation du jugement attaqué et demande à la Cour de constater l'existence d'un co emploi et d'une relation de travail avec la SARL MOULIN BUREL et donc l'existence d'un travail dissimulé.
Il demande d'autre part à la Cour de constater que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et en conséquence de condamner la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES à lui payer les sommes suivantes :
- 11.330,82 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,
- 12.000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et
sérieuse,
- 3.776,94 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 377,69 euros au titre des congés payés afférents,
- 12.029,60 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérés,
- 88,47 euros au titre de l'indemnité pour dépassement d'amplitude,
- 233,45 euros au titre de l'indemnisation des jours fériés travaillés,
- 663,70 euros au titre des dimanches travaillés,
- 3.112,77 euros au titre des indemnités repas,
- 1.000,00 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,
- 3.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [I] réclame enfin la remise des bulletins de paie et ses documents de rupture rectifiés.
Par conclusions déposées le 7 octobre 2016, développées oralement à l'audience du 6 juin 2017 auxquelles la Cour se réfère expressément, la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES en son nom et venant aux droits de la SARL MOULIN BUREL conclut au rejet de toutes ses demandes de M. [I] et demande à la Cour de condamner ce dernier à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DISCUSSION :
- Sur le lien de droit entre M. [I] et la SARL MOULIN BUREL et la demande d'indemnité pour travail dissimulé :
M. [I] fait valoir qu'il n'a jamais accepté d'être mis à la disposition de la SARL MOULIN BUREL et qu'il a signé des avenants à son contrat de travail directement avec cette entreprise pour le compte de laquelle il a travaillé.
Il soutient qu'il existe en conséquence une situation de co emploi, qu'il existait bien une relation de travail salarié avec les deux sociétés et qu'ayant travaillé pour le compte de la SARL MOULIN BUREL sans être déclaré par cette dernière, il y a eu dissimulation d'emploi salarié.
Sur ce constat, il réclame le paiement d'une somme de 11.330,82 euros sur le fondement de l'article L8221-5 du code du travail.
La SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES réplique que M. [I] n'a signé un contrat de travail qu'avec elle et qu'il n'a jamais été le salarié de la SARL MOULIN BUREL.
Elle fait valoir qu'il existait une convention entre les deux entreprises permettant à M. [I] de conduire les véhicules de l'une ou de l'autre et que pour ce faire il était mentionné sur les listes déclaratives adressées aux organismes de contrôle (ARS et CPAM) par les deux sociétés.
Elle soutient que l'avenant signé entre M. [I] et la SARL MOULIN BUREL est improprement qualifié, que seule la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES avait sur M. [I] le pouvoir de direction, de contrôle et disciplinaire et qu'enfin toutes ses heures travaillées ont été payées et déclarées.
Une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination direct que s'il existe entre elles, au-delà de cette nécessaire coordination et de l'état de domination économique résultant de l'appartenance au groupe, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion globale et permanente dans la gestion économique et sociale dépassant le périmètre acceptable de son intervention dans la filiale au point de la priver de toute autonomie.
Il appartient à celui qui se prévaut d'une situation de co emploi de démontrer que durant la vie de la société, la société mère ou sa filiale s'est immiscée globalement et de façon permanente dans sa gestion économique et sociale au point de la priver de toute autonomie devenant par la même, le détenteur du pouvoir de décision et de direction sur les salariés.
D'autre part, si le prêt de main d'oeuvre à but lucratif est prohibé, en revanche, les opérations de prêt de main d'oeuvre à but non lucratif sont autorisées sous réserves du respect des dispositions de l'article L8241-2 du code du travail qui imposent notamment que soit conclue d'une part une convention de mise à disposition entre l'entreprise prêteuse et l'entreprise utilisatrice qui en définit la durée, mentionne l'identité et la qualification du salarié, indique le mode de détermination des salaires, charges sociales et remboursement de frais facturés et d'autre part un avenant au contrat de travail conclu entre l'entreprise prêteuse et le salarié précisant le travail confié dans l'entreprise utilisatrice, les horaires, le lieu d'exécution du travail et les caractéristiques du poste de travail.
Ce même article prévoit que les institutions représentatives du personnel doivent être préalablement consultées.
