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03/07/2017 | FRANCE | N°16/01843

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 03 juillet 2017, 16/01843


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 03 JUILLET 2017



(Rédacteur : Elisabeth LARSABAL, président,)





N° de rôle : 16/01843









[K] [E]



c/



SA MAAF ASSURANCES

CPAM DE LA DORDOGNE

CPAM DE ROCHEFORT

























Nature de la décision : AU FOND








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Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 février 2016 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 6, RG : 12/07782) suivant déclaration d'appel du 18 mars 2016



APPELANTE :



[K] [E]

née le [Date naissance 1] 1992 à [Localité 1...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 03 JUILLET 2017

(Rédacteur : Elisabeth LARSABAL, président,)

N° de rôle : 16/01843

[K] [E]

c/

SA MAAF ASSURANCES

CPAM DE LA DORDOGNE

CPAM DE ROCHEFORT

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 février 2016 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 6, RG : 12/07782) suivant déclaration d'appel du 18 mars 2016

APPELANTE :

[K] [E]

née le [Date naissance 1] 1992 à [Localité 1]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX

Représentée par Maître Antoine CHAMBOLLE de la SELARL CHAMBOLLE & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

SA MAAF ASSURANCES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2]

Représentée par Maître JULES de la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES, avocat au barreau de BORDEAUX

CPAM DE LA DORDOGNE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 3]

Non représentée, assignée à personne habilitée.

CPAM DE ROCHEFORT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 4]

Non représentée, assignée à personne habilitée.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 mai 2017 en audience publique double rapporteur, les avocats ne s'y étant pas opposés devant Elisabeth LARSABAL, président, rapporteur et Jean-Pierre FRANCO, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Elisabeth LARSABAL, président,

Jean-Pierre FRANCO, conseiller,

Catherine COUDY, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Irène CHAUVIRE

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE :

[I] [E] née le [Date naissance 1] 1992 a été victime d'un accident de la circulation le 2 février 2000 alors qu'elle était âgée de 8 ans, en tant que passagère arrière du véhicule conduit par sa mère et assuré par la MAAF.

Selon rapport du 15 mai 2004 établi par le docteur [T] missionné par la MAAF Assurances, [I] [E] avait présenté un traumatisme crânien avec pétéchies bi frontales prédominant à droite, quelques pétéchies profondes près de la pointe du ventricule latéral, une hémorragie sous arachnoïdienne diffuse, un traumatisme du membre inférieur droit avec fractures de la diaphyse fémorale. Le traumatisme initialement grave a été responsable d'un coma d'emblée avec signes de décérébration et un score de Glasgow évalué à 4 et pupilles en myosis.

[I] [E] a été hospitalisée au centre hospitalier de [Localité 2] jusqu'au 21 février 2000 et a subi une ostéosynthèse an niveau de la fracture fémorale. Il y avait ouverture spontanée des yeux effective le 5 février 2000 avec début de réponse aux ordres simples dès le 7 février 2000 avec amélioration de l'état général à compter du 13 février 2000. Le 21 février 2000, elle a été transférée en service de pédiatrie au centre hospitalier de [Localité 2] où elle a été considérée comme consciente et somnolente répondant aux ordres simples mais restant mutique. Elle a été traitée par Tegretol, un anti-comitial. Elle est restée hospitalisée en service de pédiatrie jusqu'au 7 mars 2000 puis a été prise en charge à temps complet jusqu'au 12 mai 2000 puis en hospitalisation de jour trois fois par semaine jusqu'au 26 juin 2000. L'ablation des broches fémorales a été effectuée le 21 juin 2000. A la sortie du centre de rééducation le 26 juin 2000, il a été noté un déficit neuropsychologique avec ralentissement psychomoteur global, baisse de l'état de vigilance de la tension, déficit de fixation mnésique et apathie, 1'évolution étant progressivement favorable avec persistance de difficultés attentionnelles et de fatigabilité mentale.

Le médecin expert de la MAAF a fixé la consolidation au 26 janvier 2004 et a relevé un taux d'incapacité permanente partielle de 25% en fonction du barème des déficits fonctionnels applicables en droit commun tenant compte d'un syndrome frontal patent avec difficulté d'organisation visio-constructive, d'un déficit mnésique, d'un ralentissement des différentes procédures limitant les capacités d'apprentissage, d'un certain degré d'impulsivité et d'un certain degré d'anosognosie.

Les souffrances endurées ont été évaluées à 4/7 et le dommage esthétique à 1,5 sur 7 pour tenir compte des cicatrices résiduelles. Sur le plan scolaire il a été noté que [I] [E] avait redoublé son CE1 puis avait été admise en CE2 puis en CM1 puis en CM2 en septembre 2003 avec des résultats scolaires inférieurs à la moyenne avec surtout des difficultés importantes pour les mathématiques.

Le docteur [T] a établi un second rapport le 11 avril 2007. Il a relevé que courant mars 2005, [I] [E] a été confrontée à des troubles comportementaux totalement différents avec des éléments délirants, hallucinatoires qui ont justifié une hospitalisation en milieu spécialisé du 5 au 8 avril 2005 et un traitement par Tercian ayant permis une amélioration spectaculaire.

Le médecin a indiqué que cette pathologie psychiatrique n'était pas imputable au traumatisme crânien et a confirmé ses conclusions initiales retenues dans le rapport du 15 mai 2004.

