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28/06/2017 | FRANCE | N°14/05593

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 28 juin 2017, 14/05593


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 28 JUIN 2017



(Rédacteur : Monsieur Jean-François SABARD, Président,)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 14/05593







Madame [Y] [F]



c/



SAS ADP SUD-OUEST PISCINES (mise en liquidation judiciaire)



SCP [S] - [X] & [E]

CGEA de Bordeaux mandataire de l'AGS du Sud-Ouest















Nature de la décision : AU FOND













Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié pa...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 28 JUIN 2017

(Rédacteur : Monsieur Jean-François SABARD, Président,)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 14/05593

Madame [Y] [F]

c/

SAS ADP SUD-OUEST PISCINES (mise en liquidation judiciaire)

SCP [S] - [X] & [E]

CGEA de Bordeaux mandataire de l'AGS du Sud-Ouest

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 septembre 2014 (R.G. n°F 13/00281) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BERGERAC, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 25 septembre 2014,

APPELANTE :

Madame [Y] [F]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1] (GRANDE BRETAGNE), de nationalité Française

demeurant '[Adresse 1]

assistée de Me Stanislas LAUDET, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS ADP Sud-Ouest Piscines, mise en liquidation judiciaire par jugement du Tribunal de Commerce de Bergerac en date du 20 mai 2016

N° SIRET : 428 227 938

INTERVENANTES :

SCP [U] [S] - [R] [X] & [N] [E], ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS ADP Sud-Ouest Piscine prise en les personnes de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social [Adresse 2]

N° SIRET : 444 762 330

représentée par Me Aude GRALL de l'ASSOCIATION BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

CGEA de Bordeaux, mandataire de l'AGS du Sud-Ouest, pris en la personne de son Directeur domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 3]

représenté par Me Philippe DUPRAT de la SCP DAGG, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 avril 2017 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-François SABARD, Président, chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-François Sabard, président

Madame Isabelle Lauqué, conseiller

Madame Annie Cautres, conseiller

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

- prorogé au 28 juin 2017 en raison de la charge de travail de la cour.

***

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Madame [Y] [F] a été engagée par la SAS ADP SUD-OUEST PISCINES, suivant contrat de travail à durée déterminée, à temps partiel, du 4 avril au 30 septembre 2011, en qualité de secrétaire -niveau B de la convention collective nationale applicable- pour une rémunération mensuelle brute de 1.328,88 €.

La société employait 7 salariés.

L'employeur a soumis la relation de travail à la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises de bâtiment occupant jusqu'à 10 salariés, alors que, Mme [F] bénéficiant du statut ETAM estime qu'elle aurait dû se voir appliquer la convention collective des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment du 12 juillet 2006.

À compter du 1er octobre 2011, le contrat de travail à durée déterminée se transformait en contrat de travail à durée indéterminée.

Par avenant en date du 15 mars 2012 la durée de travail de Mme [F] passait de 31 à 34 heures mensuelles, moyennant un salaire brut de 1.664,94 €.

Du 29 octobre 2012 au 28 avril 2013, Mme [F] était placée en arrêt maladie.

Le 15 janvier 2013 l'employeur proposait à Mme [F] une modification de son contrat de travail. Elle refusait le 30 janvier suivant.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 26 mars 2013, Mme [F] était convoquée à un rendez-vous pour un entretien préalable en vue d'une éventuelle mesure de licenciement pour motif économique.

Par lettre du 17 avril 2013 elle était licenciée pour motif économique.

Le 26 avril 2013, elle adhérait au contrat de sécurisation professionnelle.

Le 25 juillet 2013, Mme [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Bergerac, aux fins de voir :

- dire et juger son licenciement pour motif économique dénué de cause réelle et sérieuse,

- condamner son ex-employeur à lui verser diverses sommes à titre d'indemnité ainsi que de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 8 septembre 2014, le conseil de prud'hommes de Bergerac, section industrie,

- déclare irrecevables les pièces portant les numéros 19 à 29 produites par Mme [F],

- dit que le licenciement économique de Mme [F] est sans cause réelle et sérieuse,

- condamne la SAS ADP SUD-OUEST PISCINES à lui verser les sommes de :

- 9.990 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonne le remboursement par la SAS ADP SUD-OUEST PISCINES aux organismes intéressés de trois mois d'indemnités de chômage versées à Mme [F],

- déboute Mme [F] de ses autres demandes,

- déboute la SAS ADP SUD-OUEST PISCINES de ses demandes reconventionnelles et la condamne aux entiers dépens et frais éventuels d'exécution du présent jugement.