Le non respect de ces dispositions entraîne la requalification de l'opération en prêt de main d'oeuvre à but lucratif.
Dans ce cas, le salarié peut demander au juge de reconnaître la qualité d'employeur à l'entreprise utilisatrice sous réserve de démontrer que le salarié avait été placé dans un lien direct de subordination à son égard.
En application de l'article L8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, le fait pour tout employeur soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche, soit de se soustraire intention-nellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L8221-5 à droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
En l'espèce, M. [I] se prévaut à la fois d'une situation de co emploi et d'une relation salariée directe avec la SARL MOULIN BUREL, filiale de la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES qui en était l'actionnaire unique.
S'agissant du co emploi, M. [I] démontre que les deux sociétés avaient la même activité et le même gérant.
Cependant, aucun élément n'établit la réalité d'une confusion de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES par la SARL MOULIN BUREL, cette immixtion ne pouvant se déduire du seul constat d'une activité identique et d'une gérance confiée à une même personne physique.
D'autre part, la Cour constate que M. [I] n'établit pas avoir reçu des instructions relatives à l'exécution de son travail de la part de la SARL MOULIN BUREL alors qu'il est en revanche établi que le pouvoir disciplinaire a toujours été exercé par la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES sans partage avec la SARL MOULIN BUREL, que la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES établissait ses bulletins de salaire et le rémunérait pour l'intégralité de son temps de travail même passé au service la SARL MOULIN BUREL.
Dès lors, la Cour constate que seule la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES assurait le pouvoir de direction et de contrôle du travail de M. [I], qu'elle seule le rémunérait et lui délivrait ses bulletins de salaire et qu'enfin, elle seule exerçait sur le salarié le pouvoir disciplinaire de l'employeur.
En conséquence, la Cour juge que M. [I] n'établit pas la réalité d'une relation de travail salariée avec la SARL MOULIN BUREL.
En revanche, M. [I] a signé un contrat de travail initial à durée déterminée avec la SARL BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES renouvelé par avenants successifs puis transformé en contrat de travail à durée indéterminée.
La SARL BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES produit aux débats une convention de mise à disposition de M. [I] à but non lucratif du 22 novembre 2010 signée avec la SARL MOULIN BUREL.
Cependant, la Cour constate qu'aucun avenant au contrat de travail de M. [I] n'a été signé entre lui et la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES portant accord express du salarié pour sa mise à disposition ni mention du travail confié dans l'entreprise utilisatrice, des horaires, du lieu d'exécution du travail et des caractéristiques du poste de travail.
Il n'est pas non plus démontré que les institutions représentatives du personnel ont été consultées.
Les conditions d'une mise à dispositions de M. [I] à but non lucratif ne sont donc pas remplies.
Mais la Cour relève que le salarié était déclaré pour l'ensemble des heures de travail effectuées et qu'il recevait des bulletins de paie mentionnant le nombre d'heure de travail réellement accompli en sorte que la Cour considère que n'est pas rapporté la preuve d'un travail dissimulé au sens des articles L8221-5 et L8223-1 du code du travail.
En conséquence, la Cour rejette la demande d'indemnité pour travail dissimulé formée par M. [I] sur le fondement de la dissimulation d'emploi par la SARL MOULIN BUREL.
- Sur le licenciement :
En application de l'article L1235-1 du code du travail, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur.
Il forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.
La faute grave privative de l'indemnité de licenciement et de préavis est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée de ce dernier.
La lettre de licenciement qui fixe les termes du litige est intégralement reprise dans les écritures de l'intimé auxquelles la Cour renvoie expressément.
La SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES produit aux débats le courrier adressé par M. [I] au directeur de la Clinique [Établissement 1] contenant la menace de poursuites judiciaires ainsi que le courrier reçu le 28 août 2014 de ce même Directeur jugeant le comportement du salarié inacceptable et remettant en cause la relation de confiance avec la société.
Le grief est donc établi et la Cour comme le Conseil juge qu'il est sérieux et justifiait le licenciement de M. [I].