Il a conclu à une incapacité temporaire totale sur le plan personnel du 2 février 2000 au 26 juin 2000, à une consolidation acquise le 26 janvier 2004, à une incapacité permanente partielle de 25 %, à des souffrances endurées de 4/7 et un dommage esthétique de 1,5 sur 7, indiquant que l'hospitalisation, les soins médicaux et le suivi psychologique en cours depuis le mois de mars 2005 ne sont pas directement imputables à l'accident du 2 février 2000.

Ses parents en qualité de représentants légaux ont accepté une transaction avec la MAAF selon procès verbal du 17 mars 2008 sur la base d'une indemnisation à 100% évaluée selon le rapport du docteur [T] en date du 11 avril 2007.

Le montant de l'indemnisation était de 80 600 € soit après déduction des provisions 53150.10 € et portait sur le déficit fonctionnel temporaire, le déficit fonctionnel permanent évalué à 25%, un préjudice scolaire pour le redoublement du CE1, des souffrances endurées évaluées à 4/ 7 préjudice esthétique permanent de 1,5 /7 et des frais divers en l'occurrence, la participation sur honoraires de l'avocat.

Ses parents ont été autorisés par ordonnance de transaction du 27 mars 2008 du juge des tutelles du tribunal d'instance de Rochefort à accepter cette indemnité en réparation du préjudice subi par [I] [E].

Par acte du 16 avril 2012, madame [I] [E] devenue majeure a assigné la MAAF devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux pour voir constater que l'ensemble de ses préjudices n'avait pas été indemnisé par le protocole d'indemnisation et voir ordonner une expertise avec mission de rechercher à l'époque de la première consolidation telle qu'elle avait été constatée par le docteur [T] s'il existait un retentissement professionnel et donner tous éléments pour fixer éventuellement les pertes de gains professionnels futurs et l'incidence professionnelle, voir fixer les besoins en tierce personne avant et après consolidation, voire dire s' il existait au préjudice d'agrément et un préjudice sexuel et dans un second temps ordonner une mission pour évaluer l'aggravation de son état de santé.

Par ordonnance du 2 juillet 2012 , le juge des référés a ordonné une expertise avec pour seule mission d'examiner l'aggravation alléguée des préjudices depuis le rapport du médecin conseil du 11 avril 2007 et imputable à l'accident du 2 février 2000 et d'évaluer les préjudices générés par cette aggravation, et ce, après avoir constaté que le débat concernant la validité de la transaction ne ressortait pas de la compétence du juge des référés.

Il a désigné pour réaliser cette expertise le docteur [B] qui a déposé son rapport le 28 avril 2013.

Le médecin expert a conclu de la manière suivante :

- un traumatisme crânien grave,

- fracture de la diaphyse fémorale,

- imputabilité directe et certaine,

- aggravation situationnelle depuis le rapport du médecin conseil du 11/04/2007,

- déficit fonctionnel temporaire total du 2 février au 26 juin 2000, correspondant au temps

d'hospita1isation,

- déficit fonctionnel temporaire partiel de 75% du 27 juin au 1er septembre 2000,

- déficit fonctionnel partiel de 50% du 2 septembre 2000 au 31 décembre 2011, soit pendant 11 ans

- consolidation : 1er janvier 2012,

- déficit fonctionnel permanent partiel : 50%,

- incidence professionnelle : travail en établissement adapté,

- souffrances physiques, psychiques ou morales découlant des blessures subies pendant la maladie traumatique avant consolidation: 4.5/7,

- préjudice esthétique définitif reste fixé à 1.5/7,

- pas de préjudice sexuel,

- préjudice d'étab1issement,

- gêne à la réalisation d'activités sportives,

- besoin en tierce personne:

* 3 heures de tierce personne quotidienne pendant la période du DFTP à 75%,

* par la suite il y a lieu de distinguer la période précédant la consolidation jusqu'à l'âge de 12 ans d'une heure par jour pouvant être attribuée et correspondant à un surcroît d'attention par rapport à un enfant fragilisé jusqu'en septembre 2004,

* pendant la période de la scolarité secondaire, le besoin en tierce personne peut être évalué in abstracto à deux heures par jour (de septembre 2004 à septembre 2008, augmentées à trois heures par jour pendant la période de descolarisation de septembre 2008 à mars 2009),

* à partir de l'intégration de l'IMP pro de mars 2009 à décembre 2011, deux heures par jour, une partie de l'encadrement est assurée en semaine par l'établissement d'internat,

* période après consolidation : deux heures par jour, 1'encadrement en semaine est assuré par l'ESAT

- dépenses de santé future : suivi orthoptique.

Par acte du 13 août 2012, madame [I] [E] a fait assigner la MAAF devant le tribunal de grande instance de Bordeaux pour voir ordonner une expertise sur les séquelles non indemnisées par le protocole d'indemnisation.

Par actes des 5 et 13 juin 2013, madame [I] [E] a fait assigner devant ce tribunal la caisse primaire d'assurance maladie de la Dordogne et la caisse primaire d' assurance maladie de Rochefort (Charente-Maritime) afin de les voir produire leur créance et prendre toutes conclusions qu'elles estimeraient devoir prendre.

Les procédures ont été jointes.