Mme [F] a régulièrement interjeté appel de cette décision le 29 septembre 2014.

Par jugement en date du 20 novembre 2015 le tribunal de commerce de Bergerac a placé la société sous procédure de sauvegarde et par jugement en date du 20 mai 2016 le même Tribunal convertissait la procédure de sauvegarde en liquidation judiciaire.

Par conclusions déposées le 29 avril 2016, développées oralement à l'audience, Mme [F] conclut à la réformation partielle du jugement attaqué et demande à la Cour de

- juger que la rupture de son contrat de travail est nulle,

- requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein,

- requalifier son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- fixer la moyenne des douze derniers mois de salaire à la somme de 1.909,70 €.

Elle réclame le versement des sommes suivantes :

- 21.006,70 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 1.909,70 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier,

- 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 3.819,40 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 342.78 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 500 € à titre de dommages et intérêts pour défaut de mise en oeuvre de la convention collective nationale applicable,

- 244.84 € au titre du solde de l'indemnité compensatrice de congés payés,

- 600 € à titre de dommages et intérêts pour paiement tardif du complément de salaire,

- 16.515,23 € à titre de rappel de salaire en conséquence de la requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plein, outre 1.651,52 € à titre de congés payés afférents,

- 20.000 € au titre de la perte des droits de la salariée à la retraite en conséquence de la requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plein,

- 3.000 € au titre de la perte des droits de la salariée en matière de prévoyance en conséquence de la requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plein,

- 5.000 € au titre de la perte des droits de la salariée en matière d'assurance chômage en conséquence de la requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plein,

- 3.819,40 € à titre d'indemnité de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

'$gt; les sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.

- 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Enfin, elle demande à la Cour de condamner son ex-employeur, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à lui remettre toutes ses fiches de paie d'octobre 2011 à avril 2013 rectifiées.

A cet effet, Mme [F] fait valoir que :

- sur la nullité de la rupture du contrat de travail,

- le motif économique n'est pas la cause exacte du licenciement, d'une part, parce que son poste n'a pas été supprimé, d'autre part, parce que si les résultats négatifs de l'employeur pour les exercices 2011 et 2012 sont incontestables, ils paraissent largement imputables aux dépenses somptuaires réalisées par lui,

- la cause exacte de la rupture du contrat de travail réside dans les faits de harcèlement moral commis par Mme [S] [V] à son encontre et dénoncés à l'employeur.

- sur les conséquences indemnitaires de la nullité de la rupture de son contrat de travail,

- sur l'indemnité de licenciement nul,

- au moment de son licenciement, elle bénéficiait d'une ancienneté de 3 ans, elle est donc en droit d'obtenir une indemnité de licenciement équivalente à 6 mois de salaire brut, au minimum,

- sur les dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- elle a subi un harcèlement moral, avec la complicité passive de son employeur, et ce malgré l'intervention de l'inspection du travail. Elle a vu son état de santé gravement affecté. Elle a fait l'objet d'une dépression, et la rupture brusque de son contrat de travail a bouleversé l'équilibre de sa vie familiale, notamment en ce qu'il a entraîné sa séparation avec son compagnon,

- sur l'indemnité compensatrice de préavis,

- la nullité de la rupture en raison du harcèlement moral entraîne ipso facto un droit au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis.

- sur les dommages et intérêts pour défaut de mise en oeuvre de la convention collective applicable,

- l'employeur a soumis la relation de travail à la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises de bâtiment occupant jusqu'à 10 salariés, alors que, bénéficiant du statut ETAM elle aurait dû se voir appliquer la convention collective des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment du 12 juillet 2006.

- sur le licenciement irrégulier,

- l'employeur n'a pas respecté le délai de 2 jours ouvrables entre la tenue de l'entretien préalable et la notification du licenciement.

- sur le non-respect des critères d'ordre du licenciement,

- ayant une ancienneté de 3 ans et comptant 3 enfants à charge, son éviction a été préférée à celle d'un commercial de la société disposant de la même ancienneté mais n'ayant pas de charge de famille.

- sur la requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- elle travaillait à temps complet,

- son contrat de travail à durée déterminée initial ne comporte aucun motif de recours,

'$gt; en conséquence, son salaire doit être réévalué, un rappel de salaire doit être réalisé, des dommages et intérêts compensant le préjudice causé au titre de sa pension retraite, de sa prévoyance et de ses droits à l'assurance chômage doivent lui être alloués. De plus, des fiches de paie rectifiées doivent lui être remises.