En ce que le grief invoqué à l'appui du licenciement de M. [I] s'inscrit dans la poursuite de fait de même nature ayant notamment justifié l'avertissement du 1er août 2014 motivé par un comportement menaçant et insultant vis à vis de ses collègues, la Cour juge que la répétition de faits de menace et d'agression verbale proférées à l'encontre de collègue mais aussi de client empêchait le maintien de la relation de travail pendant la durée du préavis.
En conséquence, réformant la décision du Conseil, la Cour juge que le licenciement de M. [I] est fondé sur une faute grave et le déboute de l'ensemble de ses demandes formées au titre de la rupture du contrat de travail.
- Sur les heures supplémentaires :
Il résulte de l'article L3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fourmis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir, en cas de besoin, ordonné toutes les mesures d'instructions qu'il estime utile.
Ainsi, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par le salarié, qui doivent étayer suffisamment sa demande, et de ceux fournis par l'employeur qui doivent être de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
M. [I] produit ses carnets de feuilles de route ainsi qu'un décompte journalier de son temps de travail.
La SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES ne conteste par le temps de travail de M. [I] mais fait valoir que dans le domaine du transport sanitaire, il convient de faire application de l'accord cadre du 4 mai 2000 pris en application de la loi du 13 juin 1998 qui prévoit que le temps de travail effectif peut être déterminé par équivalence.
Ainsi, la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES ne conteste pas les heures de travail dont M. [I] se prévaut et qui constitue son amplitude de travail mais soutient que la durée du travail effectif rémunéré est décomptée à partir de la somme des amplitudes affectées d'un coefficient déterminé en fonction du nombre de permanences tenues dans une année.
Il résulte, en effet, de l'article 3 de l'accord cadre du 4 mai 2000 pour l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire qu'afin de tenir compte des périodes d'inaction, de repos, repas, pauses, coupures et de la variation de l'intensité de leur activité, la durée du travail effectif des personnels ambulanciers roulants est décomptée sur la base du cumul hebdomadaire de leurs amplitudes journalières d'activité pris en compte pour 75 % de sa durée à l'issue d'une période transitoire de 3 ans.
Selon le nombre de permanence par mois travaillés, la durée du travail du travail effectif des personnels ambulanciers roulants est décomptée sur la base d'un cumul hebdomadaire de leurs amplitudes journalières d'activité affecté d'un coefficient fixé de 75 à 90 % selon le nombre de permanence.
Enfin, l'accord précise que la rémunération des personnels ambulanciers roulants correspond à la durée du travail effectif telle que décomptée ci-dessus et à l'indemnisation des autres périodes comprises dans l'amplitude.
La Cour constate que M. [I] a établi son décompte des heures supplémentaires sur la base de son l'amplitude de travail sans tenir compte du coefficient applicable à la détermination de la durée du travail effectif qui seule est rémunérée.
La SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES produit en pièce 23 le récapitulatif des permanences de M. [I] pour les années 2012, 2013 et 2014 et le coefficient qui en résultait soit 75 %.
Elle justifie donc avoir calculé et rémunéré les heures supplémentaires de M. [I] conformément aux dispositions conventionnelles de l'accord cadre.
En conséquence, la Cour constate que la demande en paiement d'heures supplémentaires formées par M. [I] n'est pas fondée et confirme en conséquence la décision du Conseil sur ce point.
- Sur les dimanches travailles :
M. [I] produit à la Cour la liste des dimanches travaillés depuis le début de la relation contractuelle dont il demande le paiement.
La Cour constate à la lecture des bulletins de salaire de M. [I] que chaque dimanche dont le paiement est réclamé a été payé le mois courant.
Dès lors, la Cour confirme le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. [I] de sa demande de rappel de salaire au titre des dimanches travaillés.
- Sur les jours fériés travaillés :
De même, les jours fériés dont le paiement est réclamé ont été payés comme le démontre la lecture des bulletins de salaire correspondant.
Cette demande sera donc également rejetée.
- Sur le dépassement de l'amplitude journalière :
M. [I] ne démontre aucun dépassement d'amplitude journalière compte tenu des modalités de détermination du temps de travail effectif prévues par l'accord cadre.
Sa demande de ce chef sera également rejetée.