Par jugement du 26 février 2016, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- déclaré irrecevables du fait de l'autorité de la chose jugée les demandes relatives aux postes suivants:

* le préjudice scolaire et universitaire ou de formation jusqu'au 17 mars 2008

* le déficit fonctionnel temporaire sauf à établir une aggravation postérieurement au procès verbal de transaction signé le 17 mars 2008,

* le déficit fonctionnel permanent sauf à établir une aggravation depuis le 17 mars 2008,

- déclaré recevables les demandes portant sur :

* le poste frais divers dans lequel rentre le poste assistance par tierce personne avant consolidation,

* le poste assistance par tierce personne après consolidation,

* le poste perte de gains professionnels futurs,

* le poste incidence professionnelle,

* le poste préjudice d'établissement,

* le poste préjudice d'agrément ;

- fixé le préjudice subi par madame [I] [E], suite à l'accident dont elle a été victime le 2 février 2000, à la somme totale de 491.715,60€ et pour le futur une rente trimestrielle de 819 €, suivant le détail suivant :

* frais divers FD : 23.545 €

* tierce personne TP : 50.805 € et pour le futur une rente trimestrielle de 819 €

* perte de gains professionnels futurs PGPF : 352.365,60 €

* incidence professionnelle IP : 50.000 €

* préjudice d'agrément : rejet

* préjudice d'établissement PE : 15.000 €

- condamné la société MAAF Assurances à payer à madame [I] [E] la somme de 491.715,60€ à titre de réparation de son préjudice corporel,

- condamné la société MAAF Assurances à payer, en deniers ou quittances, provisions non déduites, à Mme [E], une rente trimestrielle et viagère au titre de la tierce personne d'un montant de 819 €, pour un, payable à compter du 1er mars 2016 et qui sera suspendue en cas d'hospitalisation ou de prise en charge en milieu médical spécialisé supérieure à 45 jours,

- dit que cette rente sera payable à terme échu avec intérêts au taux légal : à compter de chaque échéance échue et sera révisable chaque année conformément aux dispositions de l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985, étant précisé que l'indexation n'interviendra et les intérêts ne seront dus qu'à compter du présent jugement,

- condamné la société MAAF à payer à madame [I] [E] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 15 décembre 2014, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 28 septembre 2013 et jusqu'au 15 décembre 2014,

- déclaré le jugement commun à la CPAM de la Dordogne et de la Charente Maritime,

- débouté madame [I] [E] du surplus de ses demandes,

- condamné la société MAAF Assurances aux dépens et à payer à madame [I] [E] la somme de 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l' avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence de la moitié de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens.

Le tribunal a notamment considéré que :

- l'autorité de la chose jugée fait obstacle, sauf aggravation, à toute réclamation de la victime au titre d'un poste de préjudice qui a été débattu lors de la transaction, et qui a été réparé, ou dont l'indemnisation a été rejetée,

- en revanche, la victime peut réclamer l'indemnisation de postes de préjudice qui n'ont pas été débattus lors de la transaction

- que l'aggravation postérieure au 17 mars 2008 n'était pas établie et a évalué les préjudices déclarés recevables.

Madame [I] [E] a relevé appel de ce jugement par déclaration au greffe de son avocat en date du 18 mars 2016, dans des conditions de régularité non contestées.

Par conclusions signifiées par RPVA le 7 septembre 2016, madame [I] [E] demande à la cour de réformer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.

En conséquence,

- dire et juger que l'ensemble des séquelles dont elle demeure atteinte n'a pas été indemnisé intégralement par le protocole d'accord du 17/03/2008.

En conséquence,

- dire et juger que ses demandes d'indemnité ne remettent pas en cause l'autorité de la chose jugée dudit protocole,

- dire et juger qu'elle apporte la preuve de l'aggravation de ses séquelles imputables à l'accident dont elle a été victime le 02/02/2000.

En conséquence,

- condamner la MAAF à indemniser intégralement son préjudice au vu du rapport d'expertise du docteur [B],

- lui allouer les sommes suivantes :

postes de préjudice

montant

créances du tiers payeur

solde pour la victime

Frais divers:

* assistance à expertise

* assistance par tierce personne

1.900€

107.775€

0

0

1.900€

107.775€

assistance par tierce personne post-consolidation

43.200€ jusqu'au 31/12/2014 puis rente de 1216 € par mois

0

43.200€ puis rente mensuelle de 1216 €

perte de gains professionnels futurs

601.196€

0

601.196€

incidence professionnelle

70.000€

0

70.000€

préjudice scolaire

80.000€

0

80.000€

déficit fonctionnel temporaire

49.175€

0

49.175€

souffrances endurées

20.000€

0

20.000€

déficit fonctionnel permanent

125.000€

0

125.000€

préjudice d'établissement

30.000€

0

30.000€

préjudice d'agrément

15.000€

0

15.000€

total

1.143,246€

0

1.143,246€

- condamner la MAAF à régler une rente mensuelle de 1.216€ au titre de la tierce personne future, à compter du 01/01/2015, avec rappel entre la date précitée et la date de l'arrêt à intervenir,

- condamner la MAAF au double taux d'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

- condamner la MAAF à lui verser une indemnité pour offre manifestement insuffisante.

- condamner la MAAF à payer la somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner la MAAF aux entiers dépens, dont distraction au profit de maître Fonrouge, société Lexavoués.