- sur les dommages et intérêts pour versement tardif du complément de salaire pour maladie,

- durant ses 6 mois d'arrêts de travail pour maladie, elle s'est épuisée à réclamer à son employeur le versement de son complément de salaire.

Par conclusions déposées le 21 mars 2017 et développées oralement à l'audience, la SAS ADP SUD-OUEST PISCINES conclut à la réformation du jugement attaqué en toutes ses dispositions et demande à la Cour de juger que :

- Mme [F] n'a fait l'objet d'aucun harcèlement moral,

- la demande relative à la requalification de son contrat de travail à durée déterminée à temps partiel est prescrite.

Elle demande, en conséquence, à la Cour de débouter Mme [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de la condamner à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

À cet effet, la SAS ADP SUD-OUEST PISCINES fait valoir que :

- sur la prescription des demandes de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et du temps partiel en temps complet,

- n'ayant pas fait ces demandes en première instance, elles sont considérées comme étant des demandes nouvelles et sont ainsi irrecevables et prescrites.

- sur la demande de rappel de salaire,

- la situation de Mme [F] a été régularisée,

- Mme [F] ne justifie pas le nombre d'heures invoqué,

- Mme [F] sollicite des rappels de salaire intégral au titre des périodes d'arrêt maladie, alors même qu'elle a d'ores et déjà été indemnisée par le régime complémentaire, visant ainsi à se faire payer deux fois.

- sur la demande de dommages et intérêts compensant le préjudice au titre des droits à retraite,

- l'employeur a déjà procédé aux rappels de salaire à temps plein et établi en ce sens un bulletin de paie en mars 2013 pour lequel les cotisations retraite ont été prélevées,

- Mme [F] ne justifie pas le décompte de ses demandes exorbitantes, et ne justifie pas du moindre préjudice.

- sur les dommages et intérêts compensant le préjudice au titre de la prévoyance,

- Mme [F] se garde bien de justifier en quoi, ou, quand et dans quelles circonstances ses droits à prévoyance auraient été affectés.

- sur les dommages et intérêts compensant le préjudice au titre des droits à chômage,

- Mme [F] ne verse pas ses relevés d'indemnisation pôle emploi et ne prouve d'ailleurs même pas avoir été au chômage,

- Mme [F] ne justifie d'aucun préjudice.

- sur le solde de l'indemnité compensatrice de congés payés,

- ni le cabinet comptable, ni Mme [F] ne jugent utile d'exposer en quoi il resterait dû un reliquat au titre des indemnités de congés payés.

- sur la remise des fiches de paie rectifiées,

- aucune obligation n'impose de refaire un bulletin de paie par mois,

- rien ne justifie l'astreinte, et ce d'autant moins que Mme [F] n'avait pas jugé utile de formuler ses demandes devant le conseil de prud'hommes.

- sur la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- le dernier contrat de travail à durée déterminée de Mme [F] a pris fin le 30 septembre 2011. Or, elle a formulé sa demande le 28 avril 2016, soit 4 ans et 7 mois plus tard. Son action est donc prescrite et irrecevable.

- sur la demande de dommages et intérêts pour versement tardif du complément de salaire pour maladie de la salariée,

- Mme [F] ne justifie d'aucun préjudice.

- sur l'absence de harcèlement moral à l'encontre de Mme [F],

- durant les relations contractuelles, Mme [F] ne s'est jamais plainte de ses conditions de travail prétendument délétères.

- sur le bien fondé du licenciement pour motif économique,

- le poste de Mme [F] a bien été supprimé. L'offre d'emploi de la société étant antérieure au licenciement pour motif économique de Mme [F], cela ne permet pas d'établir que son poste n'a pas été supprimé,

- la réalité des difficultés de l'entreprise ne fait l'objet d'aucun doute d'autant plus qu'elles ont conduit à une procédure de sauvegarde puis de liquidation judiciaire.

- sur les dommages et intérêts pour défaut de mise en oeuvre de la convention collective nationale applicable,

- en dépit de l'erreur matérielle dans l'intitulé de la convention collective apparaissant sur sa fiche de paie, Mme [F] s'est bien vue appliquer le bon statut conventionnel puisque l'employeur a bien cotisé à la prévoyance ETAM de la PRO BTP.

- sur les dommages et intérêts pour licenciement irrégulier,

- Mme [F] ne justifie d'aucun préjudice.