- Sur le travail dissimulé :
Par application des dispositions des articles L8221-5 et L8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a délivré de façon intentionnelle un bulletin de salaire mentionnant un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
La Cour a constaté que l'ensemble des heures de travail effectif est mentionné sur les bulletins de salaire de M. [I].
Dès lors, aucun travail dissimulé n'est établi.
La Cour déboute en conséquence M. [I] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.
- Sur les indemnités repas :
M. [I] prétend n'avoir pas reçu son indemnité repas certains jours travaillés et qu'en outre le taux appliqué par la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES était inférieur à celui prévu par la convention collective.
A l'appui de sa demande M. [I] verse un tableau récapitulatif du montant des indemnités perçues année par année qui permet à la Cour de constater qu'il ne conteste pas le nombre de repas mais le montant de l'indemnité alloué par repas.
Il soutient qu'une indemnité de 7,60 euros lui a été allouée par repas en 2011 puis de 7,74 euros en 2012, 2013 et 2014 alors que cette indemnité aurait du être de 12,10 euros en 2011, de 12,30 euros en 2012, de 12,55 euros en 2013 et de 12,80 euros en 2014.
La convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport prévoit en son article 8 une indemnité de repas unique dont le taux a évolué entre 2010 et 2014 comme suite :
2011': 7,60
2012': 7,75
2013': 7,90
2014': 7,99
versée au personnel qui se trouve, en raison d'un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail.
Ce taux est majoré lorsque le personnel n'a pas été averti au moins la veille et au plus tard à midi d'un déplacement effectué en dehors de ses conditions habituelles de travail.
L'indemnité de repas d'un montant équivalent à celui réclamé par M. [I] est versée quand aucune autre indemnité n'est appliquée, quand le temps de pause est inférieur à 1 heure et qu'il est pris à l'extérieur.
Les bulletins de salaire de M. [I] permettent de constater qu'en 2011, l'employeur a appliqué le taux conventionnel de l'indemnité de repas unique de 7,60 euros, qu'en 2012, il a appliqué un taux de 7,74 euros, qu'en 2013 le taux appliqué a été de 7,74 et qu'enfin en 2014, le taux appliqué est passé à 7,99 euros.
M. [I] qui s'est vu appliqué le taux du repas unique ne justifie pas s'être trouvé dans une des situations justifiant l'application du taux de repas revendiqué.
Cependant, la Cour constate qu'en 2012 et 2013, le taux de repas unique appliqué était erroné.
Aussi recalculant les sommes dues pour 2012 et 2013 sous déduction des sommes versées, il y a lieu d'allouer à M. [I] un rappel d'indemnité de 1,42 euros pour 2012 et de 22,56 euros pour 2013.
En conséquence, réformant la décision du Conseil sur ce point la Cour condamne la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES à payer à M. [I] la somme de 23,98 euros à titre de rappel d'indemnité de repas.
- Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :
Le contrat de travail s'exécute de bonne foi et il appartient à celui qui s'en prévaut de démontrer la mauvaise foi de son co contractant.
En l'espèce, la Cour a débouté M. [I] de ses contestations relatives à l'exécution de son contrat de travail et juge en conséquence qu'il échoue à démontrer la mauvaise foi contractuelle de la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES.
- Sur les autres demandes :
M. [I] sera condamné à payer à la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE
LA COUR
Réforme le jugement attaqué en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [I] n'était pas fondé sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES à lui payer son indemnité de préavis et les congés payés afférents outre une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Réforme également le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. [I] de sa demande formée au titre de l'indemnité de repas.
Statuant à nouveau :
Juge que le licenciement de M. [I] est fondé sur une faute grave.
Déboute M. [I] de toutes ses demandes formées au titre de la rupture de son contrat de travail.
Condamne la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES à payer à M. [I] la somme de 23,98 euros à titre d'indemnité de repas.
Confirme le jugement attaqué en toutes ses autres dispositions.
Y ajoutant :
Condamne M. [I] à payer à la SARL AMBULANCES BERGERACOISES ET DU PÉRIGORD RÉUNIES la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne M. [I] aux dépens.
Signé par Monsieur Jean-François Sabard, Président et par Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Anne-Marie Lacour-Rivière Jean-François Sabard