Par conclusions signifiées par RPVA le 12 juillet 2016, la société MAAF Assurance demande à la cour de :

Confirmer le jugement du 26 février 2016 en ce qu'il a :

- déclaré irrecevable du fait de l'autorité de la chose jugée les demandes relatives aux postes suivants :

* le préjudice scolaire et universitaire ou de formation jusqu'au 17 mars 2008,

* le déficit fonctionnel temporaire sauf à établir une aggravation postérieurement au PV de transaction signé le 17 mars 2008,

* le déficit fonctionnel permanent sauf à établir une aggravation postérieurement au PV de transaction signé le 17 mars 2008,

- déclaré recevable les demandes portant sur :

* le poste FD

* le poste ATP après consolidation

* le poste PGPF

* le poste IP

* le poste préjudice d'établissement

* le poste préjudice d'agrément

- fixé les préjudices de [I] [E] de la manière suivante :

* incidence professionnelle : 50.000€

* préjudice d'agrément : rejet

* préjudice d'établissement : 15.000€

- réformer le jugement en ce qu'il a évalué l'ensemble du dommage corporel de [I] [E] à la somme totale de 491.715,60€.

Statuant à nouveau,

- fixer les postes de préjudices autres que ceux dont il est sollicité la confirmation, comme suit :

* frais divers y compris ATP avant consolidation : 19.168€

* tierce personne TP : 41.448€ jusqu'au 1er janvier 2017 et pour le futur une rente trimestrielle de 682 €

* perte de gains professionnels actuels PGPF : 250.114€

- fixer l'indemnité due à madame [I] [E] à la somme totale de 375.730€

- dire et juger qu'il sera versé à madame [I] [E] une rente trimestrielle et viagère au titre de la tierce personne d'un montant de 682€, payable à compter du 1er janvier 2017 et qui sera suspendue en cas d'hospitalisation ou de prise en charge en milieu médical supérieure à 45 jours ;

- dire et juger que l'assiette concernée par le doublement des intérêts au taux légal consistera en le montant de l'offre faite le 15 décembre 2014, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, étant précisé en ce qui concerne la rente que la sanction s'applique aux arrérages échus de la rente,

- débouter madame [I] [E] du surplus de ses demandes,

- débouter madame [I] [E] de sa demande d'indemnité de procédure sollicitée au visa des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et, à tout le moins, réduire à de plus justes proportions l'indemnité le cas échéant,

- statuer ce que de droit sur les dépens, dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Les CPAM de la Dordogne et de Rochefort régulièrement assignées et à qui ont été signifiées les conclusions des parties n'ont pas constitué avocat.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 15 mai 2017.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes de Mme [E]

En application de l'article 2052 du code civil, les transactions entre les parties ont l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ; elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit ni pour cause de lésion ; s'agissant de l'indemnisation d'une victime d'un accident de la circulation, l'autorité de la chose jugée fait obstacle, sauf aggravation, à toute réclamation de la victime au titre d'un poste de préjudice qui a été débattu lors de la transaction, et qui a été réparé ou dont l'indemnisation a été rejetée.

Il ressort de l'examen du protocole de transaction signé les 15 et 17 mars 2008 par les parents de [I] [E] et validé par le juge des tutelles que le préjudice de [I] [E] a été évalué selon le rapport du docteur [T], expert de la MAAF, et que seuls ont été indemnisés les postes :

- déficit fonctionnel temporaire

- déficit fonctionnel permanent sur la base de 25%

- préjudice scolaire pour la perte de l'année de CE1

- souffrances endurées sur la base de 4/7

- préjudice esthétique

- participation aux honoraires d'avocat.

Le tribunal a considéré d'une part que l'autorité de chose jugée avait pour effet l'irrecevabilité des demandes relatives :

- au préjudice scolaire et universitaire ou de formation jusqu'au 17 mars 2008

- au déficit fonctionnel temporaire sauf à établir une aggravation postérieurement au 17 mars 2008

- au déficit fonctionnel permanent sauf à établir une aggravation postérieurement au 17 mars 2008,

et que cette aggravation n'était pas établie par le rapport d'expertise du docteur [B].

Il a jugé d'autre part qu'étaient recevables les demandes relatives portant sur :

* le poste frais divers

* le poste aide tierce personne après consolidation

* le poste perte de gains professionnels futurs

* le poste incidence professionnelle

* le poste préjudice d'établissement

* le poste préjudice d'agrément,

non visés par la transaction.

Le jugement n'est critiqué sur ce second chef par aucune des parties, et il sera confirmé.

En revanche s'agissant du premier point, si la cour considère comme le tribunal que ne sont recevables que les demandes qui résulteraient d'une aggravation postérieure au 17 mars 2008, il lui apparaît que l'aggravation est établie :