- sur le non-respect des critères d'ordre des licenciements,

- lorsqu'un emploi est supprimé, c'est dans la catégorie professionnelle à laquelle appartient le salarié qu'il faut appliquer les critères de choix retenus. Or, Mme [F] n'était absolument pas dans la même catégorie professionnelle qu'un commercial. De fait, il n'y avait pas lieu d'appliquer ce critères d'ordre des licenciements.

Par conclusions déposées le 31 mars 2017 et développées oralement à l'audience, le CGEA de Bordeaux demande à la Cour de :

- lui donner acte de ce qu'il se réfère aux arguments et conclusions de la SCP [S]-[X]-[E], ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS ADP SUD OUEST,

- débouter Mme [F] de sa demande de rappel de salaire sur la base d'un temps plein,

- débouter Mme [F] de ses demandes de dommages et intérêts pour perte des droits en matière de retraire, de prévoyance et d'assurance chômage en conséquence de la qualification du contrat de travail à temps plein.

En cas de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, il demande à la Cour de fixer l'indemnité de requalification à la somme de 1.713,87 €.

Il demande par ailleurs à la Cour de juger l'absence de harcèlement moral et de débouter, en conséquence, Mme [F] de sa demande de nullité du licenciement. À défaut, il demande à la Cour de réduire le montant des dommages et intérêts à la somme maximum de 10.283,22 €.

En outre, il demande à la Cour de juger que le licenciement pour motif économique de Mme [F] est bien fondé et demande donc de la débouter de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse. À défaut, il demande à la Cour de bien vouloir réduire le montant des dommages et intérêts à la somme maximum de 6.900 €.

De surcroît, il demande à la Cour de débouter Mme [F] de sa demande d'indemnité pour procédure de licenciement irrégulière et de réduire le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 3.427,71 € brut, outre les congés payés afférents de 342.77 €.

Il demande également à la Cour d'exclure, dans tous les cas, sa garantie, s'agissant des dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait du harcèlement moral, pour paiement tardif des compléments de salaire et des dommages et intérêts pour perte des droits de la salariée en matière de retraire, de prévoyance ou d'assurance chômage.

Enfin, il demande à la Cour de juger que l'arrêt à intervenir ne lui sera opposable que dans la limite légale de sa garantie, laquelle exclut l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À cet effet, le CGEA de Bordeaux fait valoir que :

- sur l'opposabilité,

- la loi donne faculté à l'AGS de contester la créance du salarié, indépendamment de son éventuelle inscription sur la liste des créances salariales par le mandataire judiciaire ou le liquidateur.

- sur la demande de requalificaition du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein,

- un rappel de salaire sur la base d'un temps plein a été effectué par la société en mars 2013 pour les années 2011 et 2012. En conséquence, aucun rappel de salaire n'est dû à Mme [F].

- sur les dommages et intérêts pour perte des droits de la salariée à la retraite, en matière d'assurance chômage et de prévoyance, en conséquence de la requalification du contrat de travail en contrat à temps plein,

- l'ensemble des sommes liées à la requalification à temps plein a été régularisé et les cotisations afférentes ont été payées de sorte que Mme [F] n'a subi aucun préjudice. D'ailleurs, elle ne justifie pas du préjudice qu'elle aurait pu subir et encore moins à la hauteur des sommes réclamées.

- sur l'indemnité de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- le code du travail prévoit une indemnité équivalente à un mois de salaire. Afin de prétendre à une somme supérieure, Mme [F] doit démontrer le préjudice subi, ce qu'elle ne fait pas.

- sur la rupture du contrat de travail,

- en cas de licenciement jugé nul pour harcèlement moral, Mme [F] ne justifie pas d'un préjudice subi qui n'aurait pas été réparé par l'allocation de six mois de salaire,

- en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, faute de préjudice démontré et étayé par des justificatifs Mme [F] sera déboutée de sa demande,

- des autres demandes relatives à la rupture, Mme [F] ne saurait prétendre à une somme supérieure à 3.427,74 € brut outre congés payés afférents, son salaire étant de 1.713,87 € brut,

- le fait d'avoir informé Mme [F] des motifs économiques au moment de l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle n'a pas pour effet de rompre le contrat.

- des dommages et intérêts pour défaut de mise en oeuvre de la convention collective applicable 

- le CGEA fait siens les arguments du mandataire liquidateur sur ce point.