- s'agissant du déficit fonctionnel permanent que l'expert judiciaire le docteur [B] évalue à 50% alors qu'il avait été évalué en 2007 par l'expert MAAF à 25%, l'expert a en effet constaté même en l'absence d'aggravation des séquelles neurologiques proprement dites, une aggravation situationnelle, en ce sens que [I] [E] avait été consolidée alors qu'elle n'avait que 15 ans, âge auquel elle vivait chez ses parents, n'était pas encore en recherche d'autonomie et où son avenir professionnel n'était pas envisagé à long terme, alors qu'à la date de l'expertise du docteur [B], Mme [E] a 21 ans, son cursus scolaire est achevé, et elle est en recherche d'insertion professionnelle, de sorte que peuvent être pleinement appréhendées les conséquences de l'accident telles que désormais déployées qui, s'agissant des séquelles d'un grave traumatisme crânien chez un enfant de 8 ans, ne sont fixées que de longues années après, la consolidation ayant été en l'état prématurée ; il en résulte que Mme [E] est donc fondée à obtenir une indemnisation de son déficit fonctionnel permanent sur la base du différentiel entre le taux de 25% retenu dans la transaction et celui de 50% évalué en 2013, les conséquences de l'aggravation n'étant prises en compte qu'à compter du 17 mars 2008 ;

- s'agissant du déficit fonctionnel temporaire, le docteur [B] fixant la date de consolidation au 31 décembre 2011, dès lors que la cour retient une aggravation du déficit fonctionnel permanent, le déficit fonctionnel temporaire sera pris en compte à compter du 17 mars 2008 et jusqu'au 31 décembre 2011, sur la base de 50 %, taux retenu par l'expert, et il n'est dû, en raison de l'autorité de chose jugée, aucune indemnisation pour la période postérieure à la consolidation prise en compte dans le protocole à la date du 26 janvier 2004 ;

- s'agissant au préjudice scolaire et universitaire ou de formation après le 17 mars 2008.

Le jugement sera réformé de ce chef.

La reconnaissance de l'aggravation, avec une consolidation au 31 décembre 2011, a une incidence notamment sur le déficit fonctionnel temporaire.

Sur le préjudice

Sur les frais divers d'assistance à expertise judiciaire

Le tribunal a retenu une somme de 1900 € correspondant à l'assistance du docteur [Y] lors de l'expertise judiciaire du docteur [B].

Le jugement n'est pas critiqué de ce chef par les parties. Il sera confirmé.

Sur la tierce personne avant consolidation

Ce poste ouvre droit à indemnisation pour la période du 27 juin 2000 au 26 janvier 2004, date de consolidation retenue par la transaction et sur celle du 18 mars 2008 au 31 décembre 2011 postérieure à la transaction.

Pour la période antérieure à la transaction :

- pour la période du 27 juin 2000 au 1er septembre 2000, 3 h par jour

- du 2 septembre 2000 au 26 janvier 2004, 1 h par jour

taux et périodes retenus par le tribunal et acceptés par les parties, le désaccord portant sur le coût horaire, que le tribunal a fixé à 15 € et que la MAAF veut voir réduire à 12 € au motif que cette aide a été assurée dans le milieu familial sans débours ; la cour ne retiendra pas cette argumentation et le jugement sera confirmé, la circonstance que l'assistance n'ait pas donné lieu à des interventions extérieures rémunérées étant indifférente.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé ce préjudice à 21645 €.

Pour la période postérieure à la transaction, et également sur un tarif de 15 € l'heure et sur la base des conclusions du docteur [B] qui ne sont pas utilement critiquées :

- 18 mars 2008 à septembre 2008 2h par jour : 21 jours et 6 mois (180 jours), 201 jours soit 402 h = 6030 €

- augmentation de l'aide de 3h par jour pendant la période de déscolarisation de septembre 2008 à mars 2009 soit 210 jours et 630 h = 9450 €

- avril 2009 au 31 décembre 2011 soit 33 mois et 2 h par jour , 1980 h = 29 700€

- total : 6930 + 9450 + 29 700 = 45 180 €.

Le jugement sera réformé de ce chef.

Sur le déficit fonctionnel temporaire

Ce préjudice a été partiellement indemnisé dans le cadre de la transaction de 2008, pour la période de déficit fonctionnel temporaire total du 2 février au 26 juin 2000, correspondant au temps d'hospita1isation, avec une indemnisation de 2000 €, sans curieusement prise en compte du déficit fonctionnel temporaire pour la période postérieure jusqu'à la consolidation au 26 janvier 2004.

Ce préjudice a été retenu par le docteur [B] et il ouvre droit à indemnisation du fait de la date de consolidation retardée pour la période postérieure au 17 mars 2008, la période entre la consolidation initialement fixée au 26 janvier 2004 et la transaction ne pouvant, en application de l'autorité de chose jugée, être indemnisée.

Pour la période retenue soit du 18 mars 2008 au 31 décembre 2011, le taux de déficit fonctionnel temporaire est fixé par l'expert à 50% et il est demandé 350 € par mois, sur la base d'un taux mensuel habituellement retenu de 700 €.

Il sera fait droit à cette demande à hauteur de 350 € X (14 jours de mars 2008 + 9 mois de 2008 + 36 mois de 2009, 2010, 2011 soit 45 mois = (350 /30 X 14) + (45 X 350 €) = 163.33 € + 15750 € = 15913.33 €.

Le jugement sera réformé en ce qu'il a déclaré cette demande irrecevable.

Sur les souffrances endurées

Ce poste a été envisagé dans la transaction et les souffrances endurées ont été évaluées à 4/7 par l'expert, et indemnisées à hauteur de 2000 €.

Le docteur [B] les évalue à 4.5/7 et Mme [E] demande à ce titre une somme de 20000 €.

L'évaluation à 4.5/7 doit s'analyser en une aggravation, ce qui est cohérent avec le fait que la consolidation est considérée comme intervenant sept ans plus tard, d'où une prolongation de la durée des souffrances endurées ; mais l'aggravation ne sera prise en compte que pour la période postérieure au 17 mars 2008 ; la cour accordera à ce titre pour la période de trois ans retenue et compte tenu de la nature de la pathologie une somme de 2500 €.

Sur le préjudice scolaire universitaire ou de formation

Le tribunal a déclaré la demande de Mme [E] irrecevable au motif que ce préjudice a été indemnisé par la transaction au titre du redoublement du CE1 à hauteur de 3100 € et qu'il n'a pas retenu d'aggravation postérieurement au 17 mars 2008.

Mme [E] sollicite une somme de 80000 € soit 10000 € par an pendant huit ans, pour cinq années d'études secondaires perturbées et faisant valoir qu'elle aurait pu suivre des études supérieures.

Ce préjudice peut être retenu dans son principe, dès lors que la scolarité de la victime a été perturbée durablement après l'accident mais seulement, en raison de l'autorité de chose jugée, pour la période postérieure à la transaction du 17 mars 2008, soit à une date où elle avait 16 ans et était à l'institut médico pédagogique de [Localité 3] , puis en 2009 en IMPro ; il n'est pas acquis qu'elle aurait pu suivre des études supérieures et ses parents connaissaient à la date de la transaction l'incidence scolaire de l'accident sur les huit années postérieures, de sorte qu'en ne sollicitant pas une indemnisation au delà du redoublement du CE1 dans les suites immédiates de l'accident, ils ont eux-mêmes considéré l'impact limité de l'accident sur le cursus de [I] [E].

Il sera accordé, par réformation du jugement, une somme de 12 000 €.

Sur les préjudices patrimoniaux permanents

Il sera fait application en tant que de besoin du barème dit Gazette du palais de 2013 comme demandé par Mme [E], la cour, qui arbitre souverainement le barème applicable, ne retenant pas le barème des assureurs BCIV invoqué par la MAAF.

1. Sur la tierce personne après consolidation

Le docteur [B] estime qu'est nécessaire une aide deux heures par jour; Mme [E] critique cette évaluation et fait valoir que son médecin -conseil le docteur [Y] estime que cette aide devrait être de 3 h par jour ; la cour retiendra comme le tribunal deux heures, le docteur [B] ayant répondu au dire de son confrère et Mme [E] ne justifiant pas que les tâches de surveillance, incitation, veille téléphonique excèdent 2h par jour, l'aide ne portant pas sur les gestes de la vie courante.

En revanche la cour considère que cette aide est due même pour les périodes où Mme [E] était en ESAT (établissement spécialisé d'aide pour le travail).

Il est en conséquence dû pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2016 soit 60 mois, soit 1800 jours soit 3600 heures 54 000 €. L'appelante ne formait sa demande en capital que jusqu'au 31 décembre 2014, mais la cour fera son calcul actualisé sur la période jusqu'au 31 décembre 2016.

Pour la période postérieure, la somme allouée à Mme [E] sera capitalisée dans les conditions décrites ci dessus ; ainsi sur la base d'un besoin de 2 h par jour soit 730 h par an, pour un coût de 15 € heure, soit annuellement 10950 €, il sera alloué à Mme [E] conformément à sa demande une rente mensuelle plus conforme à la nécessité d'organisation de son budget, d'un montant, compte tenu de son âge à la date de consolidation, de 912.50 €, et ce à compter du 1er janvier 2017. Cette rente sera révisable dans les conditions fixées au dispositif , identiques à celles décidées par le tribunal.

2. Sur la perte de gains professionnels futurs

Ce poste de préjudice relève de la perte de chance, dès lors que Mme [E] ayant été blessée à l'âge de huit ans, son cursus était à peine engagé et sans particularité à cette date.

A ce jour, Mme [E] qui avait un emploi de blanchisseuse en ESAT à [Localité 4], en a démissionné en 2011 et n'a pas retrouvé d'emploi, et considère qu'elle ne peut travailler dans ce type d'établissement ; elle a le statut de travailleur handicapé depuis 2015. Le docteur [B] considérait qu'elle peut travailler en établissement adapté, et la cour retiendra cette conclusion, Mme [E] n'apportant pas d'éléments de nature à la contredire utilement.

Il est constant que son taux de déficit fonctionnel permanent de 50% limite ses possibilités d'insertion professionnelle, et la MAAF ne conteste pas le principe d'une indemnisation.

Le tribunal a pris en compte un salaire moyen de 1200 € puis 1300 € à compter de 23 ans soit un manque à gagner par rapport au salaire ESAT de 550 € puis 650 €.

Mme [E] sollicite une indemnisation calculée sur le salaire médian de 1700€, dont à déduire éventuellement la somme de 650 € qu'elle aurait pu gagner en ESAT, d'où une perte mensuelle de 1050 €, et une somme globale de 601 196 €.

La MAAF raisonne sur la base d'un salaire équivalent au SMIC dont à déduire le salaire d'ESAT et propose une somme de 19800 € pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 puis une somme de 230 314 € capitalisée.