- créances non garanties,

- les dommages et intérêts en réparation du préjudice subi lié au harcèlement moral ne sont pas garantie par l'AGS en considération de la nature de la créance et de la date d'acquisition de la créance.

- plafonnement de la garantie-intérêts,

- compte tenu de la durée du contrat au jour de l'ouverture de la procédure collective, l'AGS garantira les créances fixées dans la limite de cinq fois le plafond mentionné dans le code du travail.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande de requalification du contrat de travail :

Contrairement à l'argumentation développée par l'intimée , les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile prohibant à peine d'irrecevabilité les nouvelles prétentions devant la cour sauf dans les cas prévus par cet article ne sont pas applicables à la procédure orale sans représentation obligatoire devant la chambre sociale pour les déclarations d'appel antérieures au 1er août 2016 conformément aux dispositions du décret du 20 mai 2016 .

L'exception de prescription ne saurait être utilement invoquée par l'intimée dans la mesure où la salariée a saisi le conseil de prud'hommes le 25 juillet 2013 de plusieurs demandes découlant d'un contrat de travail ayant pris effet le 4 avril 2011 soit dans le délai de la prescription quinquennale applicable à l'époque et qu'en application du principe de l'unicité de l'instance qui était alors en vigueur, l'effet interruptif de prescription de la saisine de la juridiction prud'homale s'étend à l'ensemble des demandes découlant d'un même contrat de travail.

S'agissant de la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, il sera observé par la cour que les relevés des horaires et les bulletins de salaire de la salariée ne montrent pas qu'elle travaillait à temps complet alors qu'elle effectuait moins de 35 heures hebdomadaires en moyenne soit 147,34 heures par mois mais aussi des heures complémentaires dont certaines étaient majorées lesquelles ont toutes été payées par l'employeur.

Il convient donc de rejeter toutes les demandes indemnitaires présentées par l'appelante sur ce point.

Force est de constater par ailleurs que le contrat de travail à durée déterminée prenant effet le 4 avril 2011 pour se terminer le 30 septembre 2011 ne comporte aucun motif de recours et que dès lors c'est à juste titre que la salariée demande une indemnité de requalification qu'il convient en l'espèce de fixer à un mois de salaire soit à la somme de 1713,87 euros sur la base d'un temps complet .

Sur le harcèlement moral :

Au terme des dispositions de l'article L 11 52 '1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

La salariée fait valoir qu'elle a dû faire face à un véritable acharnement de la part de sa supérieure hiérarchique se manifestant par une communication fondée sur des post-it infantilisants et contenant de nombreuses brimades et reproches injustifiés tout en précisant que son licenciement aurait comme principale cause les faits de harcèlement moral que la salariée a dénoncés à l'employeur.

Il est relevé notamment par un témoin ancien salarié de la société que Madame [F] devait travailler sous pression faisant plusieurs taches à la fois pendant que sa supérieure hiérarchique était dans son bureau pour boire son café et fumer une cigarette.

Il est précisé également que le comportement de cette personne était si négatif

qu'en une seule année, pas moins de trois secrétaires s'étaient succédées au poste de Madame [F].

Si la matérialité des faits invoqués par la salariée peuvent laisser présumer l'existence d'actes de harcèlement moral, la cour constate que les instructions et directives données par sa supérieure hiérarchique au moyen de post-it dont les termes ne sont ni comminatoires ni dénigrants et non susceptibles d'être qualifiés d'actes de harcèlement, étaient justifiées par des éléments objectifs pour le bon fonctionnement du service qui rendaient nécessaire le rappel d'un certain nombre de d'instructions et de consignes pour la bonne exécution du travail effectué par Madame [F] et qu'en réalité les arrêts de travail de cette dernière pour un syndrome dépressif ne sont pas consécutifs à la dégradation de ses conditions de travail dans l'entreprise.

Sur le licenciement pour motif économique :

En application de l'article L 12 33 '3 du code du travail, constitue un licenciement économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Le licenciement économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise.

Il appartient au juge de vérifier la réalité de la suppression de l'emploi ainsi que la réalité des difficultés économiques invoquées.

Les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises.

La recherche des possibilités de reclassement s'apprécie à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Doivent être proposés au salarié dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou à défaut d'une catégorie inférieure.

Madame [F] conteste son licenciement pour motif économique au motif d'une prétendue absence de suppression de son poste et de ce que les résultats négatifs de l'entreprise seraient imputables aux dépenses somptuaires réalisées par l'employeur.