Il n'y a pas lieu de prendre en compte une brève période en 2005 de troubles psychologiques de Mme [E] ayant conduit à une hospitalisation en milieu psychiatrique, dont le lien avec l'accident n'est pas avéré, de sorte que rien ne permet de penser que Mme [E] n'aurait pas eu une scolarité classique et aurait ainsi accédé à une vie professionnelle générant une rémunération équivalente à la rémunération médiane qui est en France de 1700 €, quand bien même elle est taisante sur l'apport que pouvait constituer à cet égard son milieu familial.

La cour retiendra une indemnisation sur la base de 1200 € pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, puis du salaire médian de 1700 € à compter de 1er janvier 2015 soit environ l'âge de 23 ans auquel Mme [E] aurait pu espérer accéder à une stabilisation professionnelle, et dont à déduire pour les deux périodes la somme de 650 € qu'elle pourrait percevoir en établissement adapté.

Pour la perte de gains professionnels futurs échue au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 se sont écoulés 1095 jours. Ceux-ci seront indemnisés en prenant en compte un revenu mensuel de 1200 € - 650 € = 550 €, et un revenu annuel de référence de 6 600 € et un revenu journalier de référence de 18.07 €, ce qui porte l'indemnisation au titre de cette perte à la somme de 19 786.65 €.

Pour la perte de gains professionnels futurs échue au titre de la période du 1er janvier 2015 au 3 juillet 2017, date de la présente décision, se sont écoulés 914 jours. Le revenu journalier de référence s'élève à 1700 € - 650 € (salaire ESAT) = 1050 € soit un revenu annuel de référence de 1050 X 12 = 12600 € et un revenu journalier de référence de 34.52 €, ce qui porte l'indemnisation à 31 551.28 €.

Pour la perte de gains professionnels futurs à échoir, il y a lieu de capitaliser dans les conditions précédemment retenues, l'euro de rente viager pour une femme de 25 ans étant fixé à 41,796 € selon le barème dit 'gazette du palais 2013" et le revenu annuel de référence étant fixé à 12600 €. Cela porte l'indemnisation en capital à la somme de

526 629.60 €.

Le total de ce poste s'élève donc à 19 786.65 + 31 551.28 + 526 629.60 =

577 963.53 €, somme que la MAAF sera condamnée à payer pour ce poste.

Le jugement sera réformé de ce chef.

3. Sur l'incidence professionnelle

Le tribunal a accordé à Mme [E] une somme de 50 000 € ; elle sollicite une somme de 70 000 € ; la MAAF, qui avait initialement proposé 20 000 € conclut à la confirmation.

Le jugement sera confirmé, qui a fait de ce poste de préjudice une juste appréciation, le préjudice étant incontestable mais Mme [E] n'apportant pas d'éléments d'appréciation contraires.

4. Sur le préjudice d'agrément

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [E] de sa demande à ce titre; si l'expert mentionne qu'elle ne peut se livrer à des sports d'équilibre, il n'est pas établi qu'elle en pratiquait avant l'accident, aucune pièce n'étant produite, et le taux de déficit fonctionnel permanent inclut les limites à des activités sportives ou de loisirs.

5. Sur le préjudice d'établissement

Il a été retenu par l'expert, compte tenu des difficultés de socialisation de Mme [E], et indemnisé par le tribunal à hauteur de 15 000 € somme sollicitée devant le tribunal par Mme [E] et acceptée par la MAAF ; le jugement sera confirmé, l'appelante n'apportant pas d'éléments à l'appui d'une aggravation de ce préjudice alors qu'il avait été fait droit intégralement à sa demande initiale.

6. Sur le déficit fonctionnel permanent

La cour a retenu une aggravation de ce poste de préjudice qui a été indemnisé à hauteur de 65 000 € par la transaction de 2008 sur la base d'un déficit fonctionnel permanent de 25 %, alors qu'il est désormais reconnu au taux de 50 %, soit une différence de 25 %.

Mme [E] est donc fondée à obtenir une indemnisation complémentaire prenant en compte la somme déjà perçue.

En prenant en considération ce taux de 50 %, et une consolidation à l'âge de 20 ans, et une valeur du point d'indemnisation de 3120 € , il serait dû une indemnité de

156 000 €, dont il y a lieu de déduire la somme de 65 000 € déjà perçue, de sorte que le reliquat s'élève à 156 000 - 65 000 = 91 000 €, somme que la MAAF sera condamnée à payer à ce titre.

RÉCAPITULATIF

Le préjudice de Mme [E] s'établit donc comme suit :

Frais divers:

* assistance à expertise 1900 €

* assistance par tierce personne avant consolidation 21645 € + 45180 € , total 69625 €

assistance par tierce personne post-consolidation 54000 €

+ rente mensuelle de 912.50 € à compter du 1er janvier 2017

perte de gains professionnels futurs 577 963.53 €

incidence professionnelle 50 000 €

préjudice scolaire 12 000 €

déficit fonctionnel temporaire 15 913.33 €

souffrances endurées 2500 €

déficit fonctionnel permanent 91 000 €

préjudice d'établissement 15 000 €

préjudice d'agrément 0

total 888 001.86 €

Les organismes sociaux ne présentent aucune créance ; l'arrêt leur sera déclaré opposable.

Sur le doublement des intérêts au taux légal

L'appelante présente en appel comme devant le tribunal deux demandes distinctes.

Le jugement sera confirmé, comme le demande la MAAF, en ce qu'il a rejeté la demande d' « indemnité pour offre manifestement insuffisante », au demeurant non chiffrée, alors qu'il a été fait par l'assureur une proposition raisonnable, et qu'il est fait droit à son autre demande.

S'agissant de la majoration du taux d'intérêt légal, le tribunal a, rappelant les dispositions des articles L211-9 et L 211-13 du code des assurances, et au motif du caractère tardif de l'offre, condamné la MAAF à payer à Mme [E] les intérêts au double de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 15 décembre 2014 par la MAAF dans ses conclusions devant le tribunal de grande instance, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 28 septembre 2013, soit cinq mois après le dépôt du rapport d'expertise faisant suite à l'ordonnance de référé et jusqu'au 15 décembre 2014.

Mme [E] ne conclut pas expressément sur ce point et demande au dispositif de ses conclusions la condamnation de la MAAF « au double taux d'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ».

La MAAF demande la réformation en ce que le tribunal n'a pas précisé s'agissant pour partie d'une rente que le doublement du taux devait s'appliquer sur les arrérages échus de la rente et non sur le capital représentatif.

Le point de départ de la majoration est le 28 septembre 2013 soit cinq mois après le dépôt du rapport d'expertise du docteur [B] constatant l'aggravation de l'état de Mme [E] ; il est constant que la première offre de la société MAAF Assurances a été formulée dans ses conclusions du 15 décembre 2014, de sorte que le doublement du taux d'intérêt légal est encouru du 28 septembre 2013, jusqu'au 15 décembre 2014, date des conclusions formant une proposition d'indemnisation, et sur la totalité de la somme allouée ; toutefois, ce doublement ne porte, pour la rente, que sur les arrérages échus à la date de cette décision.

Le jugement sera réformé de ce chef.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens d'appel seront mis à la charge de la MAAF qui succombe pour partie de ses demandes et sera déboutée de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à verser à Mme [E] , à qui il serait inéquitable de laisser la charge de ses frais irrépétibles, une somme de 2000 €.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Dit que Mme [E] a subi une aggravation de son préjudice postérieurement au 17 mars 2008 et qu'en conséquence ses demandes au titre :

- du préjudice scolaire et universitaire ou de formation

- du déficit fonctionnel temporaire

- du déficit fonctionnel permanent

- des souffrances endurées ,

postérieurs à cette date sont recevables ;

Confirme partiellement le jugement déféré en ce que :

- il a déclaré recevables les demandes portant sur :

* le poste frais divers dans lequel rentre le poste assistance par tierce personne avant consolidation,

* le poste assistance par tierce personne après consolidation,

* le poste perte de gains professionnels futurs,

* le poste incidence professionnelle,

* le poste préjudice d'établissement,

* le poste préjudice d'agrément ;

- il a fixé les postes de préjudice suivants :

* incidence professionnelle IP : 50.000 €

* préjudice d'agrément : rejet

* préjudice d'établissement PE : 15.000 € ;

Réforme partiellement le jugement déféré en ce que :

- il a débouté Mme [E] de sa demande de préjudice scolaire universitaire ou de formation,

- il a fixé le poste de frais divers à la somme de 23 545 €,

- il a fixé l'assistance par tierce personne temporaire à 50 805 €,

- il a fixé l'assistance par tierce personne future à une rente mensuelle de 819 €,

- il a fixé la perte de gains professionnels futurs à 352 365.60 €,

- il a déclarée irrecevable la demande d'indemnisation du déficit fonctionnel permanent et temporaire,

- il a déclarée irrecevable la demande d'indemnisation du préjudice scolaire, universitaire ou de formation ;

Statuant à nouveau ;

Fixe le préjudice total de Mme [E] à 888 001.86 € total, celui-ci se décomposant comme suit :

- Frais divers : 69625 €,

- Assistance par tierce personne future:

* 54 000 € du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2016 ,

* puis rente mensuelle de 912.50 € à compter du 1er janvier 2017,

-

perte de gains professionnels futurs : 577 967.53 €,

- incidence professionnelle 50 000 €

- préjudice scolaire : 12 000 €

- déficit fonctionnel temporaire: 15 913.33 €

- souffrances endurées : 2 500 €

- déficit fonctionnel permanent : 91 000 €

- préjudice d'établissement : 15 000 € ;

Dit que cette rente sera payable à terme échu avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance échue et sera révisable chaque année conformément aux dispositions de l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985, étant précisé que l'indexation n'interviendra et les intérêts ne seront dus qu'à compter du présent arrêt,

Condamne la société MAAF Assurances à payer à Mme [E] la somme de

888 001.86 € en réparation de son préjudice à la suite de l'accident dont elle a été victime le 2 février 2000 ;

Dit que le présent arrêt est opposable à la CPAM de la Dordogne et à la CPAM de Rochefort ;

Dit que ces condamnations seront assorties d'un doublement des intérêts légaux sur la totalité de la sommes allouée, à compter du 18 septembre 2013 et jusqu'à la date du 15 décembre 2014, ce doublement ne portant, pour la rente, que sur les arrérages échus à la date de cette décision ;

Condamne la société MAAF Assurances à payer à Mme [E] une somme de 2000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la MAAF Assurances aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Elisabeth LARSABAL, président, et par Madame Irène CHAUVIRE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 16/01843
Date de la décision : 03/07/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 1A, arrêt n°16/01843 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-07-03;16.01843 ?
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