Or il est justifié par l'employeur que l'offre d'emploi publiée le 4 novembre 2012 sur le site Internet de pôle emploi concerne la recherche d'une secrétaire comptable bilingue en anglais pour un mi-temps avec une expérience en comptabilité générale pour l'entreprise située à [Localité 2] sans qu'il soit précisé qu'il s'agit de l'entreprise sud-ouest piscine et qu'il en est de même de l'annonce pour un poste d'assistante administrative et commerciale en date du 27 mars 2013.

S'agissant du motif économique du licenciement, la lettre de licenciement du 17 avril 2013 comme la convocation à l'entretien préalable du 26 mars 2013 précise que l'entreprise est déficitaire depuis deux ans et que le résultat qui était de -52'030 € au 30 septembre 2011, a été de -119'367 €au 30 septembre 2012 et que les capitaux propres s'élevant à 139'604 € à la fin de l'exercice 2011 ont été diminués à 20'237 € en 2012 avec une capacité d'autofinancement négative et que son poste a dû être supprimé sans aucune embauche de remplaçant.

Il est ajouté par l'employeur dans le licenciement qu'il lui a été proposé d'exercer ses fonctions dans le cadre d'un temps partiel à raison de 16 heures hebdomadaires et que cette proposition a été refusée par la salariée par lettre du 30 janvier 2013 et que pour l'ensemble de ces raisons l'employeur a été contraint de réduire sa masse salariale et par voie de conséquence de supprimer son poste avec impossibilité de tout reclassement compte tenu du faible effectif des salariés.

Contrairement à l'appréciation du premier juge, les difficultés économiques de l'entreprise qui était placée par la suite dans le cadre d'une procédure collective sous le régime de la sauvegarde puis de la liquidation judiciaire, sont bien réelles et que si des dépenses à caractère somptuaire ont été réalisées par l'employeur notamment pour un ou deux véhicules de service ou de fonction notamment pour les commerciaux, ce choix de l'employeur lui appartient et ne remet pas en cause la nécessité pour la survie de l'entreprise de réduire sensiblement sa masse salariale en proposant à la salariée une diminution du nombre d'heures de travail et dont le refus justifie son licenciement.

Il convient donc de réformer le jugement entrepris dans ce sens et de rejeter l'argumentation et les demandes de l'appelante sur la nullité de son licenciement .

Sur la régularité de la procédure et le respect des critères d'ordre de licenciement

Il est soulevé par la salariée que le licenciement a été notifié verbalement lors de l'entretien préalable ce qui est contraire à la vérité alors que la rupture du contrat de travail résulte de la lettre de licenciement adressée par l'employeur à la salariée dans le délai d'au moins deux jours entre la tenue de l'entretien préalable le 5 avril 2013 et la notification du licenciement le 17 avril 2013

Il est reproché à l'employeur de ne pas avoir respecté les critères d'ordre du licenciement or la cour relève qu'aucune demande sur la communication des critères ayant présidé au licenciement économique n'a été présentée dans le délai de 10 jours suivant le départ de la salariée de l'entreprise de sorte que sa demande est mal fondée, la cour relevant surabondamment que Madame [F] était la seule salariée dans sa catégorie professionnelle.

Le jugement entrepris sera donc réformé en toutes ses dispositions.

Le présent arrêt sera déclaré opposable au CGEA de Bordeaux dans les limites de sa garantie légale.

Sur les autres demandes :

L'équité commande de condamner Madame [F] à payer à la SAS ADP SUD OUEST une indemnité de procédure de 500 € au titre des frais non compris dans les dépens sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de débouter l'appelante de sa demande sur le même chef dès lors qu'elle supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Déclare l'appel régulier, recevable mais mal fondé.

Réforme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement pour motif économique de Madame [Y] [F] est justifié par une cause réelle et sérieuse .

Rejette l'ensemble de ses autres prétentions.

Y ajoutant,

Condamne la SAS ADP SUD OUEST à payer à Madame [Y] [F] la somme de 1713,87 euros à titre d'indemnité de requalification .

Condamne Madame [Y] [F] à payer à la SAS ADP SUD OUEST une indemnité de procédure de 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette le surplus des demandes.

Déclare le présent arrêt opposable au CGEA de Bordeaux dans les limites de sa garantie légale.

Condamne Madame [Y] [F] aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Monsieur Jean-François Sabard, Président et par Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Jean-François Sabard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 14/05593
Date de la décision : 28/06/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°14/05593 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-28;14.05593 ?
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